De toute évidence, la furie à la peau verte n'avait pas l'intention de se laisser démonter par les quelques arguments et reproches de ses compagnons, maintenant sa prise sur l'Ase, tout autant que la lame posée sur son cou. Sans doute enragée par les prises de position désavantageuses pour elle des autres gardiens, Gamora n'en devenait que plus sarcastique et brusque, si bien que la fille d'Asgard ne tarda pas à sentir une douce chaleur perlée sur sa peau, à l'endroit même où se tenait le mordant de la dague. Cette petite semblait avoir le plus grand mal à gérer ses sentiments, ce qui ne manqua pas d'arracher un sourire à Amora ... tout du moins lorsque le cas Starlord pesait dans la balance.

Le géant tenta d'une manière plutôt simplette de ramener l'amoureuse éconduite à la raison. Mais ... qu'est-ce qu'il avait celui-là ? Sérieusement ? Il était fini au jus de troll ou quoi ? Est-ce que sa stratégie avait déjà fonctionné une seule fois dans toute l'histoire de la négociation ? Avec des nigauds peut-être ... ce que de toute évidence, Gamora n'était pas.

Sous l'effet des mots du lapin, l'Ase put sentir un instant de faiblesse dans la poigne de la tueuse. Manifestement, il avait su frapper l'un des points sensibles de sa partenaire de business. Et voilà ... encore une amourette mal assumée qui virait au drame ... un classique. A tel point qu'Amora roula des yeux sous l'effet de l'exaspération. Il y en avait donc encore pour tomber dans un piège aussi grossier que celui tendu par l'amour ? La bonne blague.

Et soudain, la poigne de la mégère se relâcha, tout comme la morsure de la lame se leva. Derrière elle, Amora put distinctement entendre le son d'un corps s'écroulant à terre. De nouveau libre, l'Ase se retourna pour constater que la déséquilibrée était ... endormie, la fluette créature coiffée d'antennes se tenant à ses côtés, une main posée sur la peau vert de Gamora.

"Intéressant", ponctua-t-elle, tout en adressant un sourire à sa sauveuse.

Aussitôt, Starlord échangea avec le lapin afin d'organiser l'installation de leur cliente à bord de leur vaisseau pour le temps du voyage. C'en était presque déroutant ... L'un de ses membres d'équipage venait littéralement de partir en vrille, menaçant leur gagne pain, et lui ... faisait comme si tout était normal. Et le pire, c'était qu'il était au centre de ce pétage de durite.

Amora fixa Quill d'un regard acéré quelques secondes. Qu'est-ce que c'était que cette équipe de cinglés. Le colosse végétal s'était approché de sa partenaire assoupie, la prenant dans ses branches avec toute la délicatesse propre à cette espèce, adressant au passage quelques paroles à l'Ase.

"Je suis totalement d'accord avec toi, lui répondit-elle, sans quitter de son regard désapprobateur le leader de cette équipe. Ces deux-là ont clairement un gros souci à régler."

L'incident résolu, il semblait bien que les Gardiens de la Galaxie étaient prêts à honorer leur part du marcher ... à l'exception de la Belle aux Bois Dormants.

Puis, reportant son attention sur Groot, l'Ase haussa un sourcil de surprise à la vue d'un détail particulier. Délicatement, elle retira une brochette collée sur l'écorce du colosse végétal. Voilà donc où elle avait fini par atterrir.

"Oh ! Je crois que c'est à moi ... désolée."

Sans véritable volonté d'en lire le contenu, mais uniquement dans le but de faire passer le temps, Amora feuilletait un ouvrage des plus miséreux qu'elle avait trouvé négligemment abandonné dans la navette des Gardiens de la Galaxie. Cela faisait maintenant plusieurs heures qu'ils avaient quitté Knowhere à bord de ce vaisseau qu'ils appelaient le Milano ... et ce voyage lui paraissait déjà interminable. Même l'étrange conversation qu'elle avait eu avec Drax un peu plus tôt, et qui avait pourtant eu le mérite de la divertir un temps, lui semblait lointaine ...

Dans un mouvement plein de lassitude, l'Ase tourna une nouvelle page de papier glacé ... Ce livre était des plus étranges ... Aucune couverture épaisse, tout au mieux un feuillet un peu plus épais que le reste, plié en deux et dans lequel étaient placées les pages, aucune reliure si ce n'étaient deux fines pièces métalliques repliées sur elles-mêmes et gardant l'ensemble rassemblé ... un nombre de pages  aussi pauvre que la nature de leur contenu ... beaucoup d'images réalistes, peu de mots ... majoritairement des images de femmes peu vêtues et dans des positions lascives. Poussant un soupir d'ennui, Amora se leva, refermant le livre, et prenant la direction du poste de pilotage de la navette.

Là-bas, elle y retrouva Rocket et Quill, tous deux aux commandes du Milano, vérifiant les divers instruments de navigation. Face à eux, l'immensité infinie du cosmos. Un océan de vide et d'obscurité dans lequel quelques rares astres lumineux et lointain se laissaient voir sans jamais sembler vouloir laisser la navette et ses occupants se rapprocher.

"J'ai trouvé ça ... c'est à toi, de toute évidence, informa-t-elle Starlord en lui remettant l'exemplaire Octobre 1997 de Playboy, sans même le regarder, ses iris vertes fixées sur l'espace qui s'étendait face à eux. L'encre n'a pas dû sécher correctement lors de l'impression ... certaines pages sont collées entre elles."

Débarrassée du paquet de vélins coquins, l'asgardienne vint appuyer ses bras croisés sur le dossier de Rocket, sans avoir pour autant quitté des yeux l'extérieur de l'appareil.

"Dis le lapin, on est encore loin ?"

Mais avant qu'elle ne puisse obtenir une réponse, Amora vit apparaître un clignotement dans son champ de vision, au niveau de l'un des nombreux voyants de tableau de bord, et au vu de la réaction de Rocket, elle n'était pas la seule à avoir détecté cette lueur pulsante. Bientôt, ce furent d'autres voyants qui s'activèrent, ainsi que le son d'une alarme qui se fit entendre dans le cockpit.

"J'imagine que ce n'est pas bon signe ... et que ça va retarder notre arrivée", s'osa la blonde, avec un timbre de voix flegmatique.

Bientôt, une détonation se fit entendre dans tout l'appareil, quelque chose venant d'exploser à côté du Milano, rapidement suivie d'une seconde détonation, puis d'une troisième. Quelqu'un ou quelque chose était en train de leur tirer dessus. Par réflexe, Amora saisit d'une main le dossier de Rocket, sa seconde main s'agrippant au dessus d'elle, afin de garder son équilibre malgré les secousses qui ébranlaient l'appareil à présent qu'il se trouvait sous le feu ennemi.