"Rien n'est plus agréable et rassurant que de se retrouver en compagnie de vieux amis." - Peter Bodo
Vendredi 17 Mai 2024 – Quartier du Queens
Ma semaine à la base secrète était terminée. J’avais la soirée pour moi avant d’attaquer au bar le lendemain. J’avais une soirée de libre et je comptais bien en profiter. Pouvoir manger ce que je voulais, pouvoir me promener où je le souhaitais dans New-York sans craindre d’être surveillée ou suivie. Je savais qu’on m’avait à l’œil depuis mon retour mais le pire de tous c’était Charlie. Il ne me lâché pas d’une semelle, que je sois à la base ou à mon travail de couverture. Mais ce soir, j’étais quasiment assurée d’être tranquille. Je dis bien quasiment car avec Hydra, on n’est jamais sûr de rien. Avec le recul, je me dis que si je n’avais pas été snappé, j’aurais pu m’enfuir loin et ne jamais revenir, mais voilà j’avais disparut seule dans ma cellule et j’étais revenue tout aussi seule après cinq ans d’absences.
Pour l’heure, j’étais arrivée en métro jusque dans le Queens, il y avait un petit restaurant vietnamien que j’affectionnais particulièrement. Dès que j’avais du temps libre, je venais manger ici ou alors je prenais à emporter pour emmener dans un parc et manger tranquillement à l’air libre. Et ce soir, il faisait bon, il n’y avait un nuage à l’horizon et le parc dans lequel j’allais avait des arbres magnifiques, centenaires et en pleine santé. Je me sentais bien dans cet endroit. Je me sentais affranchie de toutes sensations négatives.
Une fois arrivée dans le restaurant, je suis tombée sur la patronne qui avait bien retenue ma tête. Je lui offris un joli sourire mais ne parla pas :
« Tiens, la brunette muette. Comment vas-tu ? La même commande que d’habitude. »
J’acquiesçais d’un signe de tête affirmatif avec un immense sourire. Je n’avais pas besoin de parler et c’était agréable. Les gens ici étaient toujours de bonne humeur et cela malgré les évènements de ces derniers jours. Je regardais la télévision patiemment en attendant ma commande que j’avais déjà réglée. Et la patronne revint vers moi alors que les informations du journal télévisés diffusés des images de Times Square quelques jours plus tôt, l’attaque de la sorcière rouge, Wanda Maximoff et d’une louve géante. Certaines images étaient floues et l’on ne voyait même pas très bien les Avengers combattre cette femme avant qu’elle ne s’enfuit. Le poste de télévision étant en sourdine, je n’entendais pas les différents commentaires de la présentatrice mais je devinais qu’elle semblait désolée pour le nombre de blessés et de morts de cette journée qui à la base devait être festive. La patronne s’adressa à moi :
« Tu n’y étais pas toi ? »
Je répondis non de la tête avec une petite moue triste.
« Il valait mieux, de ce que j’ai entendu c’était le chaos. »
J’étais triste pour toutes ces personnes mais je n’aurais pas pu faire grand-chose… Si j’avais été sur place, cela aurait été du côté de Hydra. Dans une certaine mesure, je suis bien contente de ne pas avoir été là pour massacrer encore plus de gens. Mon esprit revint à la réalité lorsque la patronne se leva pour aller s’occuper d’autres clients. Ma commande arriva dans la foulée et je remerciais gentiment les patrons en leur souriant avec douceur.
En sortant de la boutique, j’ouvris instinctivement mon sac pour sentir la bonne odeur des aliments que j’allais savourer ce soir et une partie du week-end. J’en prenais toujours un peu plus pour réchauffer pour après mes services durant le week-end. Une fois la bonne odeur sentie, je refermais mon sac sans regarder vraiment devant moi alors que j’arrivais au détour d’une rue… Et je percutais de plein fouet quelqu’un qui me fit tomber à terre aussitôt…
Au loin, derrière les montagnes de fer que formaient les hauts immeubles qui s'étalaient à perte de vue, le soleil avait lentement décliné, cédant sa place à une lune argentée qui trônait dans le ciel pour veiller sur les esprits endormis. Mais le sommeil lui échappait irrémédiablement, encore et toujours... C'était une vieille rengaine, comme une chanson qui ne voulait pas quitter son esprit hanté par des fantômes bien plus forts que lui. Assis au centre de la pièce vide, dans l'unique fauteuil qui formait la seule décoration de ce qui lui avait été vendu comme un salon spacieux, Bucky attendait. Ou plutôt, il n'attendait plus. Les yeux fermés, une main appuyée sur son front, il essayait d'appliquer la technique de respiration que son psychiatre lui avait conseillée pour s'endormir... Mais même avec toute la bonne volonté du monde, il n'y parvenait pas. Les images, les cris, les odeurs, les couleurs, les visages... Tout était encore là, même des années après, il avait l'impression que c'était hier. Pourrait-il réellement s'en défaire un jour ? Un soupir de lassitude s'extirpant de ses lèvres, il s'était levé du fauteuil en décidant d'aller courir pour se vider l'esprit, peut-être dans l'espoir d'épuiser suffisamment son corps pour que celui-ci ne puisse plus résister à l'engourdissement bienfaisant du repos.
Quelques minutes plus tard, portant un pantalon de survêtement sombre et un t-shirt noir à manches longues pour dissimuler son bras robotique, Bucky avait franchi la porte de son immeuble en commençant à courir quelques petites foulées sur le bitume gris, s'échauffant tout en gardant ses coudes près du corps. Rejoignant le parc le plus proche de son habitation pour avoir un peu de calme, ne voulant pas croiser le chemin des potentiels fêtards de la nuit, le Soldat de l'Hiver s'était employé à courir le long des allées bordées de buissons et d'arbres aux branches sagement ballotées par le vent tiède, sous l'œil scintillant des étoiles qui commençaient à apparaître dans le ciel d'encre noire. Il n'avait croisé personne, ou du moins si c'était le cas, il n'y avait accordé aucune importance ; les yeux rivés sur le sol, essayant tant bien que mal de se concentrer sur le rythme de ses pas pour ne point laisser ses pensées tortueuses l'envahir, il ne s'était accordé aucun repos, pas même le loisir de s'installer sur un banc quelques secondes pour profiter de la quiétude privilégiée des lieux. Il pensait sûrement que si son corps était vidé de son énergie, son esprit ne pourrait plus échapper aux bras apaisants du sommeil, et c'est pourquoi il avait ainsi couru durant quelques heures, jusqu'à ce qu'il soit obligé de s'arrêter près d'un arbre pour reprendre son souffle. Posant alors une main sur son ventre plat, Bucky avait respiré durant un instant en gardant ses lèvres entrouvertes, balayant les alentours en s'adossant contre le tronc du grand chêne, sentant son coeur qui calmait enfin ses battements furibonds. Et quand bien même il sentait que le sommeil lui filait encore entre les doigts malgré tous ces efforts, il s'était décidé à rentrer chez lui, abandonnant l'idée de gagner quelques heures de sommeil par ce subterfuge.
