[Terminé] You should be scared of me

30 MAI 2024 AVEC ROCKET RACCOON

La terreur était retombée, mais le mal, à présent libéré, perdurait sous sa peau. Derrière le voile de ses paupières, ses yeux s'agitaient frénétiquement : en silence, les ténèbres de feu, obscure lumière brûlante, consumaient ses pensées pour les réduire en cendres, ternissant jusqu'à l'éclat discret de son âme relayée dans les tréfonds de son esprit affaibli. Était-ce un rêve ? Elle avait l'impression que c'était la réalité, tout semblait si vrai... Elle était là, au milieu d'un vaste décor sombre, comme plongée dans une nuit qui n'admettait aucune clarté, pas même celle des étoiles. Autour d'elle, le vent hurlait, le sol tremblait, son cœur s'affolait en trépignant d'une colère noire, une colère dévorante qui faisait gronder chacun de ses muscles mais qui ne semblait pas être la sienne : la colère était trop grande pour qu'elle puisse la contenir, elle envahissait chaque recoin de son ventre pour le tordre dans une douleur affreuse, son sang semblait se changer en de la lave en fusion et ses yeux, ses yeux d'ordinaire si doux, étaient à présent d'une férocité sans égale. Elle était dévorée par la colère, gangrénée par une ébullition qui rongeait jusqu'à l'essence même de ses os, qui grignotait chacun de ses élans résistants. Elle essayait de résister, de toutes ses forces mais, il y avait un Autre. Il y avait quelque chose, quelque chose de grand, quelque chose de brûlant, comme un fer chaud qui tourbillonnait entre ses organes pour les envahir, quelque chose qu'elle avait longuement pressenti sans vouloir se l'avouer. Il était là. Il avait brisé les barreaux de sa cage pour exploser, sortant de sa cachette comme un volcan qui se réveille : que le feu de sa colère se répande, que brûle ceux qui ont voulu l'emprisonner, que périssent ceux qui voudront le tuer !
Ces mots n'étaient pas les siens, mais ils avaient été articulés de sa voix. Sous le grand arbre qui surplombait le décor, elle se voyait dans un miroir sans véritablement se reconnaître. Elle discernait les contours de son visage, la couleur de ses cheveux, la justesse de ses épaules menues mais... Ce regard acerbe. Ce sourire pernicieux. Non... Ce n'était pas elle. Ce ne pouvait pas être elle. Tendant une main tremblante vers le miroir, comme pour effleurer du bout des doigts ce reflet enrôlé de rage, mais un sursaut avait soulevé son corps, l'obligeant à se réveiller. Enfin.

Il n'y avait aucune onde malveillante sur son corps. À la surface, le lac blanc de sa peau était immobile, calme, silencieux... Trompeur. Il était impossible de deviner la tornade sombre qui animait ses pensées tant son visage était resté impassible, figé dans le secret d'une ombre qui se dissimulait volontairement. S'éveillant lentement, Jean avait ouvert ses paupières en papillonnant longuement des cils, sa vue encore brouillée lui laissant deviner qu'elle se trouve sous un plafond gris, mais qui ne lui est pas vraiment familier. Fronçant alors ses sourcils, Jean grimace légèrement tout en essayant de se redresser une première fois en prenant appuie sur ses coudes, mais un vertige particulièrement douloureux afflige son crâne, l'obligeant à se rallonger en apportant une main tremblante à son front brûlant. Fiévreuse d'un mal dont personne ne saurait la guérir, elle a l'impression d'avoir dévalée une pente de cailloux pointus. Tout son corps est douloureux mais qui de comparable à la douleur lancinante qui assèche son crâne, si bien que, pendant un instant, elle a l'impression d'entendre une voix qui ne lui appartient pas. Une voix. Puis deux. Trois. Quatre. Cinq. Bientôt, une cacophonie stridente se fait entendre, aussi envahissante qu'un piano devenu fou ; elle appose ses mains sur ses oreilles en fronçant durement ses sourcils cette fois, crispant sa mâchoire tandis qu'elle panique, se laisse envahir par les sentiments affligeants qui viennent à elle ; elle hoche la tête de gauche à droite, incapable de reprendre le contrôle de son esprit :

« STOP !!!! »

Comme sur la flamme d'une bougie sur laquelle on aurait soufflé, les voix disparurent aussi rapidement qu'elles étaient venues. Le calme retrouvé, la mutante avait glissé une main affolée dans sa chevelure pour repousser quelques mèches en arrière, avant de basculer ses jambes par-dessus le lit qu'elle occupait. Encore assise au bord de celui-ci, elle avait rapidement parcouru la pièce du regard, n'ayant même plus la force de réagir.
.

