La fin d'après-midi était plutôt calme. Il n'y avait pas de travail, ni mission en particulier et ton équipe de mercenaire en avait profité pour se la couler douce un moment. C'était à toi et à ton fils de réapprovisionner tes collègues et cette petite broutille ne te convenait pas tellement, tu estimais que n'étais pas leur larbin. Quoi qu'il en soit tu avais décidé de travailler en groupe et donc tu te devais de mettre la main à la pâte lorsque le moment le demandait. C'est pour cela que toi et Alyosha avaient décidé de faire un tour au quartier irlandais : Woodside, à l'ouest du Queens. Tout ici était communautaire et avait pour but de retranscrire l'île natale de beaucoup de personnes présentes dans ce quartier. Pub, magasin touristique et usine. Tout ici respirait l'héritage celtique et la classe ouvrière. Tu prends le temps alors de t'arrêter regardant ton rejeton qui était à tes côtés. Tu ne souhaitais en aucun cas moisir trop longtemps ici et tu préfères rejoindre la planque rapidement.
« On se sépare, je me charge du matériel de réparation, occupe-toi de la nourriture. »
« Bien… »
Sortant quelques billets de ta poche, tu lui en donnes assez pour acheter de quoi faire quelques provisions. Ni une, ni deux vous voilà séparés. Tu pars alors à la pêche aux informations au sujet de la réparation du véhicule de l'équipe, en effet celui-ci avait quelques soucis au niveau de la roue droite et quelques outils de dépannage ne seraient pas de refus. Tu tombas rapidement dans la boutique d'un vieux briscard qui te conseilla cette clef à molette qu'il a lui-même bénit apparemment. De négociation en négociation tu arrives rapidement à un terrain d'entente avec le vieillard et aborda les outils à un bon prix. C'était cela aussi la vie de mercenaire, avoir la débrouille au fond de soi. Tu retournes alors vers le lieu de rendez-vous où vous deviez vous retrouver avec Alyosha. Néanmoins, tu étais surpris et agacé de ne pas le voir à l'heure. Qu'est-ce qu'il fiche ? Il sait pourtant que tu as horreur d'attendre.
« Mon dieu ! Ils s’en prennent même à un enfant ! »
« Ouais, ne faut vraiment pas chercher ces types… »
L'attroupement de plusieurs personnes et les paroles du couple eu pour effet de te surprendre grandement. Ton sang ne fait alors qu'un tour et tu t'approches du lieu de l'attroupement bousculant les personnes qui se mettaient en travers de ton chemin. Sur place, tu vis alors une lettre au sol suivi de trace de pneus. Ramassant la lettre, tu peux apercevoir à son dos un trèfle à quatre feuilles plantées par une dague en signe de symbole. Cela ne fait aucun doute, c'était la signature du gang des Irlandais... Voilà pourquoi tu ne souhaitais pas t'éterniser ici, tu avais eu affaire à ces voyous par le passé et ils n'étaient pas connus pour pardonner. De plus, être sur leur territoire n'était pas bien malin, mais tu n'imaginais pas qu'ils tenteraient un kidnapping sur ton fils en guise de représailles, qui plus est en pleine journée. Tu ouvres alors la lettre pour voir ce qui était marqué à l'intérieur, après tout cela t'était directement destiné.
« Kraven, nous détenons ton fils. Si tu le souhaites vivant tu devras nous rejoindre à notre repère. Ne tente pas de bêtises, nous souhaitons simplement négocier une prime de dédommagement que tu nous dois... Au plaisir! Grégory O'Lakkan."
Avait-il prévu le coup ? Savait-il que tu allais venir ici avec ton fils ? Beaucoup de questions te viennent alors en tête, néanmoins ce n'était pas le moment de réfléchir. La vie de Alyosha était en jeu et tu n'allais certainement pas laisser une bande de cafard s'en prendre à l'héritier du titre de Kraven le chasseur. D'instinct tu ne restes pas sur ta position et tu pistes les traces de ce qui semblerait être une voiture.
Bien que cela lui coûtait, il fallait admettre l'évidence qui s'imposait : Jean était dotée d'un sens de l'observation tout à fait discutable, pour ne pas dire complètement inconsistant, qui l'avait conduite à déambuler dans les rues du Queens jusqu'à s'y perdre. Maintenant qu'elle était au milieu d'une ruelle qui ressemblait, selon elle, en tous points aux autres, elle ne savait plus où aller, et avait abandonné son corps sur un banc le temps de reposer ses pieds endoloris. Renversant sa nuque en arrière, la rouquine avait fermé les yeux quelques secondes, juste le temps de maudire intérieurement son camarade de classe qui, d'un ton jovial et se voulant de bons conseils, lui avait affirmé quelques jours plus tôt qu'elle devait à tout prix visiter un parc niché dans cet arrondissement de New-York, et dont elle avait même oublié le nom à présent. À l'avenir, il était sans nul doute préférable qu'elle reste dans l'enceinte de l'Institut Xavier, puisqu'elle était visiblement incapable de se déplacer dans la ville sans égarer ses pas. Une légère migraine commençant à envahir ses tempes, Jean s'était redressée sur le banc tout en apportant machinalement ses index contre ces dernières, les massant brièvement tout en grimaçant de douleur. Un instant, alors que sa concentration flirtait avec la fatigue, telle la fréquence d'une radio qui grésille, Jean avait entendu des bribes de pensées qui ne lui appartenaient pas, et qui faisaient étal de terribles intentions envers ce qu'elle devinait être un enfant. Si elle n'était pas en mesure de retranscrire pleinement les phrases qu'elle venait d'entendre, car elles étaient semblables à un écho caverneux survenu d'un esprit lointain, elle était sûre des desseins qui se jouaient un peu plus loin ; les sourcils légèrement froncés, sur ses gardes, elle s'était rapidement levée du banc pour faire quelques pas sur le trottoir, ses yeux bleus vagabondant de droite à gauche comme si elle était mentalement à la recherche d'une voix en particulier. En vain. Le claquement abrupt d'une portière, suivi du crissement d'un pneu déferlant à toute allure sur l'allée principale, lui firent comprendre qu'il était déjà trop tard. Les malfaiteurs avaient eu leur cible.