Reprenant alors le chemin en sens inverse, il avait couru à un rythme moins effréné jusqu'à rejoindre la ruelle où se trouvait son immeuble à la façade quelque peu défraîchie, songeant à ce qu'il allait faire des heures qu'il lui restait avant l'aube : probablement pas grand chose, comme d'habitude. Quelque peu perdu dans ses pensées, au détour de sa rue, il avait percuté de plein fouet une silhouette frêle et brune qui n'avait pas résisté à la collision de leurs deux corps, si bien qu'elle était tombée par terre en silence.
Encore debout, Bucky avait lancé sa main droite vers elle pour l'aider à se relever, ayant l'étrange impression de l'avoir déjà vu quelque part... Trop épuisé pour pouvoir réfléchir correctement en quelques secondes, il l'avait fixée en fronçant légèrement ses sourcils, puisant dans ses souvenirs pour tenter de remettre un nom sur ce visage, qui avait fini par éclore sur ses lèvres, comme un murmure hésitant :
« ...June ?! »
Ce n'était pas possible. Ce ne pouvait pas être elle...
THE FALCON & THE WINTER SOLDIER ✯ « they made you into a weapon and told you to find peace, but you can't because this is who you are, a product of war. chains are broken but are you truly free ? »
"Rien n'est plus agréable et rassurant que de se retrouver en compagnie de vieux amis." - Peter Bodo
Mes fesses avait heurtés le sol qui j’imaginais frais vu l’heure mais aucune douleurs ne me fit réagir plus que ça. A la rigueur j’aurais pu faire une légère grimace par rapport à mon repas qui était tombé mais heureusement je l’avais bien refermé alors je savais que je perdrais rien du délicieux mets qui m’attendais chaudement dans le sac en plastique.
Rapidement j’entendis l’homme qui m’avait percuté. Il s’excusa naturellement. Avant de s’inquiéter de mon état. Je répondis non de la tête avant de me rendre compte que mes longs cheveux étaient arrivés devant mon visage. D’un revers de bras, je les repoussais en arrière et vit aussitôt la main tendue de cet homme. C’était gentil de sa part de m’aider. J’entrepris de prendre sa main tendue en me redressant et en observant enfin cet homme… Son visage, ses yeux, ce regard… Tout me frappa en un instant alors que je me remettais sur mes jambes.
Bouchée bée et éternellement silencieux, je sentais mon cœur s’accélérait à la vision de cette rencontre fortuite mais tellement espérée et même rêvée. Mes yeux s’écarquillaient alors que je l’entendis prononcer mon prénom dans un murmure, tel un appel dans un océan déchainé. Je compris en même temps que ma voix se prononça pour la première fois depuis des jours :
« James… »
Il était là devant moi. James Barnes, mon sauveur, mon protecteur, mon confident, celui qui m’oubliait parfois mais que je ne pourrais jamais oublier un seul instant. Il était devant moi à me tenir la main. Je réalisais peu à peu que je venais de retrouver une partie de mon passé et dans son regard je comprenais que lui également songeai à nous souvenirs passés.
Naturellement je le détaillais, mes yeux descendirent vers son bras qui devrait être mécanique. Il était caché de vêtements. J’avais envie de vérifier, juste pour vérifier que c’était bien lui. Rapidement et sans dire quoi que ce soir, je relevais légèrement sa manche, voyant un avant-bras de métal d’une couleur différente que celle que j’avais connu mais c’était tout de même un bras mécanique. Je remis la manche en place histoire que personne d’autre ne puisse le voir. Et je relevais les yeux vers lui, vers James Barnes, mon coéquipier du passé.
Mes yeux pétillant de la joie de le retrouver, je ne pus contenir le sourire qui s’imposa sur mes lèvres comme une évidence. J’étais prise d’un ravissement soudain de la situation alors je ne pus me retenir à me mettre sur la pointe des pieds passant vivement mes mains de chaque côté de son cou et le serrant dans mes petits bras plus frêles que les siens. Je ne sentirais pas le contact de sa peau contre la mienne, ni ses vêtements, ni sa chaleur mais je sentis son parfum. Un parfum qui me réconforta et qui apaisa tous les tourments que je pouvais ressentir. Je savais qu’il n’était pas très câlin, ni tactile mais je m’en fichais. Il n’avait pas le choix. J’enfouissais mon visage dans son cou en murmurant doucement :
« C’est bien toi James Barnes… Si tu savais comme je suis soulagée que tu sois en vie… »
Il était vraiment là devant moi, je n’arrivais pas à le croire. Il respirait et il semblait même en pleine forme. Mais soudain quelque chose me frappa. Alors que je reprenais ma position sur mes pieds pour lui faire face à nouveau, je songeais… Il se souvenait de moi et pourtant il n’était pas venu me chercher. Il m’avait laissé, il m’avait abandonné… Mon sourire disparut à l’idée qu’une fois encore il s’en aille et me laisse ainsi seule avec les monstres qui me tenaient prisonnière et qui m’obligeait à les servir. Les pensées et les questions se bousculaient dans ma tête alors que je le regardais… alors que j’attendais de voir ce qu’il pourrait bien me dire…
Bien que cette rencontre fortuite et inespérée appartenait bel et bien à la réalité, Bucky avait bien du mal à y croire : après toutes ces années à errer, après tout ce temps à essayer d'oublier celui qu'il avait été, après les souvenirs effacés et les épreuves traversées, il retrouvait un visage familier. La brune qui se trouvait devant lui le rattachait inévitablement à un passé dont il n'était point fier, mais qu'elle avait su adoucir parfois ; par sa simple présence réconfortante, trompant l'éternelle solitude qui avait été sienne —et qui l'était toujours, June avait été brièvement la seule personne ayant apprivoisé la machine de guerre qu'il était, se faisant une place privilégiée auprès de lui... Pour un temps déterminé, seulement. Après, il l'avait oubliée puis retrouvée, et de nouveau oubliée, lui imposant involontairement une indifférence qu'il n'avait pas décidé.
