Kali ne résista pas à embêter un peu plus Jean qui se plaignait de devoir s'échauffer les coudes :
- Je crois que c'est parce qu'on est censé bouger les bras quand on court.
Les Cuckoos ne rebondirent pas sur le sujet, avec une micro-hésitation qui lui fit penser qu'elles n'osaient pas dire quelque chose. Quoi donc ? Elle ne le saurait probablement jamais.
Mais remarque ou pas, Kali se rendit compte avec surprise à quel point la présence de ses amies contribuait à la détendre. Elle se sentait en sûreté avec elles, ce qui était très probablement dû au fait que les quatre filles étaient des mutantes d'une puissance considérable - Jean avait été modeste, mais plus Kali avait rattrapé son retard sur l'histoire et plus elle s'était rendue compte que l'élégante rousse n'était pas n'importe qui.
Puis la course avait commencé et le télépotin aussi.
Sursautant, Kali eut l'impression de devenir mentalement sourde. Le cri bougon de Jean résonnait encore entre ses oreilles lorsqu'elle se retourna pour constater que la mutante rousse était bel et bien là derrière elle, avec un style de course qui reflétait bien toute l'horreur que lui inspirait le sport.
- Désolée, Jean !
Sa tête toujours tournée, elle observa Phoebe décélérer pour se caler à la même vitesse qu'elle. Leur joli fer de lance était maintenant rompu, quel dommage. L'échange mental entre les sœurs fut rapide, à tel point qu'elle n'eut pas réellement le temps d'intervenir avant qu'elles aient fini.
- Mmm, j'avoue que je ne saurais pas répondre, Céleste. Si c'est pour ce qui est de l'organisation au sein de l'institut, je pense que vous êtes toutes les trois aussi avancées que moi. Pour ce qui est des potins, j'ai bien entendu des bruits étranges dans les douches du gymnase, mais j'ai des doutes quant au côté romantique de la chose...
Ladite douche avait été courte, étrangement.
Elle n'avait pas la moindre idée de ce qui avait bien pu susciter cette "dispute" entre les deux sœurs, mais cela l'amusait au plus haut point. Ces petites batailles étaient une partie intégrante de leur charme.
L'appel de Mindee la surprit - ça commençait à faire beaucoup de surprise en peu de temps - et un sourire aux lèvres et une certaine chaleur dans le torse, Kali répondit d'un ton espiègle :
- Mais bien sûr, gente Mindee.
Elle s'aligna avec Phoebe pour l'empêcher de passer, suivant les mouvements de cette dernière.
- Pourriez-vous expliciter au reste de la classe ce que vous sous-entendiez un peu plus tôt ? Je serais très curieuse de voir ce qui peut provoquer une telle réaction chez votre sœur. Et très chère, fit-elle en direction de Phoebe, n'essayez même pas de me dépasser, sinon je me verrais dans la regrettable obligation de devoir vous tacler. Et de ne plus lâcher prise.
Elle n'était pas prête de faire tomber qui que ce soit avec son poids plume. Mais elle s'était rapidement rendue compte que les Cuckoos n'étaient pas avares de contact physique. Alors autant en profiter.
I need relief, a failure's coming on Just breathe in deep, it's taking far too long I need relief, this weakness carries on Please be a dream, or was it all along?
« Le désir d'amitié est donc précisément un désir d'être compris, sollicité, apprécié pour nous-même. » ( Francesco Alberoni)
« Je crois que c'est parce qu'on est censé bouger les bras quand on court. »Gnagnagna. Cela ne la fait même pas rire ! Elle grimace comme une enfant de mauvaise foi, singe un instant son amie avant de lever les yeux au ciel en croisant les bras contre sa poitrine, boudeuse. Mais comme on ne voit pas assez qu’elle boude (devrait-elle construire une pancarte pour que ce soit plus explicite ?), elle décide de s’asseoir de nouveau par terre en fronçant les sourcils. Au moins, tout le monde a compris qu’elle boude.
Mais comme le boudage au sol n’empêche pas de bouder debout, elle se redresse en priant pour se casser rapidement la cheville ; si elle arrête de courir, non seulement ce ne sera pas sa faute mais en plus, avec un peu de chances, ses amies culpabiliseront. Avec cette idée machiavélique en tête (bien cachée, quand même), elle se met à courir avec plus ou moins de mauvaise volonté, restant en arrière pour ne pas troubler les élans presque militaires de coureuses de devant, bien trop expérimentées. Elle aurait dû rester dans son lit. Ou sous son arbre.
Après avoir crié sa présence dans l’esprit de quatre demoiselles, elle écoute les échanges entre les Cuckoos en se mettant à sauter des petits pas en se maintenant en l’air plus longtemps que la normale. C’est reposant. C’est pratique. C’est peut-être de la triche mais elle s’en fiche. (Je te pardonne !) Répond-t-elle à Kali en faisant semblant de bouger les bras pour donner l’illusion de courir mais, très vite, elle abandonne aussi ce mouvement qui sauvait peut-être les meubles et se met à se gratter le chignon puis la joue, en ne prenant même plus la peine de bouger les jambes. Elle flotte simplement dans les airs en suivant le rythme de la blonde qui est venue courir à ses côtés. Comme ça, c’est bien plus facile de les suivre, et bien moins fatiguant.
Elles veulent des potins. Du genre, Scott et elle ? Elles sont déjà au courant. N’EST-CE PAS, CÉLESTE ? (Il n’y a pas beaucoup de couples à l’Institut. D’ailleurs, vous n’êtes intéressées par personne, vous ?) Le pluriel employé dans cette phrase signale bien à qui s’adresse cette question : puisque les blondes veulent des potins, elles vont devoir en être ! (Qui est le plus mignon entre Hank, Charles et Scott, selon vous ?) En une question et trois propositions, elle avait presque vidé le stock des hommes vivant au Manoir. Il fallait vraiment renflouer les rangs des hommes de l’Institut Xavier.
Et comme les menaces de Kali concernant les tacles et la course ne l’intéresse que moyennement, elle se tourne vers sa comparse rousse en disant, d’une voix espiègle : (Et toi, alors ? Quelqu’un en vue ?)
