Vendredi 16 février 2024. Institut Charles Xavier. 18h00.
Le ton de mon frère était grave. Cela ne lui ressemblait pas. Il était inquiet. Même si peu pouvait le lire sur son visage je savais reconnaître le moindre signe d'inquiétude. Un sourcil un peu haussé, des rides plus marquées sur le front. Son discours devant l'ensemble des mutants présents à l'Institut, élèves et professeurs avait été bref mais concis.
- "Prenez soin de vous. Ne traînez pas dehors seul. Restez chez vous."
Voilà quelques mots qu'avaient prononcé mon frère devant une assemblée attentive et effrayée. Certes pour les élèves ce discours était indispensable. Notamment envers nos mutants adolescents qui se voyaient déjà comme les futurs héros de demain. La faute de ces Avengers qui s'affichent publiquement dès qu'ils sauvent un chaton dans un arbre. Non. Calme toi Raven. C'est grâce à eux si tu es encore là, debout, parmi les tiens. Face aux autres et surtout face aux élèves j'hochais la tête gravement, mais à l'intérieur je bouillais.
Comment Charles pouvait-il laisser faire sans ne serait-ce qu'envoyer quelques uns d'entre nous enquêter ? Comment pouvait-il rester en retrait ? A la fin de son discours les élèves rentrèrent chez eux ou dans leur chambre la peur se lisant dans le visage de ceux qui ne dormaient pas sur place.
Je m'attendais à ce que Charles nous prennent à part, nous les adultes, les professeurs de l'école. Logan, Hank et moi au moins ! Mais rien ... Il n'y eut pas de second discours ou de missions. J'échangeais un regard avec Hank qui compris que j'avais été déçue. Depuis notre retour à la vie je m'étais efforcée de ... prendre sur moi. D'être celle qu'on voulait que je sois mais parfois je n'avais qu'une seule envie. Partir, pas pour toujours mais pour ... voir autre chose. Une petite mission ... de temps en temps. Voilà ce qu'il me fallait. Logan posa sa main sur mon bras pour me retenir de parler. Je pinçais mes lèvres comprenant que je devais le faire, plus tard seul à seule. Frère contre soeur.
- Charles ? Ce soir j'aimerai te voir dans ton bureau veux-tu ?
Ce n'était pas formulé comme un ordre mais cela en était un. Accompagnée de Hank et Logan je partis en direction du gymnase pour évacuer ce trop plein de colère que j'avais en moi. Je devais me concentrer pour ne pas ... dire ce que je pensais là tout de suite maintenant. Je devais être moins impulsive.
- Préparez-vous j'ai besoin d'évacuer.
Dis-je aux deux hommes alors que nous nous dirigions vers le gymnase au sous-sol de l'Institut. Un endroit qui nous étaient presque réservé exclusivement à nous, les X Men. Ou du moins ceux qui étaient encore en vie. S'en suivi un entrainement assez poussé de près de deux heures. Et c'était bien ce dont j'avais besoin.
Plus tard dans la soirée.
Je laissais Hank et Logan seuls me dirigeant vers le bureau de mon frère. Une fois à l'intérieur je poussais d'un mouvement de main quelques babioles, un presse papier avec quelques dossiers en dessous, penchant la tête sur le côté pour en lire l'intitulé. "Chasseur de tête". Hum ... Cela m’intéressais. Mais j'allais devoir attendre. Je m'assis sur le bureau de mon frère, jambes croisées, reprenant ma forme bleue originelle. Je savais qu'il était toujours gêné lorsque j'étais sous ma forme naturelle "sans vêtements". Je posais mon regard jaune sur lui, le suivant au rythme de son avancée grâce à son fauteuil. Il avait toujours cette mine inquiète. Il devait forcément nous cacher quelque chose.
- Charles ? Tu as rien à me dire ?
Je voulais qu'il me le dise tout seul. Sans avoir à trop lui tirer les vers du nez mais je connaissais son entêtement, similaire au mien. Je plissais légèrement les yeux pour lui faire comprendre que j'attendais une réponse.
Je ne te laisserais pas le choix de toutes manières. Tu ne pourrais te dérober. Quitte à être la Raven du temps d'Erik. Rien qu'à cette pensée un petit frisson me parcouru. Je repris mes esprits attendant des réponses. Mais allais-tu m'en donner ? Allais-tu enfin me confier une mission autre qu'enseigner à des jeunes mutants ?
"Have you ever looked at a tiger and thought you ought to cover it up? You are an exquisite creature, Raven. All your life the world has tried to tame you. It’s time for you to be free."