Autour d'elle, les voix des passants ayant assisté à la scène s'élevèrent en s'injuriant de l'enlèvement qui venait d'avoir lieu, tandis que la voiture des criminels s'éloignait sans qu'aucun obstacle ne se mette en travers de leur route... Tout à coup, au bout de l'avenue dégagée, une voiture noire garée sur le bas-côté fut mystérieusement emportée par une main invisible qui la fit basculer sur la gauche en un seul mouvement, bloquant ainsi brièvement le véhicule des kidnappeurs, qui freinèrent violemment avant de reprendre leur chemin dans une conduire tout aussi impétueuse. Avaient-ils compris qu'une menace les guettaient à leur tour ? Les suivant du regard, les yeux braqués sur la plaque d'immatriculation qu'elle connaissait déjà par cœur, Jean tentait d'apaiser la colère qui grondait en elle ; il y avait bien trop de témoins pour qu'elle puisse les débusquer devant autant de civils, au risque de provoquer des morts aussi cruelles qu'injustifiées. Plutôt, elle s'était employée à lire, dans l'esprit du conducteur, l'itinéraire qu'il allait emprunter pour conduire son otage en lieu sûr, pour ne pas perdre la trace de l'enfant dérobé. Debout au milieu de la ruelle à présent agitée, Jean était restée quelques secondes immobile, comme paralysée par toute la nervosité qu'elle s'efforçait de noyer, mais qui faisait néanmoins trembler ses mains. Il fallait qu'elle reste calme. Parmi la cacophonie bruyante qui résonnait dans son esprit, Jean avait discerné quelque chose dans les méandres de son obscurité, comme un instinct paternel aux aguets, une volonté à la fois déterminée et désespérée de retrouver l'enfant disparu, que seul un père pouvait éprouver. Se retournant lentement, sans radoucir les traits de son visage, elle avait posé un regard intrigué sur un homme aussi imposant que fort bâti, qui la dépassait largement en taille et en force, et qui arborait les traits d'un animal sauvage traquant sa proie.
« Il faut être audacieux pour enlever un enfant en pleine journée... Et presque sous les yeux de son père. »
Faisant quelques pas pour se rapprocher de lui, au milieu des badauds et des passants qui commentaient encore la scène d'enlèvement, Jean fit de nouveau entendre sa voix mais, cette fois-ci, seulement dans l'esprit du père esseulé, sans que ses lèvres ne bougent.
Dans le milieu dans lequel tu travails, il n'est pas rare que tes ennemis utilisent les moyens qui te sont le plus cher afin de te toucher personnellement. Tu prends le temps de te relever et alors que tu t'apprêtes à partir en quête de la libération de ton fils, une voix féminine te stop dans ta démarche. Tu te tournes en regardant ton interlocutrice et tu remarques une jeune-femme à la chevelure de feu s'approcher vers toi. Ce qui t'a arrêté dans ta détermination c'est qu'elle semble savoir pour ton fils, que tu es à sa recherche et qu'il a été enlevé. Tes sourcils se froncèrent de plus belle lorsque la rouquine sembla communiquer avec toi par la pensée. Allons bon, tu as affaire soi à une sorcière, soit à une mutante. Auquel cas il est très désagréable pour toi que quelqu'un pénètre ainsi dans ton esprit. Dans ton travail tu as vu beaucoup de personnes possédant des caractéristiques surnaturelles. Tu pourrais dire que cela fait presque parti de ton quotidien.
« Allez, vient ma grande ! Ne restons pas ici ! La police va faire son travail et ce pauvre innocent sera sauvé ! »
Ton sourire n'était qu'une façade et il était clair que tu jouais la comédie. Le but premier était de ne pas éveiller les soupçons et avec la foule qu'il y avait tu ne devais pas faire n'importe quoi. Tu t'approches alors de la télépathe en l'agrippant par le bras, faisant semblant de la connaitre pour aller un peu plus loin, à l'abri des regards. Tout en marchant, la jeune-femme pouvait sentir ta main serrait son bras annonçant la couleur de tes émotions. Tu étais en colère, mais tu faisais preuve de retenu. Une fois arrivé dans un lieu où il y avait moins de monde tu lâchas la sorcière rousse, la mettant dos face à un mur. Il était clair qu'elle allait devoir te donner des explications. Si elle pouvait réellement lire en toi, elle allait deviner tes intentions, tant pis pour l'effet de surprise. Tu agrippes dans ta bandoulière un pistolet magnum que tu avais toujours sur toi. Un « clique » signifiant l'armement se fait entendre et ton regard devient alors plus dur.
