[Terminé] Je vais t'offrir un monde

17 JUILLET 2024

Sous l’inquiétude apparente de ses traits, Remy avait tout d’abord tenté de le rassurer en minimisant les faits : ce qu’il avait cru apercevoir dans le rétroviseur devait être sans grande importance, mais le joueur d’échecs s’était tout de même retourné pour jeter un regard en arrière, voulant s’assurer qu’ils n’étaient pas la cible d’un… De quelque chose ou de quelqu’un, ce qui pour l’instant n’était pas le cas.
Un bref soulagement s’installant alors dans son esprit fatigué, Ezekiel avait adressé un grand sourire à son ami en se sentant même un peu idiot sur le moment… De quoi avait-il peur, au juste ? Ce n’état pas comme s’ils pouvaient être attaqués, ils ne faisaient rien de mal…

« Ici la Police Galactique ! Vous êtes en état d'arrestation pour vol de pièces détachées ! »

Coupant le discours presque théâtral de Remy, qui faisait sourire d’amusement son jeune bras-droit, une voix autoritaire résonna dans l’habitacle en les sommant de s’arrêter et les accusant de vol (ce qui était l’information la moins surprenante pour l’instant) ; où et comment furent les premières questions qui passèrent dans l’esprit du plus jeune qui, cherchant d’abord la source de ce bruit, avait baladé ses iris affolés sur les rétroviseurs avant de finalement poser les yeux sur l’ombre du gros vaisseau positionné au-dessus d’eux, en penchant sa tête contre la fenêtre froide. Atterré de la situation, il avait froncé ses sourcils en se retournant vers Remy, qui lui souriait d’un air espiègle. Oh… Ezekiel connaissait bien ce sourire…

« Tu es sûr que… »

Trop tard. Remy avait déjà fait rugir le moteur en essayant d’échapper à cette police galactique, leur voiture volante basculant dans un virage serré pour passer entre deux immeubles, obligeant Ezekiel à se cramponner à son siège. Il ne savait pas trop s’il appréciait la tournure des événements ou non, mais il n’avait pu s’empêcher de se mettre à rire, d’un rire à la fois frénétique et incontrôlable. Peut-être que l’adrénaline, la situation tout à fait ahurissante, faisait jaillir un excès de sentiments contenus qui débordait à présent, quand bien même aurait-il dû s’inquiéter de finir une nouvelle fois à l’hôpital.

« Tu es définitivement le plus fou de nous deux ! »

Lança-t-il d’une voix forte et joyeuse en se retournant sur son siège pour voir si le fameux vaisseau les suivait encore, en espérant l’avoir semé.

17 JUILLET 2024

La virée épique prenait une tournure encore plus saugrenue qui aurait peut-être dû l’affoler mais, grisé par la notion aussi frêle qu’euphorique du danger s’offrant à eux, Ezekiel ne pouvait s’empêcher de sourire avec un prompt amusement, tout en mordillant le coin de sa lèvre, encore quelque peu éraflée par les coups de poings reçus. Nervosité et inconscience se côtoyant au sein de son esprit, il s’était retourné à de multiples reprises pour apercevoir le vaisseau planant tout près d’eux, se demandant bien quel effet cela faisait d’être à l’intérieur d’un tel engin, d’en être le pilote… Probablement que lui foncerait droit dans un immeuble sans le vouloir mais, loin de ces considérations, il se laissait volontiers rêver quand Remy, lui, jouait la carte de la prudence.

Tournant son menton en direction de son acolyte, Ezekiel avait pris une fine inspiration tout en lançant un regard dans le rétroviseur, se demandant pourquoi le Prince des Voleurs abandonnait si facilement la course-poursuite. Les sourcils faiblement froncés au-dessus de ses yeux interrogateurs, il lui avait néanmoins adressé un sourire réconfortant, qui signifiait qu’il était déjà très heureux d’avoir pu partager ce moment incroyable en sa compagnie.

