"Haha oui," rit le Slime de bon cœur, "l'être humain est fascinant sur beaucoup de chose même. J'aime beaucoup rencontrer de nouvelles personnes, j'apprends toujours toutes sortes de choses intéressantes."
Le Slime n'était pas certain de comprendre ce que "se remettre sur pied" voulait dire, mais il supposait que comme les humains marchaient sur deux jambes, ça devait vouloir dire qu'ils se remettaient debout. Et c'était vrai qu'ils le faisaient facilement, même s'il ne voyait pas bien le rapport avec le fait d'avoir une nouvelle vie. La logique des humains lui échappait encore sur bien des points.
Mais puisqu'ils en étaient au sujet de combien les humains étaient fascinant, ce qu'il avait réussi spontanément à exprimer en remplaçant "humains" par "personnes", comme il l'avait appris à force de rencontres, il se demandait ce qui empêchait souvent les humains de faire ce qu'ils voulaient. Le Slime n'était pas porté sur le calme, il préférait de loin les sons de la ville, mais il savait que les humains préféraient le calme, ce qui était étrange vu le nombre d'humains qui étaient en ville. Mais peut-être aurait-il une réponse, cette fois ?
"Vous dites que vous préférez la campagne et le calme, pourquoi vivez-vous en ville alors ?" demanda-t-il avec une étrange innocence.
Laura eut un grand sourire lorsqu’elle entendit le jeune homme rigolé. Au moins, il n’était pas trop traumatisé de sa vie passée autant soit-elle vraie. Elle continuait de penser qu’il n’était pas de ce monde, mais elle ne le fit pas sentir. Il venait de lui dire que l’être humain était facinant sur beaucoup de choses, qu’il aimait rencontrer de nouvelles personnes, qu’il apprenait beaucoup de choses intéressantes. La jeune femme continuait de lui sourire avant de lui dire :
« En tous les cas, il est agréable de voir que cette nouvelle vie vous plait. Je suis certaine que vous allez découvrir beaucoup de choses que vous ne connaissez pas. On apprend toujours au cours d’une vie, même lorsque l’on pense que l’on connait tout. »
C’était une chose très importante que Laura disait à ses enfants. Même si une personne semblait tout connaitre du monde extérieur, il y avait toujours de nouvelles choses à apprendre au cours d’une vie. Sinon, qu’est-ce qu’on s’ennuierait ! Il y avait toujours quelque chose à découvrir, un pays, une ville, une personne… C’était ce qui faisait la richesse de la vie au fond. Puis le jeune homme lui demanda pourquoi elle vivait en ville si elle aimait la campagne et le calme. C’était une excellente question. La jeune femme regarda devant elle. La vie reprenait doucement son cours, les gens commençaient à venir dans ce parc, mais elle n’y prêta pas attention. La mère de famille prit le temps de réfléchir avant de répondre :
« Pour ma part, c’est le travail de mon mari qui nous ramener à la ville. Je n’ai pas à me plaindre ma maison se trouve dans un endroit un peu isolé avec des voisins que nous connaissons. C’est assez calme. Je ne suis pas dans la ville même. Pour les autres personnes… Certaines personnes aiment la campagne, mais ils ne peuvent pas se permettre d’aller y vivre parce que c’est trop loin de leur travail. Bien sûr, ils pourraient chercher un travail à la campagne, mais certaines personnes n’ont pas les compétences pour travailler dans les champs par exemple. Donc c’est… compliqué. »
Son explication était un peu longue, peut-être qu’il aurait d’autres questions…
Compliqué, c'était le mot. Le Slime avait l'habitude que les humains se compliquent la vie, mais il savait que c'était toujours pour une bonne raison, même s'il ne comprenait pas vraiment la raison en elle-même. C'était d'ailleurs le cas ici : l'humaine exposait des raisons qui restaient obscures pour lui, sur différents point. Le mot "mari" déjà, lui était inconnu. Ce n'était pas la première fois qu'il entendait ce terme et il avait l'intuition que c'était un des très nombreux mots pour désigner un autre être humain. Mais ça restait obscur.
Ensuite, il y avait le "travail". Le Slime avait appris à diverses occasions que les humains faisaient du "travail" pour gagner du papier-argent, ce qui leur permettait d'acheter des choses, notamment de la nourriture. Si le Slime avait compris la notion de transaction, il n'était cependant pas soumis aux mêmes impératifs que les humains, aussi cette notion de faire quelque chose de pénible pour acheter des choses bizarres restait complexe dans son esprit.