30 MAI 2024 AVEC ROCKET RACCOON

Alors que le tumulte grondait encore dans son esprit, dans son dos, la voix de Rocket avait surgi des brumes obscures comme pour l'arracher du cauchemar éveillé qu'elle était en train de vivre. Comme si le monstre de colère et de férocité était retourné dans sa tanière secrète sitôt qu'il l'avait entendu, une tanière dissimulée entre ses pensées et ses souvenirs oubliés, se soustrayant aux yeux du monde entier, Jean avait repris le plein contrôle de son esprit. Ayant presque sursauté sur le lit qu'elle occupait, elle s'était promptement retournée vers la source du bruit en haussant ses sourcils sous la surprise, néanmoins heureuse de croiser un visage familier, et grandement réconfortant.

« Rocket... Tu es là... »

Ainsi donc, elle était dans le Milano... Mais pourquoi et comment était-elle arrivée là ? Et pourquoi est-ce qu'elle ne parvenait pas à se souvenir de ce qu'il s'était passé ? Encore confuse, ayant l'impression d'avoir le crâne dans un rouleau compresseur, la mutante était néanmoins apaisée d'être en présence de Rocket, car elle se sentait en sécurité avec lui. Sa voix encore tremblante traduisait tout le soulagement qu'elle éprouvait en cet instant, et les traits de son visage n'avaient pas tardé à suivre le même chemin en se radoucissant, chassant l'expression d'affliction qu'elle avait jusqu'ici porté, comme un masque créé pour l'étouffer. Il fallait qu'elle disparaisse pour Le laisser prendre les commandes. Il fallait qu'elle s'efface pour Lui laisser la place sur le devant de la scène : mais pour l'instant, le comédien distillant le chaos et la terreur préférait se taire, désireux d'observer l'environnement de son hôte, déjà prisonnière de ses griffes.

Celle-ci, sans pouvoir se remémorer les derniers évènements, avait adressé un sourire maladroit au petit Gardien, tandis que ce dernier venait s'installer à ses côtés en tenant dans ses mains une serviette humide. Apportant les paumes de ses mains contre son front toujours brûlant, Jean avait regardé le sol quelques secondes avant de tourner ses yeux fatigués vers Rocket, un air sincèrement perdu au visage. Elle avait l'impression que des éléments lui manquaient... Quelque chose lui échappait. Mais quand bien même cela pouvait paraître fallacieux, elle ne mimait pas le fait d'être amnésique ; peut-être que son cerveau cherchait volontairement à la protéger ? Ou était-ce le choc de l'attaque subie et provoquée qui l'empêchait d'être pleinement consciente de ce qu'elle avait fait ? Elle était égarée dans un océan d'incertitudes qu'elle ne parvenait pas à éclaircir, et c'est pourquoi elle avait finalement levé des cils humides vers Rocket, désireuse de connaître les circonstances de sa présence dans le célèbre vaisseau.

« Oui, ça va... Je-je crois. Mais... Qu'est-ce que je fais ici... ? »

Sa voix ne mentait pas, mais l'inquiétude vivace qui accablait son coeur était bien présente pour que l'on devine son trouble. Les yeux hagards, la bouche hésitante et le corps tremblant, Jean était la proie d'une nervosité compréhensible pour Rocket, mais qu'elle ne pouvait comprendre elle-même. Mais si elle ne se souvenait pas de ce qu'il s'était passé quelques heures plus tôt, elle éprouvait néanmoins un étrange sentiment en son for intérieur ; un instinct mauvais, presque coupable. Quelque chose venait de se produire. Quelque chose de grave. Mais quoi ?
.

