Ainsi s’achève cette rencontre qui fut aussi douce qu’inattendue, et qui sut octroyer les premiers émois dans le coeur du jeune homme, dont le palpitant n’avait jamais été effleuré par des émotions aussi suaves avant aujourd’hui. Quand bien même peut-il déplorer quelques maladresses, dont le tort pourrait aisément être partagé, Morgan se réjouit d’avoir pu passer cet instant si particulier en sa précieuse compagnie, car la demoiselle à la plastique superbe a surtout laissé entrevoir toute la brillance de son esprit, la bienveillance de son âme et la douceur de son coeur malmené, qui la rendent encore plus belle qu’elle ne l’est par l’apparence.
Ce soir, alors que tout semble les opposer, en dépit de leurs natures diamétralement différentes, de leurs origines et de leurs vies aux antipodes l’une de l’autre, leurs deux ont su s’apprivoiser, entendant et comprenant les douleurs de l’autre sans jamais juger, sans jamais détourner le regard sous la honte ou le rejet, sans jamais abandonner cette main si généreusement tendue.
Il aurait préféré que la nuit s’étire, que le grand horloger du temps leur permette de passer davantage de temps ensemble mais, le message reçu sur son portable semble signer la fin de cette belle entrevue ; il le formule, non sans laisser entrevoir combien il regrette de ne pas pouvoir rester encore un peu auprès d’elle. « Je comprends tout à fait, Morgan. » Dit-elle d’une voix douce, lui prouvant ainsi qu’elle ne lui tient point rigueur de cette fuite involontaire.
Il hoche son menton de haut en bas, laissant un sourire prendre place sur ses lèvres tandis qu’il la voit se rapprocher, lui rendant son dû : la veste passe par-dessus son propre bras tandis qu’il prend une fine inspiration, la remerciant silencieusement d’un regard aussi caressant qu’appuyé. « Merci pour cette soirée et cette belle rencontre. Au plaisir de vous revoir, Morgan. » Qu’elle est douce, cette voix… Il comprend à présent les mythes entourant le chant des sirènes. « Merci à vous, Amora. » Il ne lui retourne pas la deuxième phrase, ne pensant pas avoir la chance de la recroiser un jour. Mais elle interrompt le fil de ses pensées lorsqu’il se formule cette idée, en déposant un chaste mais ô combien tendre baiser sur sa joue ; le geste le surprend mais le touche davantage, si bien qu’il ne trouve rien à redire pendant qu’elle s’éloigne, tel un mirage s’évaporant dans la nuit…
Il reste là, au milieu du trottoir, debout face au vent et aux étoiles, jusqu’à ce qu’elle sorte totalement de son champ de vision. Puis, il s’éloigne à son tour dans la direction opposé, un vague sourire aux lèvres, l’esprit léger et le coeur encore quelque peu ensorcelé par cette étonnante rencontre.