Comme souvent lorsque j'avais du temps libre, je prévoyais d'aller me remettre en forme, après une mission et un repos bien mérité, cela servait alors de détox, ou de détente, je reposais alors mon cerceau pour des pensées plus simples. J'avais dans ce cas besoin de nature, d'air frais, d'un peu de compagnie extérieure comme les sportif de Central Park. C'était en fait l'endroit où j'aimais beaucoup aller me ressourcer. Je pouvais vraiment m'aérer en ne pensant à rien d'autre qu'à me ressourcer.
Ce matin n'était pas différent. Je me levais et me douchait avant de préparer un bon petit déjeuner. Céréales, café, jus d'orange. Des choses saines pour une bonne journée. Ensuite, je pourrais me changer pour aller courir. Je prenais ma voiture et me garais près du parc. Je verrouillais les portière et je me dirigeait près du lac. J'en faisais régulièrement le tour comme lorsque j'étais à Washington, autour du Washington Monument.
Je temps était clair, mais un peu frisquet. Je m'habillais chaudement, en pantalon de jogging et avec un sweat-shirt bien épais. Je ne voulais pas risquer d'attraper la mort, l'hiver approchait à grands pas et les températures chutaient vite au mois de novembre. Je commençais gentiment mes étirements et mon échauffement. Puis je commençait à courir à petites foulées pour bien chauffer mes muscles avant d'augmenter la vitesse lentement. Je commençait mon premier tour du lac.
J'avais trouvé mon rythme et courait depuis quelques minutes. Le bruit embuant était pour moi reposant, les rires, les éclats de voix et les discussions. C'était un moment de pure détente. J'entamais une ligne droite et je voyais au loin un couple qui semblait se disputer. Les éclats de voix passaient au-dessus de tous les autres. Ils n'étaient pas très discrets. Mais s'était fréquent, les disputes arrivaient aussi au parc même si elles restaient rares. Mais le couple en question semblait vraiment se disputer sévèrement. Mais mon regard fut bientôt attiré par tout autre chose.
Je ralentissais doucement en voyant une jeune femme qui semblait un peu perdue. Elle se couvrait d'abord les oreilles. Le bruit semblait l'incommoder. Rien de bien méchant pour commencer, mais la suite semblait être tout autre chose. Elle paraissait mal. Et son regard se tournait vers le couple. Je comprenait en un instant ce qui se passait. J'allais donc vers elle d'un bon pas et je la rejoignais rapidement. Je ne la touchais pas, il ne fallait pas risquer une crise. Elle paraissait dans son monde en demandant à ce qu'ils se taisent. La dispute semblait le problème. Dans un premier temps, il fallait éloigner les responsables :
- Dites, ça vous dérangerait de mettre un ton en dessous, vous êtes pas seuls ici ! Et vous lui faites peur.
Je demandais alors à la jeune femme pour la sortir de sa transe :
- Mademoiselle ? Ecoutez-moi. C'est terminé, tout va bien.
Je tentais de la calmer et surtout de la ramener doucement dans notre monde, dans la réalité. Le couple stupéfait de mon intervention s'était stopper en regardant la jeune fille en panique. Ils s'éloignèrent alors et disparurent bientôt. Je pouvais ainsi me concentrer sur elle et la ramener doucement.
- Vous m'entendez mademoiselle ? Tout va bien, ils sont partis.
elle se calmait alors doucement et acceptait enfin de lever les yeux sur moi. On lisait encore la panique sur son visage et dans ses yeux, mais le calme revenait et elle revenait doucement, respirant normalement et changeant l'expression de son visage. J'essayais de poser une main sur son épaule en continuant de lui parler.
- On va aller s'asseoir sur le banc. Je suis là, avec vous et je vais vous accompagner.
Je prenais alors sa main, qu'elle ne refusait pas et elle me suivait d'un pas un peu trainant jusqu'au banc le plus proche. Je la sentais tremblante et frèle, mais une fois assise, cela semblait aller mieux. Elle se sortait doucement de sa torpeur et pouvait enfin réagir à mes paroles en me regardant :
- Vous allez bien ?