« Alors, comme ça tu es de mèche avec eux ? C'est un autre piège que tu me tends, avoue-le... Comment saurais-tu où ils sont, sinon ? Malheureusement, pour toi ma belle, ta chevelure rousse a sans doute trahi tes origines irlandaises... »
Afin d'appuyer tes propos, tu lui montres de ton autre main, la lettre qui t'était directement destiné avec le symbole du gang des irlandais en prime. Si elle ne connaissait pas ce symbole, elle pourrait toujours lire dans ton esprit pour faire le rapprochement. Tu n'étais certainement pas d'humeur à jouer. Ta voix était calme, glaciale et déterminée et tu étais également sur tes gardes avec ses pouvoirs, tu ne sais sans doute pas tout. Selon toi il était clairement possible que O'Lakkan, le chef de la bande des kidnappeurs ait voulu te piéger davantage en t'envoyant une de leur larbin. Si la demoiselle souhaitait se tirer de cette situation, il fallait qu'elle gagne ta confiance et qu'elle soit concise dans ses propos. Au risque de répéter, la vie de Alyosha était en jeu et l'heure était déjà en train de tourner. Tu ne devais pas te permettre de perdre plus de temps. Tu prends alors le temps d'installer un climat de pression avant de reprendre.
« Alors, qui es-tu ? Pourquoi tu voudrais m’aider ? Qu’est-ce que tu as à y gagner... ? » Tu marques une pause avant de reprendre. « Encore une chose, je ne t’ai certainement pas invité à rentrer ici. »
Tu poses ton index sur ta tête afin d'appuyer de plus belle tes propos. Le fait qu'elle puisse être télépathe était réellement contraignant. Cela ne laissait pas beaucoup de marche de manœuvre et tu devais redoubler de prudence. Tu attendais ses réponses de pied ferme, il était à espérer pour elle que celle-ci te conviendrait.
Misérable chose... Soufflait une voix perfide dans son esprit en proie à une certaine agitation, tel un écho caverneux venu des tréfonds de ses pensées. Bien qu'il avait défait Apocalypse, évitant au monde entier de subir une déflagration mortelle, le Phoenix ne s'était pas tout à fait endormi, patientant dans l'ombre obscure qui lui permettait, pour l'instant, de demeurer caché. Il n'était encore qu'une forme brûlante dissimulée dans la pénombre d'un esprit changé en véritable labyrinthe de barrières et de souvenirs refoulés, mais la peur et la colère l'alimentaient toutes deux, lui permettant de grandir.
Traînée de force dans une ruelle par une main aussi vigoureuse qu'hargneuse, qui lui comprimait tant la peau qu'une grimace de douleur avait traversé son visage, Jean, douée de cette âme qui n'admettait que la bonté, n'avait pas réellement compris pourquoi elle était traitée ainsi. Était-ce ce qu'elle méritait pour avoir voulu aider ce père esseulé, dont l'enfant lui avait été arraché ? Non, bien sûr que non... Le dos collé contre le mur poisseux derrière elle, elle avait fait de son mieux pour se calmer, temporisant ses émotions autant que ses pensées pour tenter de garder le contrôle sur la situation.
« Vous vous trompez, je veux juste... »
Il ne l'écoutait pas. Lancé dans la spirale infernale d'un monologue ô combien accusateur, l'homme d'apparence rustre restait sourd à ses tentatives d'explication, qu'il réfutait de son œillade agressive. Bien qu'elle essayait de comprendre et d'excuser son comportement, elle ne pouvait s'empêcher de le considérer avec grande aberration : si elle avait été complice de la bande de malfaiteurs, pourquoi aurait-elle essayé de ralentir la voiture ? Pourquoi ce serait-elle attardé dans cette rue ? Pourquoi lui aurait-elle proposé son aide ? Quel idiot... Elle commençait à perdre patience, tout comme l'Ombre incandescente qui prenait davantage de place, fulminant de colère après ses propos.
Les battements de son cœur s'étaient affolés lorsqu'il avait dégainé son arme, la pointant sur elle avec une réelle volonté de s'en servir, cela ne faisait aucun doute. Veux-tu jouer ? Nous allons jouer. Les traits de son visage, autrement crispés par une peur bien légitime, s'étaient tout à coup détendus. Un léger rictus ornant ses lèvres finement dessinées, la jeune mutante avait planté ses iris bleutés dans les orbes sombres de son interlocuteur, faisant de nouveau résonner sa voix féminine dans son esprit :
« Qui t'a dit que j'avais besoin d'une invitation ? »
Tandis qu'elle penchait son visage sur le côté, d'un air aussi trompeur qu'enfantin, l'arme de l'inconnu s'était tout à coup retournée vers lui, sans qu'aucune main n'ait à le manier. Se rapprochant lentement du visage de son possesseur, le magnum avait collé son canon froid contre le front de Sergeï, l'obligeant à reculer de quelques pas tant la pression exercée contre sa peau était forte. Et comme si cela n'était pas suffisant, Jean avait relevé l'une de ses mains en utilisant sa télékinésie pour le pousser en arrière, se libérant ainsi de son emprise malveillante. Le bloquant à l'aide de ses pouvoirs pour qu'il ne puisse pas faire un seul mouvement vers elle, et faisant un pas en avant pour se décoller du mur crasseux, la rouquine avait poussé Sergeï jusqu'à que celui-ci ait son dos accolé contre le mur derrière lui, échangeant, de ce fait, leurs places. Si elle ne prenait aucun plaisir à faire usage de la violence, elle pensait ne pas avoir eu le choix : qui sait ce qu'il serait advenu si elle l'avait laissé faire ?