30 MAI 2024 AVEC ROCKET RACCOON

Si la présence de Rocket, et la serviette humide apportée contre sa peau encore brûlante, apaisèrent considérablement la jeune femme désorientée qu'elle était, sa première question lui fit manquer un battement. Un type d'HYDRA ? C'est quoi ça, HYDRA ? Et un enlèvement ? Elle avait été enlevée ? Quand ça ? Pourquoi elle ne s'en souvenait pas ? Les questions affluant à une vitesse folle dans son esprit, Jean s'était de nouveau mise à trembler en tordant sa nuque pour pouvoir poser un regard affolé sur son ami. Est-ce qu'il lui faisait une mauvaise blague ? L'expression grave de son visage et l'état déplorable dans lequel elle se trouvait lui répondirent très vite que non... Ce qu'il disait n'était que la stricte vérité. Une vérité qui lui échappait. Une vérité dont elle ne se souvenait pas. C'était presque ironique de constater qu'elle pouvait investir l'esprit des autres sans même lever le petit doigt, mais que le sien était semblable à un labyrinthe dans lequel elle était perdue.

« Je... Non... »

Avouant qu'elle ne s'en souvenait aucunement, ne possédant même pas le plus petit fragment d'image concernant l'événement qu'on lui relatait, la rouquine avait froissé son visage de ses mains tout en inspirant profondément, espérant ainsi que son cœur se calmerait par la même occasion. Mais ce dernier, indocile et bouleversé, ne cessait de tambouriner à la porte de sa chair comme s'il essayait de s'en extirper. Et où irait-il, ce cœur cousu de bonnes intentions qui lutte pour la maintenir au-dessus des vagues ? Mais la tempête gronde déjà dans le ciel de son esprit, il le sait, lui. Il voit passer les mauvais nuages de colère, les présages de violence et la cruauté qui s'annonce dans la tornade de feu qui se prépare. Le ciel si bleu se couvre, il devient aussi noir que la cendre et l'atmosphère s'alourdit, mauvais présage d'un funeste destin à venir. Il le sait, il le sent. Il essaye de construire des barricades autour de sa forteresse aimante pour ne pas se laisser consommer par le poison brûlant, mais comment lutter face à Lui ?

Nul ne peut lutter contre moi.

Des frissons parcourent sa peau. Cette voix. Cette présence presque irréelle, comme une ombre plus grande que son corps, qui l'ensevelit, qui l'engloutit, qui la dévore... C'est Elle qui parle. Elle murmure des choses affreuses, des choses que Jean n'a pas envie d'entendre, distillant des élans coléreux et perfides... Il est temps. Non ! Écartant lentement ses doigts pour dévoiler son visage blême, Jean avait lentement ouvert ses yeux pour les poser sur Rocket, qui se tenait encore devant elle. Il était là, de toute sa bonté d'âme, à prendre soin d'elle... L'avait-il sauvée des griffes de cet homme mystérieux qui l'avait enlevée ? Pour Jean, il était évident qu'elle devait sa libération au Gardien, et c'est pour lui qu'elle trouva la force d'étirer ses lèvres en un maigre sourire suave, alors qu'il la questionnait sur les raisons de son dernier appel... Ça, elle s'en souvenait. C'était confus et lointain, comme si tout cela datait de quelques années en arrière, mais elle parvenait sans mal à restituer les raisons de sa sollicitude, bien que c'était encore plus difficile d'en parler maintenant.

Triturant nerveusement ses mains blanches sur ses cuisses frêles, Jean avait baissé le menton quelques secondes en essayant de lutter contre la lourde fatigue qui l'accablait, fatigue qui allait peut-être aider à délier sa langue, enfin... Le lourd secret qu'elle portait seule depuis bien trop longtemps allait être partagé, allégeant peut-être le poids écrasant qu'elle portait sur ses épaules.

« Cela fait un moment qu'il se passe quelque chose, je crois... Je n'arrive pas à savoir quoi. C'est dans ma tête... Dans ma tête. Peut-être que je deviens folle mais, parfois, j'entends une voix... C'est une voix et une présence. Elle est partout. Tout le temps. À l'intérieur de ma tête mais aussi autour de moi. Elle est moi mais, sans être vraiment moi, tu comprends ? Non, c'est incompréhensible... »

Est-ce qu'il allait la juger comme aliénée ? Honteuse, Jean avait ramené ses genoux pliés contre son buste féminin tout en les entourant de ses bras graciles, son menton se déposant alors au sommet de l'un d'eux, véritablement tourmentée. Maintenant qu'elle avait commencé à se confier, elle avait envie de tout déverser sur le champ mais, quelque chose la retenait ; la peur que Rocket se détourne d'elle.
.