Il fallait la rassurer, qu'elle se sente en sécurité. Elle pourrait ensuite parler, mais rien ne servait de brusquer les choses.
« Pour pouvoir aider les autres, il faut avoir soi-même ce sentiment que les autres ont besoin de vous. » Stefan Zweig
De son ancienne carrière de danseuse classique professionnelle, il lui restait quelques habitudes qui ne voulaient pas s’en aller : une bonne hygiène de vie, une alimentation (presque) sans écart, des séances de yoga et du sport aussi souvent que possible. Depuis son déménagement à New-York, il lui avait fallu une petite période d’adaptation pour trouver d’abord ses marques, et ensuite ses petites habitudes de vie, qui font qu’on se sent vraiment chez soi. Pour le dernier point, elle y travaillait encore : il faut dire que sa cohabitation avec le Docteur Strange n’était pas de tout repos, ce dernier n’ayant que trop peu de patience pour admettre sa façon désarticulée de s’exprimer, et elle ne voulant faire aucun effort en ce sens puisque, de toute façon cela ne relève pas de sa volonté. Dire qu’elle regrettait le temps où elle se trouvait à Kamar-Taj serait mentir… Là-bas, elle se sentait en sécurité, appréciée, acceptée. Elle ne craignait plus de voir Auden ressurgir pour achever le travail qu’il avait commencé, lui qui avait promis de la tuer. Et s’il revenait ? Et s’il la retrouvait, maintenant qu’elle se trouve sur le même continent que lui ? Parfois, une certaine émotion de mélancolie venait l’envahir, et elle se mettait à pleurer d’une manière tout à fait incontrôlable, aussi impulsivement que survient une quinte de toux. Et lorsque ces épisodes de mélancolie survenaient, elle ne trouvait d’apaisement autrement que par le sport.
En ce mercredi matin, après une nuit d’insomnie bordée de brefs cauchemars lorsqu’elle était parvenue à s’endormir, Milena avait enfilé un jogging de sport noir, un pull thermique et un sweat-shirt à capuche vert foncé, ainsi que ses chaussures de jogging. Courir. Courir longtemps sans s’arrêter, jusqu’à ne plus être capable de penser. Voilà l’objectif qu’elle s’était fixée. Sortant du Sanctuaire, elle avait entamé un course rapide jusqu’à Central Park, d’une foulée mesurée accompagnée d’une respiration maîtrisée, soulageant la nervosité de son corps par l’effort. C’était plaisant… L’endurance, pousser son corps jusque dans ses retranchements, elle connait : du temps où elle était danseuse, il fallait souffrir pour progresser. Cela lui rappelle une vie qui lui semble bien loin, une vie où elle se croyait heureuse, une vie faite de violences et de coups, dont l’ombre plane toujours au-dessus de sa tête…
« Ferme-là ! Tu n’es qu’une incapable ! » Les mots violents ne lui sont pas destinés, mais les entendre lui fait l’effet d’une gifle percutante. Et ils s’enchaînent, furibonds, les insultes et les menaces, les mots grossiers et dénigrants, rebondissant sur sa peau comme pour raviver quelques souvenirs qu’elle ne parvient pas à oublier. Le couple, debout sur l’herbe, se jette des horreurs au visage sur le regard interloqué des passants, et celui horrifié de la jeune femme à la peau ambrée, dont les cheveux volent dans son dos à cause du vent frais de l’hiver. « Non… » Murmure-t-elle une première fois sans que personne ne l’entende, les yeux écarquillés et les mains tremblantes, en reculant d’un pas comme pour fuir instinctivement le danger qu’elle imagine, dans son esprit traumatisé. « Non, non… Ne criez pas… » Pour l’heure, elle a encore bien conscience que l’angoisse monte dans une bouffée totalement irréaliste.
Elle tente, par tous les moyens en sa possession, de reprendre pied mais rien n’y fait : l’angoisse atteint son paroxysme alors elle s’agenouille contre un arbre en tremblant de tous ses membres, appuyant son menton contre son cou et apposant ses paumes contre ses oreilles, pour ne plus rien entendre mais… Elle l’entend, lui. Auden. Elle se souvient dans les moindres détails de tout ce qu’il lui a dit, de tous les coups qu’il lui a donné, de tous les regard mauvais qu’il lui a lancé. Il va revenir. Il va revenir et la tuer.
