Comme à Kamar-Taj, les journées au Sanctuaire de New York sont réglées selon un horaire régulier. Les entrainements sont au cœur de cette vie, rendue moins monastique qu’à Katmandou du fait du luxe occidental du manoir et non par la douceur des exercices.

La première séance d’entraînement dure de 09am à 11am et se concentre sur les apprentissages. A la salle de classe située dans l’une des tours de la Maison de la Sagesse s’est succédée la bibliothèque du troisième étage du Sanctuaire ; proche des chambres. Celle-ci contient des copies des livres des Maitres des Arts Mystiques, à l’exception de ceux en accès restreint, ainsi que de nombreux documents récupérés pour mon étude personnelle et conséquemment absents de tout autre rayonnage. Il ne s’agit plus d’un cours comme cela l’était à Kamar-Taj mais d’une étude où mes Apprentis sont invités à me consulter s’ils en ont besoin comme à me foutre la paix s’ils en ont l’occasion ; invitation des plus explicites, même si elle ne m’empêche pas de m’enquérir de leurs études et de leurs éventuelles difficultés afin de les aider même s’ils n’osent le demander. Il est donc tout autant possible de me voir seul sur un quelconque livre ou tablette numérique comme antique à lire en silence ou à marmonner en gesticulant que de me faire la conversation sans que je ne lève les yeux voire, s’il y a lieu, de pouvoir avoir un cours magistral sur un sujet ! Toute tentative de canalisation doit néanmoins s’effectuer dans la salle d’entrainement afin d’éviter tout risque de destruction sur les propriétés de la bibliothèque. Toute tentative de contravention à cette règle entraine une téléportation pouvant aller jusqu’aux ruines de la cave.

La seconde séance d’entrainement dure de 01:30pm à 03:30pm. Elle se consacre cette fois aux gestes et au chorégraphie afin d’effectuer lesdites canalisations dans ladite salle d’exercice, au second étage du Sanctuaire ; une grande salle vide avec deux fenêtres donnant sur la rue newyorkaise. S’il est besoin de mobilier pour les apprentissages d’ordinaires calmes, le Sanctuaire les y téléporte à ma demande. Chaises et bancs sont souvent à l’ordre du jour, parfois accompagnés de tables lorsqu’il faut poser des livres voire prendre des notes sur papier ou sur ordinateur. On retrouve ici les travaux pratiques et les séances d’art mystique comme utilisée sur les toits de Kamar-Taj.

La troisième séance d’entrainement dure de 04pm à 06pm et se passe au sein de la dimension miroir parallèle au Manoir. Il s’agit d’un entrainement au combat et les invitations sont alors étendues au-delà de mes Apprentis : tous les défenseurs du Sanctuaire de New York peuvent participer. Les équipes et les défis du jour dépendent des présents et passent d’affrontements entre eux à des affrontements contre moi ; chose sans doute cathartique. Je ne me donne jamais à mon maximum et tâche d’éviter les blesser comme de guider le travail de l’esprit d’équipe. J’aime à ce que l’on prenne le thé après cela, le temps que la température corporelle redescende et que les affinités continuent de se tisser aussi chaotiquement que sympathiquement lorsque l’on pratique le "je t’aime pas, moi non plus" comme c’est le cas ici.

Evidemment, les invitations ne sont jamais des obligations. La présence ou l’absence d’untel ou d’unetelle semble m’indifférer.

Dominique a passé des mois ici à ne pas venir s’entrainer, avant que la catastrophe du Queens Center Mall ne le fasse réaliser qu’il n’est pas le seul à souffrir et ne le remette sur la voie des Maîtres des Arts Mystiques. Maintenant qu’il a pu reprendre son apprentissage délaissé il y a plus d’une année du fait de la dégradation de sa santé mentale, il est devenu le plus expérimenté de mes Apprentis et semble avoir ajouté à mi-temps un "homme à tout faire" à son précédent "homme à rien faire" au sein du Manoir.

A l’inverse, Kayser a mis un mois à galérer avant de vouloir retourner au Kamar-Taj qui l’avait envoyé ici parce qu’elle y était ingérable ; puis mettre un autre mois à prouver qu’elle était juste trop douée pour être Apprentie et avait juste besoin que je la nomme Disciple. Elle préfère le terme Maître, comme beaucoup, et je ne critiquerais pas le péché d’orgueil pour en être un habitué. J’ai compris son aptitude à tout réussir sans personne et je pense qu’elle fait cela mieux que moi. Ainsi n’a-t-on plus grand-chose à nous dire.