« Je voulais seulement t'aider parce que j'ai assisté à l'enlèvement de ton fils, mais puisque tu veux jouer les gros bras, je te souhaite bonne chance pour le retrouver : je pense que tu vas en avoir besoin. »
Haussant vaguement ses épaules d'un air faussement désolé, la jeune fille avait pressé ses lèvres l'une contre l'autre avant de s'éloigner pour rejoindre la rue principale, lui permettant de retrouver l'usage de ses capacités seulement à cet instant. Tandis que sa chevelure de feu sortait de son champ de vision, le magnum de Sergeï retomba à ses pieds, heureusement, sans avoir été employé.
Tout individu normalement constitué serait affolé par la pression d'une arme en face de soi. C'était le cas de la rouquine, au début seulement, le fait que tu as pointé ton magnum face à elle a fait en sorte de changer l'expression de son visage, comme si quelqu'un ou quelque chose d'autre avait pris sa place l'espace d'un instant. Tu étais surpris, en général le gibier ne sourit pas face au prédateur, mais il semblerait que les rôles changent rapidement dans l'époque actuelle. Après une provocation télépathique, ton arme t'échappe alors des mains semblant presque avoir sa propre conscience et se retournant vers toi, collant son canon sur ton front. La force de l'arme exercée sur ta tête t'obliges à reculer contre un mur te laissant un peu plus dans l'incompréhension la plus totale. La lecture de l'esprit et la communication par la pensée n'était pas ses deux seuls pouvoirs ? Voilà bien le problème avec les mutants, il n'y a pas plus imprévisible que ce genre de personne.
« Mais, que ’est-ce que… »
Tu n'as pas eu le temps de terminer ta phrase qu'une force irrésistible vient te plaquer contre le mur. S'il y a bien une chose que tu ne supportes pas, c'est d'être à la merci de quelqu'un et d'un être aux capacités supérieurs en plus. Tu tentes de te dégager de cette poigne, mais rien n'y fait et te voilà plus qu'à attendre la décision de la jeune-femme qui ne semble pas si frêle que cela au final. Celle-ci semble déçu, t'indiquant qu'elle voulait simplement t'aider à sauver Alyosha par bonté d'âme. Elle t'indique ensuite que tu es de toute façon bon à te débrouiller par tes propres moyens. Haussant les épaules, ton interlocutrice s'en va alors te libérant petit à petit de son emprise télékinétique et lorsque sa chevelure de flamme disparait, la volonté propre du magnum en fait de même et retombe par terre. Te voici sur les fesses, lentement tu ramasses ton arme et tu la remets dans ta bandoulière dorsale. Tu prends un temps pour te remettre de tes émotions en disant.
« Les mutants et leurs susceptibilités… »
La situation qui venait de se passer était plus que surprenante, mais tu n'avais pas l'envie de perdre plus de temps. Une fois que la jeune femme était partie tu avais pris une ruelle à côté menant à un parking, cassant machinalement une vitre de voiture, tu entras à l'intérieur du véhicule en bidouillant les câbles de démarrages. Tu avais l'habitude de ce genre de débrouille et après une quatrième tentative le moteur commença à ronfler. Tu t'en vas alors avec ton véhicule voler et sur le chemin tu croises à nouveau la mutante qui t'avait causé tant de problèmes. Après un moment de réflexion, l'idée d'avoir une alliée comme elle dans ta quête de retrouver ton fils ne serait pas de refus. Tu t'arrêtes alors à ses côtés. Son regard était toujours sévère et d'une manière un peu confuse, tu ouvras la portière du côté passager. Il allait falloir que tu choisisses tes mots avec soin, la mutante ne semblait pas avoir bien encaissé le fait que tu l'as menacé.
« Je crois bien qu'on soit parti du mauvais pied tous les deux... Je te propose de recommencer la rencontre. Je m'appelle Sergeï et tu as dit avoir des informations sur le lieu où était détenu Alyosha ? » La voyant toujours sur ses gardes un petit soupire sorti de ta bouche. « Écoute, je sais bien que tu ne peux pas me voir en peinture, je ne te demande pas de me rendre ce service pour moi, mais pour mon enfant, tu n'irais quand même pas laisser un pauvre innocent se faire kidnapper par de terribles hommes quand même ? »
Tu jouais sur la corde sensible. En effet, la jeune-femme semblait avoir un sens de la justice plus qu'aiguisé et de tel pouvoir à tes côtés permettrait de mettre fin au problème plus rapidement. Tu n'as plus qu'à espérer que la jeune-femme change d'avis et t'accompagne. Le fait qu'elle puisse lire dans ton esprit continuait également à être un problème, mais de toute façon il fallait faire avec ce pouvoir.