THE FIRE FINDS A HOME IN ME ᭸ clipped wings, I was a broken thing, had a voice but I could not sing. there's a scream inside that we are frightened,we hold on so tight, we cannot deny, eats us alive, oh it eats us alive. there's a scream inside that we are frightened, I’ll shout it out like a bird set free.
Mademoiselle Grey nous accompagne à sa manière. Au début, elle court. Puis quand cela lui court sur le chignon, elle lévite. On n’arrive pas à débattre du fair-play de la chose ou de son absence mais mademoiselle est comme elle est ; en l’occurrence, télékinésiste. Comme mademoiselle Herrera. Heureusement que si tout le monde commence à voler, on restera une majorité à courir !
Mademoiselle Herrera qui ne sait pas quoi nous répondre vis-à-vis des ragots. Elle nous répond d’ailleurs à côté des ragots. L’organisation, on sera aux deux tiers dedans dès la semaine prochaine. Les potins doivent arriver plus tôt ! Des bruits étranges dans les douches du gymnase… c’est au sous-sol donc isolé, c’est accessible depuis différents lieux nécessitants un vestiaire avec douche donc il est possible d’y rentrer séparément pour s’y retrouver en secret… c’est encore mieux que le labyrinthe ! En plus, s’il y a vraiment copulation, cela permet de nettoyer les traces ensuite.
Ne faudrait-il pas que j’en parle au Directeur Xavier, se demande Phoebe. C’est primordial le côté romantique de la chose non, se demande Céleste. Ne serait-il pas déjà au courant en sa qualité de télépathe, se demande Mindee.
On ne demandera jamais rien car la pensée de mademoiselle Herrera après nous laisse perplexe : une douche n’a pas besoin de plus que quelques minutes, pourquoi aurait-elle dû être plus longue. Le coït ? Le coït aurait-il eu lieu sous la douche et non avant celle-ci ? Il y a toute une logistique qui nous manque, là… Une logistique qu’on ne saura demander à mademoiselle Herrera, dont l’avis nous est connu à présent, mais à laquelle mademoiselle Grey ne répond absolument pas. C’est vrai qu’il n’y a pas beaucoup de couples à l’Institut… mais monsieur Summers et elle en sont. C’est aussi vrai qu’elle tente de changer de sujet en nous renvoyant la balle…
Était-ce eux ?! Était-ce romantique ?! Était-ce avant ou pendant la douche ?! Putain Mindee, tu as l’esprit pratique. C’est important à savoir, pour la science. Ouais, je sais.
(Qui est le plus mignon entre Hank, Charles et Scott, selon vous ?)
(Monsieur Summers.)
(Monsieur Summers.)
(Monsieur Summers.)
Il a notre âge. Ensuite, il nous a fabriqué des tables de nuit. Cela peut sembler pas grand-chose, et d’ailleurs cela ne lui a pas semblé grand-chose, mais on a beaucoup apprécié. De même que son comportement et son physique. Surtout Phoebe.
Ce qu’elle n’apprécie pas en revanche, c’est que l’esprit pratique de Mindee implique une extérieure dans nos règlements de compte ! Et mademoiselle Herrera dit "mais bien sûr, gente Mindee" avant de prendre son parti contre une Phoebe qui se demande si la bousculade est permise. Après tout, Mademoiselle s’est mêlée de nos dispute donc elle devrait ramasser comme tout le monde.
(Pourriez-vous expliciter au reste de la classe ce que vous sous-entendiez un peu plus tôt ? Je serais très curieuse de voir ce qui peut provoquer une telle réaction chez votre sœur. Et très chère, n'essayez même pas de me dépasser, sinon je me verrais dans la regrettable obligation de devoir vous tacler. Et de ne plus lâcher prise.)
(Essayez pour voir.)
(En fait c’est que Phoebe aime bien les bruns, genre monsieur Summers ou Spiderman. Ce qui se comprend.)
(Merci Céleste.)
(ON NE DEVOILE PAS L’IDENTITE SECRETE DE SPIDERMAN !)
(Certes. On dévoile juste qu’il est mignon, c’est suffisant.)
(Enfin, faudra nous faire confiance parce qu’on va pas vous montrer son visage non plus.)
(Merci.)
(De rien.)
(Je suis en train de me dire que le premier critère de Phoebe c’est peut-être pas la rousseur ; c’est que les gens soient casés.)
(IRMA !)
(D’un autre côté, c’est la preuve qu’ils sont bien s’ils sont déjà pris.)
(Désolée mais c’est pas un peu vrai ?)
Profitant de la question indiscrète de mademoiselle Grey envers mademoiselle Herrera, Phoebe tâche de passer devant en évitant son tacle ; tout comme elle tachera de ne pas se transformer en diamant face à celui-ci. Elle préfère atterrir au sol voire se faire mal que de risquer de faire mal à Mademoiselle. Après, sans doute l’enverra-t-elle chier également.
Les oreilles télépathiques de Kali se tendirent pour écouter la réponse des Cuckoos. Qui pouvait bien les intéresser à l'institut ?
Malheureusement pour elle, la question fut (habilement?) esquivée et elle dut se rabattre sur leurs réponses quant à l'homme le plus mignon de l'institut. La jeune rousse ne put s'empêcher de lâcher un soupir. Elle avait déjà sa réponse mais celle-ci n'allait probablement pas plaire :
- Charles Xavier. Et oui, je sais. Mais je ne le vois pas comme une figure paternelle et c'est plus par... dépit.
Il possédait pour elle un charisme et une maturité que les deux autres n'avaient pas, la timidité de l'un et l'égo - en apparence tout du moins - fragile de l'autre ne l'intéressant pas du tout. Elle se demanda ce que les Cuckoos trouvaient chez lui - était-ce simplement son physique bien entretenu ?
Ses pensées ne durèrent pas très longtemps néanmoins, puisque l'opportunité de jouer au chat et à la souris avec Phoebe se présenta. Elle écouta leurs réponses en gardant un œil sur sa cible, prête à lui sauter dessus quand le temps viendrait.