Encore à l’inverse des précédents, Sophia n’est pas ici pour avoir désespéré tout le monde à Katmandou. Elle tente de mener de front les deux vies épuisantes que sont les horaires de chirurgien au Metro-General Hospital et l’apprentissage auprès de moi. Je lui ai dit qu’elle échouerait à l’un des deux, si ce n’est aux deux, à agir ainsi. Elle est têtue, comme tout le monde. J’escompte juste sur ses collègues pour l’écarter des chirurgies lorsqu’ils la découvriront trop fatiguée pour les faire. Qu’elle ait besoin d’échouer pour comprendre me va mais je préfère qu’elle évite d’aggraver la situation de quelqu’un d’autre qu’elle-même dans cet apprentissage. Pour les séances du matin, seule sa capacité à retenir les choses est pénalisée ; ce qui ne l’empêche pas d’être supérieure à la moyenne et sans doute à celle de Dominique. Pour les scéances de l’après-midi, elle est à la ramasse par fatigue comme manque d’expérience ; son noviciat étant passé bien plus rapidement que quiconque. Elle est douée pour faire les bons gestes mais l’ordre ou la canalisation est plus complexe.

Parallèlement, Magik n’est même pas passée par la case Kamar-Taj ; seule raison pour laquelle elle n’a pas battu les records d’emmerdement précédemment établis. Elle fait sa vie avec la liberté d’une téléporteuse et tient plus du félin de compagnie, venant lorsqu’il a besoin de quelque chose, que de la colocataire. Deux semaines ne sauraient lui faire complètement prendre confiance en ces lieux à défaut qu’elle n’y soit à ses aises, surtout lorsqu’il s’agit de faire des conneries. Les apprentissages de la "magie" semblent néanmoins l’intéresser mais elle n’a pas de régularité en leur sein. Comme pour ma seule véritable apprentie, je la laisse faire.

Enfin, Jericho Drumm. Il n’a jamais été mon apprenti et ne le sera jamais. Il tolère ma présence pour la même raison qu’il me déteste : la mémoire de son frère. Son art est le seul à parfaitement différer de ceux pratiqués par les autres et cette différence fait une partie de sa valeur ; s’ajoutant à celle de son caractère. Oh, il y a des poings communs et il a encore beaucoup à apprendre comme à négocier avec les Loas qui lui confèrent ses pouvoirs mais il est le second plus expérimenté après moi et je respecte cela. Plus qu’il n’y parait. C’est le seul que je ne peux réellement aider sur son art mystique et j’ignore si j’y arriverais sur son personnel. Je l’espère.

Je ne suis pas Wong. Je ne suis pas l’Ancienne. Je ne suis même pas Karl.

Aujourd’hui, je n’ai même pas été là.

« Okay, souffle Dominique en laissant s’échapper de la fumée de sa cigarette ; chose qu’il a interdiction d’allumer au sein du Sanctuaire et encore moins dans la bibliothèque. Ça n’est pas très efficace…

Il soupire par le nez avant de prendre une nouvelle bouffée.

« Bon Doc Mute, reprend-t-il à l’intention de Sophia. Je sais pas pour toi mais je trouve que ça pu. Tu m’suis jusqu’au SS ou pas ? »

SS ; Sanctum Sanctorum, Stephen Strange, Sorcier Suprême, SchutzStaffel, toutes les définitions sont bonne. Même "Sécurité Sociale", d’ailleurs.

Poussant sa veste beige, Dominique remonte son pantalon de toile sur sa chemise puis met ses mains dans ses poches. Il délaisse son livre comme la bibliothèque sans fermer aucune porte après lui, se dirigeant vers les escaliers menant à la partie où je réside.

« Strange, isn’t that strange that you don’t act as your strange self, crie-t-il, autre point fortement déprécié, alors qu’il avance dans les escaliers une marche par une marche tout en regardant la fenêtre bardée du symbole d’Agamotto qui les surplombe et les éclaire. Let’s see… »

Blasé et sans gêne, Dominique marche vers la droite et pousse le rideau qui ferme l’arche carrée liant le reste du Sanctum Sanctorum à la chambre de Strange.