« James… »
Sa voix, en revanche, il l'avait presque oubliée tant il l'avait si peu entendue. S'il était reconnu pour être peu bavard, la brune l'était encore moins ! Hochant son visage de haut en bas sans prendre la parole, l'observant sans encore réaliser pleinement qu'il venait de retrouver une vieille amie, il s'était silencieusement étonné de son visage qui n'avait point subi les affres du temps : comme pour lui, les années glissaient sur sa peau sans véritablement l'effleurer, ne ternissant point la jeunesse trompeuse qu'ils possédaient tous deux. Mais à l'intérieur, étaient-ils aussi beaux ? Alors qu'il lui tenait la main, elle avait eu un geste qui lui avait arraché un sourire presque amusé : soulevant rapidement sa manche gauche, elle avait spontanément vérifié que son bras mécanique confirmait son identité, bien qu'il était passablement différent de celui qu'elle avait connu autrefois... Bucky avait tant de choses à lui raconter, par où commencer... Mais elle ? Comment s'était-elle débarrassée de l'emprise d'HYDRA ? Est-ce qu'elle était à New-York depuis longtemps ? Alors qu'il avait froncé ses sourcils en espaçant ses lèvres de quelques degrés, s'apprêtant enfin à prendre la parole pour formuler une question, la jeune femme s'était hissée sur la pointe des pieds pour enlacer son cou, lui offrant une étreinte des plus réconfortante. Bien qu'il était peu friand des effusions affectives, Bucky avait hésité seulement quelques secondes avant de déposer une main dans son dos et l'autre dans sa nuque, l'appliquant davantage contre lui avec tendresse. Véritablement soulagé et heureux de la retrouver, il avait embrassé le sommet de son crâne tout en caressant son dos d'une main aérienne, ayant presque oublié la fatigue qui pesait sur ses épaules. C'était tellement inespéré qu'un instant, il avait songé qu'il était en train de rêver... Mais le parfum qui s'élevait de la crinière brune juste sous son nez ne mentait pas : elle était bien là.
« Bucky, pas James... James est mort il y a longtemps. »
Cela pouvait paraître dérisoire, mais pas pour lui. Voyant que son sourire s'était défait, il s'était reculé d'un pas tout en baissant légèrement son menton, étudiant l'expression surprenante qui animait à présent ses traits... La joie n'était plus là. June le regardait en affichant une humeur qu'il ne parvenait pas à déchiffrer et, ne voulant pas s'éterniser dans cette rue en pleine nuit, il avait glissé sa main droite dans la poche de sa veste tout en observant rapidement les alentours avant de revenir sur son amie, lui disant alors :
« Je suppose que tu as des questions à me poser... Moi aussi. Mais pas ici... Tu me suis ? »
Lui montrant alors une clef ancienne et quelque peu rouillée, Bucky était passé à côté d'elle en continuant son chemin pour se diriger vers son immeuble, espérant ainsi qu'elle lui emboîte le pas.
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Parler n’était pas une évidence pour moi mais en la présence de James j’avais déjà quelques facilités. Pourquoi ? Peut-être parce qu’il m’avait sauvé la vie et que je lui devais beaucoup. Toujours est-il que j’avais tout de même pris le temps de vérifier son identité de façon à la fois simple et rapide : Vérifier son bras. Et en effet, c’était bien lui. Si Hydra apprenait que j’avais retrouvé Barnes, je serais immédiatement interrogée et mise sous torture pour parler. Il fallait le protéger. Il fallait le prévenir qu’il était recherché et qu’il ne devait pas se montrer trop souvent. Mais comment le lui dire sans qu’il s’inquiète pour ma personne… Parce qu’il m’avait appelé par mon prénom et donc il se souvenait de moi, de nos moments tous les deux, de notre amitié. Se souviendrait-il de ce que j’avais failli subir et se doute-t-il un seul instant de tout ce que j’ai pu traverser, seule, depuis son départ ?
Mais pour l’instant, je me sens tellement reconnaissante de le retrouver que je ne peux m’empêcher de lui sauter au cou. Je me doute qu’il n’est pas avide de ce genre de geste affectif et je ne le suis pas plus que lui mais là, en cet instant, j’en ressens le besoin. Et visiblement il a pour moi des gestes tendres et affectifs qui me laissent penser qu’il est tout autant ravi de me revoir. Une caresse dans mes cheveux et dans mon dos, un baiser sur le sommet de ma tête et je me sens aussitôt enveloppée dans une bulle de protection. Cette bulle il n’y a que lui qui est capable de me la procurer depuis aussi loin que je m’en souvienne. Depuis que je suis née, il n’y a que James qui a su me faire me sentir en sécurité. Et finalement c’est une sensation que j’avais appris à ne pas rechercher à nouveau hormis à ses côtés. C’est lui mon protecteur et personne d’autre ne pourra prendre cette place dans mon cœur.
Il m’énonça qu’il ne se faisait plus appeler James mais Bucky. Alors lorsque nous avons repris nos places l’un en face de l’autre, je lui souris doucement, acquiesçant d’une signe de tête affirmant que j’avais bien compris la nuance dans son prénom. Si c’était important pour lui alors soit je l’appellerai ainsi dorénavant. Il avait changé, il semblait toujours autant torturé mais une part de lui avait changé. Et je songeais alors égoïstement qu’il m’avait laissé à Hydra pour prendre un autre chemin. Je le savais il avait rejoint les héros maintenant mais au passage il avait choisi de laisser derrière lui tout ce qui concernait Hydra – moi y comprit. Cette sensation d’abandon et ces pensées me firent perdre le sourire. Lâchant lentement la main de Jam… Bucky je me sentais tout à coup plus distante de lui. Peut-être ne voudrait-il pas reprendre contact avec moi ? Peut-être que finalement il voulait me laisser derrière lui. Après tout je faisais partie de son passé. Et finalement il reprit la parole me demandant de le suivre ailleurs pour discuter plus tranquillement qu’en pleine rue.