Ça n'avait pas été un discours simple à tenir. Mais il avait été nécessaire. Depuis quelques jours, les médias locaux ne parlaient plus que du tueur en série qui sévissait sur New-York, d'autant plus depuis qu'il avait été découvert que les victimes étaient toutes des mutants. Il était donc important pour le professeur Xavier de rassurer ses élèves, mais aussi de les inciter à la prudence. Tous ces jeunes étaient sous sa protection, et avec les départs en weekend, il était essentiel de prendre des dispositions pour les protéger au mieux.
Après le discours qui jeta un froid dans l'assemblée des mutants, commença le ballet des départs pour ceux qui rentraient chez eux. Charles y assistait, comme tous les vendredis. Il fut cependant étonné de voir certains professeurs rester également. Lorsqu'il porta son regard sur sa sœur, il devint évident qu'elle avait quelque chose à lui dire. Il haussa un sourcil et lui adressa un signe de tête interrogatif, elle lui annonça vouloir le voir ce soir dans son bureau.
« Bien sûr Raven. Quand tu voudras. »
Il n'avait pas besoin de lire dans ses pensées pour constater qu'elle était contrariée. Son regard était dur, sa voix un peu sèche, ses lèvres pincées comme si elle se retenait de dire quelque chose, et elle tourna aussitôt les talons pour entrer dans le Manoir. Charles n'eut guère le temps de s'en préoccuper d'avantage, car il perçut quelques instants plus tard l'arrivée inattendue d'un vieil ami…
Il était près de 20h à présent. Erik était reparti depuis un moment déjà, laissant un Charles Xavier pensif et inquiet dans son bureau. La télévision était allumée sur la chaîne des infos locales, mais il ne la regardait pas vraiment. Il fut tiré de ses réflexions par l'arrivée de Raven. A cette heure, la plupart des pensionnaires restants devaient soit être au réfectoire, soit se préparer pour aller dîner. Ce devait être important pour qu'elle vienne le voir à l'heure du repas, à un moment où ils seraient quasiment certains de ne pas être dérangés.
Il éteignit la télévision et observa sa sœur s'installer sur son bureau dans un mouvement souple. Il eut un léger sourire. Son bureau, de la taille d'un petit appartement, comportait un coin salon avec des fauteuils confortables, mais elle préférait s'asseoir sur le bureau… Il détourna pudiquement le regard lorsqu'elle se mit à nu devant lui. Il trouvait toujours cela indécent, mais tant qu'elle ne le faisait pas devant les élèves, il tâchait de ne rien lui dire.
Il attendait qu'elle parle, qu'elle lui déballe ce qu'elle avait sur le cœur. Il n'avait pas eu le temps d'y réfléchir, mais il avait plusieurs idées en tête. Restait à savoir s'il avait visé juste. Mais elle se contenta de lui poser une question, de lui demander s'il avait quelque chose à lui dire. Il l'observa calmement, fixant résolument son visage pour ne pas avoir à contempler les formes de sa sœur, et pencha légèrement la tête sur le côté en signe de perplexité, avant de répondre d'une voix douce :
« C'est drôle, je pensais que c'était l'inverse... »
Il lui adressa un sourire un brin malicieux, mais vit à son regard déterminé qu'elle ne semblait pas d'humeur à plaisanter. Il fut alors saisi d'un affreux doute. Se pourrait-il... ? Non, elle se trouvait dans le gymnase durant toute la visite d'Erik, elle ne pouvait pas être au courant de sa venue... Arborant une expression plus sérieuse, il posa à son tour une question.
Un point pour moi. Tu étais visiblement toujours autant gêne par ma forme bleue sans vêtements. Malheureusement mon point ne fut qu'une courte avance car comme à ton habitude quand tu ne voulais pas répondre à des questions tu jouais la carte de l'humour puis de la question inversée. Je me concentrais néanmoins pour bloquer mon flux de pensées ne voulant pas que tu viennes farfouiller dans mon cerveau. Tu m'avais promis de ne plus le faire.
- Tu le sais très bien.
Je décidais de rester assez vague espérant que tu te trahisses tout seul et que tu lâches enfin le morceau. Que tu me donnes tous les détails et surtout que tu m'impliques dans cette affaire où malgré tes dires tu semblais déjà impliqué. Je ne me doutais pas une seule seconde qu'Erik avait été parmi nos murs. Si j'apprenais par mégarde que tu m'avais caché cela je l'aurai très, très mal pris et j'aurai réagis non pas comme une adulte mais comme une adolescente.
- Je viens rarement dans ton bureau seule.
Ne pas penser à la fois où je m'étais retrouvé en fâcheuse posture avec Hank sur ton bureau ici même. Ne pas penser à la fois où je m'étais retrouvé en fâcheuse posture avec Hank sur ton bureau ici même. Ne pas penser à la fois où je m'étais retrouvé en fâcheuse posture avec Hank sur ton bureau ici même. Ne pas penser à la fois où je m'étais retrouvé en fâcheuse posture avec Hank sur ton bureau ici même. Ne pas penser à la fois où je m'étais retrouvé en fâcheuse posture avec Hank sur ton bureau ici même.