« P’tain, déçu, constate-t-il une fois à l’intérieur. Quitte à faire la grasse mat’, z’auriez au moins pu être avec votre bleue. »

Je suis là, dormant sur le dos au centre de mon lit double. De la sueur perle sur mon front et mon visage est plissé. Mes muscles sont tendus. Mes mains couturées de cicatrices serrent les draps sur lesquels elles reposent. Mon souffle est court.

« That’s Strange… and strange… »

Sur l’une des tables de nuit, le téléphone portable utilisé comme un fixe clignote d’un sms reçu.

« M’obligez pas à vous app’ler Stephen, grogne Dominique alors qu’il retire sa cigarette et avance un peu plus vers moi. On sait tous les deux qu’c’est moche… »

Lorsqu’il est question de se pousser, Dominique se laisse faire, pousser, plus qu’il ne se pousse pour laisser le passage. Il s’abstient de répondre qu’il pardonne, cela dit. Il fait des efforts ! Au moins jusqu’au diagnostic : un cauchemar. Les épaules de l’homme se baissent autant que son visage et ses yeux se lèvent.

Il met les deux mains dans les poches alors qu’il reprend une posture aussi droite que le flegme le lui permet. Puis la gifle le surprend agréablement.

« C’est donc ça, le geste médical. »

Il ricane en tachant de ne pas se laisser aller à un fou-rire. C’est lui le plus vieil apprenti du vieux con après tout. Vieux con qui ne réagit pas et facilite ainsi le ravalement du contentement. Les mains sortent des poches. Les bras se croisent à l’explication. "C’est tout sauf normal", voilà une déclaration qui lui fait lever les deux sourcils et regarder le Doc Mute énoncer l’évidence.

« Dominique, est-ce qu'il pourrait être en train de faire une activité mystique, lui demande l’autre inquiète qui le manifeste plus et de façon plus physique, l’amenant à hausser les épaules. Parce que si ça n'est pas le cas, ça pue comme tu le dis si bien.

- Il sent le mal, commente le concerné en s’approchant de quelques pas, arrivant au rebord du lit. Même si c’est une activité mystique, ce que j’ignore puisque le vieux fonctionne à la confiance envers lui, il a l’air de la réussir avec talent. »

Est-ce qu’il pourrait essayer de ramener du monde ? Essayer oui.
Sophia va utiliser la porte vers le Sanctum Narthex pour tenter de contacter le Sorcier Suprême ? Dominique sourit.

« Heureusement qu’ils sont à mi-temps ces cons, sinon il nous en manquerait un, ricane-t-il. N’oublies pas de t’incliner devant le SS officieux ou il pourrait croire qu’il n’est qu’un Disciple parmi les autres. »

Dominique lève nonchalamment sa main gauche puis, sur ses index et majeurs tendus, fait apparaitre son Anneau de Téléportation.

« Ey Doc Mute, interpelle-t-il alors qu’il se retourne vers la concernée en prenant la posture d’invocation d’un portail étincelant, c’est plus court par-là. »

Quelques tours de poignet et le portail de téléportation relie le Sanctum Sanctorum au foyer. Il n’allait pas l’envoyer jusqu’à Wong sinon elle ne prendrait plus la porte.

« Considère ça comme un encouragement à te sortir les doigts, conclut Dominique avec sarcasme. Tu veux pas battre mon délai pour réussir à l’faire. »

Il ferme le portail avant d’avoir la réponse. Il en a d’autres à ouvrir et commence rapidement.

« Salut la Déserteuse, dit-il avec une ouverture étincelante de la taille d’une assiette, juste de quoi voir le visage de Kayser. Y’a le vieux con qu’a b’soin de toi, ça urge. »

Il referme là-encore son invocation puis s’arrête un instant pour réfléchir. Après un haussement d’épaule, il recommence son manège.

« Ey la Folle, tu t’pointes aussi quand on a b’soin de toi, interroge-t-il sans rien perdre de sa nonchalance. Vraie question : j’te laisse m’donner la réponse avec tes propres portails. »

Comme le premier, le quatrième cercle de téléportation est entier et il s’adresse cette fois à Drumm sans la moindre considération pour sa volonté d’identité secrète.

