[Terminé] Une routine qui révèle une bonne surprise

30 MAI 2024 AVEC ROCKET RACCOON ET CHARLIE SWANSON

Ne manquant nullement de courage, le Gardien effectuait une défense acharnée pour sauver Jean des griffes de son geôlier, mais avait-elle réellement besoin d’être sauvée ? Était-elle en danger, ou était-elle le danger ? Insoupçonné, dissimulé sous l’apparence d’une jeune fille au caractère docile, bien trop affable pour la moindre forme de rébellion… Redoutable était la tromperie, invisible était la menace, grande serait sa colère.
Mais durant l’échange houleux entre Rocket et Charlie, alors même qu’elle venait de faire valser une chaise contre le mur afin de protéger son ami, la rousse était restée immobile, ses yeux se changeant en une pierre d’ambre aux accents féroces alors que l’expression de son visage mutait, ses traits se durcissant comme la pierre tranchée par les âges de ce monde : durs, secs, arides, polis par une bestialité qui n’avait rien d’humain. Une inexorable froideur l’avait envahie, comme un hiver de glace survenu au cœur d’un été bouillant : elle n’avait rien entendu des mots de Charlie mais, lorsque ses cils noirs battirent de nouveau pour rejoindre la réalité, elle découvrit que Rocket était devenu le prisonnier de l’homme-ailé, qui menaçait de lui tordre le cou à son tour.

« Tu es bien trop bavard, misérable moustique… Peut-être devrai-je t’arracher la langue pour te faire taire ? »

La voix carnassière n’avait pas été celle de Jean, et elle n’aurait de toute façon jamais manié de tels mots mais, en cet instant, elle ne semblait plus être elle-même : plutôt que de déformer son visage dans une crispation d’inquiétude pour Rocket, expression qu’elle aurait arboré si elle avait été pleinement consciente de ses agissements, la rouquine avait laissé le coin de ses lèvres s’étirer en un sourire presque amusé, de même sorte que si elle n’avait point craint pour la vie de son ami : il ne risquait rien, elle le savait fort bien. Charlie pensait mener la dance, il se croyait maître du jeu… Sans savoir que la musique avait changé de rythme.
Faisant un pas vers les deux individus, sans quitter Charlie des yeux, Jean avait légèrement incliné son menton vers le bas tout en durcissant son regard, qui était à présent empli de reproches et de menaces, qu’il ne fallait pas sous-estimer.

« Libère-le et tu pourras survivre ; dans le cas contraire, tu regretteras le jour où tu es tombé du nid. »

Alors qu’il tirait sur sa cigarette, celle-ci s’était étrangement échappé de ses doigts pour s’écraser sur le sol sous la seule volonté de Jean, qui n’avait point bronché, présage —s’il en fallait encore un, qu’elle ne lui laisserait aucun avantage sur la situation. Mais l’homme ne semblait pas vouloir coopérer, et tandis que la tension montait dans cet immeuble désaffecté, Jean sentait qu’une colère vivace se mêlait à son sang, le rendant aussi acide qu’un poison virulent. Il y avait d’abord la colère, comme un grondement de terreur dans un ciel noir, puis une fureur abjecte, inébranlable, infinie, tordue dans tous les sens comme un monstre de cruauté qui fulminait sous sa peau.

Il était là.

« Je t’ai dit de… »

Enfin.
Le voilà.

Une tempête de feu et de flammes, aux ailes embrasées de hargne, dont le bec distillait la violence et la rage : le Phoenix. Grandiose. Immense. Indomptable. Tornade de rancœur, véritable furie ailée, animée de gourmandise, d’impatience, de vengeance, de force et de révolte… Oh, oui. Il était là.
Les barreaux avaient cédé, le Monstre était à présent libéré : les yeux de Jean étaient aussi luisants que deux pièces d’or, mais leur expression sanguinaire ne laissait rien présager de bon : le Fauve brûlant, véritable volcan ailé, s’animait déjà d’une rancœur effrénée, que la colère rendait impitoyable. Et les deux individus qui lui faisaient face n’allaient pas tarder à se rendre compte du cataclysme qui s’annonçait.

Ses yeux dorés se braquant sur la silhouette massive de l’agent d’HYDRA, Jean avait soudainement tendu sa main vers lui sans qu’il n’en ressente, d’abord, les moindres effets : puis, alors qu’elle penchait légèrement son visage sur le côté comme pour enclencher la machine de ses tortures, Charlie avait pu sentir l’air se raréfier dans ses poumons, lui octroyant un sentiment de noyade qui était aussi douloureux que cruel ; elle s’en délectait allègrement, le punissant pour la façon dont il avait traité Rocket, son amie. Alors que les doigts de la main tendue se repliaient vers l’intérieur de la paume, le brun agonisait d’un étranglement qui n’était la faute d’aucune main posée sur sa gorge : à distance, elle parvenait à l’étouffer. L’observant sans une seule once de pitié, sans même ressentir la moindre faille d’hésitation. Punition.

Lentement, comme une rafale de poussière, les pieds de Jean furent soudainement envahis de cendres grises et noires, qui remontaient vers le haut de son corps en faisant voltiger ses cheveux roux dans son dos. Son visage était blanc, impassible, figé dans une métaphore d’indifférence qui était presque placide ; et si ses pensées s'emmêlent, formant un brouillon hasardeux de mots n'ayant aucun sens, les murs de l’immeuble désaffecté se mirent bien rapidement à palpiter. Le bâtiment menaçait de s’effondrer, des débris tombant même du plafond en tressautant comme si un tremblement de terre était à l'œuvre dans la ville.