Quel malotru ! Songeait une part de ses pensées agitées, sans toutefois parvenir à convaincre l'autre partie de l'assemblée : ostensiblement, elle détestait faire usage de la violence, quand bien même elle n'avait pas été la première à attaquer. La violence, justement, n'était-ce pas la force des plus faibles, comme elle aimait le penser ? Cet homme là n'avait rien de faible, du moins en apparence... Peut-être que l'enlèvement de son fils avait fait vaciller sa raison, le poussant à voir un ennemi partout où il posait les yeux ? Indéniablement, Jean était tout à coup prise en étau entre des sentiments contraires, qui tentaient tantôt de défendre le comportement méfiant et agressif du père, tandis que d'autres la faisaient fulminer de colère, le condamnant déjà pour son attitude pugnace qui n'était en rien justifiée. Après tout, elle avait seulement voulu l'aider, rien de plus, il n'avait eu aucune raison d'agir de la sorte. Pourquoi mordre la main généreusement tendue ? Soucieuse, elle fit quelques pas sur le trottoir à présent bondé de passants curieux qui relataient, avec grand intérêt, ce qu'ils avaient vu, échangeant des spéculations aussi farfelues les unes que les autres.
« On ne retrouvera pas ce gosse vivant, j'vous l'dis moi... »
Sans pouvoir parler, elle s'était brusquement retournée vers la vieille femme qui venait d'énoncer cette cruelle fatalité, de même sorte que si le schéma s'était si souvent répété qu'on en connaissait à présent le dénouement. Les sourcils froncés, elle lança un regard sans espoir à la ruelle sombre qu'elle venait de quitter, n'ayant même pas remarqué que l'homme en était déjà sorti. Tiraillée entre l'envie de sauver cet enfant qui n'était en rien responsable de l'attitude de son père, mais étant en même temps encore considérablement secouée par l'agression, quoique minime, qu'elle venait de subir, Jean ne savait plus si elle devait continuer son chemin sans se retourner ou alors retrouver le rustre à la voix grave. Accepterait-il seulement son aide, cette fois, ou ferait-il encore preuve d'une hargne peu commune à son égard ? Elle n'était pas de ceux qui trouvent leur confort dans la querelle et la violence, elle n'avait jamais été belliqueuse et elle n'élevait jamais la voix, s'efforçant de toujours temporiser ses émotions, même les plus acides, alors elle avait bien du mal à comprendre cette nature acerbe qui lui avait fait face. Quelque peu perdue dans ses pensées, les bruits de la ville avaient fini par disparaître. Bientôt, elle n'avait plus entendu les voix qui fourmillaient autour d'elle, ni le ronronnement des moteurs pressés, qui faisaient crier les klaxons impatients, jusqu'à ce qu'une portière s'ouvre devant elle, comme une invitation inattendue. Penché sur le côté, le visage de l'homme s'était dévoilé dans le brouillard, l'obligeant à retrouver la terre ferme. Surprise, elle avait eu un léger mouvement de recul tout en fronçant durement ses sourcils, s'apprêtant à devoir se défendre à nouveau contre lui. Mais le tigre s'était calmé. Il ne feulait plus.
Tout d'abord hésitante, et avec raison, les traits de Jean s'étaient peu à peu détendus, tandis qu'elle se rapprochait de la portière ouverte. Posant une main sur celle-ci, elle avait pressé ses lèvres l'une contre l'autre avant de lui répondre enfin, d'une voix étonnamment calme.
« J'ai pu lire dans l'esprit du chauffeur, donc je sais où ils comptent l'emmener, oui. »
Prenant place sur le siège passager, Jean avait refermé la portière avant d'attacher sa ceinture, un léger sourire désabusé se formant sur ses lèvres lorsqu'elle comprit que le véhicule dans lequel elle se trouvait était une voiture d'emprunt. N'ayant guère le temps de se questionner à ce sujet, elle s'était aussitôt employée à guider celui qui s'était présenté comme Sergeï, car le temps était compté, et il en avait déjà perdu beaucoup.
« Ça a été très rapide alors je n'ai pas pu voir l'adresse exacte mais j'ai visualisé une usine désaffectée en dehors de la ville... Une sorte de terrain vague entourée par une grande foret, et les murs du bâtiment étaient blancs, avec quelque chose écrit en vert. Mais ce n'était pas le seul bâtiment, il y en avait d'autres autour de lui... Est-ce que ça te dit quelque chose ? »
Une fois la portière claquée, ta nouvelle collaboratrice t'indiqua tout ce qu'elle savait au sujet de ces kidnappeurs qui avaient osés toucher à ton fils. Elle n'avait pas l'itinéraire parfait, mais ce qu'elle te décrit suffit alors pour savoir quel chemin toi et ta nouvelle comparse alliez pouvoir prendre. Tu démarres à nouveau la voiture et tu accélères vers la direction. Tu avais déjà eu affaire à O'lakkan et à son gang par le passé et tu savais donc où était leur repère, une série d'entrepôts qui servaient auparavant à distiller le whisky irlandais, le chef de ce gang était très enraciné dans ses traditions c'est pour cela qu'il n'hésitait pas à faire ses petits larcins là-bas. Ton regard se concentre sur la route et lorsque la rouquine te demande si ce qu'elle te décrit te disait quelque chose tu hésites tout d'abords à lui réponde, il y avait encore un peu de méfiance en toi, tu ne pouvais pas t'en empêcher. Puis, tu te dis qu'elle méritait de savoir ce qu'elle pouvait potentiellement affronter.