Heureusement c'était il y a longtemps. Avant toute cette histoire avec Thanos et même avec Apocalyse. Je secouais la tête légèrement comme pour me remettre les idées en place alors que je reposais le regard sur toi, inquisitrice.
- Tu me caches quelque chose. Je le sens.
Au début pas du tout mais tu avais cette attitude là quand tu voulais dissimuler un fait. Le calme. La tempérance. L'inflexibilité. Mais au fond de toi je sentais bien que tu étais perturbé. Encore plus que tout à l'heure lors de ton petit discours. C'était assez étrange d'ailleurs car tu étais déjà tellement grave dans tes propos. Qu'avait-il pu se passer en à peine deux heures ? Deux heures où je m'étais bien défoulée, Logan ayant encaissé de nombreux coups.
- Je ne suis visiblement pas la seule a être tourmentée...
Dis-je en désignant d'un geste de la main le dossier que j'avais repoussé quelques minutes auparavant avant de m’asseoir sur ton bureau. Je mourrais d'envie de l'ouvrir et de voir quelles informations tu avais récupérées de plus que celles que la presse nationale relataient déjà. Oh et puis tant pis. Tu ne roulerais pas assez vite pour m'en empêcher. Je poussais le presse papier puis pris le dossier, l'ouvrant commençant à observer le fruit de tes recherches. En quelques secondes rien qu'a soupeser le dossier je vis qu'il était loin d'être vide. Se pourrait-il que toi, Charles Xavier, tu mènes ta propre enquête sans m'impliquer ? Ni moi ? Ni Hank ? Ni Logan ? Quel était donc cet homme que j'avais en face de moi. Qu'avait-on fait à mon frère ?
"Have you ever looked at a tiger and thought you ought to cover it up? You are an exquisite creature, Raven. All your life the world has tried to tame you. It’s time for you to be free."
Raven pouvait lire en lui comme dans un livre ouvert. Ils avaient grandi ensemble, et se connaissaient mieux que n'importe qui. Cela ne signifiait pas pour autant qu'ils se comprenaient toujours, qu'ils étaient toujours d'accord. Loin de là. Leur relation s'était compliquée à l'âge adulte, avec l'arrivée de Erik et la volonté de Raven de s'assumer telle qu'elle était, quitte à prendre des risques, trop de risques. Depuis qu'ils s'étaient retrouvés, Charles marchait un peu sur des œufs. Il parvenait moins qu'avant à cerner les souhaits de sa sœur, et ne savait comment renouer le lien si fort qu'ils avaient eu étant enfants.
Il ne pouvait pas rétorquer qu'il ne lui cachait rien, car malheureusement ça aurait été un mensonge. Il estimait agir pour son bien. Il estimait que le retour d'Erik dans la vie de Raven ne pourrait que bouleverser encore leurs existences, plus pour le pire que pour le meilleur. Après tout, n'avait-il pas tenté de la tuer à Paris ? N'avait-il pas combattu contre ses anciens amis en Egypte ? Il avait peut-être ouvert les yeux de sa sœur autrefois, mais il lui était nocif.
« Il va falloir que tu sois plus spécifique. J'ai beaucoup d'affaires à gérer, et je ne peux pas constamment tout partager avec toi... »
Elle pointa du doigt le fait qu'il était tourmenté lui aussi. Certes. Attendait-elle de lui qu'il se livre à elle ? Ca avait toujours été compliqué. Il avait toujours tant tenu à entretenir cette image de grand frère parfait, qui maîtrisait tout et pouvait tout résoudre, qu'il s'était forgé une carapace et refusait que Raven voie ses faiblesses. Il se confiait donc peu à elle sur ses ressentis personnels, mais elle n'était pas dupe, elle sentait lorsque quelque chose le préoccupait.
Elle se saisit du dossier du chasseur de têtes qui était posé sur son bureau, et commença à le feuilleter. Il contenait les rapports détaillés de la police avec les identités des victimes, de nombreux articles de presse relatant cette sordide affaire et donnant l'avis des journalistes, ainsi qu'un dossier assez complet sur l'inspecteur en charge de l'affaire. Charles avait visiblement fait beaucoup de recherches. Il y avait sur ces pages de nombreuses annotations, des réflexions personnelles, des phrases surlignées. Sentant qu'il ne pourrait se dérober au regard inquisiteur de Raven, il prit les devants et commença à s'expliquer.