Ainsi les sœurs connaissaient l'identité secrète de l'homme-araignée ? Cette information aurait sûrement fait tourner de l’œil plus d'une fangirl, mais Kali était pour le moins... indifférente. Les super-héros ne l'intéressaient pas, surtout lorsque ces derniers étaient humains. Enfin, l'était-il ? Aucune idée.
Ce qu'elle notait cependant, c'est qu'elles aimaient les bruns. Et les gens casés. Enfin, Phoebe.
Elle eut un pincement au cœur, mais elle ne se concentra pas dessus, préférant reporter toute son attention sur la sœur dans son radar pour mieux la tacler. Et pour éviter de réfléchir, aussi.
Et, alors qu'elle venait juste de s'interposer devant Phoebe pour lui sauter dessus et passer ses bras autour de son cou en profitant de l'inertie de celle-ci pour avoir une bonne prise, Jean posa la question. Fatale.
Kali s'arrêta d'un coup. Tête tournée vers elle. Terreur dans son cœur.
Et... BAM.
Ce fut comme si sa chute avait été instantanée - elle n'avait aucun souvenir d'être arrivée au sol, et pourtant elle y était. Une vive douleur au centre de son visage était présente, tandis qu'une sensation de chaleur semblait s'en échapper. Elle saignait.
Si elle avait bien compris la situation, elle venait de se prendre Phoebe de plein fouet - enfin plutôt la clavicule de cette dernière - alors qu'elle venait de s'arrêter net, tel un malheureux insecte face à une force inarrêtable. Se relevant doucement, elle entreprit de clarifier sa situation en tâtant d'abord son nez. Il lui faisait un mal de chien, mais il ne semblait pas cassé, bien que le saignement était plutôt abondant. D'une voix un peu sonnée, elle s'adressa aux quatre filles :
- Il est pas cassé, ça va. Je vais aller me rincer par contre, continuez sans moi, je vous rejoins dès que j'ai fini. On peut rester en contact télépathique si vous voulez.
Elle se dirigea d'un pas rapide vers l'institut, ses yeux involontairement humides - les blessures au niveau du visage avaient tendance à la faire pleurer, indépendamment de la douleur. Kali était furieuse contre elle-même - elle s'était non seulement laissée distraire, mais pire, elle s'était laissée distraire avec cette question. Une fois arrivée à l'intérieur de l'institut, elle fonça droit vers la salle de bain de son étage, ignorant les quelques regards surpris tournés vers elle.
Pinçant son nez, elle laissa la colère et son sang refluer. Soucieuse du bien être des Cuckoos, elle leur adressa une pensée.
- Désolée Phoebe. Je n'aurais pas dû faire la maligne.
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« Le désir d'amitié est donc précisément un désir d'être compris, sollicité, apprécié pour nous-même. » ( Francesco Alberoni)
Aucun reproche n’est ainsi formulé pour la tricherie invétérée dont elle se rend volontairement coupable : n’ayant aucun attrait pour le sport, on pourrait aisément la qualifier de paresseuse mais elle préfère se trouver ingénieuse, économisant ses forces pour le reste de la journée. De ce fait, elle n’ira pas jusqu’à dire ouvertement que courir lui semble ainsi plus facile, de peur de contrarier ses comparses d’efforts. Enfin, les efforts, ce sont elles qui les fournissent.
Peut-être pour détourner l’attention de sa flemme aiguë (maladie gravement handicapante et n’ayant, malheureusement, aucun repère), elle posa une question hautement intéressante : qui est le plus mignon entre Hank, Charles et Scott ? Évidemment, la question s’adresse seulement à ses comparses, car son choix est déjà fait et connu de tous. En même temps, le premier est comme un frère, le deuxième est son père et le troisième… A-t-on vraiment besoin de le dire ? Les réponses des Cuckoos ne la rendent pas jalouse outre mesure, elle laisse même un sourire amusé prendre forme sur ses lèvres : elle comprend. Au-delà des tables de nuit, Scott est un homme doté d’un charme certain, il est donc naturel que les trois blondes le désignent. (Et toi, Kali ?) Son sourire se perdit dans les vestiges d’une grimace car, pour elle, Kali craque sur son père. Ou, en tous cas, de ce qui se rapproche le plus d’un père. D’ailleurs, il pourrait aussi être celui de Kali, ce qui conduit Jean à une réflexion qu’elle partage par pure générosité (Tu aimes les hommes plus âgés, donc.) Non, ce n’est pas une question mais plutôt une affirmation. Une information importante que Jean note dans un coin de sa tête ; si un jour elle se met en tête de caser Kali, elle commencera ses recherches par les hommes murs (pas pourris, c’est la nuance).
Le Télépotin continue, et la lévitation confortable de la mutante également, puisque cela ne semble gêner personne. De toute façon, elle ne reprendrait pas la course. Phoebe aime bien les bruns comme Summers ou… Spider-Man ?! (Vous connaissez Spider-Man ?!) Elle le connait aussi, mais n’a pas vu son visage et n’a pas fouiné dans son esprit par respect… La tentation de fouiner dans les souvenirs de ses amies est tentante, sans compter le fait qu’elle partage déjà une bulle télépathique de complicité. Bon, elles ne le sentiront même pas…
Pendant que les Cuckoos s’affrontent télépathiquement, la rouquine cherche l’image qui est apparue dans les pensées des blondinettes lorsqu’elles se sont remémorées le visage de l’araignée aux cheveux bruns… (Il a l’air jeune !) Souffle la rousse d’un air étonné, en même temps qu’une question adressée à Kali concernant ses émois amoureux. La question n’eut guère un grand succès, mais provoqua la chute de la malheureuse, qui saigne à présent. (Kali ! Ça va, rien de cassé ?) Demande-t-elle d’un air sincèrement inquiet en la voyant se redresser, amenuisant rapidement la distance qui les sépare en affichant une mine soucieuse. Retrouvant la terre ferme, elle apparaît tout d’abord soulagée d’entendre que son nez, bien que sanguinolent, n’est en effet pas cassé. La blessée s’éclipse, et la rouquine ne fait aucun geste pour la retenir, la suivant simplement du regard jusqu’à ce que celle-ci disparaisse de son champ de vision. Qu’a-t-elle ressenti ? De la douleur et de la tristesse… Décidant de laisser quelques minutes à Kali, Jean tourna son menton vers les Cuckoos pour leur adresser ces quelques mot, de vive voix cette fois : « On l’attend ici ? » Elles n’allaient tout de même pas continuer à courir sans elle...