« Merci. Pour ça. »

Pour « tout » aurait été plus judicieux mais il était certain que Remy allait comprendre le sens de son message. Enfin, la voiture s’était posée sur le toit de l’immeuble, obéissant aux ordres donnés par la police de l’espace. Maintenant, restait à savoir comment la rencontre allait se dérouler… En voyant Remy sortir son jeu de cartes, Ezekiel avait un instant baissé le menton en mordillant l’intérieur de sa joue, ses doigts jouant nerveusement avec la bordure de son t-shirt.
Était-il en état de se téléporter ? La question, surprenante, lui avait fait redressé un visage dépourvu d’expression. Surtout surpris, il se sentait pourtant principalement inquiet. Il était encore fatigué, trop faible même s’il refusait de l’admettre, alors ses pouvoirs devaient en pâtir comme le reste mais…

« Oui. Mais pas loin et… » Captant le regard de Remy, il avait légèrement arqué l’un de ses sourcils en précisant, d’une voix ferme : « Pas sans toi. »

Mais il fallait espérer que cette rencontre se déroule du mieux possible… Soufflant par la bouche, il avait ouvert la portière sans sortir de la voiture pour l'instant, puisqu’éprouvant de grandes difficultés à marcher, attendant de voir comment était la fameuse police de l’espace.

17 JUILLET 2024

Remy était sûrement agacé de l’opiniâtreté (néanmoins attachante) dont faisait preuve son acolyte blessé ; cela se voyait sur son visage, véritable peinture qui exprimait à la fois le désespoir et la résignation en un seul coup de pinceau. Et pour cause, le Prince des Voleurs savait que c’était peine perdue : aucune négociation était possible avec le bouclé qui, observateur silencieux de sa figure soupirante, lui avait adressé un sourire qui se voulait mutin pour tenter de l’attendrir… Durant quelques secondes à peine.
Les fameux flics de l’espace se posant à leur tour au sommet de l’immeuble, Ezekiel avait d’abord froncé ses sourcils en raclant discrètement sa gorge, plissant ses paupières pour mieux apercevoir l’engin impressionnant qui leur faisait face, devenant tout à coup plus sérieux. Mais lorsque les deux flics sortirent de leur vaisseau, le mutant avait espacé ses lèvres de quelques degrés, surpris de découvrir un… Une créature ressemblant à un arbre et marchant sur deux troncs-jambes, ainsi qu’un petit raton laveur solidement armé. Bien trop éberlué pour remarquer la nervosité de Remy, Ezekiel s’était contenté d’observer les deux policiers jusqu’à ce que la voix de son ami se fasse entendre dans l’habitacle.
« Surtout ne bouge pas, reste dans la voiture. »
Non, sans blague ? Levant légèrement ses mains tout en secouant son visage de gauche à droite, il l’avait toisé avec un air de « où veux-tu que j’aille dans cet état ? » avant d’appuyer son coude contre la portière, son poing appuyé contre son front tandis qu’un soupir passait la barrière de ses lèvres.
S’ensuivit alors une conversation des plus constructive entre Remy et l’homme-arbre, dont la réplique était quelque peu redondante. Sur la dernière, Ezekiel l’avait même mimé de ses lèvres mots pour mots avant de lancer un sourire amusé vers Remy qui, lui, perdait un peu patience. Lorsque ce dernier frappa la tôle de la portière avec une main furieuse, Ezekiel avait presque sursauté sur son siège avant de se tourner vers celui-ci, glissant sa main sur son bras pour tenter de le calmer par quelques pressions exercées sur celui-ci, bien qu’il savait sa quête ardue :
« Remy… »
Souffla-t-il d’une voix presque douce, bien que les soupçons de la nervosité se tendaient déjà dans ses syllabes et sur son visage.
« Essayons de gar… De garder notre Calme. »
Le tien, surtout, si possible. Un léger sourire complice, un discret haussement de sourcil après un bref hochement de la tête pour le persuader, il poursuivit alors :
« Laisse-moi essayer. »
Sans lui laisser le temps de répondre ou de réagir, il s’était tourné vers sa portière, abaissa la vitre et allongea son bras pour que sa main puisse remuer à l’extérieur, saluant de loin l’homme-arbre avant d’enchaîner à son attention, d’une voix étrangement joyeuse au vu de la situation :
« Je s’appelle Ezekiel ! »
Fraterniser avec l’ennemi ; comme aux échecs, il fallait se rapprocher de l’adversaire pour pouvoir capturer ses pièces. S’adressant ensuite au raton-laveur équipe, encore dissimulé sous la voiture, il lui fit :
« Eh ! Et si on parlait comme… des… hommes…? »
Sa voix s’était faite de plus en plus faible au fur et à mesure que son esprit avait réalisé la maladresse de son propos ; pressant alors ses lippes l’une contre l’autre tout en agrippant ses deux mains sur le rebord de la fenêtre, il avait essayé de rattraper sa bévue.
« Après tout, l’homme est un animal ! Parlons entre animaux. »
Bon. S’il ne sortait pas de dessous la voiture pour discuter, il le ferait pour lui tirer dessus.