Dans sa psychose, elle ne remarque pas tout de suite la main bienveillante qui s’est tendue vers elle ; ce n’est qu’après de longues secondes qu’elle détecte la présence d’une autre personne, et qu’elle lève les yeux pour observer l’homme qui se tient en face d’elle. Ils sont partis… Dit-il la vérité ? Elle le regarde avec les yeux écarquillés et la bouche entrouverte, des larmes continuant de dévaler ses joues tandis qu’elle se retourne pour vérifier ses dires : oui, ils sont partis. Les deux inconnus sont partis mais Auden ? Il est toujours là. Elle en est sûre. Il veut la tuer. Il va la tuer. « Il v-a m… me…tuer… » Il ne semble pas comprendre ses paroles décousues, mais elle accepte de prendre la main qu’il lui tend et de le suivre sur le banc, sa main s’accrochant à la sienne avec un peu plus de raison, preuve que son angoisse était vraie et qu’elle ne mentait pas. Du moins, pour elle. Car bien évidemment, Auden n’était pas là.
Regardant partout autour d’elle, Milena se tourne à gauche et à droite tout en gardant la main de l’inconnu dans la sienne, continuant de pleurer et de lui dire, d’une voix brisée par la peur : « Il… Il est là-à… Il ve-veut me tu-u-er… » De toute évidence, non, elle ne va pas bien…
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Le tension retombait doucement. Je la sentais toujours paniquée, comme absente, elle semblait comme perdue en plein rêve éveillé. Elle balbutiait des mots que je ne comprenais pas tout de suite. Elle semblait même les répétés. J'avais déjà vu ce genre de réaction violente. Je savais qu'elle avait subi un stress intense du à une situation vraiment effrayante ou quelque chose du genre. Elle avait vraiment beaucoup de peine à retrouver son calme. Seuls des mots paisible prononcés calmement et lentement pouvait la sortir de sa transe. Alors je ne cessais de parler pour la ramener à la réalité :
- Tout va bien. Je suis là, vous ne risquez rien.
Entre deux phrases je tentais de comprendre ses mots. J'avais cru comprendre " Il va me tuer " et ensuite " il est là... Il veut me tuer ". Mais qu'avait-elle vécu pour être aussi terrifiée ?
Je regardais autour de nous, comme bon soldat que j'étais pour identifier une éventuelle menace, mais je n'en voyais aucune alors il fallait la rassurer.
- Vous pouvez me faire confiance. Il n'y a personne. Calmez-vous, je suis là. Je ne laisserais personne vous approcher. Vous êtes en sécurité.
Mais nous étions tout de même au beau milieu de Central Park et il fallait alors quitter le lieu pour un endroit un peu moins exposé, au cas ou elle serait vraiment en danger. Je l'invitais à me suivre dans un bosquet ou on serait moins à la vue de tout le monde. Les passants la dévisageaient déjà et cela ne réussirait pas à la calmer totalement.
- On va aller à l'abri des regards et dans un endroit un peu moins exposé, vous voulez bien ?
Elle semblait ne plus vouloir me lâcher. La confiance et la connexion était établie, elle me suivrait, elle semblait croire que je pouvais la protéger. Alors nous nous déplacions doucement. Elle était accroché à mon bras à présent à deux mains et me suivait en marchant à pas serrés comme une biche affolée. J'étais rassuré qu'elle me fasse confiance. Cela aidait grandement à la mettre un peu plus en sécurité. Nous n'avions pas besoin de marcher bien longtemps pour rejoindre le bosquet.
- Il n'y a que deux entrées et sorties et je pourrais voir une éventuelle menace. On est à l'abri. Vous pouvez respirer. Lentement, grandes inspirations et larges expirations.
Elle commençait lentement, calée sur le son de ma voix et prenant une respiration moins saccadée. Je sentais son emprise sur mon bras moins forte. Elle se calmait peu à peu. La méthode datait, mais elle fonctionnait toujours aussi bien. J'allais pouvoir lui parler à présent, elle semblait réagir et reprendre ses esprits.
