Quand bien même l’état somme tout alarmant de Charles était sa première préoccupation, Jean ne pouvait s’empêcher de jeter des œillades inquiètes par-dessus son épaule, dans le but de surveiller la Créature qui ne bougeait toujours pas ; devait-elle s’en réjouir ou s’en affoler ? Puisqu’elle était encore immobile, l’Étrangère ne représentait pas une menace directe pour les habitants de l’Institut, mais peut-être étaient-ce les prémices du calme avant la tempête… Toujours méfiante, la rouquine avait légèrement froncé ses sourcils tout en redressant lentement ses épaules, rassurée d’entendre la voix de son Mentor, bien que celui-ci avançait des propos pour le moins curieux.
« L’éveil d’une conscience ? Qu’est-ce que cela veut dire ? »
Quelque peu perplexe face à cette annonce inattendue, Jean avait mollement croisé ses bras frêles contre son buste féminin tout en lançant un regard appuyé à la Créature, comme si la réponse à sa question se trouvait quelque part sur son corps d’humain, qui n’en était pas vraiment un ; et à force d’observation, les yeux plissés de la télépathe avait fini par remarquer les détails révélateurs de sa silhouette fabulatrice. Ses genoux étaient curieux et, sa peau, ou ce qui semblait être [i]sa peau[i] derrière le tissu translucide de sa robe, témoignait masses étranges qui flottaient comme des bulles… Tout ceci apportait davantage de questions que de réponse.
« C’est… »
Les lèvres entrouvertes, le menton légèrement penché sur le côté, Jean s’était inconsciemment avancée d’un pas vers la Créature, d’un désir presque irrépressible de s’approcher davantage pour l’observer de plus près… C’est qu’elle était particulièrement fascinante, d’une certaine façon. Mais la voix de Charles l’avait ramenée à la réalité. Interrompant sa marche, la rouquine avait papillonné des cils avant de déglutir en entendant les mots qu’il venait d’employer. Engloutir les gens. Elle avait donc vu juste. Ce qui n’était nullement rassurant, donc.
Mordillant le coin de sa lèvre avec un élan d’hésitation, ce n’est qu’après s’être assurée que Charles reprenait peu à peu ses esprits et son souffle que Jean avait fait un pas supplémentaire vers la Créature, en mettant soigneusement ses mains en évidence pour lui signifier qu’elle ne lui voulait aucun mal, mais allait-elle la croire à présent ?
« Tu es en sécurité ici, personne ne te fera le moindre mal… Tu comprends ? » .
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THE FIRE FINDS A HOME IN ME ᭸ clipped wings, I was a broken thing, had a voice but I could not sing. there's a scream inside that we are frightened,we hold on so tight, we cannot deny, eats us alive, oh it eats us alive. there's a scream inside that we are frightened, I’ll shout it out like a bird set free.
Les paroles des humains passèrent dans l’esprit de la Slime comme de vagues brises auxquelles on ne prête pas immédiatement attention. Revenant à la réalité, elle réalisait que sa forme humaine n’était plus correctement maintenu, en témoignait les bosses et ondulations tout le long de sa surface translucide. Se reprenant, elle se concentra à nouveau sur sa forme humaine. Elle reprit très soudainement une apparence normale, celle de la jeune femme qui leur posait tant de soucis depuis le début, ne laissant aucun doute quant à sa capacité de métamorphose.
Après quoi, son esprit simpliste se rappela des paroles qui venaient d’être prononcées, les réentendit et les comprit. Engloutir était mal.
« Pourquoi ? » demanda-t-elle naturellement à l’humain qui avait l’air encore plus malade qu’avant.
C’était l’unique question qui s’était posée dans sa tête, sa curiosité naturelle ayant refait surface et guidant de nouveau sa pensée. Elle savait que les humains se battaient parfois, même si elle en ignorait la raison. Du coup, elle se demandait sincèrement pourquoi elle ne pouvait pas en manger.