Bien sûr que n’importe quel endroit serait plus sûr au cas où un agent d’Hydra serait dans le coin. Je regardais rapidement autour de moi et fut tout de même légèrement rassurée que l’endroit semblait désert. Bucky se mit finalement en marche et je me baissais alors pour ramasser le sac de mon repas avant de me redresser pour le suivre. J’ignorais ou il m’emmènerait et j’ignorais même si j’étais suivie et peut-être que j’allais le mettre en danger. Mais je savais également qu’en sa présence à mes côtés, il ne pourrait rien m’arriver. Il était tellement important à mes yeux, un pilier qui me permettait de survivre à ma vie actuelle. Pour l’heure, je le suivais silencieusement jusqu’à un endroit inconnu certes mais un endroit où l’on pourrait discuter et profiter d’un moment ensemble.
« Il manque un temps à ma vie, il manque un temps, j'ai compris. Il me manque toi, mon alter ego. Il manque un temps à ma vie, il manque ton rire, je m'ennuie. Il me manque toi, mon amie » jean-louis aubert
Pour la toute première fois de sa vie, il remerciait presque ses insomnies pour l'avoir maintenu éveillé aussi tard dans la nuit ; sans elles, il ne serait pas sorti courir dans les ruelles de la ville et il n'aurait probablement jamais retrouvé celle qu'il avait toujours regardée avec une certaine tendresse pour sa fragilité, bien qu'il savait qu'il ne fallait pas la sous-estimer pour autant. June avait une force certaine, aussi bien de corps et d'esprit, mais elle appartenait à ceux qui ont la résilience dans le sang et qui savent souffrir sous le poids du silence, sans s'ébattre de violence. C'était une chose qu'il avait toujours admirée chez elle, bien que cette faiblesse d'apparence lui avait parfois causé quelques ennuis, qu'il n'avait pas toujours pu lui éviter. Ainsi, alors qu'il marchait d'un pas rapide vers son immeuble, il n'avait pu s'empêcher de se questionner... Qu'avait-elle fait depuis son départ ? Était-elle toujours sous l'emprise d'HYDRA ou avait-elle réussi à s'enfuir également ? Est-ce qu'elle avait souffert durant tout ce temps, ou avait-elle trouvé des bras protecteurs pour lui épargner davantage de souffrance ? Il espérait qu'elle ait une vie des plus douce et soyeuse, mais il n'y croyait pas tellement... HYDRA ne laissait que rarement filer leurs soldats et, lorsque ces derniers leur échappaient par miracle, ils remuaient ciel et terre pour le retrouver... Et l'achever eux-mêmes. Alors, que faisait-elle, là, en pleine nuit, dans la même ruelle que lui ? Le hasard faisait bien les choses, disait-on. Mais parfois, le hasard est trompeur, illusoire. L'avaient-ils envoyée comme un piège tendu à son esprit désoeuvré, qui n'attendait qu'une éclaircit pour chasser la noirceur ? Est-ce qu'elle était là pour le capturer, le ramener à HYDRA ou le tuer pour eux ? Un instant, alors qu'il avait sa main appuyée contre la porte de son immeuble, prêt à la pousser pour en franchir le seuil, il n'avait pu empêcher cette idée sordide d'effleurer son esprit... Bien qu'elle aurait pu s'injurier en apprenant qu'il formulait de telles pensées à son encontre, ce n'était pas réellement étonnant car il avait cette question intérieure pour la plupart des personnes qu'il rencontrait, même des enfants. Il vivait dans la peur constante de les voir ressurgir de l'ombre, effrayé à l'idée de redevenir la machine sanglante qu'ils avaient engendré, si bien qu'il tendait vers la paranoïa bien trop souvent d'après la psychiatre qui le suivait... Devait-il la considérer comme une menace ? Peut-être. C'était inconsidéré de lui faire confiance, et encore plus de la conduire dans son appartement... Mais il avait beau essayé de se raisonner, d'être plus méfiant envers elle, il prenait le risque, bien trop heureux de la retrouver après toutes ces années. Les yeux rivés sur le sol, réfléchissant à toute vitesse, Bucky s'était retourné vers June au bout de quelques secondes pour, contre toute attente, l'enlacer délicatement afin de la serrer de nouveau dans ses bras, comme s'il avait peur de ne plus pouvoir recommencer après : qu'importe si elle était le piège joliment dressé, il acceptait le destin qu'elle lui réservait, aussi funeste pouvait-il être.
« Je suis vraiment heureux de te revoir. »
Se détachant d'elle après avoir murmuré ces quelques mots à son oreille, Bucky s'était engouffré dans le hall de son immeuble et avait monté les étages pour grimper sur son palier grinçant, sur lequel il s'était dirigé vers une porte étonnamment intact, dont la peinture était encore lisse et brillante, comme si elle n'était que rarement utilisée. Elle était le présage annonciateur de ce que June allait découvrir : un appartement trop peu décoré, pour ne pas ainsi dire presque vide, ne comportant qu'un canapé dans le salon et de quoi se nourrir dans le frigo. La laissant passer la première, Bucky lui avait adressé un léger sourire complice avant de rentrer à sa suite, refermant la porte de l'appartement derrière eux. L'endroit était spacieux et lumineux grâce aux nombreuses fenêtres nues, les murs étaient d'un blanc immaculé et le sol était d'un bois clair, jamais caché par un quelconque tapis. Il n'y avait aucun cadre, aucune photo aux murs, pas un seul signe que l'appartement était habité ; seul une couverture et un oreiller traînaient sur le canapé en cuir élimé, qui ne faisait face à aucune télévision. Tout portait à croire que personne ne vivait ici, et pourtant...