Au final, le jeune homme parut se perdre dans ses réflexions tandis que ses yeux prenaient une teinte violacée tout en observant l'humaine. Il avait fini par perdre le fil de la conversation et ne savait pas trop comment la rattraper, même si le mot final de l'humaine, "compliqué", résumait bien la situation et sa pensée.
"mmh, oui, je crois, c'est toujours... compliqué. Le.. travail oui. Compliqué."
Le Slime savait que poser trop de questions avait tendance à rebuter les humains et leur faisait mettre fin aux conversations. Mais dans le cas présent, la gêne qu'il ressentait était avant tout due à son esprit en désordre, qui cherchait à comprendre ce qui venait de lui être dit. Le jeune homme qui avait pourtant été plein d'assurances jusqu'ici se montra hésitant, sans compter que son regard restait fixé sur l'humaine sans cligner des paupières.
Laura se doutait bien que la conversation pouvait peut-être être compliquer pour le jeune homme, mais elle continuait quand même. Pendant un instant, elle le vit se perdre dans ses pensées lorsqu’elle parla du fait qu’elle avait quitter la campagne pour suivre son mari. Déjà, elle perdit le jeune homme. Est-ce qu’il connaissait ce mot ? Elle n’en était pas certaine. Mais elle continua quand même de répondre à la question qu’il lui avait posé. Pendant qu’elle continuait de discuter, Laura se rendit compte que les yeux du jeune homme changèrent de couleur. Sur le coup, elle n’y prêta pas attention, mais elle concentra son attention de nouveau sur le jeune homme. Ce dernier était perdu dans ses pensées, bien loin. Il lui dit alors que oui, c’était toujours compliqué… le travail, aussi… Laura se tourna légèrement vers lui et lui demanda :
« Est-ce que tout va bien ? »
Il venait de poser son regard sur la jeune femme et il la fixait sans même cligner des paupières. Cela avait quelque chose de déstabilisant. Laura se demandait si elle ne devait pas rentrer chez elle sur le coup… La mère de famille secoua la tête et lui dit :
« Peut-être que je vous ai donné trop d’explications en même temps… Est-ce que vous voulez que je reprenne ? Ou que je vous laisse tranquille ? »
C’était peut-être la seule chose à faire après tout…
"Oh, ce n'est pas grave, j'ai l'habitude" répondit le Slime en riant.
Il aurait effectivement voulu recommencer l'explication, mais il avait déjà perdu le contexte donc la question ne l'intéressait plus. En plus, les humains avaient tendance à compliquer encore plus les choses quand ils "répétaient" ce qu'ils avaient dit. Le Slime se souvenait avec une certaine appréhension de sa rencontre avec l'humaine-Lucky-compliquée.
C'est pour ça qu'il avait décidé de désamorcer ça en riant. Les humains arrivaient souvent à détourner la conversation en riant. Ça agaçait le Slime, d'ailleurs, parce qu'ils ne répondaient pas toujours à ses questions en utilisant cette astuce. C'était finalement la première fois qu'il l'utilisait parce qu'il voulait éviter d'être encore plus perdu. Est-ce qu'il l'avait bien fait ?
Le jeune homme avait recommencé à paraître normal, c'est-à-dire qu'il clignait normalement des yeux et que ces derniers avaient repris leur couleur noisette "naturelle". Il souriait chaleureusement, peut-être trop même, pour tâcher de rassurer l'humaine et en espérant qu'elle ne renchaînerait pas. Il décida qu'il devait continuer sur sa lancée pour être sûr.
"Mais, si vous vivez ici, vous pouvez avoir autre chose qu'un chien, si les enfants n'en veulent pas. Il y a des chats, des oiseaux, des ratons, des souris et même des crocodiles !"
Si on pouvait croire que le Slime s'apprêtait à parler du zoo local, en réalité il parlait de ce qu'il avait effectivement déjà croisé en ville... et sous la ville. Le crocodile qu'il avait déjà rencontré se promenait sur les berges près d'une sortie d'égout quand il l'avait rencontré. Cette rencontre avait été de courte durée parce que l'animal avait servi de repas à un Slime alors curieux de connaître le goût qu'il avait. Seul avait été retrouvé de l'animal sa puce d'identification du zoo dont il s'était échappé.