« Il s'agit du repère des Irlandais de Woodside. Cet enlèvement sur mon fils m'était directement destiné, j'ai eu quelques petits problèmes avec eux. » Sans la regarder tu lui tendis la lettre du chef, la laissant prendre toutes les informations disponibles. « O'lakkan, le leader de cette petite sauterie ne m'a pas à la bonne et cherche à se venger de moi, enfin je crois. Heureusement, ce n'est pas très loin on y sera rapidement... »
La jeune-femme aux cheveux de flammes pourrait rapidement faire le lien entre tes activités et celle des Irlandais. Tu n'en avais que faire de son avis, après tout c'est elle qui avait décidé de t'aider dans cette quête. En revanche, qu'avait elle a y gagner à t'aider ? Était-elle motivée à rendre la justice par bonté d'âme ou pour des motifs d'argents ? À force de tremper dans les salles affaires, la notion de justicier t'étais difficile à comprendre. Le principal, c'était que tu possèdes une alliée remarquable, capable de déplacer les objets par la pensée et de lire dans l'esprit des gens. Si jamais cette personne souhaitait un jour faire mercenaire, nul doute qu'elle s'en mettrait plein les poches. D'ailleurs qui est-elle exactement ? Que fait elle dans la vie ? À vrai dire, tu ne connaissais pas plus que cela ta nouvelle coopératrice et elle d'un simple sondage de l'esprit pourrait très bien tout savoir sur toi d'un clin d'œil.
« Je ne t’ai pas demandé comment tu t’appelles. Simple curiosité bien entendu, j’aime savoir qui est l’héroïne qui sauve mon enfant des griffes des terribles salopards. De plus, je t’ai dit mon nom moi, c’est un signe de confiance. »
Pouvais-tu parler de confiance après avoir braqué une arme à feu contre cette mutante ? Difficile à dire, celle-ci te l'avait bien rendu. Pour toi ce malentendu faisait partie du passé. Ta tenue de route et ton respect vis-à-vis du code de la route n'était pas irréprochable, néanmoins il fallait aller vite pour pouvoir sauver rapidement Alyosha. Après un léger moment de route vous arriviez vers le lieu de toute les attentes et la demoiselle pouvait reconnaitre les plans de pensée des ravisseurs. Tu prends alors le temps de te garer dans un coin à l'abri des regards pour ne pas gâcher l'effet de surprise. Après avoir coupé le moteur ton regard froid se penche à nouveau sur ton acolyte de ce début de soirée. Malgré ses pouvoirs tu ne pouvais pas t'empêcher de vouloir lui faire comprendre que c'était toi le patron. Selon-toi il ne fallait pas qu'elle fasse n'importe quoi, la vie de ta progéniture était en jeu.
« Je vais être clair, il s’agit de mon fils. C’est moi qui tiens les commandes, tu n’agites pas une oreille sans que je te dise de le faire. Toi tu n’as rien à perdre contrairement à moi, donc prend ton mal en patience. On y va, on sauve mon fils et après chacun prendra son chemin. Je me suis bien fait comprendre ? »
Têtu et imbuvable ? Peut-être. Tu comprenais que la jeune-fille ne souhaitait pas s’éterniser ici et ta voix était certes de dur, mais calme. Malgré le fait que vous ne vous appréciez pas particulièrement il allait falloir que vous vous mettiez d’accord sur la marche à suivre.
Des Irlandais, avait-il dit... Au vu des accusations précédemment portées sur elle, en simple raison de la couleur de ses cheveux, Jean aurait pu le deviner. Un instant, elle eut envie de questionner son nouveau comparse pour tenter de comprendre ce qui avait poussé ces individus à s'en prendre à un enfant innocent, qui n'était en rien responsable des agissements de son père ; mais cette notion de conduite semblait échapper aux malfrats, qui n'entrevoyaient que la vengeance et le crime pour servir leurs propres intérêts. S'ils se faisaient la guerre pour quelques raisons futiles - du moins, aux yeux de Jean, ils étaient néanmoins semblables les uns aux autres : en d'autres lieux, en d'autres circonstances, n'aurait-elle pas aidé les Irlandais à sauver un enfant des griffes de Sergeï ? Épargnait-il ces âmes innocentes, contrairement à eux ? N'osant pas véritablement poser la question, de peur d'être agacée de la réponse, la rouquine attrapa simplement la lettre pliée qu'on lui tendait, la soumettant alors rapidement à son regard.
