Voici les mots qui comptaient vraiment. Le mot qui comptait. Depuis une petite dizaine de jours, non, une petite semaine. Tout était à peu près redevenu à la normale. C’était encore un bien grand mot mais en tout cas… J’avais besoin de souffler. Ne rien faire. Arrêter de penser.
Même si c’était impossible.
Mais j’allais tout de même essayer. Il ne m’avait pas fallut longtemps pour choisir une destination. Un magasine posé par je ne sais qui sur la table de la salle de lecture de l’Institut et mes billets étaient réservés.
Destination Hawaï.
Le magasine indiquait des propositions d’activités et des conseils d’hôtel. Certains donnaient vraiment envie. Ils respiraient le luxe mais il ne me plaisait pas. J’avais envie de quelques choses de simple de naturel. Entre océan et volcan.
Carte de paiement en main j’avais effectué toutes mes réservations en ligne. Mon frère avait été prévenu. Maintenant. Il ne me restait plus qu’à partir.
Mes valises prêtes. Oui, j’en avais prise deux. Une grosse et une petite. Mon passeport soigneusement conservé dans mon sac à main, j’avais atterri à l’aéroport d’Honolulu.
Diablo m’avait bien proposé de me déposer sur place lorsqu’il avait entendu parler de mon départ imminent mais j’avais tout simplement refusé. C’était absolument adorable de sa part mais je refusais de l’exploiter de la sorte. Et je n’étais pas un billet d’avion prêt. Et le temps ? Je n’avais que cela à revendre. D’autant plus que je partais seule. Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas pris de vacances et partir seule ne m’effrayait absolument pas.
J’avais ce besoin de me retrouver loin de tout. Loin de toutes ces galères des derniers mois. Loin des pleurs, loin des larmes, loin des interrogations. Evidemment avant de partir nous avions vérifié avec Hank que voyager n’était pas déconseillé aux femmes enceintes, et avant de partir j’avais eu le droit à un câlin de la part de tout ceux que j’aimais et qui vivaient à l’Institut. Jean, Scott, Charles, Hank, et même de Logan.
Pour montrer que je faisais un effort auprès des triplés je leur avais même imprimé mon plan de vol, ainsi que ma réservation d’hôtel pour qu’elles puissent, si besoin était, me joindre mais seulement en cas d’extrême urgence.
Chaleur. Que c’était bon. A peine étais-je sortie de l’avion qu’un soleil resplendissant m’accueillit. Ainsi que des femmes en tenue traditionnelles venant me déposer autour du coup un magnifique collier de fleurs du pays : un lei. Une femme, magnifique aux yeux noirs intenses glissa même une fleur dans mes cheveux.
Un immense sourire s’afficha sur mes lèvres. J’allais passer de bonnes vacances entre farniente à la plage et balade dans la forêt et sur les volcans. Peut importe que je sois enceinte ou pas. Cela ne comptait pas pour moi et ne m’empêcherait pas de faire ce dont j’avais envie.
J’étais maintenant à 4 ou 5 mois de grossesse je ne savais pas trop et j’avais de plus en plus de mal à le camoufler. Une femme enceinte qui voyageait seule. Cela ne passait de moins en moins inaperçu.
J’aurai pu mentir une fois descendue du taxi qui m’avait transporté de l’aéroport jusqu’à mon hôtel, mais je me moquais royalement de ce que les gens pouvaient penser à mon égard. Arrivée à l’accueil de l’hôtel on m’accueillit comme une princesse là aussi, avec cocktail à la clé. Un blue hawaï que je dus refuser poliment pour mon plus grand regret et après une longue hésitation.
Le portier transporta mes valises dans une petite voiturette, et après quelques minutes de routes nous arrivions enfin devant le petit bungalow que j’avais loué. Un petit paradis sur terre. C’était donc cela ?
"Have you ever looked at a tiger and thought you ought to cover it up? You are an exquisite creature, Raven. All your life the world has tried to tame you. It’s time for you to be free."
La Guerre de l’Infini. Les délibérations des Maîtres des Arts Mystiques afin de juger mon échec à protéger la Pierre du Temps, de ma ré-inclusion ou non dans leurs rangs et, si oui, à quelle position. L’intervention sur le Céleste, bien plus urgente et ayant contribué à me rendre ma place de Sorcier Suprême par reconnaissance de mon aspect prodigieux dans le domaine des Arts Mystiques. L’investigation sur les Célestes, afin de comprendre la portée de la menace malgré la difficulté à trouver des informations sur ce qui me semble à présent être la plus puissante race de notre univers. L’interaction avec Fenris, afin d’essayer d’offrir une chance de vivre à celle qui survie jusqu’ici et ce depuis des millénaires, prouvant que les Asgardiens ne sont pas aussi pacifiques et bienfaisants qu’ils ont voulus le devenir sur le dernier millénaire. La menace de Loki, puisqu’on est sur des Asgardiens et affilié. La volonté de créer les Illuminati afin que je ne sois pas le seul à m’inquiéter et à chercher des solutions pour tout ce bordel. Oui, ce bordel. L’évaluation de la menace du Phénix et celle de la Sorcière Sombre. La participation à la quête de la première et au sauvetage de la seconde… avant que l’administration ne s’en mêle et ne menace de faire saboter tous nos efforts par méconnaissance. Méconnaissance qui se retrouve dans une rivalité possible entre le SHIELD, détenant l’autorité de l’ONU alors qu’il n’existe que depuis 75 ans, et les Maitres des Arts Mystiques, n’ayant aucune autorité politique mais ayant près de 7.500 ans d’activité. Merci le Tribunal Vivant, l’agent Carthew du SHIELD reconnait ma spécialité et laisse entrevoir les possibilités d’une collaboration, là-aussi. Je n’aurai pas réellement eu la patience de négocier lorsque cette affaire à la Bibliothèque Butler de l’Université Columbia s’est rajoutée, à un ou deux jours avant la confrontation avec Wanda Maximoff, sur les rajouts que je fais aux devoirs de tout Maître des Arts Mystiques : protéger la Terre des menaces magiques ou venues d’autres dimensions. Ce qui inclue énormément de surveillance, même si je délègue cette partie-là. A tord ou à raison, je suis sur le terrain. Encore et toujours.
Le terrain d’aujourd’hui dépend directement des événements de la Bibliothèque Butler, sur lesquels je ne reviendrais pas. L’apparition d’êtres de lave à cause d’une exposition sur les mythologies des îles du Pacifique Sud implique que, dès que j’ai eu le temps de m’en préoccuper, je m’en aille à celles-ci pour éviter que, malgré la diplomatie faite avant moi par mes confrères, les choses s’enveniment. Il y a un avantage avec les entités multi-centenaires voire multimillénaires : elles comprennent le principe de prendre son temps avant d’entreprendre une action. J’aimerai pouvoir le faire. L’investigation est pratique pour cela : mes katas faits, je me déplace de jour pour rencontrer les différentes sources d’informations vivantes, aka les témoins et autres "spécialistes", à ce moment-là avant de laisser mon corps se reposer de nuit et d’employer ma projection astrale pour consulter les sources d’informations inertes, aka littéraires et équivalents. Un rythme auquel je suis habitué, ce genre de marathon de la connaissance ayant rythmé mon apprentissage des Arts Mystiques. Un rythme que je tiendrais. Ad Vitam Eternam, physiquement parlant. Psychologiquement, j’ai placé les éléments adéquats si jamais je craque. Ou pour quand je le ferais, je n'en suis pas certains moi-même. L’Ancienne avait trouvé un rythme et une sérénité dans l’enseignement à de nouveaux pratiquants des Arts Mystiques, nombre sont ceux à m’avoir conseillé d’en faire de même mais je peine à supporter cela. Nous verrons si j’ai l’occasion de le faire avec mesdemoiselles Maximoff ou non. Toujours est-il que je dois rester concentré.