« Tu as raison. Cette affaire me préoccupe beaucoup. Je la suis de très près, à titre personnel, simplement pour m'assurer que les choses ne vont pas déraper. Je crains une vendetta, j'ai peur que des mutants se mettent en tête de faire justice eux-mêmes. Pour l'heure, l'opinion publique nous est favorable, et la majorité condamne les actes du Chasseur de têtes. Mais il suffirait que des mutants s'en mêlent, qu'ils répondent à la violence par la violence, pour que la situation dégénère. »
Pour le coup, il était parfaitement sincère sur ses intentions initiales. Même si entre temps, la situation avait changé, et qu'il avait conclut avec Erik qu'il retrouverait l'endroit où les mutants étaient enfermés et qu'ils iraient les libérer tous les deux. Cela, il se gardait bien de le dire à Raven.
Moi aussi j'avais senti ce changement. Cette différence entre nous depuis mon retour. Je t'avais abandonné. Je ne me le pardonnerai jamais. Mais je faisais tout pour me racheter. Et être ici, donner des cours à des enfants ... Je le faisais pour toi. Pour nous. Pour espérer retrouver notre relation d'avant. Mais nous n'étions plus des enfants. Nous avions grandi. Ensemble ou séparément avec nos blessures respectives. Et pour certaines elles étaient encore bien profondes. Je savais que lors de ma relation avec Erik tu étais ... tu n'étais plus toi. Je ne t'en avais jamais parlé. Mais je n'avais pas eu besoin de le faire. Mon comportement me trahissait toujours. Au moindre soucis j'accourais pour le sauver. Ce grand "méchant" avait au final bien souvent besoin d'aide... J'avais cependant toujours en tête le fait qu'il ait voulu me tuer à Paris ... Malgré notre histoire... Intense.
Heureusement qu'il ne lit pas dans mes pensées ... Me dis-je alors à moi même. Il allait vraiment falloir que je fasse quelque chose. L'enfermement avec des adolescents et surtout deux adultes comme Logan et Hank ne me réussissait pas. Trop de tentations... J'allais devoir sortir un peu de ce manoir. J'avais tendance à un peu trop repenser au passé ou à avoir des fantasmes ... Très ... Pas très catholique.
Je déglutis tout de même les photos et les articles devant mes yeux me rappelant ceux que j'avais trouvé dans le bureau de Trask. Cet homme abject qui avait fait des expériences des plus atroces sur mes frères et sœurs mutants. Je sentis une colère en moi resurgir. Cette même haine que j'avais éprouvé il y a plusieurs années.
- Comment peux-tu laisser faire ça ? Comment peux-tu ... ?
Je posais le regard sur toi totalement perdue. Je sentais presque les larmes me monter aux yeux en me rendant compte que tu ne m'avais même pas demandé mon avis. Je pinçais mes lèvres fermant les yeux un instant pour retenir mes larmes. Je ne pouvais pas pleurer devant toi même si je me sentais trahie.
- Mais pourquoi ne m'a tu rien dis ? Je ne suis plus une gamine qui serait partie avec l'envie de tuer.
Bon d'accord en y réfléchissant bien peut-être que ... Pas forcément tuer. Mais ... Blesser. Douloureusement. Ou faire subir les mêmes tortures. Ou ... le livrer à la police. Mais si cet homme était un mutant ? Que ferais-je ?
- Je suis une femme. Une femme adulte. Je pourrais t'aider dans ton enquête. Aller poser des questions. Me faire passer pour la police. Faire parler des hommes. Ne me sous estime pas Charles.
Je rouvris les yeux posant mon regard sur toi alors que je tenais toujours le dossier ouvert dans mes mains, le rapport de police m'appelant afin que je le lise en détails.
- Tu n'as plus besoin de me protéger sans cesse. Je t'aime mais ... Tu peux aussi vivre pour toi et arrêter de penser un peu aux autres Charles.
Je t'aime. Je ne l'avais pas dis depuis bien longtemps. Et... Tu étais peut-être le seul à qui je l'avais dis. J'avais ressenti ce sentiment d'amour quelques fois mais je ne l'avais jamais oralisé. Trois petits mots ... Tout bête mais tellement important.
- Nous ne sommes pas tous des enfants que tu dois surveiller. Avec Hank et Logan ... Tu peux compter sur nous. Tu dois nous faire confiance. Arrête de porter le poids du monde sur tes épaules.
J'hochais la tête lentement comme si je validais moi-même mes paroles. Je décroisais mes jambes posant le dossier sur mes genoux me penchant un peu vers l'avant vers toi. Mon regard jaune était perçant, et je savais qu'il pouvait être perturbant.
- Comment puis-je t'aider Charles ?
Je sentais que malgré mon petit discours j'allais faire chou blanc et tu allais encore te dérober mais je ne pourrais pas me reprocher de ne pas avoir essayé. Soit tu allais me répondre honnêtement soit tu fuirais en te dérobant subtilement. En quelques secondes à peine mon regard jaune se transforma en mes yeux "humains". Je gardais mon apparence bleue mais prenais des yeux plus ... "humains".