- C'est bien, continuez doucement... inspiration... expiration.
Elle continuait à suivre mes indications jusqu'à ce que le tension se relâche totalement. Elle revenait parmi nous et semblait plus lucide à présent.
- Je sens que ça va mieux. Vous m'entendez j'en suis certain maintenant. Je m'appelle Sam Wilson. Vous me comprenez ?
Elle levait timidement les yeux sur moi comme pour s'excuser de sa conduite. Je ne savais pas si elle me connaissait, mais nous serions vite fixés.
« Pour pouvoir aider les autres, il faut avoir soi-même ce sentiment que les autres ont besoin de vous. » Stefan Zweig
Il n’a de cesse de lui parler d’une voix douce et constante, elle l’entend mais ne l’écoute que d’une oreille, car elle a l’impression qu’il ne comprend pas ce qu’elle essaye de lui dire, et qu’elle martèle comme un disque rayé ; elle est prise dans une spirale infernale, une bouffée délirante qui la renvoie dans les souvenirs qu’elle tente de refouler, et qui reviennent à présent exploser comme des bombes autour d’elle. Et chacune de ces bombes porte un nom : les cris, les coups, la peur, la douleur. C’est une guerre de laquelle elle ne ressort jamais victorieuse, accablée par la violence qui s’abat sur elle sans qu’elle ne puisse se défendre : aujourd’hui, elle saurait se défendre… Elle en a les capacités mais pas la conscience, si bien que lorsqu’elle se croit menacer, elle se replie sur elle-même au lieu de lutter.
Sa respiration est haletante, difficile, si bien que les mots se perdent sur sa langue, se retrouvent hachés, éparpillés comme des pierres jetés au-dessus d’une mer déchaînée. Mais dans le tourbillon qui l’emporte vers la peur et la douleur, des sentiments qu’elle a trop longuement côtoyé autrefois, elle s’accroche au bras qui la maintient hors de l’eau : elle ne le connait pas, il ne lui doit rien et, pourtant, il est là, il prend le temps de veiller sur elle, de s’assurer qu’elle va bien. Aussi, lorsqu’il lui suggère d’aller dans un endroit moins exposé, elle n’hésite qu’un court instant : l’idée qu’il soit de mèche avec Auden lui traverse bien évidemment l’esprit mais, l’idée de se retrouver seule, livrée au danger qui la guette, lui fait bien trop peur pour qu’elle abandonne cette main tendue. Alors, de ses yeux écarquillés et de ses lèvres tremblantes, elle hoche son menton de haut en bas tout lui signifie qu’elle est d’accord et tous deux s’engagent sur un chemin qu’elle ne connait nullement, mais sur lequel elle le suit sans vraiment réfléchir, cramponnée à son bras comme si sa vie en dépendait. Et, peut-être que dans le fourmillement de son esprit en proie à une angoisse intangible, c’était le cas.
« Ou…Oui… » murmure-t-elle en fermant les yeux quelques secondes, suivant ses indications pour tenter d’apaiser son coeur et sa respiration : elle inspire et expire aussi lentement que possible, reprenant peu à peu conscience de son état. Une crise d’angoisse. Elle avait fait une crise d’angoisse.
Relâchant enfin le bras de son sauveur, elle apporte ses deux mains froides sur son visage et le contact de ses paumes fraîches lui fait un bien fou alors elle soupire, ravalant sa salive et essuyant ensuite ses joues, un peu gênée de la situation. Se repliant un peu sur elle-même, la brune croise ses bras contre son buste tout en posant enfin un regard éclairé sur l’homme qui l’a aidé, et le reconnait aussitôt. Il n’a même pas besoin de se présenter. Elle sait qui il est. Dire qu’elle lui a fait perdre son temps alors qu’il a bien mieux à faire…
Hochant alors de nouveau son menton, elle lui adresse un léger sourire amical pour lui dire, d’une voix encore chevrotante d’émotion : « Je… vous co-connais. » Dire qu’elle n’avait pas son carnet sur elle… Quelle idiote. Elle aurait dû l’emporter, cela lui serait grandement utile en cet instant ! Passant alors ses mains dans les poches de sa veste, elle y trouve son téléphone et pianote à toute vitesse dans les notes, avant de lui montrer : Je m’appelle Milena. Désolée de vous avoir déranger.