L’investigation sur les Êtres de Lave m’amène sur le sommet du volcan Kilauea, situé dans le sud-est de l’île d’Hawaï. 1.246m d’altitude, j’ai connu pire à cause, ou grâce, à l’Ancienne. Cependant, je n’ai encore jamais eu l’occasion de mettre les pieds dans une caldeira. Elliptique, celle du Kilauea fait cinq kilomètres de longueur et égraine des cratères, cônes et fissures volcaniques sur plusieurs dizaines de kilomètres… sachant que le volcan est l’un des plus actifs au monde. Les légendes locales expliquent la chose pas la résidence de Pélé, "déesse" du feu, des éclairs, de la danse, des volcans et de la violence. Je prends des pincettes avec la divinité car, tout comme les Asgardiens, les Kupua ont été vénérés par les humains mais sont une forme de vie avancée au-delà du mysticisme qu’on y a rajouté. De plus, Kupua n’est pas exactement une divinité ou un esprit et ils semblent surtout être conceptualisés, originellement, comme des humains supérieurs mais pas totalement des divinités. Evidemment, Kamar-Taj a un livre dessus et, évidemment, l’entité avec laquelle je viens tenter de discuter a le caractère qu’on peut s’imaginer d’un volcan. J’ai sincèrement hésité à amener des renforts pour pouvoir isoler ledit volcan si jamais ça tourne à l’éruption mais cela aurait pu être pris comme un mauvais signe et les locaux sont habitués à l’activité volcanique. Après tout, la dernière éruption d’un puit secondaire du Kilauea a duré de 1983 à 2018, soit 35 ans durant lesquels les fontaines, lacs et coulées de lave ont barboté "tranquillement" ou sont allés se jeter dans la mer. Madame Pélé pourrait donc être plus destructrice avec les tremblements de terre qu’avec les éruptions. Idéalement, aujourd’hui ne verra ni l’une ni l’autre.
N'étant pas particulièrement appréciateur des environnements volcaniques, je me suis téléporté en lisière de la caldeira et me suis concentré de prendre une position de méditation tout en lévitant, histoire que la Cape puisse sécuriser mon corps au besoin. Oui, j’ai l’intention de le laisser là pour me projeter astralement et aller à la rencontre du Kupua au sein du Volcan. De ce que j’en sais, Pélé est représentée sous la forme d’une jeune femme aux cheveux longs laissés libre, avec parfois une couronne de fleurs et souvent en bâton magique. De ce que j’en sais aussi, les Kupua sont métamorphes et celui-ci spécifiquement aurait sa voix audible dans les explosions de méthane ainsi que donné pour qualificatif "cheveux de Pélé" aux filaments de verre volcanique et "larmes de Pélé" aux goutes qui les termines. Je m’attends donc moins à trouver une belle jeune femme, chose commune chez les métamorphes, qu’un être de lave plus ou moins féminin. Une entité avec un tempérament explosif et ardent qui est vénérée comme une divinité… qu’est-ce qui pourrait mal se passer ?
Alors que mon esprit plonge à travers la matière de roche et de lave à la recherche de la Kupua, mon corps reste à l’extrémité de ce domaine dangereux. Jambes croisées à un mètre du sol, partiellement dissimulée sous le bas de la veste traditionnelle de Sorcier Suprême, sans manches mais dont les lanières de tissu d’un bleu royal descendent d’ordinaire jusqu’aux genoux. Au-dessous, la tunique de denim est plus sombre, apparaissant au niveau du col et des manches qui finissent bandées aux avant-bras. Sur mes mains, paumes ouvertes et tournées vers le ciel, se trouvent des gants d’un brun clair qui remontent jusque sur les lanières de mes poignets. Les sept ceintures brunes qui m’enserrent la taille continuent de participer au dégradé de couleur, étant brunes aux boucles et attaches métalliques de bronze. Elles renvoient à l’or de l’Œil d’Agamotto, posé sur mon torse et la veste, lequel est lui-même lié aux fermoirs en or avec incrustation de rubis de la Cape de Lévitation, elle-même confectionnée à partir de laine japonaise superposée avec des bords brodés et une doublure intérieure à carreaux imprimés. Au-delà de son col, mon visage aux pommettes pointues témoigne de mon absence : ses yeux sont clos et il a cette paix des gens dans un état second, qu’on le perçoit comme transe ou sommeil. Les épais sourcils sont droits, la fine bouche encadrée d’un bouc aussi. L’entièreté de la tête est légèrement penchée en avant et son principal mouvement est celui du vent dans les cheveux bruns aux tempes grisonnantes, courts pour être disciplinés mais dont les mèches frontales libres sont le jouet des courants d’air ascendants.
La chambre était parfaite. C’était vraiment comme dans un rêve. Le sable blanc, la vue enchanteresse et reposante sur l’océan Pacifique à perdre de vue. Quelques bateaux au loin, un ponton, privatif me permettant de me rendre directement dans l’eau.
Le rêve. Mais c’était terrible. Il était à peine midi, j’étais arrivée depuis deux heures et je m’ennuyais déjà. A vrai dire … c’était surtout le fait de me retrouver seule. Vraiment seule. Qui me perturbait.
Habituellement j’étais toujours entourée par une dizaine de personnes, ma famille, mes amis, les professeurs et les élèves. Bien plus qu’une dizaine à vrai dire. Et là … De me retrouver seule je n’avais pas anticipé que d’y aller dans de telle condition me perturberait grandement.
J’avais déjà eu le temps de faire quelques photos de la chambre que j’avais envoyé à Charles et Jean, mais maintenant… J’hésitais à aller me baigner mais vu l’heure j’allais cuire. Auparavant je n’aurai pas vraiment fait attention, mais maintenant je n’étais plus seule. J’avais une certaine responsabilité envers les bébés que je portais.
Pour rompre l’ennui et surtout arrêter de penser (c’était clairement cela le pire) je m’étais rendue à l’accueil de l’hôtel pour demander ce qu’il était possible de faire. La gentille réceptionniste m’avait indiqué une magnifique randonnée sur un des nombreux volcans de l’ile.
Parfait !
Et alors que j’avais reculé pour retourner dans ma chambre me changer pour une tenue plus confortable, elle avait regardé mon ventre que je ne cherchais absolument pas à cacher ici. Je n’avais pas la moindre raison de le faire. Je ne connaissais de toute façon personne et je n’avais pas besoin de dissimuler la vérité.
Cependant, cette vérité semblait légèrement déranger la réceptionniste qui tiqua, tentant de se reprendre bien rapidement.
- Peut-être que dans votre état ce n’est pas conseillé Madame c’est vraiment sportif comme ascension.
Mes lèvres s’étaient pincées, et je m’étais réellement retenue de lui lancer une petite remarque acerbe dont j’avais le secret. Mais je ne pouvais pas non plus la laisser comme cela. Je n’aurai pas été moi.
- Je vous remercie de votre considération Mademoiselle mais je suis seulement enceinte, pas malade.
Et j’avais tourné les talons pour partir rapidement à ma chambre faire mon sac de randonnée et passer des vêtements plus adéquatsà ma situation. Malgré la chaleur ambiante j’avais opté pour un pantalon de sport long remonté assez haut sur mon ventre, et une brassière de sport de couleur noire elle aussi. Mon ventre ne passait absolument pas inaperçu dans cette tenue. Je pris tout de même une petite chemise en lin blanche que je pourrais ajouter si jamais j’avais peur d’avoir froid ou si je prenais trop le soleil.
Lunettes de soleil sur le nez, sac sur le dos, chapeau sur la tête et bonnes paires de baskets au pied, c’est en taxi que je me rendis au pied du volcan. Une fois la portière refermée, les deux mains sur les hanches observant la bête que j’avais à gravir, un sourire satisfait franchit la barrière de mes lèvres.
Enfin un défi à ma portée.
C’est donc ainsi que, à bonne allure, avançant sur les sentiers balisés, je gravissais les flancs du volcan. Le paysage était vraiment magnifique.