Jean était à présent moins inquiète que perplexe. Elle avait naturellement du mal à saisir le sens des mots du professeur, et lui-même ne savait pas comment lui expliquer les choses. Tout du moins, il ne trouverait pas immédiatement les mots, et aurait besoin de temps pour tenter de lui transmettre ce qu'il venait de vivre. Aussi lui adressa-t-il un sourire rassurant en lui disant simplement par télépathie :
« Je t'expliquerai plus tard. »
L'urgence était de s'occuper de la créature, et de lui faire comprendre qu'elle ne devait plus engloutir des humains. Mais comment lui expliquer les notions de bien et de mal ? Telle un jeune enfant, elle n'avait qu'une vision egocentrique du monde, et ne possédait pas encore de conscience morale. Elle ne pouvait pas apprendre ce qui était bien et ce qui était mal si personne ne la guidait, ne réagissait à ses actes.
« C'est mal. En faisant cela, vous les tuez, ils arrêtent d'exister. Cela rend triste beaucoup de gens, et peut les mettre en colère. Vous ne voulez pas que les gens soient en colère contre vous, n'est-ce pas ? »
La psychologie du jeune enfant n'était pas vraiment son domaine, et s'il tentait d'utiliser des mots et des concepts simples, il n'était toujours pas certain qu'elle le comprendrait. Mais en tentant de lui expliquer que le "mal" lui ferait du mal à elle, que ses actes pouvaient avoir des conséquences sur sa vie à elle, il estimait avoir une approche correcte.
Comme la Créature ne semblait pas avoir remarqué ou entendu les mots bienveillants qu’elle venait de lui adresser, Jean avait reculé d’un pas tout en laissant ses mains retomber le long de son corps, laissant plutôt la jeune fille interagir avec le professeur. Celui-ci l’avait rassurée sur son état, et sur les explications qui viendraient bien assez tôt, la rouquine avait hoché son visage de haut en bas avant de tourner son menton pour lancer un regard entendu à Scott, qui se faisait aussi silencieux et discret qu’elle. Maintenant que Charles avait pris la situation en mains, ils n’avaient plus grand chose à faire, sinon espérer que les choses ne tournent pas en leur défaveur…
Raclant discrètement sa gorge tout en se plaçant aux côtés de Cyclope, les bras croisés et le regard attentif, Jean avait légèrement sourcillé en entendant les paroles de Charles… Il s’adressait à la Créature comme à une enfant, et cela n’aurait rien eu de surprenant si elle n’avait pas eu le physique d’une jeune adulte. Mais son esprit n’avait vraisemblablement pas le même stade de maturité que son corps, et la jeune mutante s’était bien gardée de prendre la parole à ce sujet. Charles devait savoir ce qu’il faisait, et il était évident qu’il tentait de lui inculquer les valeurs du bien et du mal, mais Jean doutait sincèrement de sa réussite.
Néanmoins, voulant être optimiste, Jean avait tourné son menton vers la jeune fille en arquant l’un de ses sourcils, sans froideur aucune : elle n’avait jamais été hostile à son égard et ne comptait pas commencer maintenant. Alors, patiente et toujours aussi amicale, elle avait entendu la réponse de celle qui donnait l’impression d’être une jeune fille ordinaire… Mais qui ne l’était pas vraiment. .
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Contre toute attente, l’explication de l’humain malade fit germe une étincelle dans l’esprit simpliste de la Slime. Effectivement, les humains se montraient violents quand elle mangeait un autre humain devant eux. Elle n’en comprenait pas vraiment la raison, mais à présent, elle comprenait que ça les mettait en colère. Le pourquoi était encore en suspens, mais la Slime savait aussi que les humains n’aimaient pas qu’on leur pose trop de questions, aussi se contenta-t-elle de répondre.
« Non, je ne veux pas. D’accord, je ne mangerai plus d’humain ! »
Son désir, après tout, était de se mêler aux humains. Ne pas manger d’humain n’était qu’un petit sacrifice pour atteindre cet objectif. Évidemment, elle ne poussa pas la réflexion plus loin, comme par exemple de comment agir face à un humain qui lui ferait du mal, mais il aurait fallu pour ça qu’un humain puisse lui faire du mal, ce qui n’était arrivé, finalement, que très rarement.