« Salut Tambourin, ton bénévolat t’appelle. J’te fais l’transport ou ? »

Laissant la réponse se faire, Dominique contourne le lit où je repose dans mon cauchemar pour s’approcher de la table de chevet sur laquelle repose le téléphone. Il se saisit de celui-ci et regarde le petit point clignotant, annonciateur d’un message. L’absence de code d’ouverture lui permet de déverrouiller l’appareil pour voir un sms indiquant que le numéro inconnu "va bien", daté du matin même ; et s’en suivant tous les autres matins.

« C’est meugnon, ils s’envoient des messages. »

●●●●● 4G

04:20AM

99%

numéro inconnu

Je vais bien.

Super, lui pas. Rapplique immédiatement. Merci.

Message

« Doc Mute, Not Wrong, la Déserteuse, la Folle, Tambourin et la Bleue, énumère Dominique. Est-ce que j’appelle la Psychorigide aussi ? »

Il regarde puis hausse les épaules à l’intention de ceux qui sont déjà là.

Cauchemar

Une journée normale pour un nouveau mois normal s'annonce. Tu te trouves actuellement dans ton bureau et tu es en train de consulter tes mails. La journée commence tranquillement et tu comptes rentrer chez-toi en début d'après-midi. Le mois de janvier a été synonyme pour toi d'une certaine prise de recul avec l'ordre d'Agamotto. Non pas que tu as décidé de totalement couper les ponts avec maître Strange et les autres, mais tu préfères largement ta vie de gérant d'association. La seule membre des arts mystiques avec laquelle tu avais gardé contact est Milena. Oui, la faire entrer dans le Lazarus Center pour t'aider, la laisser loger dans ton appartement et de prendre ton lit là où toi, tu vas dormir dans le canapé est plus qu'un simple contact gardé, c'est de l'adoption à ce niveau. J'ai bien tenté de te raisonner depuis ce repas de Noël, mais tu n'en avais fait qu'à ta tête comme à ton habitude… Ta posture flegmatique sur ton siège et le fait que tu boives ton café avec nonchalance m'exaspère au plus haut point. Il va réellement falloir t'occuper de ta seconde vi…

« Salut Tambourin » Tu n’avais même pas remarqué un portail apparaître dans ton bureau. La voix de Dominique vient te faire sursauter et te faire renverser ton café. « Ton bénévolat t’appelle. J’te fais l’transport ou ? »

« Chhhhht ! » Avec l'aide de ton index sur tes lèvres, tu lui demandes de faire silence tout en t'approchant du portail. « Non, mais je rêve ?! Je peux savoir qui t'a permis de manifester une téléportation dans mon centre ? Je croyais avoir été clair avec l'ordre ! »

Ne pas venir te déranger lorsque tu es dans ton centre associatif. Oui. Ils savent. Cependant, ne t'attends pas à être écouté alors que tu n'écoutes personne en retour. Dominique Kazaroff… Un sorcier que je n'aurais jamais souhaité avoir comme apprenti de mon vivant étant donné que je suis toujours largué lorsqu'il décide de prendre la parole. Tout comme toi d'ailleurs. Laissant passer une ou deux minutes, tu remarques ensuite que la porte de ton bureau s'ouvre. Il doit sans aucun doute s'agir de Milena qui était dans la réserve en train de faire l'inventaire. « Ferme la porte à clef, vite ! » C'est le stress qui fait en sorte que tu lui donnes une telle injonction. Ce n'est pas spécialement contre elle, mais tu ne voudrais pas que d'autres personne puisse être témoins de ce qui était en train de se passer. Un nouveau regard mauvais envers Dominique et tu comptes lui dire d'aller se faire cuire un œuf. Non. Tu dois y aller sur ce coup. Le blondinet ne t'a jamais contacté auparavant. C'est que cela doit être important. Dépêche-toi un peu, tambourin.