Particulier mais magnifique à sa façon. Nous étions loin des flancs de végétation luxuriante comme il pouvait y avoir sur d’autres volcans de l’île. Non. Ici tout était vide. Seulement des roches, un paysage lunaire qu’il fallait gravir pour arriver au presque sommet du volcan.
La réceptionniste m’avait bien précisé qu’en ce moment, nous ne pouvions nous approcher du cratère car le volcan était en activité. Mais il y avait de nombreuses coulées de lave à observer.
Après trois bonnes heures de marches, j’arrivais enfin à la limite autorisée par les autorités et j’avais observé des jeunes faire griller des marshmallows à la lisière d’une coulée de lave trouvant ce geste à la fois très stupide et en même temps particulièrement amusant.
Voulant, moi aussi flirter avec le danger, je décide de contourner le volcan par des petits chemins bien escarpés et ainsi m’éloigner de l’afflux de touristes. Charles me tuerait si il savait ce que je fais … En une petite demi-heure je suis montée de plusieurs autres dizaines de mètres, et alors que la température devient dangereusement chaude, qu’elle ne fut pas ma surprise de tomber sur un Docteur Strange en pleine pause méditative non loin de moi.
Plusieurs fois, je dus cligner des yeux pour m’assurer de qui j’avais sous les yeux, mais c’était bien le cas. A un moment je crus même que j’avais respiré des fumées hallucinogènes du volcan tellement je ne m’attendais pas à trouver le sorcier suprême ici.
Je m’approchais alors, finissant par me racler la gorge pour indiquer ma présence car le sorcier ne semblait pas bouger. Seule sa cape avait .. elle venait de bouger non ? J’avançais alors d’un pas, me baissant pour prendre un petit caillou dans le but premier de le lancer en direction des pieds du docteur.
- Docteur Strange … ?
Demandais-je à voix haute, me demandant comment il pouvait se concentrer avec une telle force dans un endroit pareil.
"Have you ever looked at a tiger and thought you ought to cover it up? You are an exquisite creature, Raven. All your life the world has tried to tame you. It’s time for you to be free."
Il faudra que je me rappelle de faire plus confiance à mes homologues des Maîtres des Arts Mystiques, notamment dans des domaines comme la diplomatie où ils brillent probablement plus que moi. En tout cas, j’espère pour eux considérant l’élément de comparaison. Evidemment, ce qui me fait râler cela est moins mes futures difficultés à dialoguer que mes actuelles difficultés à ouvrir le dialogue. Visiter l’intérieur d’un volcan n’est pas particulièrement intéressant. De la roche, de la lave, cinquante nuances de ce qui sépare les deux. On se débrouille avec ça. Kupua ? Kupu a pas ? La prochaine fois je vais comme avec Fenris, j’énonce mon intention à l’entrée. Certes, je me serais pris une discussion avec du méthane, ce qui n’est pas la chose la plus agréable du monde, mais au moins n’aurai-je pas passer je-ne-sais-combien-de-temps à faire de l’apnée astrale dans la matière à la recherche d’un être qui vraisemblablement n’est pas chez lui. Tel l’image de l’Hadès de Disney, tournoyant dans la rivière des morts lorsqu’il a été vaincu par Hercules (chose idiote soit dite en passant, puisqu’en tant que maître des lieux il ne devrait pas trop avoir de mal à se sortir de là et que, comme l’a prouvé l’Hercules l’instant précédent, les immortels n’avaient pas de souci à nager dans le flux… alors même que les références mythologiques expliquent que de tremper un mortel comme Achille dans le Styx revient à le rendre immortel mais tremper les doigts de sa mère Thétis revient à la rendre mortelle) je m’égards. Dans ce volcan. Comment ont-ils fait la dernière fois pour pouvoir discuter ? Sans doute comme hasardé précédemment : en demandant. Ou alors… Ou alors Madame Pélé est déjà sous forme humaine à parcourir les activités de son île, pour peut qu’elle ne s’en soit pas ennuyée pour aller faire du tourisme ailleurs. C’est bien, je ne la connais pas encore qu’elle me gonfle déjà. Je dirais qu’on est à 0,5 télépathe, puisque, dans mes moments de fatigue, j’envisage de faire du télépathe l’échelle de mesure des choses qui me contrarient.
Je passe à 0,6 télépathe lorsque la Cape, avec laquelle je suis connecté depuis qu’elle m’a adopté même si les méandres de notre relation et de nos capacités à communiquer me sont encore étrangers (même si nous sommes bien plus en accord qu’au début, chose n’étant pas difficile), commence à m’avertir de quelque chose. Incapable de savoir si j’ai physiquement et psychiquement touché le fond, je commence à me dire que je fais le toucher au sens figuré. Je remonte donc jusqu’à mon corps pour voir ce qui se passe. Depuis la partie de la dimension astrale la plus superposée aux trois dimensions physiques, j’observe une trentenaire blonde de taille moyenne et à la silhouette en sablier tendant vers l’athlétique vêtue pour un sport qu’elle a dû faire pour monter jusqu’ici et n’aurait peut-être pas du faire considérant ce qui dépasse entre son haut court et son pantalon. Il me faut plusieurs instants à froncer mes sourcils astraux pour réussir à la reconnaitre en une expression de surprise que personne ne peut voir. Sauf la Cape, qui me fait coucou et avance vers moi – ou le vide, sans doute, du point de vue de Mystique – une petite pierre qu’elle a due attraper au vol pour me protéger. C’est bon, on est à 1 télépathe, là.
Déformant la barrière entre les dimensions physiques et l’astrale, j’ouvre un nexus dimensionnel cristallin alors que mes mains puis ma tête et l’entièreté de mon buste apparaissent dans les airs, parés d’un aspect fantomatique. Contrairement à l’Œil d’Agamotto, la Cape de Lévitation n’est pas présente sur ma forme astrale ainsi suis-je seulement en tunique et robe. Et transparent.
« Bonjour, dis-je avec une politesse contrainte qui se voit sur mon visage astrale, Mystique. »
Je marque une pause le temps d’une inspiration buccale irréelle mais néanmoins visible, trahissant ma volonté de ne pas laisser s’échapper la frustration de ma baignade astrale sur l’X-Woman.
« Je suis occupé. Elle aussi, et elle a des problèmes de concentration. Ne l’aider pas. Que puis-je pour vous ? »
La cape se mit soudainement à bouger et intercepta mon caillou au moment même où se dernier allait atterrir au pied du sorcier. La surprise se lut sur mon visage et un petit :
- Génial !
S’échappa de mes lèvres alors que je me penchais pour ramasser d’autres petits cailloux accroupie remplissant ma main, c’est en me relevant que ma surprise grandit encore et que sur le coup, j’en lâchais ma petite poignée de cailloux faisant face à un Docteur Strange … Mort ? Non. Impossible. Il aurait cuit sur place comme une grosse côtelette ? Comme j’étais entrain de le faire à vrai dire. C’était vraiment difficilement supportable.
- Bonjour …
Dis-je d’une voix pas trop sûre de moi observant, en long, en large, et … en travers au sens premier du terme l’apparition qui me faisait face. C’était vraiment étrange comme cette expression prenait sa vraie nature avec l’être désincarné qui me faisait face.
- Etes-vous mort ? Je dois appeler quelqu’un ?
Mince. Ça serait bien ma veine. Devoir porter le corps du sorcier suprême sur mon dos pour le descendre dans la vallée pour qu’il soit rapatrié rapidement auprès de sa famille et des gens qui l’aimaient pour des funérailles en bon et due forme.
Dans quelle galère m’étais-je encore fourrée !
En tout cas pour un mort il était loquace, enfin tout était relatif évidemment… Mais je voyais clairement sur son visage que je venais de le déranger et que je l’énervais prodigieusement. C’était comme si je venais d’être surprise au moment où j’allais faire une bêtise, comme une enfant. Le Docteur Strange donnait-il des punitions ? Des fessées ? Oh … Je ne serai pas contre ce qu’il. Merde Raven. Ne pense pas à ça. Je suis vraiment désespérante, ou désespérée comme dirait certains.