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Elle paraissait aller de mieux en mieux. Elle reprenait son souffle et parvenait même à bredouiller quelques mots. C'était un très bon signe. Elle me connaissais apparemment. Elle prenait toutefois son portable dans sa poche. Elle craignait sûrement que je ne l'ai pas comprise ou elle avait encore du mal à parler sereinement. Et elle me faisait lire l'écran : " Je m'appelle Milena. Désolée de vous avoir dérangé. " Et elle me regardait, encore un peu confuse.
Je devais la rassurer avant tout, le reste importait peu :
- J'ai bien vu que ça n'allait pas. Je n'aurais pas pu vous laisser dans cet état.
Comme lorsque je m'occupais de l'amicale des vétérans, je savais reconnaître une crise de ce type. J'en avais vu des tas et elles se ressemblaient toutes : stress post traumatique. Elle avait du subir quelque chose de grave qui l'avait marqué et quand une situation similaire la replongeait dans son calvaire, elle ne pouvait pas répondre autrement que par une crise de panique.
- J'ai déjà été confronté à votre crise. VOus avez subi quelque chose de grave n'est-ce pas ? Dans notre jargon on appelle ça le stress post-traumatique. Et vous avez fait une crise d'angoisse liée à ce que vous avez vécu. Je ne me trompe pas n'est-ce pas ?
Je profitais de notre relative intimité pour lui parler comme j'aurais pu le faire avec n'importe qui de mon club, lors des réunions. Elle consultait sûrement. Et si ce n'était pas le cas, il le fallait. Elle ne pourrait pas vaincre ces crises seules. Il était difficile de combattre ce genre de stress sans un accompagnement. Une aide était toujours importante pour retrouver une vie normale. Me rappelant ce qui avait pu provoquer la crise : la dispute du couple sur le sentier, je comprenais que c'était sans doute liée à une relation conflictuelle. Que ce soit ses parents, un couple, ou même son propre couple, cela venait visiblement de ça.
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D’ordinaire, sa langue lui fait défaut et l’empêche de communiquer aussi aisément qu’elle le souhaite : soit, depuis ce qu’elle nomme avec euphémisme comme étant un accident, elle s’en accommode et tente de vivre avec, forçant même ses capacités à poursuivre l’élocution quand elle sent qu’elle a atteint ses limites mais, en cet instant, l’angoisse est plus forte que sa volonté. Elle voudrait être plus forte que tout ça, que tous les souvenirs odieux et douloureux qu’il lui a laissé, plus forte que lui mais… Elle n’y arrive pas.
Alors, après avoir écrit une première fois sur les notes de son téléphone pour adresser quelques mots à son sauveur, Milena lui adresse un bref sourire avant d’arquer l’un de ses sourcils quand il lui signifie qu’il n’aurait pu se détourner de son désespoir : il lui semble être une âme pure, généreuse et bienveillante… Comme Auden, avant qu’elle ne découvre son vrai visage. Son sourire s’étiole quelque peu sur ses lèvres tandis qu’elle resserre inconsciemment ses doigts autour de son téléphone ; faire confiance à un homme est bien plus compliqué qu’elle ne l’aurait imaginé… Pourtant, être en présence de Dominique et de Strange ne lui procure pas cet effet d’insécurité. Peut-être parce qu’ils sont des Maîtres, comme elle, et qu’elle leur alloue une confiance aveugle, que rien en peut entacher ? Ne sont-ils pas, après tout, sa famille désormais ?