- Il est des nôtres ? Mutant ? Humains ? Alien ? Animal ? Le tueur.
J'avais besoin de le savoir. Je me doutais que mon flot de questions ne serait pas facile à endiguer mais tu étais suffisamment intelligent pour tout retenir. A bien y réfléchir dans mes propositions ... J'avais peut-être exclu d'autres catégories intéressantes comme .. les dieux par exemple où les humains aux supers costumes.
"Have you ever looked at a tiger and thought you ought to cover it up? You are an exquisite creature, Raven. All your life the world has tried to tame you. It’s time for you to be free."
Même s'il se refusait à lire dans les pensées de sa sœur, il percevait la colère et la tristesse monter en elle, tandis qu'elle parcourait le dossier et qu'il lui expliquait ce qu'il avait fait. Sa réaction le surprit, et il eut un léger mouvement de recul, tout en fronçant les sourcils. Il avait, une fois de plus, l'impression d'entendre Erik. Il se ferma immédiatement et détourna son regard d'elle. Afin de se donner une contenance, il se dirigea vers le minibar et se servit un verre de whisky.
Son cœur se serra lorsqu'elle lui reprocha de ne rien lui avoir dit. Pourquoi l'aurait-il fait ? Il ne voulait surtout pas impliquer qui que ce soit dans cette affaire. Erik et lui, c'était déjà trop. Lorsqu'elle s'exprima sur le fait qu'elle était une adulte et qu'elle n'avait plus besoin de sa protection, il se raidit et avala une gorgée de whisky. Les mots d'Erik, prononcés peu de temps avant, lui revinrent en mémoire. "Comme dans tes habitudes Charles, tu oublies que tes X-men ne sont plus des enfants et tu continues tout de même de les couver." Il comprenait ce qu'ils voulaient dire, mais il ne voyait pas les choses ainsi.
Il la laissa s'exprimer en se contenant pour rester calme. Il ne voulait pas s'engager dans un débat houleux ou une dispute, il avait déjà donné avec Erik. Les yeux résolument fixés sur son verre, un étonnement passa sur son visage lorsqu'elle lui annonça qu'elle l'aimait. Il n'avait pas entendu ces mots dans la bouche de Raven depuis vingt ans...
Mais il y avait un "mais". Lorsqu'elle enchaîna en lui reprochant de trop penser aux autres et pas assez à lui, il tourna la tête vers elle avec un air incrédule, voire un peu vexé. Comment pouvait-elle lui reprocher cela ? Après tout ce qu'il avait construit, tout ce qu'il avait traversé ? Aurait-elle préféré qu'il baisse les bras, qu'il laisse tout tomber, comme il l'avait fait autrefois ? Et par la faute de qui ?
Une fois de plus, il ne répondit rien. Il encaissait les reproches de sa sœur en silence. Elle lui balança ensuite qu'en somme il ne déléguait pas assez, qu'il fallait qu'il leur fasse un peu confiance. Qu'il arrête de porter le poids du monde sur ses épaules. Ces dernières phrases le radoucirent un peu. En fin de compte, elle s'inquiétait pour lui. Elle ne demandait qu'à l'aider. A présent qu'elle avait dit tout ce qu'elle semblait avoir à dire, il put lui répondre, avec son calme habituel et déroutant :
« Je ne te sous-estime pas Raven. Et je sais que je peux compter sur toi. Mais la question n'est pas là. »
Il avala une seconde gorgée d'alcool. Elle lui demanda comment elle pouvait l'aider. Il allait falloir qu'il use de beaucoup de diplomatie et de délicatesse, car la réponse risquait de ne pas lui plaire. Il termina son verre et le posa sur la table basse, avant de revenir vers sa sœur et de se poster devant elle. Lorsqu'elle lui demanda des informations sur le tueur, il posa doucement sa main sur le dossier et hocha négativement la tête. Il plongea ses yeux clairs dans les yeux humains de Raven, et répondit avec beaucoup de douceur :
« Raven... Nous ne sommes pas des super-héros. Nous n'avons pas à intervenir. Si je le fais, c'est uniquement pour m'assurer que la situation ne dégénère pas, et parce que je peux aider sans que cela se sache. »
Je te regardais pivoter et rouler vers ton espèce de mini-bar et cette fameuse bouteille de whisky qui semblait diminuer bien vite. Bien plus vite qu’avant. T’étais-tu mis à boire récemment ? Je fronçais les sourcils encore plus me doutant que c’était une de tes manœuvres pour gagner du temps mais je ne dis rien. Je préférais te laisser faire pour voir dans quel plan tu allais encore m’embarquer. Même si je me doutais que tu cherchais tout simplement un moyen pour me détourner de mon objectif. Je déglutis difficilement en observant que tu essayais de noyer le poisson. Charles Charles Charles… La voix dans ma tête était dépitée.