« Oh… Que les esprits m’en soient témoins, je ne peux jamais être tranquille. » Tu lèves les yeux au ciel. « Tu n’as qu’à faire le transport à moi et à Milena dans un même portail. Nul besoin d’en ouvrir cinquante dans le Lazarus. »

Tu attends donc qu'il agrandisse le cercle mystique pour pouvoir y entrer en compagnie de l'Indienne. Sans transition apparente, vous passiez donc de ton lieu de travail à la chambre du sanctuaire de New York. Tu pouvais alors potentiellement observer les autres venus et ton regard se pose sur le propriétaire de la cape de lévitation. Ah, tu vois là… C'était mon lit. C'était ici que je dormais avant de dormir pour l'éternité. Enfin ça, c'était avant que tu ne te décides de jouer à l'apprenti bokor, mais passons. Strange est endormi. Il a le visage crispé et tu fronces les sourcils. C'est pour cela que tu es venu ? Pour admirer une sieste du docteur ? Il est vrai que Dominique ne t'a donné aucune indication. Il s'est juste contenté de te lancer des traits d'humour aussi inutile que pas drôle. Donc, tu es forcément perdu. Tu l'aperçois en train de consulter un téléphone portable et tu te penches vers Milena pour lui souffler à l'oreille d'un air grognon.

« S'il nous a fait venir pour une mauvaise blague, retiens-moi pour ne pas lui faire manger sa veste s'il te plaît. »

Essai d'avoir un peu de jugeote petit-frère… Cela devient vraiment exaspérant à la fin… Tu ne vois pas que Strange n'est pas à son aise ? Lorsque tu te contentes de grommeler, j'essaie pour ma part d'analyser. Sa posture, ses mains qui se resserrent sur ses draps, son expression faciale. Il fait un mauvais rêve ? Dans ce cas, il doit particulièrement être virulent. L'autre chose qui m'alerte, c'est que le bruit et l'agitation autour de lui ne semble pas le réveiller. C'est étrange.

Je sautille sur place pour tenter de me réchauffer, frottant mes mains l’une contre l’autre. Il va falloir que je trouve de meilleurs gants. Ceux dans la boutique au coin de la 8ème sont plutôt sympas. On pourrait y faire un saut ? Pour les acheter ? Je… Ce serait une possibilité… mais c’est peu probable. Tu pourrais.Si je vole des porte-feuilles avant. Ou tu pourrais retrouver un travail ?Uuuurgh. Boriiiing. J’ai faim. Et j’ai froid. Je lève le nez vers l’horloge au coin de la rue. 9H10. Ça devrait être bon.

D’un saut, je me téléporte dans un des couloirs du premier étage du sanctuaire. Aucun bruit, c’est plutôt bon signe pour moi. Je suis toujours entière, ce qui est encore mieux. Je sais que c’est censé être safe, et que jusque-là ça va, mais je ne suis toujours pas rassurée à 100 %. Enfin le plus-plus mieux, c’est que je peux repartir, quand je veux. Même si je suis toujours pas rassurée à 100 % pour ça non plus.

Je me fige, la main suspendue au-dessus du beurre de cacahuètes, et je tends l’oreille. C’est lequel ça déjà ? Dominique Kazaroff … Ah celui qui a tout le temps l’air de se demander ce qu’il fout là ?… Enfin, c’est la même chose pour Maître Drumm aussi. Mais c’est l’autre quoi. Je finis de faire mon sandwich avant de ranger confiture et autre. On pourra pas me reprocher d’être désordonnée. Tu n’as surtout pas envie qu’on sache que tu étais là à l’heure de l’entraînement. Quoi ? Mais non. Et puis, ce n’est pas un entraînement, c’est de la lecture et c’est méga ennuyeux. T’as vu la taille des bouquins ? Et ce qu’ils contiennent ? Sérieux, qui arrive à lire ça sans s’endormir ? Tu vois, même eux ils y arrivent pas, ils seraient pas là à chantonner en se baladant sinon ! Tu devrais aller voir. Voir quoi ? Ce qu’il se passe. Tu veux des céréales ? Ou du jus d’orange ? Je suis sûre qu’il y a du jus d’orange. Ah tu vois, j’avais raison !

Je me sers un verre et sursaute quand l’abruti susnommé apparaît devant moi. Hein ? Quoi ? Il se fout de moi ? Ils sont où ? … Dans la chambre du Docteur Strange.