Revenant à la conversation avec le dénommé Sam, dont le visage est mondialement connu, elle se décompose presque lorsqu’il évoque le stress post-traumatique, ainsi qu’un évènement l’ayant causé. Elle ne peut pas le contredire alors elle hoche la tête de haut en bas, avant de pianoter rapidement sur son téléphone pour lui transmettre un message : Rien d’original… Un ex petit-ami violent, j’ai peur de le recroiser Elle grimace lorsque ses yeux croisent les siens, puis elle hausse les épaules comme si elle cherchait inconsciemment à dédramatiser la situation, pour se rassurer elle-même. Reprenant le téléphone, elle poursuit pour lui expliquer la raison de cette communication : « Je bégaie beaucoup quand je suis stressée, c’est pour ça que je vous écris… Désolée »
Elle ne faisait que s’excuser, oui, sans nul doute parce qu’elle se trouvait ridicule et honteuse de se retrouver dans pareille situation, surtout en présence d’un héros tel que lui. Que devait-il penser ? Elle ne préférait pas l’imaginer… « On p… On peut y al-aller… » Elle n’allait tout de même pas le retenir toute la journée, il avait sans nul doute mieux à faire que de s’occuper d’elle !
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La pauvre paraissait si désorientée qu'elle ne pouvait même pas parler. Alors elle prenait son portable pour pianoter quelques mots. Je comprenais mieux. Elle faisait parti de ses femmes que leur conjoints violentaient. C'était bien triste. Je n'imaginais pas comment on pouvait faire une chose pareille. Et je comprenais son désarroi. Mais si juste une querelle dans un parc pouvait déclencher une crise, c'est que cela paraissait bien plus grave. Elle avait sûrement subi cela un certain temps. Le souvenir devait être encore bien présent. Cela ne voulait dire qu'une chose, elle était encore avec, ou elle lui avait échappé il avait peu.
Elle souffrait de plus de bégaiement. Le stresse augmentait ce fait et elle devait utiliser son portable pour se faire comprendre. Je prenais mon temps, je lisais et j'attendais pour pouvoir parler à mon tour. Tout en douceur, je ne la brusquais surtout pas pour qu'elle puisse ce calmer. Il était important de ne pas en rajouter, elle devait suffisamment embarrassée. Elle ne cessait de s'excuser, mais cela ne me dérangeait pas. Au contraire, je ne pouvais pas la laisser comme ça. Et même si j'avais eu quelque chose de prévu, on ne pouvait pas laisser ce genre de chose se dérouler sans intervenir quand on le pouvait. Je m'en serait voulu et je ne me le serais pas pardonné.
- Il n'y a vraiment pas de mal. Ne vous inquiétez pas. On a tout notre temps. Je ne vous laisserais pas seule. Au moins, les gens arrête de vous regarder. C'est assez stressant comme ça. Il vous faudrait un remontant, une boisson chaude, un endroit au calme. Vous permettez ?
Je l'aidais à se relever. Je me disais qu'on pourrait aller dans de ces cafés pour nous poser, qu'elle reprenne doucement son calme, qu'elle puisse penser à autre chose. Je lui proposait une boisson, elle pourrait ainsi se focaliser sur autre chose. Une conversation anodine sur le temps, par exemple. Dans ces cas là, il fallait distraire son esprit encombré par des choses simples mais plus gais, plus banales... Si elle acceptait, je la mènerais dans le café tout proche pour qu'on soit déjà au chaud, mais aussi pour qu'elle se libère complètement de ce sentiment de stress. Il lui faudrait quelques minutes pour vraiment se défaire cette sensation et avant de complètement faire confiance. Et ensuite, il fallait la ramener à des sentiments plus calmes, plus posés pour enfin se replacer dans un contexte serein et pouvoir rentrer seule sans aucune appréhension. Une première question me venait...
- Est-ce que vous êtes suivie ? Voyez-vous un docteur pour cela ?
Parce que si ce n'était pas le cas, il allait falloir y penser. Elle avait sérieusement besoin de soutien psychologique parce que ce ne serait pas la dernière fois qu'elle aurait ce genre de crise. Et tout le monde n'était pas aussi bienveillant dans ces cas là. Malheureusement, les gens avaient peur de ces crises qu'ils ne connaissaient pas, contrairement à moi. Et on fuyait bien souvent ce qu'on ne comprenait pas. Elle avait eu énormément de chance que je passe dans les environs à ce moment précis. Sinon, Dieu sait ce qu'elle aurait du enduré encore.