Sauf que le tremblement de terre, c'était elle.
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30 MAI 2024 AVEC ROCKET RACCOON ET CHARLIE SWANSON

« Jean! c'est bon, il a eu son compte! Vient il faut qu'on se tire d'ici avant de finir écrasés comme des crêpes! »

Les mots raisonnables de Rocket ne parvinrent jamais aux oreilles de la jeune mutante, qui était au prisme d’un pouvoir qu’elle était bien incapable de contrôler ; tout au plus, avait-il la sensation d’être envahi, jusque sous sa peau laiteuse, d’une frénésie superbe : un pouvoir immense s’était glissé dans ses veines, brûlant son sang et réduisant ses pensées en cendres. Elle n’était plus en état de réfléchir correctement, ni de réellement se rendre compte de ses gestes : animée par une puissante rage, un déclin sans nom de toute la compassion qu’elle pouvait contenir, si bien qu’elle ne semblait plus avoir de limite.
Blesser n’avait jamais été une option envisageable, tuer encore moins ; mais en cet instant, elle n’hésitait pas à malmener l’homme qu’elle tenait dans son emprise, et qui suffoquait sans qu’elle n’en éprouve la moindre culpabilité : pire encore, alors que son sourire s’étoffait de grandeur, on pouvait presque avoir l’impression qu’elle prenait un malin plaisir à le torturer. Son visage qui se déformait à cause de l’air qui lui manquait, ses yeux horrifiés qui menaçaient de s’extirper de leurs orbites pour atterrir par-terre, la vie qui s’écoulait, lentement, au bout de ses doigts, à la fin de son souffle… Le Phoenix, euphorique, contemplait la scène sans se détourner. Il était puissant. Il était le Maître.

« Et maintenant, misérable… Qu’est-ce que tu vas faire ? Que crois-tu pouvoir faire, contre Moi ? »

Rien.
Tu ne peux rien faire.

Le Phoenix se délectait de chaque seconde, de chaque crispation de ce visage tordu par la douleur et la suffocation, de chaque minute de pouvoir qu’il exerçait sur cet individu qui avait réveillé sa colère, sa fureur et son feu incandescent… Oui, c’était presque grâce à lui qu’il était Maître en cet instant. Mais sans trop savoir comment, alors qu’elle avait maintenu une emprise parfaite sur l’homme qu’il était, Charlie était parvenu à s’extraire de ses liens invisibles pour se jeter sur elle, accolant ses blessures ouvertes sur les émanations brûlantes qui s’échappaient du Phoenix, dissimulé sous une peau aussi blanche que la neige : le feu l’avait brûlé à divers endroits, et Jean avait à peine eu le temps de lever ses yeux dorés vers lui qu’il s’était déjà enfui, usant de ses ailes pour s’éloigner à grande vitesse… Comment avait-il pu lui échapper aussi facilement… L’aigreur emporta sa coeur, faisant croître sa fureur et sa révolte, toutes deux grondant sans se cacher.
Mais point le temps de songer à cette question épineuse. Le bâtiment, affaibli par des années d’abandon était sur le point de cédé ; les murs tremblaient comme des feuilles mortes ballottées par le vent d’hiver, et même le sol s’émiettait sous ses pieds. Elle aurait dû avoir peur. Elle aurait dû fuir à son tour. Mais elle n’en fit rien. Immobile, elle demeurait au centre de la pièce vide, sous les décombres et la poussière qui volaient autour d’elle comme des nuages de fumée ; les cheveux portés vers le haut, la peau lézardée de fissures orangées qui donnaient l’impression qu’elle était faîte de lave bouillante, Jean avait finalement levé des yeux furieux vers le ciel étoilée, qu’elle apercevait à travers les trous béants du plafond qui s’écroulait également.

À quoi avait-elle pensé durant les dernières secondes de conscience ? Qui cherchait-elle du regard ? Était-elle revenue à la raison, ou était-ce encore le Phoenix qui contrôlait ses sens ? Nul ne saurait le dire mais, au moment même où une déflagration sourde avait explosé autour d’elle, comme l’accomplissement sourd de ses pouvoir poussés à leur paroxysme, le plafond décrépi de l’immeuble avait fini sa course en contre-bas, emportant la rouquine dans son sillage brutal. Le choc avait dû réveiller tout le quartier tant le sol en avait tremblé, et l’onde de choc s’était propagée à la vitesse de l’éclair autour d’elle, aussi violemment qu’une bombe qui aurait explosé en détruisant tout sur son passage.
Pourtant, elle n’avait été frappée d’aucun débris : dans sa chute, ils avaient volé autour d’elle en l’évitant soigneusement, comme guidés par une main invisible qui l’aurait  volontairement épargnée. Elle s’était éteinte en même temps que l’immeuble avait chuté, fermant les yeux au milieu de sa chute, sans avoir poussé le moindre cri. Au sol, entre ce qui restait de l’immeuble désaffecté qui ne comportait plus aucun étage, au milieu des vestiges et des ruines de béton et de ciment brisés, le corps endormi de Jean reposait : elle était vivante puisqu’elle respirait encore, mais elle était inerte. Allongée sur le côté, les mains près de son ventre, les genoux pliés et les cheveux éparpillés autour de son visage, elle semblait être l’unique survivante d’un effondrement dont elle était secrètement la cause.

Épuisée par la libération de ces pouvoirs, elle allait probablement dormir plusieurs heures avant de se réveiller. Mais, à présent, la présence de l'Ombre de Feu ne pouvait plus être niée.
Le Phoenix était là.
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