- Nous ne sommes certes pas des super héros qui se baladent avec des petits costumes moulants, inutiles pour la plupart et avec des gadgets.
Evidemment je faisais référence à certains héros, les Avengers, leur espèce d’archer en costume trop moulant pour son âge, Clint je ne sais pas quoi, ou bien la cape ridicule et inutile, selon moi du fameux Docteur Strange.
- Je pense être la personne la plus qualifiée dans cette partie du globe pour passer inaperçue « sans que ça se sache ».
Je fis les guillemets avec mes doigts pour bien souligner le ridicule de la situation. J’espère que tu comprenais le sous-entendu et le ridicule de la situation.
- Aurais-tu oublié momentanément le caractère de ma mutation ?
Dis-je avec une voix qui n’était pas la mienne mais belle et bien la tienne. Je n’aimais pas forcément avoir recourt à ce genre de stratagème mais parfois cela avait du bon.
- Qu’est ce qui te fait penser que tu dois être le seul à être impliqué ? Tu as peur que je redevienne comme avant c’est ça ?
Je fis mon regard encore plus intense reprenant ma voix à moi ainsi que mon physique d’humaine et des vêtements. Ma stratégie ne me permettait plus de marquer des points avec ma véritable forme.
- Que je redevienne la Raven que j’étais avec Erik ?
Rien que de prononcer ce prénom devant Charles mes faisait souffrir et cela se voyait je n’arrivais absolument pas à le cacher. Je tirais nerveusement sur mon chemisier blanc. J’étais partagée entre l’exaspération, la colère et la compréhension.
- Tu sais très bien que je ne vais pas en rester là. Et que si il le faut je ferai mon enquête seule.
Têtue ? Moi ? Non jamais. Ce n’était absolument pas mon genre voyons. Je me voyais déjà m’éclipser de la maison dans la nuit noire. Foncer au garage et enfourcher une moto. Je laisserai celle de Logan, je savais qu’il y tenait vraiment. Et malgré tes recommandations et tes conseils si sages j’irai, seule, en ville, chercher des indices et me renseigner sur les mutants en ville. Je passerai inaperçue. Je le savais. Ce n’était pas comme si je pouvais me transformer à ma guise. Je descendais de ton bureau pour me poster face à toi, mes deux mains sur tes accoudoirs, penchée vers toi, assez près de ton visage un petit air de défi dans la voix et le regard.
- Tu ne pourras pas m’empêcher de faire ce que je veux de toute façon Grand Frère…
Tu n’oserais pas t’insinuer dans mon cerveau et me bloquer. Non…. Si ? Je devais bien avouer qu’en ce moment je doutais vraiment de ce que tu ferais pour m’en empêcher et je n’étais pas si confiante que ça d’avoir joué à ce petit jeu.
"Have you ever looked at a tiger and thought you ought to cover it up? You are an exquisite creature, Raven. All your life the world has tried to tame you. It’s time for you to be free."
Lorsqu'elle évoqua les costumes moulants et les gadgets de super-héros, Charles esquissa une moue amusée, l'air de dire qu'ils n'en étaient pas si loin. Après tout, leurs tenues noires de X-Men étaient toujours entreposées dans l'une des salles de stockage du second sous-sol, et il avait conservé en souvenir son costume bleu et jaune des évènements de Cuba. Mais cette époque était révolue.
Il fronça légèrement les sourcils et entrouvrit la bouche lorsqu'elle contra ses arguments. En effet, de par sa mutation, elle disposait des atouts appropriés pour être la parfaite enquêtrice anonyme. Se l'entendre dire avec sa propre voix lui fit comprendre qu'elle avait absolument raison sur ce point. Mais il n'y avait simplement pas songé. Pas une seconde, il n'avait pensé à impliquer les membres de son équipe d'enseignement. Car c'était ce qu'ils étaient à présent, des professeurs. Pas des enquêteurs, pas des sauveurs, pas des héros.
Cela n'avait rien à voir avec le fait qu'il n'aie pas confiance en elle, ou qu'il aie peur qu'elle "redevienne comme avant", comme elle le disait. Elle évoqua douloureusement la sombre période où elle était partie avec Erik, une époque dont il voulait en savoir le moins possible. Il fut surpris, et même peiné, qu'elle puisse penser cela. De l'eau avait coulé sous les ponts depuis. Il plissa les yeux, se retenant de les lever au ciel, et répondit :
« Mais non, voyons... »
Et pourtant, une petite voix dans sa tête ne put s'empêcher de lui rappeler que lorsqu'Erik était venu à l'Institut en fin d'après-midi, Charles avait consciencieusement vérifié où se trouvait Raven, afin d'être certain qu'elle ne le croiserait pas... Savoir qu'elle allait enquêter par elle-même ne l'enchantait pas. Mais bien sûr, il ne l'en empêcherait pas. Tant qu'elle restait anonyme et qu'aucune implication violente ne pouvait mettre en cause des mutants, il ne voyait pas pourquoi il aurait quoi que ce soit à y redire.