Laura trouvait que la conversation prenait une tournure un peu bizarre ce qui confirma que le jeune homme n’était pas du tout humain. La mère de famille avait bien vu qu’il n’avait pas cligner des yeux et que ses yeux avaient changé de couleurs, mais elle préféra ne pas y faire référence. Son instinct lui disait que ce n’était pas une bonne idée d’insister. Le jeune homme se mit à rire en lui disant que ce n’était pas grave qu’il en avait l’habitude. Elle ne savait pas trop quoi répondre à ça, mais elle choisit de sourire. Les yeux du jeune homme avait reprit une teinte plus naturelle et il clignait des yeux de nouveau. Laura se perdit un peu dans ses pensées en se disant que le monde était fascinant. Elle n’aurait jamais imaginer qu’il pouvait être aussi vaste. Parce qu’il y avait de plus en plus de créatures et de surhumains qui apparaissaient dans sa vie. Lorsqu’elle était petite, toutes ces choses n’existaient pas, du moins, on n’y prêtait pas attention et surtout, on ne savait pas ce qui se passait chez son voisin. Les réseaux sociaux, les journalistes, tout ça avait contribuer à faire apparaître ces gens aux yeux de tous… Surtout depuis l’attaque de New-York en 2012. C’était une des choses les plus impressionnantes que Laura assisté… La voix du jeune homme la sortit de ses pensées. Il lui dit qu’il était possible d’avoir autre chose qu’un chien, il y avait des chats, des oiseaux, des ratons, des souris et même des crocodiles. Laura ouvrit de grands yeux sur la dernière affirmation.
« Des crocodiles ? Vous avez vu un crocodile dans un zoo ? »
Elle préférait lui demander parce que s’il y avait un crocodile en liberté dans New-York, elle en aurait sans doute entendu parler aux informations… Ou pas. Ce genre de choses arrivaient plus souvent qu’elle ne le pensait…
Le Slime ignorait ce qu'était un zoo et il était certain que l'endroit où il avait rencontré le crocodile ne portait pas ce genre de nom. En fait, il avait compris que ces endroits ne portaient jamais de nom. D'ailleurs, il n'y avait qu'un panneau avec un crâne à proximité, sur fond rouge, mais aucune écriture. Même s'il y en avait eu, ça aurait été peu utile au Slime qui ne savait pas lire. Si savoir lire l'avait tenté, sa récente rencontre avec une humaine qui avait essayé de lui apprendre l'avait quelque peu refroidi, même s'il gardait le papier sur lequel elle lui avait inscrit l'alphabet.
"Non, je ne crois pas. C'était près de la plage. Il était gros, marron-vert et avait beaucoup de dents, c'était impressionnant. D'ailleurs, lui non plus ne m'aimait pas, parce qu'il a cherché à s'éloigner de moi."
Il se souvenait que le crocodile, dont il ignorait la nature à l'époque, avait d'abord tenté de le morde. Ça avait coupé net la jambe du Slime qu'il avait aussitôt remplacé, mais le reptile avait aussitôt compris qu'il était plus menacé que l'inverse. La suite des événements lui donna raison, d'ailleurs, le pauvre animal avait découvert ce que c'était que d'être la proie. Le Slime préférait éviter de parler du fait qu'il s'était fait couper la jambe : les humains ne récupéraient pas facilement de ce genre de blessure.
La conversation prenait une tournure un peu bizarre même si le sujet de la dite conversation était un sujet banal. Laura ne savait pas pourquoi elle était persuadée que le jeune homme n’était pas humain, mais certaines de ses expressions ou explications n’étaient pas très nets… Alors quand elle parla du zoo, la mère de famille savait que ses doutes se confirmaient. Mais elle décida de ne pas le laisser paraitre. Laura prit donc le temps d’expliquer ce qu’était un zoo.
« Un Zoo, c’est un endroit où l’on trouve plein d’animaux qui viennent du monde entier. Les gens peuvent les observer. Parfois, c’est un lieu qui n’est pas agréable parce que certains animaux ne sont pas heureux en captivité… Comment expliquer… C’est comme si on vous enlevait votre liberté de vous promener où vous le voulez. Bah, c’est le cas pour ces animaux. Certains sont très malheureux même s’ils n’ont connu que ce zoo. C’est pour ça que certaines personnes tentent de les faire sortir de ces zoo. C’est pour cela que je vous demandais si vous en aviez vu un dans un tel endroit. »
Laura attendit la réponse du jeune homme qui ne tarda pas, lui disant qu’il ne l’avait pas rencontrer dans un zoo, mais plutôt sur une plage. Laura n’avait jamais entendu parler de crocodile qui vivent au niveau des plages, mais c’était peut-être la seul façon donc le jeune homme avait d’exprimer ce qu’il avait vu. Il lui décrit aussi l’animal avant de lui dire qu’il était impressionnant et que surtout, il ne devait pas l’aimer beaucoup parce que le crocodile avait chercher à s’éloigner de lui. Laura ouvrit des yeux de surprise avant de lui répondre :
« Alors vous avez eu beaucoup de chance parce que la plupart du temps, ce genre d’animal ne se laisse pas impressionner. Les crocodiles sont les chasseurs. Ils sont plutôt du genre à tenir leur proie pendant des heures avant de la manger… Je crois que vous avez eu de la chance. »
Laura était loin de s’imaginer que c’était le jeune homme et sa composition qui avait fait penser au crocodile qu’il était en danger.