« Fais comme chez toi... »
Avait-il dit en déposant les clefs de son appartement sur un petit meuble dans l'entrée, qui ne servait qu'à ça d'ailleurs. Lui faisait signe de poursuivre dans le salon, seule pièce où elle pourrait s'asseoir quelque part, Bucky l'avait suivi tout en passant l'une de ses mains dans sa chevelure brune, ne sachant pas tellement par où commencer... Il y avait tant de choses à dire. Posant un regard presque caressant sur celle qui donnait l'impression d'être un oisillon tombé du nid, Bucky avait légèrement relevé ses mains en haussant ses épaules, un peu maladroit dans ses propos.
« Tu as bonne mine... Les choses ont l'air d'aller pour toi. »
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Après quelques minutes de marches en silence, nous arrivâmes devant une porte d’un immeuble. Je réalisais alors que nous étions chez lui. C’était des souvenirs que j’étais en train de forger et auxquels Hydra auraient accès s’ils fouillaient mon esprit. J’allais devoir me tenir parfaitement à carreaux si je ne voulais leur donner la moindre information. Et dans le cas contraire, il fallait que je parvienne à prévenir Bucky qu’il était en danger, qu’il était recherchait et qu’il devait être discret. Pourtant j’avais le regard fixé sur sa main gantée qui était posée sur la porte. Je le regardais, il semblait hésitant à me montrer son univers et c’était logique dans le fond. Nous appartenions désormais à des camps ennemis mais jamais Ô grand jamais je ne pourrais faire de mal à cet homme qui pour moi est un modèle. Cela serait contre mes préceptes les plus ancrés en moi.
J’allais m’avancer vers lui pour lui partager mon inquiétude mais à la place c’est lui qui s’était rapidement retourné vers moi pour me prendre dans ses bras. Surprise durant la première seconde, je sursautais légèrement à l’idée d’un contact avec moi et puis la seconde suivante, j’étais totalement détendue et sereine. Je me rendais bien compte qu’il pressait ses bras autour de mon corps comme pour me faire comprendre à quel point il tenait à moi et un sourire doux se forma sur mes lèvres alors que j’enfouissais mon visage dans son blouson de cuir. J’entendis alors sa voix qui me berça doucement en me rassurant sur ma présence à ses côtés. Il était là désormais, je ne serais plus seule. Je ne répondis que par des yeux pétillants – difficilement visible avec la nuit tombée – et un sourire sincère à mon protecteur attitré.
Et puis nous entrons tous les deux dans le hall en silence, les seuls bruits perceptibles étaient nos pas sur l’escalier grinçant sous nos pas. Et puis une porte, simple, qui semblait neuve… Je le regardais ouvrir calmement la porte avant de me céder le passage pour que j’entre en première. Mes yeux écarquillaient devant un appartement immense… et vide ! Je me retourne une première fois vers Bucky en fronçant légèrement les sourcils d’incompréhension avant d’avancer un peu plus dans le logement pour découvrir son univers. Il est dénué de souvenirs, dénué d’objets personnels et de meubles. Ma chambre sous les toits dans le Bronx est bien plus petite mais également bien plus encombrée. Le moindre morceau de mon âme qui ne me fait pas penser à Hydra s’y trouve pour que je m’y sente bien. Alors lorsque je voie cet appartement vide d’âme, je songe au fait que Bucky est bien plus solitaire et seul qu’il n’y parait lorsqu’on peut le voir aux côtés des Avengers. Il me dit de faire comme chez moi et naturellement je pose mon sac de courses sur la pointe du canapé avant de songer à retirer ma veste pour plus d’aisance. Mes yeux se perdent sur la baie vitrée qui offre – malgré la nuit – une vue magnifique sur la ville. Je n’ose pas m’approcher de la fenêtre pour ne pas être vue mais j’admire l’étendue de son appartement avec des yeux brillants, telle une enfant qui découvre un endroit certes sans traits de personnalité apparents mais un endroit qui lui appartient à lui.
Et puis mes yeux se posèrent sur Bucky qui me regardait avait tendresse. Je lui souris à nouveau en silence. Je savais que nous avions beaucoup à nous dire et il faudrait que je parle mais c’était toujours compliqué. Et puis même si j’avais l’habitude de parler avec lui, c’était il y a bien longtemps maintenant. Il me lança une phrase qui me fit réagir… Bonne mine ? Je ne sais pas si le terme était correct mais soit, je devais avoir une bonne tête alors. Je fronçais légèrement les sourcils tout de même en haussant les épaules…
« Disons que ça peut aller, malgré tout ce que je peux subir. »
J’étais plus cassante et ironique que je ne l’aurais voulu et mon regard se perdit dans le vide de cette appartement, fixant un point sur le mur en face de moi pour poursuivre :
« Je ne sais pas ce que tu imagines pour moi Jam… Bucky, mais je suis toujours coincée avec eux… »
Il n’y avait nul besoin de préciser qui était le « eux » en question. Pourtant je me sentis obligée de me justifier quant à ma présence et le hasard de l’avoir retrouver.
« Je ne sais pas non plus si tu y as songé mais non, je ne suis pas en mission pour te retrouver et entrer en contact avec toi… En tout cas pas ce soir ... Et saches que je ne dévoilerais rien de ce que tu diras. Tu sais à quel point tu comptes pour moi. Je ne pourrais jamais te faire ça. C’est important pour moi de te le dire. »
J’avais parlé avec mes mots, avec mon cœur et je ne le regardais plus, limite honteuse de ce qu’il pourrait penser de moi et de mon inaction quant au fait que j’étais toujours prisonnière de ces monstres. Je n’avais même pas remarqué la larme qui coulait sur ma joue comme libératrice de mes révélations.