- Vous pouvez m’appeler Raven vous savez. Peu m’appelle Mystique. Surtout car ils n’étaient pas nés à l’époque où je me faisais appeler comme cela.
Enonçais-je avec un petit sourire, alors que je passais une main sur mon front qui commençait à dégouliner sérieusement en raison de la chaleur. D’ailleurs … N’importe quel être humain normalement constituer aurait trop chaud à cet endroit. Et un petit regard vers le corps, le vrai, celui en chair et en os de Strange confirma ce que je pensais.
- Que faites-vous ici ? Je ne m’attendais pas à tomber sur … quelqu’un comme vous. Enfin sur vous en partant en vacances à Hawaï et en gravissant ce volcan.
Mon regard amusé passa de la forme en dure de Strange à celle qui flottait dans les airs comme un fantôme. C’était un des pouvoirs de tous les sorciers où seulement de celui qui était… ou qui est le sorcier suprême ? Cela me fit d’ailleurs penser que je n’avais jamais eu l’occasion de le remercier de m’avoir sauvé la vie face aux terribles Wanda il y a de cela une semaine ou peut-être un peu plus.
- A quoi êtes-vous occupé si ce n’est pas à mourir ?
Un instant je pivotais sur moi-même comme pour chercher ce que qu’il pouvait bien faire dans les parages… C’était vraiment très « Strange » de le trouver ici. Je m’éclaircis la gorge qui commençait à devenir sèche en raison de la chaleur ambiante.
- Puisque …Vous êtes là. On pourrait aller … Enfin.
Je cherchais mes mots, je n’avais pas l’habitude mais en même temps je ne m’adressais pas souvent à des personnes de son standing.
- Vous ne trouvez pas qu’il….. fait…. très chaud …..quand même ?
J’avais perdu le fil de la conversation, mes yeux se mettant à papillonner rapidement. J’avais subitement chaud d’un coup. Encore plus que quelques secondes auparavant. Levant un bras pour observer ma main, ma vision se brouilla un peu.
- J’ai …
Je me mis à tirer sur le gros élastique du pantalon qui cachait mon ventre (douce illusion) comme si je cherchais à apporter de l’air frais. Puis à me ventiler (inutilement) avec ma main, alors que je perdais lentement mais surement l’équilibre.
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Alors que je continue d’évaluer la situation, je me rends compte que d’autres pierres se trouvent dans les mains de Mystique… face à l’interception de la première par la Cape, elle comptait vraiment en envoyer d’autres pour me faire réagir ? 1,5 télépathe d’agacement. Au moins l’X-Woman se les envoie-t-elle sur les pieds, ses pierres, plutôt que de me les envoyer. Je vois sa surprise, je vois son doute, je n’y réagis pas. Je n’en ai cure. Ne vit-elle pas avec un télépathe ? Les projections astrales sont de leur domaine d’évolution. Néanmoins, sans doute en ont-ils un bien meilleur contrôle que le mien et peut-être est-ce le nexus qui pose également problème. Ou pas, d’après ses questions sur mon état de survie ; qui m’arrache une élongation du visage alors que je me retiens de lever les yeux au ciel du mieux que je peux. Suis-je mort ? Doit-elle appeler quelqu’un ?
« Non, réponds-je avec rapidité et concision. Aux deux questions.
- Vous pouvez m’appeler Raven vous savez. Peu m’appellent Mystique. Surtout car ils n’étaient pas nés à l’époque où je me faisais appeler comme cela. »
C’est probablement mon cas, même si je suis né durant la période après laquelle elle est devenue la mutante la plus connue au monde pour avoir sauver le Président face à Magneto. C’est néanmoins hors de propos et je ne prends même pas la peine de lui répondre, plus concerné par le fait qu’elle commence à subir une suée consécutive à son ascension, la chaleur combinée du volcan et du soleil ainsi que la différence d’oxygène entre son point de départ probable et l’altitude actuelle. Si la chaleur est supportable, principalement grâce aux vents marins, la différence d’oxygène peut réellement amener à empêcher la récupération du souffle voire à faire un malaise. Les pertes de connaissances sont plus rares s’il n’y a pas panique et tachycardie conséquente mais je dois avouer ne pas être familier du facteur "femme enceinte". Pour l’heure, elle semble bien le vivre et passe de mon moi astral à mon moi physique avec un sourire.
« Que faites-vous ici ? Je ne m’attendais pas à tomber sur… quelqu’un comme vous. Enfin sur vous en partant en vacances à Hawaï et en gravissant ce volcan. »
Je respire, chose illusoire dans ma situation, et je me concentre sur le fait qu’elle tâche d’être amicale et polie pour ne pas être inamical et impoli envers elle. Ce volcan me gonfle profondément et cette Raven commence à en rajouter une couche mais je ne dois pas exploser contre elle. Néanmoins, mes yeux se plissent en la fixant puisque, outre l’évidence qu’elle énonce elle-même, j’ai déjà répondu à sa question précédemment. Elle s’en souvient d’ailleurs, comme le prouve son interrogation suivante :
« A quoi êtes-vous occupé si ce n’est pas à mourir ?
- Je tente d’être diplomate. »
Ce n’est pas dit avec agressivité, je suis fier de moi. Cependant, j’énonce un fait. Pour ne pas dire deux faits : je tente d’être diplomate avec une Kupua aux abonnées absentes alors qu’elle devrait se trouver ici ainsi qu’avec une X-Woman aux abonnées présentes alors qu’elle ne devrait pas se trouver ici. Sachant que cette constatation a également deux significations : cela n’est pas un lieu où elle est sensée être en tant qu’X-Woman ni en tant que femme enceinte.
« Puisque… Vous êtes là. On pourrait aller… Enfin.
- Je travaille, dis-je en croisant les bras sur mon torse et en dissimulant mes mains entre mes bras et mes flancs. Et vous ne devriez pas être ici.
- Vous ne trouvez pas qu’il… fait… très chaud… quand même ?
- Vous faites un malaise. Allongez-vous, levez les jambes. Gardez votre souffle sous contrôle.
- J’ai… »
2 télépathes.
Reculant dans le plan astral, mon corps astral disparait des dimensions physiques en un instant avant d’en faire de même de la quatrième dimension pour réintégrer mon corps physique. Je tourne alors je visage vers la malaisée tout en décroisant mes jambes. Mes pieds touchent le sol alors que des bandes d’une brume dorée apparaissent sur mon avant-bras le plus proche de Mystique puis je le tends en direction de cette dernière. Les photons s’en vont user de l’effet de photophorèse à son encontre, comme lorsque j’ai chassé la poussière de Greenwich Village juste avant l’attaque des soldats de Thanos ou que j’ai retenu les flots du lac proche de l’Avengers Facility durant la bataille contre la version alternative du titan fou. Ma simili-télékinésie me permet de soutenir la forme chancelante de la femme enceinte, qui en cet instant l’est définitivement plus qu’elle n’est X-Woman, afin de l’accompagner pour qu’elle s’allonge. C’est à ce moment que je réalise qu’elle ne possède pas de conteneur d’eau. Le chapeau est une chose, la gourde une autre.
« Asseyez-vous parterre, ordonne-je en me rapprochant de quelques pas, main toujours tendue vers elle afin de la soutenir avec la photophorèse. Allongez-vous parterre, rajouterai-je lorsqu’elle finira pas avoir les fesses au sol, chose qui arrivera en douceur puisque je l’accompagne magiquement. Relevez les jambes. »
Là encore, je la soutiendrai. Bien que ma demande puisse se satisfaire qu’elle remonte les genoux en collant ses talons à ses fesses, j’ignore ce qu’elle comprend de la situation et si elle obéira sans trop se poser de questions dans le cas où elle ne comprenne pas. Je m’attends à ce qu’elle se mette en position d’accouchement, cependant, et si elle commence à réellement accoucher je l’expédie directement au Sanctum d’Hong Kong puisque Maître Minoru, qui en est la gardienne, a déjà eu deux enfants. Néanmoins, avant de parler de malheur, tachons déjà que Mystique parvienne à une position plus posée avant de l’envoyer à un autre Maître des Arts… Mystiques… Sérieusement ? Bon, je vais reconsidérer la possibilité de l’appeler Raven.