30 MAI 2024 AVEC ROCKET RACCOON

Les informations lui tombaient dessus en lui donnant l'impression de l'ensevelir sous les décombres ; ainsi donc, d'après les dires de Rocket, elle avait successivement été enlevée par un agent d'une organisation terroriste, sauvé Rocket et fait fuir l'individu malintentionné... C'était assommant. Et d'autant plus perturbant qu'elle n'en avait gardé aucun souvenir, pas la même plus infime image pouvant correspondre au récit qu'on lui contait. Pourquoi ne parvenait-elle pas à se remémorer des choses qu’elle avait faîtes ? Elle avait plutôt l'impression qu'on lui racontait l’histoire d’une autre, d’un autre jour, d’un autre temps. Ce ne pouvait pas être vrai. Ce ne pouvait être elle. Mais pourquoi Rocket mentirait sur un sujet aussi grave ? Il n’avait aucune raison de se jouer d’elle… À défaut de pouvoir nier l’évidente vérité, la mutante avait enfin cédé à la raison, acceptant le fait que son esprit avait arraché des fragments de sa mémoire immédiate, sans qu’elle ne puisse le contrôler.
Grandement perturbée par le flot de mots qu’elle venait de recevoir, et par le mécanisme de son esprit émancipé, Jean avait apporté ses deux mains après de son visage tout en prenant une fine inspiration, essayant ainsi de calmer les battements affolés de son cœur, en vain.

« Oui, ça va… Un vertige, c’est tout… »

Fébrile, elle avait maladroitement attrapé la petite main de Rocket dans la sienne, comme pour s’assurer qu’il était toujours là, avec elle, qui ne la lâcherait pas. Et une fois rassurée de cette présence ô combien réconfortante, sa langue déliée avait laissé fleurir quelques confidences interdites, qui dévoilait abruptement la présence d’un autre dans son esprit ; comme un miroir opposant le pire et le meilleur dans le même reflet, la télépathe avouait être la proie d’une présence qui ne la quittait jamais, sans encore révéler la nature néfaste et dangereuse qu’elle pressentait.
Devant la mine soucieuse de Rocket, Jean avait gardé le silence en redoutant la réaction de ce dernier, craignant qu’il ne s’insurge de colère après elle. Mais il n’en fit rien. Égal à la gentillesse qu’elle admirait tant en lui, le Gardien s’était employé à la rassurer et même à la faire sourire, ce qui avait considérablement allégé son cœur inquiet.

« Me voilà rassurée… »

Un léger sourire bordant ses lèvres finement dessinées, elle s’était redressée de quelques degrés en prenant de la hauteur grâce à ses coudes, posant alors un regard hésitant sur son ami, qui lui proposait de se restaurer pour reprendre des forces. L’estomac noué, Jean avait légèrement grimacé avant de demander un café, se disant que ça lui permettrait peut-être de sortir du brouillard dans lequel elle était piégée. Et peut-être que ses souvenirs reviendraient ? Prenant place au bord du lit, la mutante avait attendu que Rocket revienne pour lui adresser un sourire emplit de gratitude, s’empressant d’apporter sa tasse parfumée à ses lèvres afin d’en boire une fine gorgée. Le liquide chaud coulant dans sa gorge en l’apaisant, elle avait fermé les yeux quelques secondes avant d’entendre la dernière question de Rocket, se figeant presque.
Après quelques secondes d’hésitation, et après avoir déposé sa tasse sur la petite commode à côté du lit, Jean avait hoché son visage de gauche à droite tout en pressant ses lèvres l’une contre l’autre, un peu gênée.

« Non, il ne le sait pas… Enfin, je crois ? Il est tellement puissant qu’il a peut-être remarqué que quelque chose clochait dans mon esprit mais, il ne m’en a jamais parlé... »

Ses doigts se refermant sur ses cuisses, elle avait quelque peu écarquillé ses yeux en se retournant vers Rocket, le suppliant alors d’une voix plus forte, véritablement effrayée à l’idée que son mentor puisse connaître l’honteuse vérité à son sujet :

« Tu ne vas rien lui dire, hein ?! Promets-le moi ! »
.