« Dites moi seulement que ce n’était pas dans New-York que vous avez vu ce crocodile… »
La description que l'humaine donnait de ce "zoo" n'était pas flatteuse. Le Slime se montra particulièrement sensible au fait d'y être privé de liberté. Pour le Slime, rien n'était plus sacré que sa liberté à errer comme il le souhaitait dans le monde des humains, donc l'idée de ne plus pouvoir le faire lui était insupportable.
"C'est affreux, comment peut-on faire ça ? Ils devraient pouvoir se promener comme bon leur semble, non ?"
Évidemment, le Slime était bien loin des préoccupations humaine concernant leur survie : aucun animal n'était dangereux pour lui. En fait, c'était même plutôt l'inverse, surtout depuis qu'il avait cessé de manger des humains. D'ailleurs, il parut particulièrement surpris lorsque l'humaine lui expliqua que le crocodile aurait pu le manger. Le Slime dévorait toutes sortes de choses, mais il ne lui était jamais venu à l'esprit qu'il pouvait lui-même servir de repas. Il faut dire qu'il n'avait jamais rencontré de prédateur capable de le digérer.
"Effectivement, j'ai eu de la chance. Il faudra que je fasse attention à l'avenir. Mais par contre si, c'était à New York. Mais c'était loin d'ici, je crois. C'était il y a longtemps."
La notion temporelle du Slime n'était pas très au point et se limitait aux cycles de jour et de nuit, le reste étant encore trop abstrait pour lui. Aussi, "longtemps" dans son langage pouvait autant signifier "il y a quelque jours" que "il y a des mois", puisque ce n'était guidé que par sa perception personnelle du temps. En tout cas, il était certain que c'était loin d'ici parce qu'il ne se souvenait pas d'arbres.
Lorsque Laura parla des zoo, elle vit tout de suite que le concept ne plaisait pas au jeune homme. Il y avait de moins en moins de personnes qui aimaient le zoo d’ailleurs. Laura ne comprenait pas non plus ce concept. Certains aimaient voir des animaux qui n’étaient pas de leur pays. D’autres détestaient les voir dans des cages. Le jeune homme lui dit alors que c’était affreux, demandant comment on pouvait faire ça. Les animaux étaient mieux en liberté non. Laura hocha doucement la tête en lui disant :
« Je suis d’accord avec vous. On ne devrait pas mettre en cage des animaux. Mais pour certains de ces animaux, ils ont été sauver parce que des personnes les ont importés illégalement et que leurs conditions n’étaient pas du tout les même que dans le zoo. Parfois, il y a des zoos qui ont des parcs très très grands et donc, ça fait un peu comme s’ils étaient en liberté, mais pas dans leur habitat naturel. Je dois vous avez que je ne suis pas le genre de personne à aller au zoo le dimanche. »
Laura n’aimait pas voir certaines bêtes souffrir en silence. Elle était particulièrement sensible au bien sûr des animaux. Bien sur, elle avait eu des vaches et d’autres animaux donc ils avaient consommés la chair, mais ils avaient toujours été traiter dans le plus grand des respects. Le jeune homme lui parla alors d’un épisode de sa vie où il avait croisé un crocodile et Laura ouvrit de grands yeux lui expliquant qu’il aurait pu être manger. Elle était loin d’imaginer que le jeune homme était plutôt du genre à manger les animaux qui l’attaquaient. Il lui dit alors qu’il avait eu de la chance et qu’il allait devoir faire attention. Cependant, il rajouta que c’était bien à New-York, mais c’était loin d’ici. La jeune femme ouvrit de nouveau de grands yeux.
« J’espère que vous avez raison… Je me vois mal croiser un crocodile chez moi ! »
Elle se promit d’appeler la mairie au cas où pour demander s’il n’y avait pas un crocodile qui se serait échappé d’un zoo. La mère de famille regarda l’heure sur son téléphone. Il était bientôt l’heure d’aller chercher le petit dernier à l’école. Elle regarda le jeune homme et lui dit :
« Je vais devoir vous laisser. Je dois aller chercher à l’école mon fils. Est-ce que ça va aller pour vous ? »
Elle n’aimait pas partir en voleuse, mais cette fois, si elle ne voulait pas être en retard, elle n’allait pas avoir le choix. Mais elle avait encore quelques minutes à consacrer au jeune homme s’il avait toujours des questions…
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