Le bas de la Cape de Lévitation se recule un instant avant que je n’entreprenne de mettre un genou à terre pour faciliter le contact visuel avec l’X-Woman qu’il va me falloir faire parler afin qu’elle garde le contrôle de son souffle et, de préférence, conscience.
« Au risque de vous vexer, le docteur que je suis vous conseille de calmer vos ardeurs volcaniques et assimilées pour les mois à venir. N’est-ce pas le principe de vacances que de se reposer ? »
Non. Evidemment que non. Les activités des vacances permettent peut-être de se ressourcer mais rarement de se reposer. Après, j’ai peut-être tort. Je n’en prends pas.
« Quel était votre programme en venant ici ? »
Je reste volontairement vague sur le "ici", qu’il s’agisse du volcan ou de Hawaï. Mon objectif c’est qu’elle parle, ce qu’elle raconte ne m’intéresse pas vraiment. Si elle comprend quelque chose, c’est déjà bien. Si elle ne comprend rien, elle finira en PLS. Du côté gauche, puisque la veine cave inférieure se trouve du côté droit et que l’utérus risque de l’écraser si on la tourne du côté droit. C’est étrange de faire appel à mes connaissances de M.D., cela fait si longtemps.
Un malaise ? Non c’était tout bonnement impossible. Je n’étais pas du tout le genre de personne à m’évanouir. D’ailleurs à part utilisation d’armes contre moi je n’arrivais pas à me souvenir de la dernière fois où j’avais perdu conscience comme cela. A moins d’être blessée ou mise hors d’état par quelque chose ou quelqu’un.
Si bien, que, alors que mes oreilles bourdonnaient légèrement, je me sentis partir sur le côté et mes jambes céder sous mon poids dans une lenteur toute relative. Heureusement le magicien sort un tour de son chapeau et m’enlace avec une espèce de corde dorée pour accompagner ma chute et faire en sorte qu’elle s’effectue en douceur et non pas comme un boulet tombant au sol lourdement.
Pendant un petit moment je reste sans bouger essayant de lutter contre moi-même, les yeux un peu brumeux, je tente de me concentrer le plus possible sur ce que dis le fameux Docteur Strange. Heureusement que je suis tombée sur lui, et non pas sur … Je ne sais pas un héro qui s’appellerait Mécano Bruno.
Je relève la tête en devant lutter de toutes mes forces pour garder les yeux ouverts je ne comprenais que les mots « par terre » répété plusieurs fois, mais je ne demandais que cela fermer les yeux un petit moment par terre et repartir comme en 40.
Peut-être que j’aurai du boire plus d’eau. Pourtant…. Et mince ! Ma gourde !!! Je l’avais laissé un peu plus bas sur un rocher du volcan quand je m’étais arrêtée pour regarder les stupides humains faire griller des chamallows.
Et bien qui était stupide maintenant Raven hein ? Je te le demande bien.
Ma tête se pencha sur le côté puis en arrière alors que je me concentrais sans toutefois relever les jambes dans un premier temps ayant toujours ce bourdonnement dans mes oreilles. Toutefois les étoiles qui étaient venues s’incruster dans mon regard commençait à disparaitre alors que ma tête reposait contre le sol avec douceur, toujours grâce au petit tour de magie du Docteur Magic.
- Mhm ...
Je me mis alors à respirer lentement et profondément tout en posant naturellement les mains sur mon ventre. Trop tard pour le cacher. Vu ma tenue il était absolument certain qu’il avait vu que j’étais enceinte, il fallait être aveugle pour le louper. Après … Je ne suis pas sure qu’il était le genre d’homme à trop se soucier de ce genre de chose chez les femmes tant qu’elles ne lui annonçaient pas que les petits étaient les siens !
Levant les bras pour les mettre de chaque côté de ma tête toujours allongée sur le sol la réflexion du brun me fit légèrement tiquer. Et bien raté ! Il avait vu qu’un petit habitant me faisait sous le nombril.
- Je suis ….enceinte pas malade …
Répondis-je assez posément mais calmement mesurant les efforts qu’il me fallait pour parler, essayant de gérer ma respiration comme je pouvais espérant me sentir mieux rapidement. Je n’étais pas une femme de petite nature qui s’évanouissait pour un rien ! Ressaisis-toi Raven ! ne fait pas ta faible face à un homme qui te considère déjà surement comme … Comme quoi ? A vrai dire je n’en savais rien…
- Se reposer … découvrir… partir à l’aventure. Je suis venue … Seule.
Une petite grimace passa furtivement sur mon visage alors que naturellement, je redressais mes jambes pour les mettre dans un premier temps repliées les pieds bien au sol, puis dans un second temps, je les levais avec une agilité déconcertante aussi droite qu’un i, je finis par les écarter. Même si la position était surement assez gênante du point de vue du Docteur mais après tout il était médecin, il avait du en voir d’autres. D’autant que j’étais vêtue.
- J’ai un caractère … volcanique… lui aussi, comme mes ardeurs, …..donc je risque de …..ne pas me contenter….. du farniente à la plage. Boire des … Coktails ca va ….un peu mais …
Ajoutais-je en redressant légèrement ma tête pour observer le visage du brun entre mes cuisses. La situation était des plus cocasse. Je prenais le temps de faire des pauses régulièrement dans mon discours, en espérant gagner du temps allongé par terre ainsi…
A vrai dire j’avais du mal à l’admettre mais sans aide, si l’on devait me demander de me relever là tout de suite maintenant et de redescendre tout ce que j’avais grimper pour venir ici, je ne l’aurai pas fait.
La bouche pâteuse, à cause surement d’un début de déshydratation, je finis par reposer ma tête sur le sol en fermant les yeux pour profiter de ce petit moment avant de me faire rouspéter à nouveau par le grand manitou de la magie.
Après un moment, je repris la parole, les yeux toujours clos mais la respiration déjà plus correcte. Les jambes en l’air faisaient leur effet. Je relevais alors toujours la tête, les cuisses écartées pour permettre au sang de mieux circuler.
- Vous avez de la chance …. Travailler à Hawaï. Dans quel hôtel … logez-vous ?
Détourner la conversation pour éviter d’avoir le droit à la sempiternelle question « Seule, mais où se trouve le père de votre enfant ? » c’était bien mon but. Sauf que mon cerveau fonctionnait un peu au ralenti et que je n’arrivais plus vraiment à percevoir correctement le temps. Les pauses, les moments que je prenais pour gagner du temps en étaient-elles vraiment ? Je l’ignorai, mais je me doutais que je devais faire plus qu’énerver le grand Stephen Strange. Il devait certainement avoir bien mieux à faire que de s’occuper d’une gourde comme moi (qui avait oublié la mienne sur un malheureux rocher).
Et que venait-il faire ici en haut du sommet d'un volcan en activité ? Et en plus à méditer comme cela au sol. Vraiment très étrange. Les pratiques des sorciers étaient vraiment plus étranges que celles des télépathes. Et pourtant ... Depuis mon enfance j'avais quand même passé quelques années auprès de celui qui pendant longtemps était le plus grand télépathe du monde. Maintenant je ne savais pas vraiment ce qu'il en était, d'autant plus que l'Institut était devenu visiblement un refuge pour tous les télépathes en péril. Mais peut importait.
"Have you ever looked at a tiger and thought you ought to cover it up? You are an exquisite creature, Raven. All your life the world has tried to tame you. It’s time for you to be free."