Je me téléporte sans réfléchir, mon sandwich à la main. « Tu te prends pour qui espèce de... » Je me fige, en voyant les gens présents. Et surtout le vieux con encore couché. « Vous êtes tous là pour un réveil genre comme au Moyen-âge ? » Je croque un morceau et reprends la bouche pleine. « Vous avez besoin de moi pour le réveiller ? Ça peut se faire ! » Je les regarde et m’arrête à nouveau, un sourire venant éclairer mon visage. « Hey Spidey ! Salut ! Qu’est-ce que tu fous là ? » Bonne question. Ouais, je n'ai que des bonnes questions. C’est quoi ce bordel ? Mais d’ailleurs…

Je fronce les sourcils, tournant sur moi-même, sans trouver ce que je cherche, jusqu'à l'apercevoir au sol. « Oh putain. » Je les oublie tous et passe entre eux pour rejoindre un coin de la pièce et me laisse tomber à genoux. « Hé! » Je la pousse du bout des doigts, le cœur battant à tout rompre. Je pose mon sandwich et attrape la cape, qui ne réagit quasiment pas. Elle ne me repousse même pas, c’est flippant ! Je me tourne vers les autres, la portant contre moi comme un bébé, les yeux écarquillés, reprenant d'une voix de petite fille. « Pourquoi elle est comme ça ? »

Milena "croyait qu’il fallait choisir entre vieux et con !", voilà qui fait sourire Dominique alors qu’il la laisse à ses biscuits sans se demander si l’un d’eux, ou un pourcentage de l’un d’eux, n’a pas tenté la grande évasion par portail de téléportation lors de l’exclamation.

Magik était déjà sur place vraisemblablement, Dominique reconnait la cuisine comme le vol, mais il a autre chose à faire donc ce n’est qu’une fois que la Gamine l’a rejoint qu’il peut la laisser pester en paix : il est déjà passé à l’autre pesteur professionnel. Enfin, le troisième ou le quatrième. Ça dépend si on fait cela par ordre de contact, d’arrivée ou de talent dans le domaine. La compétition est féroce.

Drumm est celui qui a le droit à un portail le plus longtemps ouvert et pas que parce que ça augmente la quantité et la qualité de Dominique sur l’échelle des emmerdeurs : c’est le seul qui peut pas se téléporter. Enfin, avec Sophia mais elle c’est une affaire en cours alors que lui ce n’est plus à faire. Tout comme son "chut" qui obtient un profond questionnement sur "est-ce que j’appelle son ancienne maître ou pas ?" tant Dominique n’en a rien à secouer du fait que le Maître de l’art vaudou ait l’impression de rêver. Pourtant, c’est dans le thème !

Il faut bien dire qu’entre Tambourin et la Folle, Dominique est clairement celui qui fait le moins de bruit. Pour qui il se prend ? Une espèce de Lui-même. Avec une Majuscule. Qui lui a permis de manifester une téléportation dans le Lazarus Center ? Lui-même. Toujours.

« Je croyais avoir été clair avec l'ordre ! »

L’Ordre avec une Majuscule, celui des Maîtres des Arts Mystiques, ou bien l’ordre avec une minuscule, celui de ne pas venir le déranger ? Comme quoi c’est important les majuscules et les minuscules. Plus qu’un ordre donné à un Ordre qui ne le respectera pas puisqu’il ne dérangerait pas sans nécessité à la base. Les Maîtres des Arts Mystiques ont beau se titiller l’orgueil en se faisant appeler Maîtres alors qu’ils ont le rang officiel de Disciples et pas forcément d’Apprenti pour justifier que quelqu’un les appelle Maîtres, reste qu’ils ne sont pas du genre à déranger les gens pour le plaisir. En bons voyeurs invisibles, les Esprits peuvent être témoins de beaucoup de choses mais pas besoin d’en être un pour savoir que chacun vit très bien chez soi parmi les MAM de New York City. Reste à déterminer s’ils peuvent compter les uns sur les autres ou s’ils sont tous des Dominiques en puissance ; et Dominique lui-même tâche de ne plus l’être.