Pour autant, son esprit n’était pas à l’arrêt. La notion de « mal » étant totalement absente chez elle, elle ne put se rapporter qu’à une définition homonyme : le mâle. Cela voulait-il dire qu’elle pouvait manger d’autres humains quand elle était sous des traits masculins ? Elle avait assimilé les différences physiques entre mâle et femelle, mais elle ignorait que les comportements étaient à ce point différents. La chose la laissa pensive…
Charles poussa un soupir de soulagement lorsque la créature comprit ses mots et, mieux encore, accepta sa requête. Finalement, il avait gardé quelques notions de ses lointains cours de psychologie du jeune enfant, et ils s'appliquaient bien dans ce cas insolite. Si au moins sa rencontre avec elle lui avait permis d'empêcher des innocents de se faire tuer, c'était déjà une excellente chose. Il lui sourit, comme pour la féliciter, et lui répondit simplement :
« Merci. »
Il ne savait pas pour autant quoi faire avec elle. Elle était trop différente d'eux pour pouvoir rester à l'Institut, et il n'avait absolument pas le temps de s'en occuper, surtout en ce moment. Et l'endroit ne serait de toute façon pas adapté pour elle, si son but était de voir le monde et de le comprendre, un lieu clos comme l'Institut ne lui conviendrait pas. Mais en attendant, elle était là, et elle ne semblait plus vouloir partir.
« Vous avez des questions ? »
Après l'expérience télépathique éprouvante qu'il venait de vivre, il était exclus qu'il retourne lire son esprit, même pour une simple captation de pensées superficielles. Elle semblait toutefois très pensive, et il pouvait bien lui accorder quelques minutes avant qu'elle ne reparte. Mais d'ailleurs, pourquoi et comment était-elle venue ici en premier lieu ? Plutôt que de lui demander, ne voulant pas la distraire avec d'autres pensées, il demanda à Jean par télépathie.
« Sais-tu pourquoi elle est venue ici ? Et comment elle est entrée dans la propriété ? »
À la plus grande surprise de la jeune mutante, la Créature avait accédé à la requête de Charles sans même poser la moindre question, sans même s’y opposer… C’était presque étrange, une réaction aussi docile. Assise sur le petit muret à côté de Scott, son menton niché dans la paume de sa main, Jean avait légèrement redressé sa nuque en fronçant ses sourcils d’un air suspicieux… Avait-elle réellement compris ce qui venait de lui être demandé ? Si elle se posait secrètement la question, la rouquine n’avait guère eu le courage d’envelopper l’esprit de l’étrangère et, pour cause, l’état grandement préoccupant de Charles après cette expérience faisait paraître sa curiosité bien maigre.
L’entrevue s’éternisait quelque peu, et aucune solution ne semblait être de mise concernant la présence de cette étrange jeune fille. Charles allait-il l’accueillir au sein du manoir maintenant qu’elle lui avait assuré qu’elle ne mangerait plus d’humains ? La propriété regorgeait de mutants aux pouvoirs exceptionnels mais… Pourraient-ils se défendre si elle décidait de les engloutir ? Toujours est-il qu’elle avait oublié son obsession pour la fameuse chambre, ce qui était déjà une très bonne chose.
Toujours silencieuse, Jean avait à peine relevé son regard vers son mentor, ne voulant pas éveiller les soupçons de la Créature. La première question était particulièrement ardue, bien que des bribes de réponses avaient été délivrées de sa propre bouche. Quant à la deuxième, Jean avait des faits à apporter, aussi étranges pouvaient-ils être :
« Je pense qu’elle est venue ici pour connaître des humains… Elle veut essayer de leur ressembler, je crois. Et… Elle est venue par les tuyaux, apparement. »
Sachant combien son discours pouvait paraître saugrenue, Jean avait légèrement haussé ses épaules tout en courbant ses lèvres dans une moue hésitante, ne cherchant même pas à justifier ses propos. Comment pouvait-elle expliquer ce qu’elle avançait ? Reprenant sa posture avant de poursuivre avec un air plus sérieux au visage, elle avait gardé ses yeux posés sur la Créature tandis qu'elle s'adressait à nouveau télépathiquement au professeur :
« Qu’est-ce qui va lui arriver, Charles ? » .
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La Slime réfléchit. Elle avait en effet bon nombre de questions, mais ne sachant pas trop quand s’arrêter, elle décida qu’elle devait en trouver une seule. Elle commençait à se dandiner de façon particulièrement mignonne, habitude qu’elle avait prise en se rendant compte que les humains lui attachaient plus d’importance quand elle faisait ça avec sa forme féminine, même si elle ignorait pourquoi.