Les Vents de Watoomb soutiennent mademoiselle Darkhölme correctement alors que celle-ci essaie de se relever, sans succès. Sa tête est au cœur de l’effort, pour continuer à me fixer d’yeux qui traduisent également sa lutte. La tête dodeline puis accepte finalement de se rendre, rejoignant la totalité du corps contre le sol sec. D’être resté en lisière de la caldeira était une bonne idée, cela limite la chaleur dégagée par les cônes et les fissures volcaniques qui clairsement celle-ci. Il n’en faut pas autant à la mutante pour être malaisée de chaleur mais c’est toujours un mal d’évité. De plus, l’entrainement à contrôler le souffle lui permet de se reprendre malgré la difficulté, évitant d’accroitre sa température corporelle et la tachycardie pouvant préfacer l’évanouissement. Bien.
« Je suis, commence-t-elle à répondre, non sans difficulté, après avoir levé les bras au-delà de son visage, enceinte pas malade… »
Je prends une inspiration buccale pour retenir un soupir. Je qualifierai bien la réponse de hors sujet mais elle est en plein dans le sujet de pourquoi mademoiselle Darkhölme n’aurait pas dû venir ici ; sur le volcan. Être enceinte n’est pas une maladie, non, mais être inconsciente non plus ; chose qui s’applique tant à l’état que l’on essaie d’éviter physiquement, la concernant, qu’à l’état mental dans lequel elle était en venant ici. Se reposer, découvrir, partir à l’aventure ; c’est un début de réponse qui me convient mieux mais qui reste dans la problématique précédente. Que mademoiselle Darkhölme soit venue seule est une précision dont je ne saisis pas la pertinence. Néanmoins, si je pense d’abord qu’elle est capable de prendre des vacances sans assistance puisqu’elle doit savoir se gérer même en étant enceinte, je me rends compte avant la fin de ma pensée qu’elle n’est justement pas capable de se gérer ainsi et que partir accompagnée aurait pu être une bonne idée. Après, s’il faut que je la renvoie à l’Institut, je n’aurai besoin que d’un tour de main pour le faire.
Avant d’en arriver là, cependant, elle redresse enfin les jambes. Genoux d’abord, ce qui nous évite une position gynécologique que je pourrais plus aisément soutenir de ma brume lumineuse que de mes yeux, puis jambes droites ensuite, lesquelles m’amènent à cligner des yeux par réflexe pour cacher que je les lève aux cieux. Puis, comme elle ne me voit plus, elle écarte les cuisses. Je dirais bien que je suis blasé mais la gêne gêne cela, justement. Le pantalon de sport est près du corps et me laisse l’impression que la partie la moins moulée est son ventre laissé visible par-dessus lequel elle tâche de me voir. Toujours une main tendue pour transmettre l’énergie lumineuse, je me place néanmoins de biais en penchant la tête en arrière.
Elle a un caractère… volcanique. Elle fait bien d’avoir du mal à le dire même s’il est vrai que les volcans passent la plupart de leur existence à ne rien faire. Concernant ses ardeurs, force est de constater qu’elles l’ont tant chauffée qu’il faut la refroidir à présent. Mon visage se tourne légèrement vers elle alors que je la regarde avec un sourcil levé tâcher de me parler de la causalité des deux points précédents : donc elle risque de quoi ? Tomber dans les pommes ? Marcher sur son égo ? Ne pas se contenter de ? Tomber dans les pommes ? Je n’aide pas pour l’accouchement. Marcher sur son égo ? C’est pourtant bien parti, juste qu’elle ne le réalise pas encore. D’un autre côté, il y a quelque chose de touchant à la voir refuser des limites que son propre corps lui impose. Après, ce qu’elle ne risque pas de faire c’est ne rien faire à la plage, justement. Outre qu’il y a pleins d’endroits où il est possible de ne rien faire afin de varier les plaisirs, c’est un extrême opposé à gravir un volcan ; même si, il faut le reconnaitre, cette île semble passer très vite de la plage au volcan et inversement. Boire des… cocktails ça va ? Un peu mais ?
« Sans alcool. »
Ce n’est pas une question pour m’assurer qu’elle ne le fasse pas, c’est un rappel à ce qu’elle doit déjà savoir. A nouveau, elle cherche à me fixer. Est-ce un moyen de me signaler qu’elle attend de moi plus que deux mots ? Je ne sais quoi lui dire outre que c’est elle qui doit parler pour garder connaissance mais les rappels à ce qu’elle sait déjà ne m’aideront pas à paraitre agréable, ou plutôt supportable, sachant que je ne fais pas cela pour être moralisateur. De voir mademoiselle Darkhölme ainsi, se calmant face au malaise et non les jambes en l’air et les cuisses écartées à me présenter son intimité, me calme également. Me gêne, oui, mais me calme aussi. Il faut que je fasse attention sinon on va finir par comprendre que je suis plus empathique que je n’aime à l’être. Même énervé par les obligations.
Darkhölme ferme les yeux et repose sa tête contre le sol, me faisant m’avancer avec un instant de décomposition par crainte qu’elle ne perde conscience. Il n’en est rien alors je recommence à faire la gueule, pour garder mesure. Au moins suis-je désormais à son côté et plus son dessous, géographiquement parlant. Je rappelle d’ailleurs à moi ma main et la brume lumineuse disparait, m’accordant un regard à mes doigts scarifiés. Ils ne tremblent pas.
« Vous avez de la chance, finit-elle par reprendre en levant de nouveau la tête à défaut de le faire des paupières, m’amenant à soupirer de désaccord. Travailler à Hawaï. Dans quel hôtel… logez-vous ?
- Aucun, énonce-je simplement. Dès que j’ai fini, je repartirais. »
Ce qui risque de ne pas arriver tout de suite, entre la mauvaise volonté de la Kupua et la bonne volonté de la mutante. Pour peu que j’écoute une petite voix paranoïaque dans mon esprit, je me dis que la métamorphe surnaturelle serait probablement capable de se jouer de la situation avec la métamorphe humaine si elle en venait à s’ennuyer. Espérons que ce ne soit pas déjà le cas, j’ai d’autres choses à faire. Toujours. Ce qui est épuisant.
« S’il vous faut un coup de main pour repartir, que cela soit ici ou à votre hôtel, je peux le fournir. »
Là encore, je sais me projeter dans le futur mais je le propose néanmoins. Mieux, je le propose avec bienveillance même si le ton est assez neutre… ce qui est un net progrès vis-à-vis du "je vous expédie à Hong Kong pour qu’ils se démerdent avec vous" auquel j’étais dans les minutes précédentes. Heureusement, mon bon sens m’a fait taire ce commentaire.
« Néanmoins, attendez de vous sentir mieux pour essayer de vous relever. Merci. »
Pas que je n’ai pas envie de lui tendre la main pour le faire mais, outre que je n’ai effectivement pas envie de forcer sur mes mains pour des raisons de douleurs inutiles, la photophorèse pourra l’aider comme précédemment.
J’entrouvre la bouche afin d’essayer de la relancer sur quelque chose puis m’arrête là face à l’absence d’idée. Elle n’a plus l’air prête à tomber dans l’inconscience, à défaut d’avoir fini son malaise, ainsi peut-on peut-être profiter d’un peu de silence. Ou pas. L’un des avantages qu’il y a avec les chirurgiens, c’est qu’on sait toujours de quoi parler à nos patients. Avant l’opération, c’est ce qu’on va leur faire une fois ouvert. Après l’opération, c’est comment cela s’est passé. Et pendant l’opération, ils sont sous anesthésie et on peut écouter de la musique. Le meilleur moment. Trouvé.