« IL MANQUE UN TEMPS À MA VIE, IL MANQUE UN TEMPS, J'AI COMPRIS. IL ME MANQUE TOI, MON ALTER EGO. IL MANQUE UN TEMPS À MA VIE, IL MANQUE TON RIRE, JE M'ENNUIE. IL ME MANQUE TOI, MON AMIE » JEAN-LOUIS AUBERT
VENDREDI 17 MAI 2024 AVEC JUNE CAMPBELL
« Disons que ça peut aller, malgré tout ce que je peux subir. Je ne sais pas ce que tu imagines pour moi Jam… Bucky, mais je suis toujours coincée avec eux… »
Avait-elle dit, d'une voix aussi glaçante que la réalité qu'elle annonçait. Suivant les intonations de sa voix, et les odieuses vérités cachées derrière ses mots, Bucky n'avait pu que se raidir d'effroi, son esprit devinant fort bien ce que le mot "subir" voulait présentement dire. La torture. La souffrance. La solitude. La peur. Les menaces. La violence. Un quotidien qu'il avait connu, qu'il n'oublierait probablement jamais. Aussi bien ce qu'ils lui ont fait, que ce qu'ils l'ont forcé à faire, aucun souvenir ne quittera sa mémoire. La culpabilité est une liane incassable : vous n'avez aucun refuge lorsque vous êtes coupable aux yeux du monde, et ils s'imposent alors comme la seule maison que l'on peut posséder. La seule ? Non. June avait une autre maison qui pouvait l'accueillir. Elle avait une autre personne sur qui compter. Elle avait désormais quelqu'un pour la protéger.
Dos à elle, encore protégé de son regard peut-être curieux, le brun avait crispé sa mâchoire dans une expression de vive colère, qu'aucun geste doucereux n'aurait pu apaiser. Cela faisait bien longtemps qu'il n'avait pas éprouvé une telle fureur, des années même... Ses lèvres pincées, étouffant un élan de rage qu'il se devait de contenir devant son amie, le Soldat de l'Hiver avait déposé une main lourde sur le meuble devant lui, comme s'il se retenait de frapper dans le bois de celui-ci, à défaut de pouvoir extérioriser sa colère contre les réels coupables. Mais il s'en voulait également de ne pas avoir été présent pour elle. Il aurait dû la chercher. À la minute où son visage était réapparu dans ses souvenirs, il aurait dû remuer ciel et terre pour la trouver et la sauver, lui épargnant des années de souffrance et de servitude pour HYDRA... Il aurait dû, oui. Mais il ne l'avait pas fait et, par sa faute, par son immuabilité, June souffrait depuis bien trop longtemps.
Se retournant enfin vers elle en arborant une mine sincèrement désolée, Bucky avait d'abord haussé ses épaules comme s'il avouait silencieusement ses fautes, qu'il regrettait amèrement. Elle avait toutes les raisons du monde de lui en vouloir, et il méritait amplement sa colère mais, peut-être aurait-elle la force de le pardonner et de lui accorder de nouveau sa confiance ? C'est ce qu'il espérait en tout cas.
« Non, plus maintenant. J'aurais dû être là avant, j'aurais dû venir te chercher et te protéger d'eux. Et je n'étais pas là... Je te demande pardon, June. Je ne t'ai pas protégée comme je m'étais promis de le faire. Mais maintenant, c'est terminé. Tu es en sécurité avec moi, et je ne laisserai plus personne te faire du mal. »
Glissant de nouveau ses bras autour de ses hanches, il l'avait serrée contre lui comme une promesse immuable, que personne ne pourrait briser : il ne l'abandonnerait plus jamais derrière lui, il allait veiller sur elle et la protéger contre chaque agent d'HYDRA qui voudrait se mettre en travers de sa route. Il l'avait déçue une première fois, il avait manqué à sa parole, il ne comptait pas échouer une deuxième fois. Se séparant de la brune de quelques degrés après ses derniers aveux, il avait apporté son pouce métallique sur sa joue lisse pour intercepter la larme qui courait sur sa peau laiteuse, comme pour effacer toute trace de tristesse sur son beau visage. Il voulait la voir sourire, il voulait qu'elle soit enfin heureuse et libre.
Mais pour l'instant désireux de la rassurer, Bucky avait entouré ses épaules de son bras droit tout en l'entraînant vers le canapé pour que tous deux puissent s'y installer, tandis qu'il lui disait :
« Je te crois... Je te fais confiance. Mais il va falloir que tu me fasses confiance aussi... »
Frottant nerveusement l'arrière de son crâne en soupirant, Bucky avait mordu le coin de sa lèvre inférieure tout en appuyant ses coudes sur ses genoux pliés, ne sachant pas tellement comment formuler la chose, ni même si elle allait accepter. Car même si elle n'était pas heureuse auprès d'eux, il lui faudrait beaucoup de courage pour s'enfuir... Mais de courage, elle n'en manquait pas et il le savait. Elle était l'une des personnes les plus fortes qu'il connaissait, et c'est pourquoi il avait fini par lui dire, sans vraiment réfléchir aux mots employés :
« Ne retourne pas avec eux. Reste avec moi. Ici. » .
CODAGE PAR AMANTIS ET PERSONNALISATION PAR AIWENORE
THE FALCON & THE WINTER SOLDIER ✯ « they made you into a weapon and told you to find peace, but you can't because this is who you are, a product of war. chains are broken but are you truly free ? »
"Rien n'est plus agréable et rassurant que de se retrouver en compagnie de vieux amis." - Peter Bodo
Presque honteuse de tout ce que j’étais en train d’annoncer à Bucky, je n’osais pas le regarder et je n’osais pas affronter son regard. Je pourrais surement y lire le trouble face à mon récit. Il a déjà vécu ce que je vis par le passé et je savais qu’en l’évoquant, j’allais faire remonter quelques souvenirs douloureux. Ce n’est que lorsque je l’entendis bouger que je compris qu’il avait le dos tourné, surement pour lui également masquer ses émotions. C’était une habitude chez Hydra de masquer ce que l’on ressent pour ne pas se faire trahir par les collègues ou les supérieurs.
La voix de Bucky résonna alors dans l’appartement. Il s’excusa. Il s’en voulait de ne pas avoir été là pour moi. Ses mots résonnaient dans mon esprits tout comme ils résonnaient dans son appartement contenant trop peu de meubles. L’écho de sa tristesse et de sa mélancolie me transperça alors que je le sentais se rapprocher de moi. Il me protégera, il sera là pour moi désormais. Je sentais d’un coup une vague de soulagement qui m’envahissait alors qu’il me prit dans ses bras.