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Si on est unanimes sur monsieur Summers, pour mademoiselle Herrera c’est monsieur Xavier le plus mignon des trois ! "Mais elle ne le voit pas comme une figure paternelle et c’est plus par… dépit". Alors pour la figure paternelle, c’est compliqué. Mais c’est pas faut. Ainsi c’est donc vrai. C’est compliqué. Pour nous trois du moins ; mademoiselle Grey a été élevée par lui donc ça doit être beaucoup plus simple. Chose qui ne signifie pas que c’est simple. Quant au dépit, c’est insultant non ? C’est aussi compliqué même si l’esprit de Mademoiselle nous apporte les informations. Monsieur Xavier est effectivement charismatique, il y a d’ailleurs plein de lettres en commun entre la qualité et son prénom. Quant à la timidité de monsieur McCoy et à l’égo fragile de monsieur Summers…
C’est que monsieur Summers a peur de faire du dégât avec ses pouvoirs incontrôlables, le défend Phoebe. C’est que monsieur McCoy est habitué à cacher sa vraie nature, le défend Céleste. C’est pas dur d’aimer les hommes plus âgés pour mademoiselle Herrera puisqu’elle a 16 ans, la défend Mindee.
On ne s’y attarde pas puisqu’il y a encore beaucoup trop à dire. Un beaucoup trop qui finit mal. Avant cela, on a l’instant surprise vis-à-vis de Spiderman. Mademoiselle Grey le connait aussi.
(Je l’ai rencontré lors d’une sortie à notre ancien boulot. Un jeune dans le minibus que je conduisais a eu une émergence de pouvoir qui a failli nous faire passer par-dessus la rambarde d’un pont.)
(Spiderman était dans le coin et est immédiatement venu aider, notamment à stabiliser le minibus. Après la difficulté a été que le cri psychique du jeune atteignait tout le monde, même les autres conducteurs.)
(Il a fallu gérer le suraccident et le jeune tout en parvenant à dresser des boucliers mentaux chez Phoebe et Spiderman, d’où la découverte de son identité. Elle a promis de la garder secrète autant qu’elle peut, pas de question dessus donc.)
(Il a l’air jeune !)
Pas le temps de répondre à la réalisation que mademoiselle Grey est non seulement dans nos pensées instantanées, non seulement dans celle de mademoiselle Herrera, mais également dans nos données cérébrales ; alors qu’on ne l’y a pas invitée et qu’elle ne s’est pas annoncée ! C’est un choc.
Et en parlant de choc…
Phoebe n’est pas la plus douce d’entre nous. Lorsqu’il est question de réussir à lui faire le tacle promis, elle attend juste l’opportunité d’une diversion offerte par mademoiselle Grey pour tenter son contournement. Or, mademoiselle Herrera rate son tacle du fait de ladite diversion mais Phoebe ne la rate pas elle.
Celle à l’avant de la scène, fuyante, entreprend de ralentir alors qu’elle se rend compte que sa blague amicale a très mal tourné. Celle à l’arrière de la scène, tranquille, entreprend d’accélérer alors qu’elle se rend compte qu’il y a peut-être une blessée. Celle au centre de la scène heurte et tombe, roulant pour amortir la chute et se dégageant par réflexe du contact.
Putain ! Crotte ! Merde !
Au sol, elle cherche à voir les dégâts sans essayer de se relever. A l’arrière, elle cherche à voir les dégâts tout en espérant qu’il n’y en ait pas. A l’avant, elle cherche à voir les dégâts en palissant d’en être l’une des causes.
(Kali ! Ça va, rien de cassé ?)
C’est à entendre la voix de mademoiselle Grey dans nos têtes qu’on se rend compte qu’on a été déconcentrées. Nos yeux se sont éteints, retrouvant leurs apparences humaines.
« Il est pas cassé, ça va, nous assure mademoiselle Herrera en parlant de son nez saignant alors qu’on la fixe toutes trois avec inquiétude et culpabilité, les gorges serrées et les cœurs plus rapides encore que précédemment. Je vais aller me rincer par contre, continuez sans moi, je vous rejoins dès que j'ai fini. On peut rester en contact télépathique si vous voulez. »
On ne veut pas. Ni continuer à communiquer avec elles. Ni continuer à courir avec elles. On voit le sang que l’on lui a causé. On voit les larmes que l’on lui a causé. On ne veut pas cela. Il faut néanmoins qu’on se tempère. Où qu’on tempère Phoebe. Lorsque celle-ci est debout, elle croise les bras, et fixe le départ précipité de mademoiselle Herrera. A sa droite, Céleste s’enserre le bras gauche de la main droite. A sa gauche, Mindee s’enserre le bras gauche de la main droite. Toutes deux ont la tête rentrée dans les épaules. Au centre, elle serre la mâchoire et fronce les sourcils.
Intérieurement, la peur profonde alimente une colère de surface. Exception faite de Céleste, on a toutes merdé sévèrement dans cette histoire. Impliquer mademoiselle Herrera est la faute de Mindee. L’heurter est celle de Phoebe. Tout cela parce qu’on espère qu’elle confonde le sentiment d’attirance amoureuse avec celui de jumelage. Qu’est-ce qu’on connait à ce premier sentiment, cependant ? Rien. Tout comme à l’amitié. L’amitié est une belle idée qu’on veut tester mais chaque tentative se passe mal, actuellement. Autant, il était impossible de considérer la présence d’erreurs lors du premier crève-cœur avec Kali, lors de la découverte de notre condition d’Arme XIV. Autant cette fois, tout est purement notre faute.
Il nous faut environ trois secondes pour prendre notre décision.
« On l’attend ici, nous demande mademoiselle Grey, restée à nos côtés et nous amenant à tourner nos trois visages vers elle.