« "Une prime de dédommagement que tu nous dois" ? » Avait-elle lu à haute voix, plus pour elle-même que pour Sergeï, même si elle avait tourné son menton vers lui pour l'interroger silencieusement, haussant l'un de ses sourcils avec curiosité. Elle avait bien raison, son hôte n'était pas blanc comme neige, bien au contraire. « Je peux te demander ce que tu leur as fait pour les mettre autant en colère, ou tu vas me répondre que c'est un secret d'état ? »
Abandonnant la lettre de rançon sur le tableau de bord, Jean ne pouvait s'empêcher de se dire qu'elle s'était encore lancée dans une aventure qui allait la dépasser, et qu'il y avait de grandes chances pour qu'elle regrette ses choix. Le reste du trajet, la jeune mutante était restée silencieuse, contemplant le décor qui défilait derrière la vitre, jusqu'à ce que la voiture volée s'immobilise à l'abri des regards, sur un sentier désert. Le soleil déclinait au-dehors, et à travers les branches des arbres qui étaient sagement ballottées par le vent, on apercevait le toit de l'usine désaffectée, ainsi que quelques bruits qui témoignait d'une présence sur les lieux, en grand nombre. Défaisant sa ceinture, Jean s'apprêtait à sortir du véhicule lorsque la voix froide et sévère de Sergeï l'avait interrompue. Décidément, il était aussi aimable qu'une porte de prison, et pire encore : il ne retenait pas de leçon. Était-il en position d'ordonner quoi que ce soit, tant il avait besoin d'elle pour s'assurer de repartir vivant de cet endroit ? Refermant la portière d'un coup sec, Jean s'était tournée vers lui, les sourcils légèrement froncés.
« Je ne reçois pas d'ordre, sache-le. Si tu veux de mon aide pour sauver ton fils, on va travailler ensemble, mais tu vas changer de ton parce que je ne suis pas l'un de tes hommes qui obéit au doigt et à l'œil. »
Il était hors de question qu'elle se laisse marcher sur les pieds, pas après qu'il l'ait menacée avec une arme alors qu'elle voulait seulement lui apporter son soutien. Sortant de l'habitacle sans lui laisser le temps de réponse, la jeune fille avait claqué la porte de la voiture tout en portant son regard au loin, essayant mentalement de déterminer combien de personnes se trouvaient à l'intérieur du bâtiment. Pour intervenir, il fallait au moins avoir une bonne connaissance de l'environnement.
Les raisons qui ont poussé à ce que O'Lakkan enlève Alyosha ? Un simple échange d'arme qui devait se dérouler entre ton groupe de mercenaire et les Irlandais. Celui qui vous avait payé pour faire l'échange vous avait demandé de créer une entourloupe afin de voler les armes de ce gang. Il n'y avait rien de personnel dans le business, en tout cas pas pour toi. Tu ne souhaitais pas spécialement en parler avec ta nouvelle alliée, c'est pour cela que lorsqu'elle te posait la question, tu ne répondis pas. Si vraiment elle voulait le savoir, elle n'aurait qu'à fouiller dans ton esprit. Elle semblait faire ce qu'elle voulait après tout. Entre ne pas te dire son nom ou encore jouer les durs en ne t'obéissant pas. Lorsqu'elle claque la porte tu ne pouvais t'empêcher de lâcher un soupir avant de toi aussi sortir de la voiture. Tu charges alors à nouveau ton arme, te préparant cette fois-ci à une confrontation avec les hommes de Gregory O'Lakkan.
« Dans ma vie j’en ai vu des pestes, mais alors toi, tu en tiens une couche. C’est évident que je te suis reconnaissant pour ton aide, même si je ne comprends pas trop. En revanche, ça faciliterait la tâche si tu étais un peu plus attentif à ce que je dis. M’enfin si tu insistes à être têtu comme une mule… »
Tu interromps alors la conversation voyant la rouquine se concentrer pour analyser les lieux. Tu en profites alors pour commencer à marcher en direction du repère. Tu savais très bien où tu allais et tu n'avais pas besoin de la sorcellerie de la jeune-femme pour comprendre où était ton objectif. L'air commençait légèrement à se refroidir et il fallait une petite marche pour arriver vers l'endroit où était positionné les hommes de Gregory. Tu ne savais pas si ta comparse t'avait suivi ou si elle avait fait un détour pour prendre son propre chemin. Toujours est-il que tu n'as pas le temps de faire le baby-sitter. Après avoir aperçu deux hommes postés à l'entrée du repère de l'usine désaffecté tu te mets à couvert en faisant bien attention à ne pas te faire repérer. Tu dégaines alors une nouvelle fois ton magnum en visant la tête d'un des Irlandais présents pour faire le garde. Tout à coup tu sens à nouveau un regard se poser sur toi. Tu te retournes et tu aperçois la jeune-femme avec ses redondants sourcils froncés.
« Ne me dis pas que tu vas me faire le coup d’interdire de tuer qui que ce soit. » Dis-tu discrètement avant de lever les yeux aux ciels, voyant sa détermination. « Tu es vraiment pénible… »
Évidemment, ceux qui pensaient avoir une âme de bonté inqualifiable sont en général ceux qui ne souhaitent pas d'effusions de sang. Tu soupires à nouveau en rengainant ton arme derrière ta bandoulière. Dans un sens cela ne serait pas spécialement discret de faire entendre des coups de feu au groupe et le reste du gang pourrait rappliquer avec une grande vitesse. Tu sors alors de ta cachette toujours avec la discrétion du chat et le silence du serpent. Tu saisis l'un des hommes qui était de dos vers la gorge en plaçant une main sur sa bouche. Tu appuis ensuite sur les points de pression de son cou afin de le plonger définitivement dans l'inconscience. Tu le couches alors avant de t'occuper de ta prochaine cible. Toujours en essayant d'être discret tu t'approches suffisamment de l'homme avant de siffler. L'homme se retourne et se prend un coup de poing dans le plexus solaire qui a pour effet de couper sa respiration. Un dernier coup de poing dans les tympans font en sorte de le plonger dans les bras de Morphée. L'assaut n'a fait au final aucun bruit et personne n'a été tué.