Elle descendit du bureau et se pencha vers lui, posant ses mains sur les accoudoirs de son fauteuil, l'obligeant à retirer les siennes qu'il replia contre son abdomen, doigts entrecroisés. Lorsqu'avec un air malicieux elle le mit au défi de l'empêcher d'agir, Charles répondit en premier lieu par un sourire amusé, pensant qu'elle jouait le jeu de la petite sœur rebelle. Mais lorsqu'il lut le doute dans les yeux de Raven, son sourire s'évapora pour laisser place à de l'étonnement et de l'inquiétude. Il répondit d'une voix lente, presque un murmure :
« Tu en doutes... Mais quelle image as-tu donc de moi ? »
Ressentir l'appréhension chez sa petite sœur, avoir la sensation qu'elle le percevait comme une sorte de dictateur qui nuirait à ses libertés... cette douloureuse impression lui serrait le cœur. Comment pouvait-elle penser une chose pareille ? Certes, il l'avait beaucoup protégée lorsqu'elle était plus jeune, parce qu'il s'était toujours senti responsable d'elle. Mais jamais il ne s'était considéré comme un tyran l'empêchant de s'épanouir. C'était l'opposé total de ce à quoi il aspirait.
« Raven, je ne t'ai jamais empêchée de quoi que ce soit... Tu as toujours été libre de tes choix... »
Il posa sa main sur celle de Raven et la serra doucement, dans un geste fraternel. La tristesse se lisait dans son regard et se percevait dans sa voix. Cela n'avait rien à voir avec cette histoire d'enquête. C'était un mal plus profond, et cette affaire n'avait été qu'un déclencheur.
« Qu'est-ce qu'il y a ? Parle-moi Raven... Qu'est-ce qui te contrarie réellement ? »
Même si toi, mon grand frère tu répondais non concernant le passage où j’évoquais Erik je savais, sans n’avoir aucunement besoin d’être télépathe, que la réponse était « Oui » et non pas non. C’était d’ailleurs bien la raison pour laquelle je n’étais pas, encore, au courant de la visite d’Erik quelques heures plus tôt.
C’est juste que .. non je ne pouvais pas lui dire. Je savais qu’il serait blessé si je disais entièrement la vérité. Je devais faire attention au moindre de mes mots. Je voulais effectivement jouer avec toi quand je m’étais rapprochée de la sorte aussi près de toi mais ton expression changea à nouveau pour laisser place à un geste d’amour : me prendre la main.
Pourquoi avais-tu fait cela ? Avais-tu lu dans mes pensées et vu ce que je ressentais réellement ? A vrai dire je ne le savais pas vraiment moi-même j’avais toujours eu du mal à exprimer mes sentiments. Tu semblais si triste quand tes yeux se posèrent dans les miens que cela ne pouvait être que la seule explication. Tu avais lu dans mes pensées malgré mon interdiction. Mais je ne savais pas pourquoi je n’éprouvais pas de colère ni de rancœur à ce propos. Ce qui n’aurait pas été le cas dans une autre situation.
Cependant ta dernière question me fit douter.
« Qu'est-ce qu'il y a ? Parle-moi Raven... Qu'est-ce qui te contrarie réellement ? »
Non … Tu n’avais rien lu ou vu dans ma tête. Tu étais juste inquiet pour moi comme moi je pouvais l’être pour toi depuis quelques temps. Je pinçais mes lèvres, baissant le regard n’osant pas affronter le tien. Quelques instants plus tard mon pouce caressa, fraternellement aussi la main que tu avais posé sur la mienne.
- Je … Charles. J’aime les élèves. Tu le sais. Défendre les mutants a toujours été une cause profondément ancrée en moi … Mais … J’ai besoin de plus. Je veux retrouver les X-Mens. Je veux pouvoir sortir de chez nous et partir en mission. Ne serait-ce que venir avec toi pour le recrutement des jeunes mutants en détresse. Retrouver un peu d’actions. Cette vie … là … est trop tranquille. Tu sais que j’aime me battre.
Depuis des mois je n’avais pas mis un seul pied en dehors du manoir et cela commençait vraiment à se ressentir sur mon équilibre psychique. La sédentarité, maintenant que j’avais connu une vie de nomade ne me réussissait pas vraiment. Je ne savais pas comment tu allais prendre mes paroles mais j’avais pesé soigneusement mes mots. Je savais que je n’étais pas prisonnière de cet endroit, que j’avais des responsabilités vis-à-vis des élèves mais j’avais réellement besoin de plus. Et je savais que j’en étais capable. Je savais que je pouvais aider encore plus la cause mutante.