- A voir, répond-t-on à trois, désolées. On demande. »
Nos yeux s’illuminent à nouveau, juste à temps pour entendre les excuses.
(Non. Je n’aurais pas dû penser que la question piège me permettrait de vous dépasser. Je suis désolée.)
(Vous êtes celle dans le mal, actuellement. Nous sommes désolées.)
(Je n’aurais pas non plus dû vous impliquer dans nos histoires. C’est prématuré. Les activités sont déjà bien suffisantes, si on arrive à en faire une correctement.)
Sur deux activités tentées, ou trois selon le point de vue, toutes sont des échecs. Le petit déjeuner. La course avec télépotin. Inutile de rappeler à toutes les deux conclusions.
(Mademoiselle Grey, sachez que nous accompagner télépathiquement nous suffit. Ne vous sentez pas obligée d’être physiquement présente auprès de nous. Demandez également avant de vous servir dans nos souvenirs, sauf si on peut également faire la même chez vous.)
(Sachant que votre fugue et l’éventualité que vous ayez couché avec monsieur Summers dans les douches du gymnase nous intéressent beaucoup. Pour des raisons différentes. Mademoiselle Herrera, sachez que nous comprendrons si vous ne souhaitez plus courir avec nous.)
(Nous trouverons d’autres activités ensemble. Les tabous fonctionnent mal avec le télépotin mais on peut essayer d’en avoir. Il est facile de blesser les gens avec la désinhibition de la télépathie mais ce n’est pas ce que nous voulons.)
Tout est parti de là, quand on y pense. Mentalement, on passe notre temps à nous écharper puisque l’on n’a aucun filtre mais on sait aussi s’arrêter lorsque l’on blesse réellement. Mindee déteste le conflit mais est la première à en créer entre nous car c’est une manière de le canaliser et d’éviter qu’on se déteste réellement. Lors de nos véritables disputes, l’absence de filtre et la sincérité absolue signifient qu’on s’attaque au cœur et sans répit. En tant que télépathes, on apprend à faire abstraction de toute cette méchanceté certes pensées mais temporaire. Pour une non télépathe, en revanche, cela peut être compliqué. Voire impossible à comprendre.
Kali eut un pincement au cœur en entendant la réponse des Cuckoos.
Non seulement elle avait tout gâché de part ses actions, mais en plus le trio le prenait pour elles. Elle serra sa mâchoire alors que les pensées continuaient d'affluer en elle et que la colère faisait son grand retour. Par envers elles - envers elle-même.
Elle haussa brièvement un sourcil devant le "reproche" fait à Jean. Qu'avait-elle fait ? Ses deux neurones non-impactés par la collision se rappelèrent qu'elle semblait avoir vu l'apparence de Spider-Man sans pourtant que les Cuckoos la partage. Les wagons furent raccrochés et la suite sut piquer son intérêt - elle n'avait jamais connu le fin mot de l'histoire sur la disparition de Jean. Pour ce qui était de la douche, elle estima que c'était un malentendu ou qu'elle avait encore raté un épisode. Ce qui était fortement probable.
Sa mâchoire se serra encore un peu plus à la mention de son nom. Il fallait d'abord laisser les Cuckoos finir leurs pensées. Kali ignora volontairement la dernière phrase, tout en sachant pertinemment qu'elle lui était adressée. Relativement certaine qu'elles avaient fini de parler, la jeune mutante s'exprima, relâchant au passage la tension qu'elle exerçait sur son nez pour vérifier que celui-ci avait fini de saigner.
- En ce qui me concerne, je veux être impliquée dans vos histoires. Vous n'êtes pas responsables de ma stabilité émotionnelle ou des mauvaises décisions que je peux prendre. Nul besoin de ressentir une quelconque culpabilité à ce sujet, donc. Ce n'est rien qu'un choc et j'en suis déjà remise.
Son nez avait effectivement arrêté de saigner, l'écoulement avait été vite arrêté puisqu'il n'était pas très important dès son commencement.
- Ce n'est pas un accident bien important. Je me suis prise Phoebe comme on se prend un lampadaire et je préférerais que vous puissiez en rire plutôt que de le prendre pour vous. Soyez aussi désinhibées que vous le souhaitez, je le réitère, mes pensées vous sont ouvertes.
Mêmes celles de la douche.
Tout ce qu'elle avait dit était sans rancune ou méchanceté quelconque, puisqu'elle pensait réellement qu'elles n'avaient pas à se sentir coupables pour ses actions, aussi stupides soient elles. Les actions, évidemment.
Elle nettoya rapidement son visage avant de repartir d'une marche rapide en direction de l'endroit où elles les avaient quittés. Les mêmes visages surpris de l'aller semblèrent la fixer curieusement encore une fois avant de retourner à leurs occupations diverses et variées. Elle écouta silencieusement ce que Jean avait à dire, contemplant seulement l'herbe sous ses pieds alors qu'elle se rapprochait rapidement du lieu de la chute.
Une fois arrivées, elle leur offrit un sourire qui, bien que manquant d'enthousiasme, restait sincère. Malgré sa stupidité, elle restait contente de pouvoir être avec ses amies.
- Bon, maintenant que j'ai fini de repeindre la salle de bain des filles, on y retourne ?
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« Le désir d'amitié est donc précisément un désir d'être compris, sollicité, apprécié pour nous-même. » ( Francesco Alberoni)
Ne dit-on pas que tous les goûts sont dans la nature ? On dit aussi que les goûts et les couleurs, ça ne se discute pas, mais il y avait un point sur lequel Jean pouvait disputer : l’égo prétendu fragile de Scott. Lorsqu’elle entend ses amies formuler cette pensée saugrenue au sujet de son petit-ami, elle fronce durement ses sourcils au-dessus de ses yeux clairs, poussant ses lèvres en avant dans une sorte de petite moue étonnée, qui se poursuit par une pensée que toutes peuvent entendre : « Scott n’a pas un égo fragile ! Bien au contraire. Vous ne le connaissez pas bien. » Heureusement, Phoebe le défend à son tour et Jean l’en remercie vivement, avant de tendre l’oreille sur ce qui se dit sur les autres : un en particulier. Spider-Man.