« Qu’aimez-vous comme musique, mademoiselle Darkhölme ? »
—08/08/2024 VACANCES. Quelle question étrange. Me demander mon style de musique alors que je n’étais visiblement pas dans la meilleure de mes formes était assez … bizarre …. Mais cela voulait-il dire que tu cherchais à me faire la conversation ? Je pensais que tu étais plus du genre à m’expédier le plus rapidement possible ailleurs que sur ce flanc de ce volcan qu’à me faire la conversation mais …. C’était assez surprenant et plutôt agréable. Comme quoi. Tu devais très certainement te donner un genre de dur à cuire cérébral égoïste et égocentrique alors qu’en vrai tu étais peut-être … Je disais bien peut-être plus sympathique que la terrible réputation qui te précédait. Et moi d’ailleurs… quelle était ma réputation ? Que pensais le monde de moi ? Pas grand-chose vu que personne ne savait que j’avais atterri ici, mais … A une époque, oui, il y a de cela plusieurs dizaines d’années, je connaissais ma réputation, et bien que je la savais positive pour des milliers de mutants qui vivaient dans la peur et la solitude, elle ne me rendait pas forcément fière. J’avais plus l’impression d’être piégée par mes actes, certes héroïques mais … C’était depuis ce jour là que je ne me présentais plus sous ma forme bleue. Mutante et fière de l’être. Je l’avais dit, répété et usé jusqu’à l’os mais je n’étais plus la même.
Alors, oui, cette question sur la musique me fit pousser un petit soupire qui n’avait rien du tout d’agacé car il était contenu avec le début d’un rire, et alors que je rouvrais les yeux, une de mes mains vint masser une de mes tempes. Je n’avais pas remarqué la douleur dans ma tête jusqu’à maintenant.
- Je suis … Assez vieux jeu… étant donné que… je suis née dans les années 1940. Musique classique… jazz… blues … et les musiques des années 80. J’ai beaucoup plus… de mal …. avec les musiques dites modernes… Mais… je dois avouer que… je ne prends pas forcément le temps… d’écouter toutes les nouveautés… de ce siècle, mais je suis sûre que… je trouverai de quoi … me satisfaire. Et vous… Docteur ?
Je parlais lentement, avec des pauses pour contrôler mon souffle. A nouveau mes yeux se fermèrent pour que je puisse tenter de reprendre encore mes esprits. Lentement mais surement je redescendis mes jambes pour qu’elles retombent au sol, et je commençais à me sentir légèrement mieux. Assez pour en tout cas tenter de me redresser et au moins de m’assoir.
Mauvaise idée.
Je fus trop rapide et une grimace assez prononcée s’afficha sur mon visage quand je fus à nouveau positionnée, assise, les jambes repliées et écartées. Le front posé sur mes genoux, je soupirais encore à nouveau, gémissant très légèrement sous la douleur dans ma tête. « Attendez de vous sentir mieux pour essayer de vous relever. Merci. » Oh. Je crois que je n’avais pas assez attendu au vu de la douleur dans ma tête et des petites étoiles qui passaient dans mon regard mais je fis comme si ne rien n’était, fermant les yeux encore et encore.
- Oui … Je sais je suis vieille … Mais si vous me dites que… je fais… une grossesse gériatrique je vous jure… que je …
Était-ce vraiment le moment de faire une petite plaisanterie ? Peut-être oui, après tout. Tu avais commencé avec ta question sur la musique après tout. Alors oui peut-être que tu faisais cela juste pour masquer ta gène mais j’avais du mal à comprendre face à quoi tu pouvais être gêné. Ma présence ? Ma tenue ? Ma position ? Tu ne pouvais pas être si prude ! Tu étais un médecin mondialement connu avant ton accident, et peut-être encore plus après avec ta maitrise de la magie. Et tu avais forcément fait un stage en obstétrique et gynécologie. Et puis mince. Je n’étais pas non plus nue.
Au final tu avais même de la chance que je sois sous ma forme blonde, et non pas la bleue. Ou plus exactement « la première femme nue que pas mal de jeunes gens ont vue sur papier » comme allait le dire dans un futur plus ou moins proche, une dizaine de jour, une certaine nerd richissime qui pensait tout savoir mieux que tout le monde.
- Je crois que … Je vais avoir… besoin d’un petit coup de main… pour retourner dans ma chambre… Qu’est ce que vous… faites ici… en fait précisément ? Quel genre… de travail exactement ? Je pourrais… peut-être … vous aider….
J’hésitais à rajouter qu’il n’y avait rien de secret défense et que nous étions dans le même camp. D’ailleurs nous avions tous les deux affrontés ensemble la sorcière rouge et la sorcière sombre alors tu pouvais bien me dire la raison de ta présence ici non ?
Entre deux pauses de respiration et d’inspiration profonde, je décollais mon front de mes genoux pour poser mes yeux bleus dans le gris des tiens, avec un éclair de malice pouvant s’y lire malgré le fait que mon regard n’était pas aussi vif que d’ordinaire.
- Je pourrais … peut-être … vous aider ? … Le maitre des arts mystiques … et Mystique…
Lançais-je avec une petite voix amusée alors que je lâchais ma tête en arrière après avoir soutenu ton regard pendant un très long moment. Les yeux encore clos à nouveau. Le silence ne me dérangeait pas vraiment entre nous deux.
- Cela m’évitera de boire trop de cocktails …. Sans Alcool bien entendu.
Fis-je remarquer encore avec amusement en redressant ma tête. Si je n’avais pas fait de remarque tout à l’heure sur ta recommandation digne d’un médecin, je ne pouvais pas m’empêcher de faire une petite réflexion sur ce point tout de même.
- Mais si … on en parlait … autour d’un verre… justement ?
Une main glissée dans mes cheveux pour passer une mèche derrière mon oreille en tendant la main vers toi avec un petit sourire un peu timide alors que je bougeais les doigts un a un comme pour me prouver à moi-même que j’étais capable de bouger.
- J’aurai juste besoin… d’un peu … d’aide…
Demander de l’aide. C’était quelque chose que je faisais très rarement. J’étais plutôt le genre de femme à me débrouiller toute seule et à ne compter que sur moi-même mais … Je ne me sentais pas forcément capable de le faire dans l’immédiat. Si tu étais pressée il fallait que je me dépêche moi aussi.
"Have you ever looked at a tiger and thought you ought to cover it up? You are an exquisite creature, Raven. All your life the world has tried to tame you. It’s time for you to be free."
Un soufflement buccal est la première réponse que j’ai à ma question incongrue. Considérant les associations d’idées qui m’ont amené à la poser, cela n’a rien de surprenant. Pas plus que considérant la question elle-même. Elle peut être amusante à plus d’un titre, jeu de mot volontaire, mais je ne suis pas réellement la bonne personne pour ça.
Darkhölme est "assez vieux jeu". Avec pour explication son âge. Quatre-vingt ans, en effet. C’est aisé à oublier du fait de leur bond temporel mais également de ses capacités de métamorphose. Elle devrait avoir quarante ans, elle en a entre vingt et trente. Physiquement, du moins. Classique, jazz, blues… et les musiques des années 80. J’acquiesce sans mot dire, satisfait qu’elle parle autant et qu’elle gère son souffle parfaitement. Ce n’est pas fluide mais c’est régulier et elle reste là. Evidemment, je pense cela au moment où elle commence à avoir du mal… pour dire qu’elle a beaucoup de mal… avec les musiques modernes. Le modernisme est un courant intéressant mais elle ne doit pas en parler en tant que tel : c’est tout ce qu’elle découvre depuis son arrivée ici et tout particulièrement les tubes de ces dernières années. Il y a une certaine puissance et un optimisme dans les années 80, une capacité à créer des chansons qui sont restées dans les mémoires, là où l’accélération de la mode et la sur-diversification de la production amène aujourd’hui à des choses plus éphémères et moins marquantes. Evidemment, il s’agit de tendances générales et non d’un absolutisme mais l’arrivée d’internet fait que tout le monde peut publier n’importe quoi alors que les années 80 avaient le filtre du professionnalisme pour assurer une qualité. Je ne dirais pas qu’ils faisaient plus de chansons que d’argent mais aujourd’hui beaucoup donnent l’impression de faire les chansons pour l’argent. Encore une fois, c’est une généralité. Il est impossible d’étudier totalement la musique ; comme n’importe quel autre domaine. De plus, contrairement à la lecture, écouter une musique prend le temps de ladite musique.