« La voie est libre. »
Tu fais alors un signe à la rouquine pour qu'elle puisse à nouveau avancer. Après un petit moment tu mes ton bras en opposition pour la stopper en lui signifiant qu'il y avait d'autre personne plus loin. Deux hommes de main étaient assis à jouer aux cartes et ne vous avait pas encore repéré. Tu regardes alors ton alliée en lui demandant implicitement si elle pouvait faire quelque chose.
L'étonnement qui avait parcouru son visage, sitôt qu'il avait prononcé le mot peste pour la qualifier, aurait eu en d'autres circonstances une teinte des plus comique. Le menton légèrement baissé, les lèvres entrouvertes et un sourcil arqué, elle avait semblé le questionner silencieusement du regard sur le sérieux de son propos, sans pouvoir néanmoins faire l'usage de sa voix tant elle paraissait surprise, et pour cause : c'était bien la première fois qu'on employait un mot aussi dénigrant la concernant ! Du moins, pas en sa présence. Elle pouvait au moins lui reconnaître une certaine franchise, qui n'était pas tout à fait à son goût en cet instant, et qu'elle remettait dûment en cause tout en marmonnant tout bas, plus pour elle-même que pour les autres :
« Je ne suis pas une peste... Ni têtue... N'importe quoi... »
Mais l'homme ne s'était guère attaché à la surprise de son acolyte du jour, et avait même dégainé son arme en se faufilant au plus près du hangar d'apparence abandonné, tandis qu'elle recentrait ses pensées sur ce dernier, essayant de repérer combien de personnes se trouvaient à l'intérieur. L'effet de surprise et une bonne connaissance des lieux pourraient jouer à leur avantage, car ils n'étaient que deux contre ce qui lui semblait être une bonne dizaine de personnes. Si elle n'était pas en mesure de dire avec précision où chacune se trouvait, Jean pouvait toutefois ressentir et se formuler la présence des individus autour d'elle, par l'écho de leurs pensées lointaines, et lorsqu'elle fut suffisamment certaine de ses réflexions intérieures, la rouquine s'était empressée de rejoindre l'homme ayant la gâchette bien trop facile. Encore une fois, illustrant parfaitement l'image qu'elle se faisait de lui, Sergeï avait son magnum pointé en direction de deux gardes qui scrutaient les alentours, solidement armés. Était-ce réellement indispensable de les tuer ? Elle pensait bien évidemment que non, mais se doutant qu'il ne l'écouterait pas, malgré tous les mots qu'elle pourrait formuler, elle s'était contentée de laisser son regard parler pour elle ; étonnamment, il l'avait entendu.
« Arrête de dire que je suis pénible, je n'ai rien dit ! »
Agacée, elle avait fait de son mieux pour parler tout bas, malgré le ton impatient qui avait animé sa voix. Mais elle n'allait pas s'en plaindre, car Sergeï faisait preuve d'une étonnante bonne foi, rangeant son arme comme pour signifier qu'il ne ferait pas de victime inutile, du moins pas aujourd'hui. Plutôt que de répandre le sang de ses ennemis, il avait usé de techniques d'attaque aussi surprenantes que fascinantes, la laissant un instant songeuse. Où avait-il appris tout ça ? Pensant qu'il lui faudrait se méfier de lui, car les deux gardes étaient à présent inconscients sur le sol, ressemblant à des marionnettes dont on aurait coupé les fils, Jean avait suivi Sergeï sans dire un mot, jusqu'à ce qu'il interpose son bras devant elle, lui signifiant silencieusement qu'un obstacle leur barrait la route. Assis autour d'une étroite table basse, deux hommes jouaient aux cartes en échangeant quelques mots quant aux projets de leur chef, se réjouissant ouvertement de son audace pour l'enlèvement d'un enfant en pleine journée. Quand bien même il lui inspirait autant de mépris que de répulsion, Jean refusait d'être l'instrument funeste d'une vengeance aveugle.
« Suis-moi. »
Plutôt, elle avait appliqué la pulpe de ses doigts contre sa tempe, bloquant leurs esprits afin qu'ils ne puissent pas les voir lorsqu'ils avaient traversé le terrain jusqu'au hangar, dont les portes étaient entrouvertes. Maintenant sa paralyse mentale jusqu'à ce qu'ils soient à l'intérieur de l'usine, Jean avait profité de l'obscurité de certains coins pour s'y fondre, voulant tout d'abord prendre ses repères dans cet endroit inconnu : de toute évidence, l'enfant n'était pas ici, du moins, il était retenu dans une autre salle, et celle-ci ne servait que de passages aux Irlandais. En entendant des pas se rapprocher, elle avait posé un regard soucieux sur Sergeï, usant de sa télépathie même s'il ne l'appréciait pas, car il était préférable de l'agacer plutôt que de se faire repérer.
« Il faut que je fouille dans sa tête pour voir où est ton fils, mais il doit rester dans les parages quelques secondes... »
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