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Fort heureusement, dans son malheur, elle avait croisé le chemin de cet homme bienveillant, qui prenait le temps qu’il n’avait peut-être pas pour l’aider à retrouver son calme, ainsi que son état normal ; elle-même avait bien du mal à comprendre comment son esprit avait pu autant lui échapper. Il est vrai que la violence, sous toutes ses formes, est quelque chose qu’elle supporte avec grande difficulté mais, de là à perdre totalement le contrôle pour si peu, pour quelque chose qui ne la concerne même pas…
Est-ce que cette forme exacerbée de sensibilité avait été enfoui jusqu’à maintenant, lui donnant l’impression de gérer la situation et ses traumatismes ? Était-ce pour cela qu’elle ne parvenait pas à progresser au sein des Maîtres des Arts Mystiques ? Quelque chose, en tous cas, venait de se débloquer. Elle prenait peut-être enfin conscience du traumatisme subi, de la violence endurée, de la souffrance qui n’a pas totalement disparu. Et que faire, à présent ?
Sortant de ses pensées sous la voix de Sam, elle papillonne quelque peu des cils tout en écoutant attentivement chacun de ses mots, prenant ensuite le temps d’essuyer ses joues avant de pianoter sur son téléphone, ses mains tremblant un peu moins que précédemment. Oui je veux bien, merci peut-il lire lorsqu’elle lui tend de nouveau le téléphone, avant d’essuyer machinalement sa joue encore humide, puis de se remettre sur ses deux jambes, grâce à lui. Tenant sa main dans la sienne, elle la serre délicatement en lui adressant un sourire suave, comme pour le remercier silencieusement de la gentillesse dont il fait preuve à son égard. Ce n’est pas tout le monde qui aurait agit ainsi, elle le sait et s’estime donc chanceuse.
Le suivant d’un pas lent, ils parviennent tous deux devant le café le plus proche ; le fait de marcher est curieusement libérateur, lui permettant de détendre ses muscles engourdis et contractés en même temps que cela libère lentement son esprit de l’oppression. Elle respire bien mieux…
Elle s’installe sur une chaise près de la fenêtre pour pouvoir observer l’extérieur, tandis qu’il la questionne sur le suivi…. Qui est inexistant de son côté. Pressant ses lèvres l’une contre l’autre tout en enfouissant ses mains contre ses cuisses, elle courbe ses épaules tout en secouant finalement son menton de gauche à droite, avouant qu’elle n’en a aucun : « Non… C’est la pr-première-e fois que ça m’ar-m’arrive. » Ne voulant pas abuser de sa gentillesse, elle sort quelques billets de sa poche et les dépose sur la table, en adressant un sourire à l’homme qui l’accompagne « Votre bois-sson ? » Elle ne peut pas faire bien plus pour le remercier, pour l’instant.
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Petit à petit, elle retrouvait ses esprits et se détendait. Le fait d'être maintenant dans un endroit fermé, au calme, avec peu de circulation de personnes aidait grandement. Il n'aurait pas été judicieux de la laisser dans un état pareil au milieu d'une foule. Je me réjouissais qu'elle ait accepté mon aide. J'avais été confronté plusieurs fois à des cas similaires, cela me permettait de savoir comment agir. Le calme était primordial et le ton de la voix également. Il fallait parler un brin plus lentement et tout en douceur, d'une voix neutre mais posée.
Elle parlait un peu, mais utilisait encore le portable quand c'était difficile pour elle d'aligner des mots. Le traumatisme était vraiment profond, cela se ressentait dans sa façon d'agir. Même si c'était la première fois qu'elle réagissait de cette façon, elle devait avoir eu déjà des crises moins graves, elle devait faire des cauchemars et surtout devait réagir à certaines situation. Elle devait se battre pour ne pas craquer au quotidien, même sans s'en rendre compte, c'était la seule raison pour une réaction de cette intensité. Le temps avait fait son œuvre et la coupe était pleine. On ne pouvait pas encaisser indéfiniment sans exploser. Quelque fois une simple phrases suffisait à raviver un souvenir violent. On ne guérissait jamais vraiment de ce genre de trouble. Cela demandait un travail énorme et un temps considérable pour retrouver une vie normale.