Elle écoute attentivement le récit que les Cuckoos font à propos de leur rencontre avec le plus jeune des Avengers, mais ce qu’elles ne savent pas, c’est que la fouine est de retour ; elle a investi leurs souvenirs pour retrouver la trace visuelle de cet incident : bingo, elle a maintenant le portrait de l’homme-araignée. Bah quoi ? Il ne fallait pas ? Oh bah, fallait prévenir ! Le choc concernant le rapt d’informations secrètes ne s’étale pas bien longtemps car Kali fait une malheureuse chute, suivie de près par une Mindee qui s’écroule à son tour. L’image des dominos… Oh, pardon ! Ça vient tout seul.
Jean se précipite alors auprès des potentielles blessées, demandant tout d’abord à Kali si celle-ci n’a rien de cassé, car celle-ci n’a pas une apparence invincible contrairement à la blondinette qui scintille au sol : si la rouquine est d’abord rassurée sur ce point, elle grimace néanmoins en voyant la blessure légère, avant d’aider sa jeune amie à se remettre sur ses jambes afin de rejoindre l’infirmerie, bien que cela ne soulève que trop peu l’inquiétude de Jean : ce n’est qu’une petite blessure, rien de grave. Dos aux Cuckoos, elle ne se rend compte de leur malaise qu’en se mettant sur la même ligne qu’elles, afin de demander si elles attendent le retour de Kali ; les paupières plissées et les sourcils froncés, elle se retourne vers ses trois amies en inclinant son menton sur le côté, comprenant fort bien l’élan de culpabilité qui vient les ronger mais ne sachant pas comment l’apaiser. « Ce n’était pas de votre faute, cette chute… » Souffle-t-elle avant de froncer légèrement ses sourcils devant le reproche qui lui est fait, et qu’elle ne comprend pas réellement puisqu’elle n’a fait que saisir l’image qui s’est présentée lorsqu’elles évoquaient ce souvenir… Mais soit. Elle ne veut entamer un autre conflit, jugeant leur état fragile et déjà assez tourmenté ; prenant donc sur elle, la rousse croise ses bras contre sa poitrine tout en hochant son menton de haut en bas, usant alors de la parole pour se faire entendre cette fois : « D’accord. Je m’excuse. » Puis elle s’éloigne pour aller prendre place sur un banc installé non loin, levant son menton et fermant les yeux pour offrir son visage aux rayons du soleil, chauds mais doux, en attendant le retour de sa comparse. Tout à coup, elle n’avait plus vraiment envie d’user de la télépathie.
Kali finit par revenir, sans l’ombre d’une douleur ou d’une blessure : ce qui ne put qu’arracher un sourire aux lèvres de la mutante qui, se levant de son banc, fit quelques pas pour les rejoindre. « Allons y. » Donnant un léger coup de coude à Kali, Jean lui adresse un sourire suave avant de se remettre doucement à courir, tout en sachant pertinemment qu’elle va se remettre à léviter sous peu. D’ici quelques minutes. Secondes, plutôt.
THE FIRE FINDS A HOME IN ME ᭸ clipped wings, I was a broken thing, had a voice but I could not sing. there's a scream inside that we are frightened,we hold on so tight, we cannot deny, eats us alive, oh it eats us alive. there's a scream inside that we are frightened, I’ll shout it out like a bird set free.
Mademoiselle Grey souffle que cette chute n’est pas de notre faute. Si. Aux deux tiers. Mindee a invité mademoiselle Herrera à participer. Phoebe a essayé de feinter. C’est de notre faute.
Mademoiselle Herrera culpabilise aussi. On le comprend, en plus de le partager. Tout comme la colère. Cela passera. Cela étant, il faut éviter d’en reproduire. De refaire les mêmes erreurs. Comme disait Père, ce n’est pas grave de faire une erreur une fois mais cela le devient si on la refait. On n’a jamais vraiment été d’accord : on ne devrait pas la faire la première fois. Comme à chaque fois, on l’a fait. Sauf Céleste, certes. Quant à la réponse de Mademoiselle… la volontaire occultation de notre conclusion ne nous échappe pas. Elle se met des œillères. Elle veut être impliquée dans nos histoires et cela nous place en désaccord. Selon elle, on n’est pas responsable de sa de sa stabilité émotionnelle ou des mauvaises décisions qu’elle peut prendre. Certes. Cela étant, la mauvaise décision a été demandée par Mindee et entérinée par Phoebe. Faute partagée, donc. Pour la stabilité émotionnelle… peut-être est-on celles qui se mettent des œillères. Peut-être pas. On a plutôt bien compris à quel point c’est exceptionnel d’ainsi réussir à faire sortir Mademoiselle de sa coquille, de son isolement. Les raisons qui ont amené cela à arriver sont aussi familières qu’étrangères, pour nous. Qui a raison sur la nature réelle du sentiment ? Qui le comprend réellement ? Il y a beaucoup d’enjeux et on le sait. On peut admettre que le nez et le saignement soient peu mais ils sont sans doute révélateurs d’appréhensions à plus long terme. Faire souffrir les autres. On est capables de faire souffrir lorsque c’est nécessaire, lorsqu’on fait face à une personne dangereuse ou à une situation qui exclue les personnes qu’on aime être. Le Baron Zemo et l’escouade de l’Hydra à sa poursuite en ont fait les frais. Cela étant, on est actuellement avec des personnes que l’on souhaite en amies.
C’est d’ailleurs parce qu’on les souhaite en amies que je vais tolérer la comparaison avec le lampadaire, considère Phoebe avec fermeté. C’est plutôt bien d’être comparée à un lampadaire puisque ça veut dire que tu es une lumière, considère Céleste avec l’espoir qu’elle ne dise pas de connerie. Je suis aussi pour ne pas prendre Phoebe le lampadaire pour nous mais je peux le laisser à Mademoiselle Grey et non à Céleste, considère Mindee avec l’espoir qu’elle dise une connerie.
(Soyez aussi désinhibées que vous le souhaitez, je le réitère, mes pensées vous sont ouvertes.)