« Pourquoi les femel- » commença-t-elle avant de s’interrompre, « Non, pourquoi les femmes ne doivent pas manger d’humains ? »
C’était la question la plus pertinente qui lui était passée par la tête. Elle ne saisissait pas pourquoi les femelles avaient cette interdiction alors que ce n’était pas le cas pour les hommes. L’humain malade avait dit que ça rendait les humains en colère, ça lui semblait étrange qu’ils ne se mettent en colère que si c’était une femme. De plus, à bien y réfléchir, elle n’avait jamais vu d’humain, mâle ou femelle, manger un autre humain. Il y avait bien cet humain, celui de la chambre, qui avait parlé de la « manger toute crue » à un moment, mais il était évident qu’il mentait : les humains mangent toujours leurs aliments cuits.
Pensez-vous qu'on puisse se diriger tranquillement vers une conclusion de RP ? Je commence à être à court d'idées
Bulle de savon et gelée géante
Jean, Le Slime, Scott et Charles
L'analyse de Jean était pertinente, et c'était également ce que le professeur avait supposé. Cette créature, qui à la réflexion n'avait pas de nom, avait sans doute atterri ici en quête d'humains à observer. Une intrusion purement fortuite. Le fait qu'elle soit arrivée par les tuyaux ne sembla pas l'étonner outre mesure, cela l'éclairait même sur la forme qu'elle pouvait prendre, à défaut de pouvoir la voir directement. Quant à la dernière question de son élève, il y répondit en toute honnêteté :
« Je n'en sais rien… »
Et il en était désolé. Le cas de cette créature était hors de ses compétences habituelles, et il ne voyait absolument pas comment l'aider sans mettre en potentiel danger ses élèves. Il ne pouvait que réduire un tant soit peu son côté nuisible en lui indiquant de ne plus manger d'humains… Mais elle aurait nécessité un suivi bien plus poussé, qu'il ne pouvait malheureusement lui offrir. Il ne pouvait qu'espérer qu'elle réussisse à apprendre d'avantage, et surtout qu'elle retienne les bons côtés de l'humanité.
« Personne ne doit manger d'humains, ni les femmes ni les hommes. »
Bien que la question lui soit parue saugrenue, il y répondit comme si elle était parfaitement légitime, sur un ton toujours calme et pédagogue. Il aurait aimé pouvoir développer son propos, mais il craignait de lui embrouiller l'esprit s'il se lançait dans des explications de concepts qui lui étaient à priori inconnus.
« Avez-vous un endroit où aller ? Ici vous ne trouverez pas ce que vous cherchez. »
Ce n'était pas dit méchamment, il ne voulait pas la rejeter, mais elle ne pouvait pas rester ici, pour son bien et celui des mutants présents.
L’aveu du professeur lui fit hausser les sourcils avec entente, car elle s’était attendue à une telle réponse de sa part. Pour ainsi dire, après ces échanges rocambolesques et sa rencontre inattendue avec la Créature, Jean ne savait plus tellement quelle réaction adopter face à celle-ci, qui s’était invitée au Manoir par la drôle volonté du hasard : de toute évidence, la jeune femme était désireuse d’apprendre à vivre parmi les humains, et souhaitait même leur ressembler, mais cela pouvait-il se faire au sein de l’Institut Xavier ? Quand bien même elle présentait une volonté certaine, il s’agissait à présent de mesurer le degré de dangerosité que sa présence incombait… Et de responsabilités.
Le menton dans sa paume, Jean avait légèrement inspiré par le nez tout en se tournant vers la demoiselle qui mimait presque l’attitude d’une enfant attendrissante, sans parvenir à se laisser gagner par ce sentiment doucereux. Elle songeait à présent que sa présence pouvait être dangereuse pour les autres élèves de l’Institut, et se sentait presque coupable de l’avoir entraînée au-dehors… Mais qu’aurait-elle pu faire d’autres ?
Mordillant le coin de sa lèvre, elle avait retenu sa respiration lorsque Charles avait soulevé le fait qu’elle n’avait aucun intérêt à rester ici… La chambre. Évidemment. Il fallait espérer qu’elle ait oublié ses caprices pour obtenir une chambre et qu’elle accepte de s’en aller sans faire d’esclandre. Iraient-ils jusqu’à la mettre dehors ? Si elle pouvait se balader dans les tuyaux, cela serait sans doute risible… Il fallait qu’elle veuille partir d’elle-même, mais Jean doutait véritablement de cette issue favorable. Néanmoins, le visage paisible et la bouche muette, elle attendit la réponse de la Créature, sans broncher. .
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