30 MAI 2024 AVEC ROCKET RACCOON

La présence de Rocket était semblable à un baume appliqué sur son esprit tourmenté, qui parvenait peu à peu à sortir de sa torpeur, peut-être grâce à lui ? Si elle ne retrouvait pas les images des événements qu’il lui avait raconté, au moins, elle sentait que la Malveillance s’éloignait de ses pensées, son âme s’apaisant au contact du Gardien qui n’était que bienveillance et douceur à son égard. Méritait-elle autant de bonté ? Probablement pas, car Il était toujours là, dissimulé dans l’ombre d’une ignorance qu’il s’évertuait à maintenir, n’étant pas encore assez fort pour se montrer aux yeux de tous.
Le Phoenix, libéré de ses chaînes, était encore entravé par les barrières psychiques que Charles avait érigé autour de lui quelques années auparavant, mais qui étaient à présent grandement fragilisées par l’implosion de cette nuit : elles menaçaient de céder pour le laisser s’enfuir, et peut-être que le télépathe l’avait senti, même en étant loin d’elle ? Charles avait-il pressenti les raisons de sa fuite ? Jean espérait bien que non, mais elle n’avait pour l’instant ni la force ni le courage de rechercher la réponse auprès de lui, craignant viscéralement de le décevoir ou de le perdre. Après tout, l’enfant qu’elle avait été n’avait eu que lui comme repère, pouvait-elle s’imaginer vivre sans lui ?

Tenant encore la main de Rocket dans la sienne, elle l’avait écouté avec une attention accrue lorsqu’il s’était confondu en confidences à son tour, avouant qu’il n’était peut-être pas la personne admirable qu’elle voyait en lui… Comme il se trompait. Pressant ses lèvres l’une contre l’autre d’un air attendri, Jean lui avait adressé un sourire suave avant de prendre la parole à sa suite, parlant d’une voix basse à cause de la fatigue qui s’était soudainement abattue sur ses épaules.

« Peu importe qui tu as été, Rocket… L’important pour moi est la personne que tu es aujourd’hui. Quelqu’un de courageux, de loyal et de bon, qui répond présent lorsqu’on a besoin de lui… Comme ce soir. Tu es bien plus que ton passé. »

Hochant son visage de haut en bas comme pour mettre une emphase sur ses paroles et le convaincre, Jean l’avait regardé quelques secondes avant d’attraper sa tasse de café pour en boire une nouvelle gorgée, essayant de contrebalancer la fatigue avec ce breuvage réputé pour être un stimulant. Ce n’était pas le moment de dormir. Il y avait encore tellement de choses à dire… Et à comprendre. Si elle avait accepté le fait de n’avoir aucun souvenir des derniers événements, elle avait néanmoins des questions à poser, même si la priorité était de maintenir Charles en-dehors de cette histoire, Jean ne voulant pas lui causer davantage d’ennuis qu’il n’en avait déjà. Elle n’avait jamais voulu être un poids pour celui qui avait eu la bonté de l’accueillir lorsqu’elle était enfant, elle n’allait pas commencer maintenant.
Heureusement, Rocket l’avait bien rapidement rassurée sur le silence qu’il tiendrait pour ne pas l’embarrasser ; aussitôt, ses traits se détendirent et elle lui adressa un nouveau sourire joviale, ses bras venant spontanément enlacer le corps du Gardien pour qu’elle puisse le serrer contre elle avec ses maigres forces, ne lui occasionnant aucun mal sinon une étreinte tendre.

« Je te remercie d’être là, Rocket… Je ne sais pas ce que j’aurais fait sans toi. Heureusement que tu es là. »

Se reculant, elle avait rajouté, d’une voix craintive mais néanmoins déterminée :

« Il faut que j’en parle à Charles… Je le sais. Mais toute seule, j’ai peur. Est-ce… Est-ce que tu serais d’accord pour m’accompagner ? Tu n’es pas obligé d’accepter, je comprendrai si… Si tu ne veux pas… »
.