- Dis moi que tu m’impliqueras plus dans tes aventures Charles …
Je savais que tu me cachais quelque chose mais tu n’avais pas l’air non plus de trop vouloir en parler. Chacun son tour, c’était de bonne guerre. Pendant toutes mes prises de paroles ma voix avait été des plus douces et ne marquait absolument aucune agressivité ou aucun reproches. Je parvenais juste, enfin à exprimer ce que j’avais sur le cœur. Cela faisait bien longtemps que nous n’avions pas parlé de la sorte. A cœur ouvert, en toute franchise l’un envers l’autre. Nos moments me manquaient d’ailleurs aussi. Nous avions du mal à nous retrouver seul, en famille pour partager des moments de complicité ensemble.
- Tu me manques tu sais Charles…
Je t’aime et … tu me manques dans la même conversation, la même journée ? Je devais profondément le ressentir pour l’avoir exprimé de la sorte. Surtout à voix haute, et encore plus face à toi. Devant les autres je n’avais aucun mal à dire que je t’aimais ou que nos moments passés me manquaient, mais devant toi c’était une autre affaire. Mais si nous nous connaissions, du moins avant, par cœur, depuis Cuba quelques choses avaient changé entre nous. Je voulais retrouver mon grand frère d’avant. Celui qui pour fêter sa thèse avait ingurgité une quantité d’alcool astronomique, celui qui me commandait un soda …Celui qui ... Je savais ce temps révolu car nous avions grandit et vécu tellement … Mais il me manquait.
"Have you ever looked at a tiger and thought you ought to cover it up? You are an exquisite creature, Raven. All your life the world has tried to tame you. It’s time for you to be free."
Leur relation était complexe, c'était certain. Mais Charles et Raven s'aimaient, profondément. Lorsqu'elle était partie avec Erik, elle avait laissé un grand vide dans son cœur, et il avait perdu pied. Il avait fallu deux décennies et deux apocalypses pour qu'ils se retrouvent enfin. Depuis, les deux mutants tentaient d'oublier leur passé tumultueux et tâchaient de réapprendre à vivre ensemble. Mais c'était loin d'être facile...
Lorsqu'elle commença à dire ce qui la tourmentait, lorsqu'elle évoqua son amour des élèves, le cœur de Charles se serra. Ce début d'explication impliquait un "mais", et il craignait ce qui allait arriver après. Il avait peur de la perdre à nouveau. Elle s'exprima avec beaucoup de douceur, et une sincérité non feinte. Il ne pouvait détacher son regard triste d'elle.
« Je suis profondément désolé de n'avoir pas perçu ton mal-être, Raven... »
Remonter l'école lui avait pris tellement de temps... A présent que l'Institut était rouvert, il y avait une quarantaine d'élèves à gérer, sans compter les jeunes mutants que le professeur cherchait à aider à travers tout le pays. Il ne s'en plaignait pas. C'était sa vocation, sa raison d'être. Et il était heureux d'avoir sa sœur à ses côtés pour le soutenir dans ce grand projet. Mais il était si préoccupé par son Institut qu'il s'était mis des œillères, et ne s'était pas rendu compte que sa sœur aspirait à autre chose.
« Les X-Men... n'ont plus de raison d'être... Ce monde a déjà ses héros. Je ne veux pas d'une vie de conflits, tu le sais bien. Je n'aspire qu'à la paix. »
S'ils avaient tous deux à cœur de défendre la "cause mutante" - bien que Charles n'aime pas ce terme - ils avaient tous deux des ambitions et des besoins différents. Charles était un intellectuel, un professeur, il était fait pour enseigner, pour guider. Raven était une battante, courageuse, téméraire, vivant pour l'action, ressentant toujours le besoin de se battre pour prouver sa valeur. Il était certain que le mode de vie de son frère ne pouvait lui convenir entièrement. S'il ne trouvait pas rapidement comment satisfaire son besoin d'aventure, il risquait de la perdre à nouveau.
« Je comprends... Je vais réfléchir à tout cela... Je vais trouver une solution, je te le promets. »
Il n'avait rien à lui proposer dans l'immédiat. Mais il allait se pencher sérieusement sur la question. Il remuerait ciel et terre pour rendre sa petite sœur heureuse. Lorsqu'elle lui avoua qu'il lui manquait, il lui adressa un sourire ému.
« Je suis là... Tu as raison, il faut que j'apprenne à lâcher prise. On va se dégager du temps, rien que pour toi et moi. Une soirée par semaine, qui n'appartiendra qu'à nous. Qu'en penses-tu ? »
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