« Et vous… Docteur ?
- Je pense aussi que vous trouveriez, acquiesce-je bien plus rapidement qu’elle avant de marquer une pause. J’apprécie les classiques mais je tâche d’écouter de tout, lorsque j’ai le temps. »
Depuis combien d’années n’ai-je plus le temps ? Plus le temps pour la musique ? Plus le temps pour l’opéra ? Plus le temps pour ce qui animait ma vie avant l’accident… peut-être celui-ci. Oh, la musique y a un peu survécu. Un peu. Le reste, non. Pour certaines choses, ce n’est pas plus mal. Pour d’autres, peut-être. Je n’ai pas le temps de m’y attarder. De manière générale comme présentement.
Darkhölme tente de se relever. J’aurai dû le voir venir. Même si elle a fermé les yeux et baissé les jambes, d’une façon maitrisée et non parce qu’elle perdait conscience, elle n’en a rien perdu de son inconscience et de son refus de ses limites. Cela va un peu mieux ? Ou plus exactement, cela ne va pas trop mal ? C’est reparti ! Faux départ pour la mutante, donc, qui s’entête évidemment. Je la regarde faire avec un soupir. Bras le long du torse, visage penché vers l’avant et dos droit, je reste de biais alors qu’elle prend une position de repos qui, je l’espère, n’appui pas trop sur son ventre. D’après le papillonage de ses paupières, elle se retrouve une fois de plus en difficulté. Canalisant la lumière dans mon bras extérieur, je suis prêt à la rattraper magiquement s’il le faut mais je ne dis rien.
« Oui… Je sais je suis vieille… Mais si vous me dites que… je fais… une grossesse gériatrique je vous jure… que je… »
Je ne prends pas la peine de répondre. Je comprends ce qu’est l’exigence envers soi-même mais je ne saurais partager la dépréciation personnelle qui amène Darkhölme à ainsi se pourrir elle-même. Evidemment, j’ai trop d’égo pour cela et peine à comprendre comment on peut en avoir aussi peu au point d’avoir besoin de s’enfoncer comme elle le fait. Après, elle parle ; l’objectif est donc accompli. Néanmoins, si c’est pour avoir du soutien moral, je suis mauvais à cela. Mieux vaut ne rien dire, au risque d’empirer les choses. L’âge apporte la connaissance des limites et, considérant combien elle écoute les siennes, Darkhölme fait plus son âge physique que réel sachant que celui-ci est différent que son âge théorique. Cela étant, il me suffit d’un entrainement martial avec Wong et j’ai aussi l’impression de faire le double de mon âge, chose encore plus problématique qu’il est plus vieux que moi. La quarantaine, surement. L’âge où les choses commencent à aller de travers mais où il y a encore du suspens sur quoi.
« Je crois que… Je vais avoir… besoin d’un petit coup de main… pour retourner dans ma chambre… Qu’est-ce que vous… faites ici… en fait précisément ? Quel genre… de travail exactement ? Je pourrais… peut-être… vous aider…
- En effet, vous le pouvez, acquiesce-je rapidement en attrapant l’Anneau de Téléportation à l’une de mes ceintures pour le lui présenter dans le plat de ma main intérieure, la plus proche d’elle.
- Je pourrais, reprend-t-elle après avoir relevé sa tête de ses genoux pour me fixer avec une espièglerie fatiguée. peut-être… vous aider ? »
Déjà proposé, déjà répondu, prenez l’Anneau.
« Le maitre des arts mystiques… et Mystique… »
Je prends une inspiration et retiens un soupir alors qu’elle s’esclaffe en silence ; évidemment, il a fallu qu’elle y pense. Tant qu’elle ne perd pas un mot dans son jeu de mots, cela ira. Sinon, elle aura de quoi s’amuser avec les ordres que je peux donner. Pour l’instant, ils sont silencieux : l’Anneau ? Evidemment encore, elle referme les yeux encore. 2 télépathes. Encore.
Ça lui évitera de boire trop de cocktails "sans alcool, bien entendu". Répond ? Répond pas ? Dans le doute, la prudence. J’expire par le nez juste avant qu’elle me propose, difficilement, d’en parler autour d’un verre. "Justement". Souffrirait-elle de la solitude ? Ai-je été plus agréable que je ne le pensais ? Lorsque Darkhölme remet une mèche de cheveux derrière son oreille, je pince les lèvres en la fixant avec gravité. Ensuite, seulement ensuite, elle me tend sa main avec un sourire… inattendu. Je l’aurai pensé certes fatigué mais fatigué provoquant, pas fatigué gêné. D’une gêne modérée, comme la mienne tout à l’heure face à sa position somme toute plus descente que ma première rencontre avec Fenris, mais d’une gêne tout de même. Le thème est pratiquement le même, cependant, mais ce n’est pas moi qui invite cette fois.
« J’aurai juste besoin… d’un peu… d’aide… »
Dans quel ordre faire les choses ? La décision est vite prise. Me redressant, je me place sur le côté de la main tendue et me penche pour lui passer deux bagues aux doigts ; l’Anneau de Téléportation.
« C’est sans engagement, dis-je avec sarcasme mais un sourire malgré tout avant de me reculer d’un pas et de passer dans le dos de Darkhölme. Pensez fort à votre chambre d’hôtel, s’il vous plait. »
Après quelques secondes de silence et d’attente, je me concentre pour lier l’Anneau de Téléportation à l’air autour de mes propres index et majeur. La canalisation me permet d’inverser leurs places, ne laissant que de l’air autour des doigts de Darkhölme et m’emparant de la Relique pour prendre la position d’invocation du portail étincelant. Celui-ci arrivé, s’il correspond à une chambre (d’hôtel ou autre, qu’importe), j’attirerai le portail jusqu’à moi pour que Darkhölme et la terre sur laquelle elles se trouvent soient emportées jusqu’à la pièce. Suite à quoi je n’aurai plus qu’à lui souhaiter un bon séjour et refermer le portail.
« N’ose nullement, rugit une explosion de méthane derrière moi alors que j’avance le buste pour ma salutation, m’amenant à me retourner avec une posture défensive.
- Vous étiez là, répond-je en me reprenant et tâchant de baisser ma garde alors qu’une forme féminine de roche en fusion est apparue, une chevelure de verre tout aussi en fusion jouant au gré du vent.
- Et tu n’as jamais été aussi peu ennuyant que depuis qu’elle est là. La blonde et le coincé… Prometteur.
- Pardon ? »
Je tâche de modérer ma surprise et l’expression de mon agacement mais mes points sont fermés. De savoir qu’elle m’a laissé crapahuter dans son volcan juste pour le plaisir me déplait au plus haut point, à défaut de me surprend. Quand aux dires… 5 télépathes.
« Tu veux une audience ? Fais-moi rire.
- Je tâche d’être diplomate, pas ridicule.
- Je me moque de comment tu le fais, tant que tu le fais. »
Je m’apprête à répondre lorsqu’elle lève une main pour me faire le signe d’aurevoir, tout son avant-bras s’embrasant avant qu’elle ne le pointe dans ma direction. Mon réflexe me fait avancer mon portail étincelant et le refermer précipitamment alors qu’elle me projette une boule de lave. Je tombe d’un centimètre avec la terre arrachée par le portail et celui-ci se clos avant que le projectile n’approche trop prêt, m’enfermant dos à Mystique dans la chambre d’hôtel de celle-ci.
Une grande inspiration me permet de contenir ma frustration et ma fatigue mais mes mains tremblent visiblement. Une connasse, il fallait que la Kupua soit une connasse. Je déteste les divinités.
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