Considérant le chaos prometteur que leur petite troupe crée à chaque fois qu’elle tente de collaborer, Dominique trouve sa réponse quant à l’appel de la Psychorigide : mauvaise idée. Elle tenterait d’imposer son ordre dans un lieu où il n’a pas sa place et où c’est volontaire que les gens puissent être chaotique afin de s’exprimer pleinement. L’Apprenti délaisse donc le téléphone pour reprendre les gestes nécessaires à l’agrandissement du portail de téléportation. Cela permettra à tout le monde à part la Bleue et la première arrivée comme repartie d’être présent "pour un réveil genre comme au Moyen-Age". Il n’y était pas question que les témoins du mariage puissent surveiller que celui-ci soit bien consommé ou une connerie dans le genre ? Dominique ne sait pas mais il sait qu’il déclarerait préféré attendre que la Bleue ait pondu pour regarder, même s’il retient cette réplique car il préfère être loin de toute copulation de craindre de vriller à nouveau.

« S'il nous a fait venir pour une mauvaise blague, retiens-moi pour ne pas lui faire manger sa veste s'il te plaît, commence Tambourin à l’intention de Milena, arrivée avec lui et derrière laquelle le portail se dissipe.

- Il n’a pas assez d’humour pour faire ça, souligne la Déserteuse entre l’espièglerie et le désabusement.

- Doc Mute lui a déjà collé la tarte qu’on rêve tous le lui mettre et, commence à expliquer Dominique avant de s’interrompre face à la téléportation d’un Spiderman, surement causée par le Sanctum lui-même, qui n’était pas prévue du tout.

- Euh, commence à hésiter le super-héros dévisagé par les autres parce que personne, l’incluant potentiellement, ne comprend ce qu’il fait là… bonjour ?

- Euh… Bonjour, répète Milena, singeant un homme-araignée ce qui est amusant à penser.

- Hey Spidey ! Salut ! Qu’est-ce que tu fous là ?

- +3 pour la Folle.

- Je… cherche le Doc. M’sieur… docteur Strange. On m’a envoyé un SMS bizarre y a… pas longtemps.

- Ah… Il est pas en train de méditer très fort hein…

- P’tain, c’est pas à sa Bleue qu’il demande des nouvelles tous les matins, s’étonne Dominique avant de se blaser en disant qu’il devrait même pas s’étonner en fait… Sauf si t’es sa Bleue déguisée…

- Tu peux nous expliquer, Domi ? Qu’est-ce qui se passe ?

- Pour lui, répond le concerné en désignant Spiderman, je dirais que le vieux trompe sa métamorphe pour se la jouer pédo, ce qui est contreproductif puisqu’une métamorphe peut faire semblant d’être sous la limite d’âge sans réellement l’être…

- Oh putain, s’exclame Magik en interrompant puis faisant souffler Dominique.

- C’est du sarcasme la Folle, toi et ton préservatif draconien vous craignez rien… »

Trop tard, elle est encore partie en délire sur les tissus… sauf que c’est la Cape qu’elle trouve, ayant bien été la première à la chercher. Et elle la trouve en un état qui fait s’assombrir Dominique.

« Pourquoi elle est comme ça ? »

Dominique n’a pas le temps de répondre à cette nouvelle anormalité que la personne sensément la plus normale du lot revient sans le mec qu’elle était partie chercher mais avec le salut qu’elle a dû lui faire et le discourt qu’il aurait dû faire lui. Dominique range les mains dans ses poches et retient un sourire face à la nouvelle Apprentie qui prend le relai.

La politesse, elle est la seule à l’avoir. Les présentations, aussi. Le titre, idem. Et les explications enfin.

« Si Dominique vous a rassemblé ici, c'est parce que suite à un manquement inhabituel du Docteur Strange, nous l'avons trouvé dans cette pièce, dans sa position actuelle. Il semble bloqué dans un cauchemar et ne réagit plus du tout aux stimulus externes, ce qui est hautement préoccupant. Est-ce que l'un d'entre vous a une idée de ce qui est en train de se passer ? Nous avons aussi prévenu le Sorcier Suprême Wong, qui ne devrait pas tarder à faire son entrée, je l'espère.

- Tout comme elle a dit, est sa manière de la soutenir sans sortir les mains de ses poches. Visiblement ça affecte la Cape aussi. Aucune idée de comment elle roupille d’habitude, j’ai jamais vu faire. Voilà ma contribution aux explications pour le principal adjoint. Quelqu’un d’autre ? »