J’avais parlé avec mon cœur et toute mon âme et si j’avais pu être cinglante d’une certaine manière c’était parce que durant longtemps j’avais songé au fait qu’il m’avait abandonné et puis les années ont passées et ma vie a repris son cours et mon quotidien douloureux est redevenue une habitude mais désormais avec le retour de Bucky tout pourrait changer. J’avais un nouvel espoir de revoir le soleil dans ma vie. Encore une fois, il serait mon sauveur, mon protecteur et le pilier dans ma vie.
Il avait essuyé mes larmes et j’eus enfin le courage de remonter mon visage vers le sien pour plonger mes yeux dans les siens. Comme par le passé, je me sentis aussitôt rassurée et apaisée. Je voulais qu’il sache que je suis sincère et honnête avec lui et que je serais là pour lui comme lui est là pour moi.
Lentement, il m’entraina vers le canapé mais je restais blottie contre lui. Sentir sa présence était rassurant pour moi et j’avais besoin de ça. Et puis il se plaça à mes côtés l’air songeur alors que je le regardais en murmurant :
« Je te fais confiance. Toujours… »
Je me repositionnais sur le canapé pour m’installer en tailleur, une de mes positions favorites. Et je me redressais pour me caler sur le dossier du canapé alors que Bucky, lui, était penché en avant les coudes sur les genoux. Il semblait réfléchir et j’aurais voulu lui montrer mon soutien. Je levais la main dans le but de la poser dans son dos mais je me retins, laissant ma main suspendue dans l’air à quelques centimètres de lui. Je fermais alors les yeux, me résignant et ramenant ma paume vers moi. J’ouvrais la bouche pour parler mais il parla avant moi et ses mots me heurtèrent à nouveau. Je rouvris les yeux d’un coup et me redressa. Il avait dit quoi ? Que je reste avec lui ? Mes yeux exprimaient autant de surprise que tout mon visage et mon corps. Je gardais la bouche ouverte, interloquée devant ses paroles.
Est-ce que réellement je pourrais rester ici ? Oui et d’ailleurs ce n’était pas l’envie qui me manquait mais si jamais je désertais Hydra comme ça du coup au lendemain, je serais recherchée, traquée et suivie. Je le mettrais aussitôt en danger lui et ses proches, surtout avec le projet Nemesis. Mes pensées fusaient à toute vitesse dans mon esprit en même temps que mes yeux fixaient Bucky. Après plusieurs secondes de silence, je repris enfin, ferma ma bouche et déglutis péniblement. Un sentiment partagé s’empara de moi. Une dualité qui allait me rongeait encore et encore pendant un moment. J’ouvris la bouche pour parler mais les mots ne sortirent pas. Mon cœur hurlait un immense oui et voulait lui sauter au cou et mon cerveau lui restait rationnel et tactique me suppliait de ne pas le mettre en danger. Il avait tellement galérer pour être libre que je ne voulais pas être responsable de sa « remise en cage »…
Ma bouche se ferma doucement en même temps que mes yeux se baissaient. Lentement je décroisais mes jambes pour m’aligner dans la position penchée vers l’avant de mon ami. Tendrement ma main se posa sur la sienne. Si je ne sentais pas le contact de sa peau sur la mienne, je comprenais – et lui également – toute la symbolique du geste. Sans le regarder je commençais enfin une réponse à sa proposition :
« Si tu savais à quel point je voudrais te dire oui, un immense oui joyeux et instantané… Mais … Je ne peux pas. Je te mettrais en danger en désertant. Ils te cherchent toujours et ils veulent que te retrouver pour te reconditionner ou alors te tuer. Je ne pourrais pas vivre avec ça sur la conscience s’il t’arrivais quelque chose. »
Je serrais ma main sur la sienne en relevant mes larmes emplis de larmes vers lui.
« Tu es tout pour moi, un grand frère, un pilier, je refuse de te mettre en danger. Rien que le fait que je sois là je te mets en danger… J’ai envie de les quitter, c’est mon désir le plus cher mais pas au détriment de ta sécurité. »
Je sentais que les larmes montaient et allaient couler. D’instinct, je me blottis dans le cou de James, j’avais besoin de son soutien, de son réconfort. Même si je ne sentais pas ses caresses où ses câlins, je me devais d’être proche de lui pour me sentir bien. Une fois dans son cou, je humais lentement son parfum tout en murmurant :
« Je pense que l’on pourrait trouver un moyen de garder le contact mais il faut que l’on soit prudent jusqu’à ce que je trouve le moyen de partir de cet enfer… »
« IL MANQUE UN TEMPS À MA VIE, IL MANQUE UN TEMPS, J'AI COMPRIS. IL ME MANQUE TOI, MON ALTER EGO. IL MANQUE UN TEMPS À MA VIE, IL MANQUE TON RIRE, JE M'ENNUIE. IL ME MANQUE TOI, MON AMIE » JEAN-LOUIS AUBERT
VENDREDI 17 MAI 2024 AVEC JUNE CAMPBELL
Après lui avoir assuré qu’il n’allait plus se détourner d’elle en scellant ses paroles d’une promesse intérieure, Bucky l’avait entraînée vers le canapé en la caressant presque du regard, osant à peine imaginer les choses terribles qu’elle avait vécu depuis qu’il s’était échappé d’HYDRA, sans elle. C’était presque par sa faute qu’elle avait enduré toutes ces souffrances. Ce n’était pas sa main qui l’avait torturée, mais sa fuite l’avait conduite à affronter leurs bourreaux toute seule, la laissant prisonnière entre des barreaux qui étaient aussi cruels qu’une torture interminable. Et pour cela, il s’en voulait irrémédiablement, même s’il ne se souvenait point d’elle lorsqu’il avait fui l’organisation soviétique après avoir retrouvé Steve, ne retrouvant sa mémoire qu’entre les mains précieuses de Shuri, alors qu’il était au Wakanda pour sa convalescence. Mais dès cet instant, à la minute même où il avait retrouvé les traits féminins de son visage dans le brouillon de ses souvenirs surgissant d’une brume lointaine, il aurait dû aller la chercher, il aurait dû la sauver des griffes des geôliers armés de terreur et de violence. Voilà une culpabilité de plus à rajouter à la longue liste des regrets qui lui rongeaient l’âme. Bientôt, celle-ci ne serait plus qu’un lambeau troué. Mais n’était-ce pas ce qu’il méritait ?