"Mêmes celles de la douche". On lève les sourcils de surprise. Puis les regards s’échangent entre nous, celle du centre s’en allant d’abord vers celle de gauche. Celle-ci lui rend son regard puis penche la tête sur le côté pour fixer celle de droite, qui a le geste en miroir. Cette dernière revient ensuite vers celle du centre qui la fixe à son tour.
Techniquement, on a l’autorisation de voir le souvenir de mademoiselle Herrera ; même s’il implique mademoiselle Grey. D’un autre côté, on ne peut pas réellement faire ça à mademoiselle Grey si elle est véritablement impliquée. D’un troisième côté, l’alternative c’est de risquer de perdre notre virginité mentale. C’est une situation complexe. Pire, c’est une diversion efficace !
Une diversion interrompue par le départ de mademoiselle Grey, après ses excuses. Les deux autres, bras gauche enserrés de mains droites, tournent leurs regards vers celle du centre, aux bras croisés. Celle-ci tient sa position, même si ses épaules s’abaissent légèrement. Les regards recommencent à s’échanger et celle de droite croise rapidement les bras tandis que celle de gauche se tourne vers les deux autres puis croise les bras à son tour. Au centre, l’agacement prédomine. A droite, l’agacement s’y joint. A gauche, l’autorité tâche de se faire.
Ça y est, l’amitié me saoule. On va devoir apprendre, comme le reste. Faut voir le positif, ça commence tellement mal que ça ne peut que s’améliorer ! Démerdez-vous, je reprendrais les rênes quand quelqu’un sera à nouveau blessé. Si seulement ça pouvait t’empêcher de râler avant que ça arrive. Du coup c’est moi la cheffe. Céleste, peut-être que j’aurai moins à râler si t’avais le courage d’intervenir pour autre chose que faire ta mignonne. Phoebe, peut-être que t’aurais moins à râler si t’avais le bon sens d’intervenir pour autre chose que faire ta casse-couille. Les filles, en tant que cheffe je veux le silence ! Mindee, la ferme. Mindee, ça marche. La majorité a choisi. Bougez-vous et faites pas chier. D’accord. Deal.
Après quatre secondes d’échanges silencieux, on s’harmonise dans une tentative d’impassibilité curieuse : on regarde mademoiselle Grey qui s’est assise et prend le soleil.
Faut qu’elle fasse attention à ne pas brûler sa peau de rousse, considère Phoebe malgré son envie de retourner courir seule. Un coup de soleil c’est pas bien grave puis Mademoiselle sait ce qu’elle fait, considère Céleste malgré son envie de suivre le mouvement ; tant la course que l’assise. On attend tout le monde pour reprendre, considère Mindee malgré la lucidité sur cette décision collective et tacite. Super. Or donc, la douche ou pas la douche ? Débat approuvé !
On perd la notion du temps, toutes trois en triangle à se faire face et à échanger silencieusement, jusqu’à ce que mademoiselle Herrera n’arrive. La discussion a été animée, les bras croisés s’accompagnant d’haussement des visages, des épaules voire des mains, mais l’absence de connexion télépathique et le "sujet navrant", selon une Phoebe qui s’y intéresse tout de même autant que les autres, implique qu’elle reste notre petit secret. Comme on n’est toujours pas d’accord à la fin, il n’y a pas grand-chose de secret au final.
La pause temporaire de notre débat sur l’espionnage du coït de mademoiselle Grey, sachant qu’à part l’espionnage tout est hypothétique lorsqu’on y réfléchit bien et on y a bien réfléchi, se conclut par un changement de nos positions. D’un même mouvement, nos bras se décroisent et nos visages se tournent vers la revenante avec une grimace de désolé. Celle de gauche passe au milieu tandis que celle qui reste à droite tourne les yeux vers mademoiselle Grey, qui nous rejoint également.
« Bon, maintenant que j'ai fini de repeindre la salle de bain des filles, on y retourne, demande une mademoiselle Herrera après un sourire faible que l’on mimique par réflexe.
« Allons y, confirme une mademoiselle Grey avant de lui mettre un léger coup de coude, accompagnant ainsi son sourire plus convaincant.
« On vous suit, déclare-t-on à trois d’une même voix avant de faire un silence, le temps de fixer celle de droite qui ajoute comme une excuse : Du coup, l’histoire de la douche, c’était vous ? »
***
Lundi 29 Juillet – 06 : 40 P.M.
On n’a pas atteint nos objectifs de course du matin. Pas de 10km aujourd’hui. Pas d’autres soucis, heureusement. On a également évité les katas par crainte d’une cata. La douche d’après le sport, prise dans la chambre, a donc été prise en avance. Même si nos journées de travail n’ont pas encore commencé, on a déjà établi les horaires et commencé à travailler. Mindee a eu sa première rencontre avec une parent d’élève deux jours après notre arrivée, d’ailleurs ! On en est fières et on aide déjà comme on nous y autorise. Ce qui implique que l’on ne soit absolument pas disponible entre 8h30 et 12h ainsi qu’entre 13h et 18h30. Les horaires de travail nous semblent raisonnables, surtout considérant qu’on tâche d’être en avance d’une demi-heure sur leurs débuts matin et après-midi. Le plus gros manque que l’on a, c’est au niveau des jours de congés : dix jours par ans, cela nous semble peu. On sait que l’ancienneté permet d’en rajouter mais on n’a jamais travaillé cinq ans au même endroit pour en avoir quatorze, des jours de congé, alors les dix ans pour dix-sept jours ou les vingt jours après vingt ans… sachant qu’en plus ce n'est pas obligatoire puisqu’il n’y a aucune loi sur les congés payés dans les Etats-Unis. Surtout que l’on va travailler sept jours sur sept, puisque l’on loge sur notre lieu de travail et que les élèves ne rentrent pas chez eux le weekend ; pas plus qu’on ne cesse de côtoyer les collègues. On aime dédier nos vies aux autres donc cela ne devrait pas nous poser de problème. Il faut cependant en tenir compte pour notre organisation.
Car on a une organisation ! C’est assez militaire, on le sait et en même temps on a grandi comme ça. Ça nous rassure, ça nous plait et on fait partager !