Dans le café, nous nous installions près de la fenêtre. Il fallait qu'elle ait visiblement un visuel sur ce qui l'entourait pour la rassurer. Je la laissais choisir et s'installer. Elle rentrait les épaules et mettait ses mains entre ses cuisses. Elle était encore sur la défensive. Mais elle tentait le dialogue. C'était une bonne chose. Elle arrivait au moins à communiquer. Elle se sentait redevable. Ce n'était pourtant pas le cas. C'était naturel pour moi de lui venir en aide.
Elle sortait des billets de sa poche pour me proposer une boisson. Elle les posait sur la table. Elle n'avait pas à faire ça. Mais le geste était peut-être normal pour elle. Je reprenais les billets.
- Vous n'avez pas besoin de faire ça, je vous assure. Cela me fait plaisir. Je vais m'en occuper, que souhaitez vous ? Peut-être avez envie de manger quelque chose ? Les pâtisseries sont un bon remède aux maux aussi et elles sont délicieuses ici.
Je me levais en la priant de rester assise. Le comptoir était à proximité, donc je me levais en attendant qu'elle me dise ce qu'elle souhaite prendre. J'irais ensuite pour commander ce que nous souhaitions. Je reviendrais ensuite m'installer près d'elle en demandant à ce qu'on nous emmène notre commande à table si c'était possible.
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Le café étant peu fréquenté à cette heure matinale, la jeune femme a tout le loisir de se détendre sans se sentir observé par des paires de regards curieux ; les coudes appuyés sur la table, elle glisse ses mains froides mais apaisées contre son visage qui lui semble brûlant, étirant ses doigts jusqu’à son épaisse chevelure ébène, en retrouvant peu à peu son calme.
Heureusement qu’il avait été là… Elle se sentait évidemment redevable, mais avait l’impression qu’il n’attendait rien en retour, qu’il faisait cela par bonté d’âme et de coeur, sans aucun intérêt perfide caché derrière ses gestes. Ceux de Milena sont toujours un peu décousus, ses mains allant de ses cuisses à sa nuque puis sur la table pour se lier et se détacher, tandis que son talon gauche tape frénétiquement le sol sous cette dernière. L’angoisse, bien qu’attenuée, n’a pas totalement disparu… pas encore.
Mais voulant tout de même lui rendre la gentillesse reçue de sa part, la Sorcière sort quelques billets de sa poche en les déposant sur la table de ses mains encore tremblantes, lui adressant un sourire chaleureux pour lui signifier qu’elle souhaite l’inviter mais, il décline délicatement : elle aimerait insister mais elle a comme l’impression que c’est peine perdue et qu’il n’acceptera pas alors, elle abandonne l’idée en pressant ses lèvres l’une contre l’autre, se disant qu’elle trouvera un autre moyen de le remercier. Après tout, son anneau de téléportation lui permettra de le retrouver quand elle le souhaitera.
Ayant pressé ses lèvres l’une contre l’autre avec résignation, elle lui adresse un sourire un peu gêné avant de dire, tout simplement : « Un thé. » Il lui parle également des pâtisseries mais elle ne se sent pas capable d’avaler quoique ce soit pour l’instant alors elle remue simplement son menton de gauche à droite, articulant péniblement : « Plus ta-ard… » Elle le regarde alors s’éloigner quelques secondes puis appose son visage entre ses mains, soufflant longuement par la bouche pour se décharger de toute la nervosité qu’elle contient. Elle se sent bien mieux, et tout cela c’est grâce à lui.
Lorsqu’il revient, elle lui adresse un nouveau sourire en affichant des couleurs plus chaleureuses, ayant l’air davantage détendue et sereine : « Je me sens mi-mieux. Merci. » Glissant ses deux mains autour de sa tasse chaude pour se réconforter du froid hivernal, elle poursuit, curieuse : « Vous venez-ez souvent ic-ci ? Je viens d’arriv-ver à New-Yo-oork. »
FIGHT LIKE A GIRL ᭸ I am my mother's savage daughter, the one who runs barefoot cursing sharp stones. I am my mother's savage daughter, I will not cut my hair, I will not lower my voice.
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