« Je te fais confiance. Toujours… »
Sa confiance était un trésor inestimable, qu’il n’était sans doute pas digne de recevoir ; après tout, il l’avait à la fois déçue et trahie, l’abandonnant aux prismes d’un monstre aux mille visages qui n’avait qu’un but : formater des soldats dans la souffrance pour parvenir à leurs fins. Mais malgré tout ce qu’il s’était passé et tout ce qu’il n’avait pas fait pour la sauver, June continuait à lui accorder sa confiance, lui pardonnant son absence avec une générosité de cœur tout à fait incroyable. Sous ces mots, véritable soulagement qui vint apaiser son cœur de quelques tourments, Bucky avait serré sa main l’une dans l’autre tout en tournant son menton crispé vers son épaule pour lui lancer un regard au-dessus de celle-ci, ses lèvres prenant la forme d’un sourire étrangement suave. Lui aussi, lui faisait toujours confiance. Malgré les années, malgré le fait qu’elle appartenait toujours aux geôliers qui avaient fait de lui un monstre sanguin, malgré le fait qu’ils s’étaient quittés sans savoir qu’ils se voyaient pour la dernière fois, malgré le fait qu’il l’avait oubliée sans le vouloir, ils se retrouvaient, des années après, comme s’ils s’étaient enlacés hier. Sans rancœur pour les départager, seulement de l’amitié pour les unir.
Rien n’avait véritablement changé entre eux, car Bucky nourrissait toujours les mêmes élans protecteurs envers celle qu’il considérait comme une petite sœur, peut-être, pour remplacer celle qu’il avait perdu et qu’il n’avait jamais retrouvé. Ou peut-être était-ce elle qui l’avait perdu ? Rebecca était morte sans savoir ce qu’il était advenu de son frère, pensant sans nul doute qu’il était mort à la guerre, comme tant d’autres… C’était une version bien plus douce que la réalité, et James —le James qu’elle avait connu, était soulagé de savoir que sa sœur s’était éteinte en pensant qu’il avait été un héros pour sa nation. C’était mieux ainsi. Il n’aurait pas supporté de la décevoir si elle avait connu l’honteuse vérité d’avoir un meurtrier pour frère.
Mais, en cet instant, c’est lui qui fut déçu par la réponse de June ; sans refuser viscéralement son offre, elle considérait qu’il était bien trop dangereux de déserter HYDRA après l’avoir retrouvé. Même après toutes ces années, même après avoir été abandonnée, elle s’évertuait à le privilégier au détriment de sa propre quiétude de vie : elle acceptait de souffrir encore si c’était pour le protéger, et cette démarche aimante ne pouvait que l’émouvoir. Sincèrement touché par les élans dévoués de son amie, Bucky avait entrelacé leurs doigts tout en soupirant de nervosité, sachant pertinemment qu’elle parlait avec raison. Evidemment qu’elle disait vrai, mais c’était un irréparable préjudice qu’il essayait de racheter, et le fait d’être en danger n’était qu’un détail qu’il acceptait volontiers si c’était pour la protéger elle. Rien n’était plus important que sa sécurité à présent. Pressant ses lèvres l’une contre l’autre, l’écoutant parler avec grande attention — d’ailleurs il lui apparaissait nettement qu’elle n’avait jamais été aussi bavarde qu’en cet instant, Bucky avait tourné son visage vers le sien en fronçant légèrement ses sourcils sous les larmes qui accablaient ses joues, car il détestait la voir ainsi mal en point, tourmentée par la peur et sa volonté. À cause d’eux. À cause de lui. Il fallait que son calvaire cesse, et vite. Il refusait de l’abandonner une seconde fois à son sort funeste.
« Tu as raison, tu ne peux pas disparaître du jour au lendemain, ça engendrerait trop de risques, surtout pour toi… »
Avait-il fini par admettre, lui accordant le fait qu’ils devaient organiser sa fuite avec précision et préméditation, pour ne pas risquer d’être découvert par les agents d’HYDRA. Il ne pouvait nier le fait qu’ils avaient essayé plusieurs fois de le ramener dans l’une de leurs bases, peut-être pour le tuer d’ailleurs, et ne voulait pas prendre un tel risque pour June. Alors que celle-ci venait se cajoler contre lui, il l’avait tendrement enlacée de son bras robotique afin de caresser son dos d’une main métallique quelque peu froide, essayant de la rassurer du mieux qu’il le pouvait. Et comment pouvait-elle être rassurée ? Il redoutait à présent le moment où il devrait la laisser repartir vers eux sans pouvoir la retenir… Cela s’annonçait, par avance, très difficile, mais il savait qu’il fallait en passer par là pour lui offrir un avenir meilleur, celui qu’elle méritait.
Embrassant de nouveau le sommet de son crâne, il l’avait davantage serrée contre lui pour lui signifier physiquement qu’il serait toujours là pour elle dorénavant, et qu’il ne laisserait plus personne se mettre entre eux. Essayant de faire taire la colère et la fureur vengeresse qui coulait à présent dans ses veines, il s’était concentré sur la jeune femme qu’il tenait dans ses bras. Comme avant, aillait la protéger et veiller sur elle, même de loin. Il ne pouvait supporter l’idée qu’on puisse de nouveau lui faire du mal.
« Je te promets que je vais te sortir de là et que tu auras une belle vie… Je te le promets. »
Passant son autre bras autour de son corps pour la tenir pleinement contre lui, Bucky avait appuyé son menton sur le sommet de son crâne tout en lui murmurant, d’une voix douce :
« Déjà, sache que tu peux venir ici quand tu veux… J’ai un double des clefs, je vais te les donner et tu pourras venir même en mon absence, d’accord ? Je vais aussi nous acheter deux téléphones, qu’on utilisera seulement pour se contacter… Et tu vas me dire tout ce que tu peux pour que je puisse organiser ton départ. Déjà, qu’est-ce que tu fais ici, à New-York ? »
Il fallait qu’il en sache le plus possible sur les projets de l’organisation pour les utiliser à son avantage… Mais savait-elle réellement ce qu’ils comptaient faire ? Et accepterait-elle de lui en parler ? .
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