Le rendez-vous d’après journée s’est donc déroulé au début de notre "quartier libre". 06 : 40 P.M.. On tenait à essayer de trouver une place à la table du personnel pour le midi, d’autant que mademoiselle Grey serait à New York pour ses études et que mademoiselle Herrera devrait manger avec ses amis autres le midi ; elle finirait bien par s’en faire, non ? On a fait un tour de cadrant depuis qu’on est levées mais on a l’habitude d’activités tranquilles, entre nous, à partir de cette heure. On s’est regroupées mais, contrairement à l’ordinaire, on n’est pas allées se doucher. Non. Le rendez-vous est à la grande salle de jeux, où heureusement les élèves sont rares. Lorsque la rentrée sera arrivée, voire nos métiers seront commencés, on n’aura plus l’occasion de venir ici pour se détendre : c’est un espace pour les jeunes et on y serait donc soit sollicitées soit en surveillance. Dommage pour Mindee, il y a un piano. Heureusement pour le décor, il y a un billard et une Phoebe. Quant à Céleste, elle est bien plus intéressée par surveiller les allées et venues au sous-sol. C’est d’ailleurs mieux que les couples se retrouvent là-bas : on n’est pas capables de se repérer dans le labyrinthe de haies, à l’extérieur du manoir. Enfin, visuellement.
Chacune fait un tier de tour d’horizon de la grande salle de jeux, afin qu’on en voie le décor à la recherche de mesdemoiselles le plus rapidement possible. Sur la droite, elle regarde le piano et les confortables divans qui accompagne la petite table à échiquier. Au milieu, elle détaille le billard et le canapé qui se trouve au-delà, devant le bowwindow. A gauche, elle détaille les sièges de discussion et la commode où sont rangé les jeux de société ; ainsi que la cheminée décorative puisqu’elle est accompagnée du plus grand siège de discussion de la pièce. De notre côté, nous sommes vêtues comme tous les jours : chemises blanches à col en V et liserés noirs, jupes droites noires, collants noirs et chaussures à talons noires aussi ! Il n’est pas encore temps d’être discrètes avec des ballerines, on veut qu’on sache qu’on arrive actuellement. Deux d’entres nous ont les bras le long du corps tandis que celle de droite dispose de notre tablette numérique. Face au fait que l’on soit les premières arrivées, celle de gauche croise les bras de satisfaction tandis que celle du milieu joint les mains, de satisfaction aussi. Après une silencieuse hésitation parce qu’il faut se mettre d’accord sur l’endroit où poser nos fesses et préparer notre réunion de préparation, on se décide à s’installer devant la cheminée. Ce qui nous amène à une primordiale question : est-ce que les coussins rembourrés sur la barrière qui devait servir autrefois à la sécurité sont destinés à nos fesses ou à éviter que les plus jeunes pensionnaires de l’Institut ne se fassent pas mal ?
C’est donc à trois, échangeant constamment des regards et haussant régulièrement les épaules, qu’on se concentre pour élucider ce mystère. Il ne faudrait pas qu’on montre le mauvais exemple, quand même.
Allongée sur son lit, Kali se repassait les évènements du matin dans sa tête. Tout n'était pas à jeter, mais ses interactions avec les Cuckoos avaient été misérables dans l'ensemble. Elle était rouillée, socialement parlant. Et ses émotions la trahissaient toujours au pire moment. Toutes avaient pu recommencer leur course comme si de rien était, mais elle sentait clairement que côté Cuckoos, le cœur n'y était plus. Après ce petit épisode sportif, elles avaient toutes vaqué à leurs occupations - les trois sœurs n'étant pas en congés - même si Kali n'avait pu que ressasser ses erreurs de la journée.
C'était fatiguant. Du genre à lui faire fermer les yeux et se concentrer sur le silence de sa chambre. Les ténèbres étaient appréciables, relaxants. Trop peut-être, puisque la jeune mutante finit par s'endormir, dans une sieste très inhabituelle.
Ce fut la sonnerie de son téléphone qui la réveilla. Du genre prévoyante, elle avait tout de même prévu une sonnerie, une vingtaine de minutes avant leur rencontre. Un peu nauséeuse, puisque peu habituée aux siestes, Kali se leva lentement pour aller enfiler une tenue un peu plus convenable. Elle s'arma d'un jean des plus simples, un pull léger à col roulé vert et des baskets d'un autre temps. Après un re-coiffage rapide pour cacher la marque de l'oreiller, elle partit en direction de la salle de jeu.
C'était la deuxième fois qu'elle s'y rendait. Enfin, troisième techniquement, puisque après avoir expédié son repas de midi en mangeant seule à une table proche d'une fenêtre - elle avait vu que les Cuckoos avaient décidé de manger avec le personnel et s'était contenter de leur offrir un sourire sincère - elle s'était promenée dans le manoir pour effectuer une mission de reconnaissance. C'était sans trop d'efforts qu'elle avait trouvé la salle, guidée par ses souvenirs de la journée du 25 qu'elle avait passé en compagnie des trois sœurs.
Kali arriva ainsi sur les talons des Cuckoos, déjà présentes dans la salle. Avec un sourire, elle s'adossa à l'entrée et s'adressa à elles :
- La session n'a même pas encore commencé et je me fais déjà damer le pion.
Elle entra dans la salle sans se départir de son sourire et enchaina :
- ça me rappelle de bons souvenirs... On peut refaire un tour du labyrinthe après si vous voulez.
La salle était ordinairement rempli de gens qu'elle n'aurait pas voulu voir. Kali n'avait toujours vraiment pas d'ami hormis Jean et l'idée de se sociabiliser en venant ici ne serait-ce que de temps en temps ne l'enchantait guère. Mais pour les Cuckoos et sa compagne rousse ? Elle pouvait clairement faire une exception.
- Est ce que vous avez planifié des activités ? Sinon je vois quelque chose qui m'intéresse beaucoup.
D'un geste télépathique, elle effectua un glissando sur le piano, tout en gardant ses yeux sur Mindee. Parce qu'il fallait bien en regarder une des trois.
I need relief, a failure's coming on Just breathe in deep, it's taking far too long I need relief, this weakness carries on Please be a dream, or was it all along?
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