D'un royaume à l'autreRemy Lebeau11 septembre 2024.
La journée avait été morose.
Malady ne pouvait s'empêcher de ressasser ses actuels échecs diplomatiques, puisque la crème d'Asgard avait été présente sur Midgard et lui avait filé entre les doigts. Certes leur royaume n'était plus, mais ces derniers disposaient tout de même d'un certain poids diplomatique. Assise sur le lit de sa maison prêtée par le Shield, la reine d'un monde en ruine se permit de laisser s'échapper un soupir audible.
Il lui en fallait néanmoins plus pour se laisser abattre. Se relevant d'un coup, Malady commença à se déshabiller pour prendre une courte douche. Ses ablutions finies, elle ouvrit de multiples tiroirs pour en ressortir une tenue de soirée.
Devinant qu'elle allait probablement rester sur "Terre" pour un petit moment, l'elfe noire avait décidé de faire des emplettes, accompagnée d'une agente du Shield, non pas pour sa sécurité mais pour l'aider à choisir des tenues de tous les jours, ainsi que pour des occasions spéciales - elle n'allait pas passer sa vie en armure.
L'argent lui venait de la vente des matériaux de sa navette, sur laquelle l'organisation qui l'avait recueillie s'était permise de prélever des "dommages & intérêts" liés à son crash et à son logement. Ladite somme prélevée avait été ridicule comparée à ce que lui avait rapporté la vente de matériaux qui n'étaient pas présents dans le sol terrien.
Peu dépensière, Malady n'avait que très peu utilisé ses fonds que le Shield gardait de toute façon pour elle. D'un geste habile, elle enfila sa robe de soirée, se remémorant attentivement ce que lui avait dit l'agente - un problème de garde-robe restait gênant, même pour une alien. Si ladite robe était somme toute assez classique, son physique de guerrière était cependant garanti de faire tourner des têtes. Ce qui ne la gênait pas plus que ça.
Elle tapota rapidement sur une tablette fournie par le Shield pour demander de l'argent et si possible un transport jusqu'à New-York. La réponse ne se fit pas tarder et on lui annonça qu'un chauffeur serait là avec l'argent d'ici une trentaine de minutes. Parfait.
Prenant un soin tout particulier à ses cheveux qu'elle brossa pendant quelques minutes, la reine troqua son habituel élastique tenant sa queue de cheval pour un bijou en or. Sans hâte, elle enfila des ballerines noires - les talons étant pour elle un outil de torture particulièrement sadique - et une pochette dorée dans laquelle figurait ses "papiers" et des informations que lui avait donné le Shield. Aujourd'hui, elle serait Alisson Cain, une mutante venue à la grande pomme en touriste, dans l'espoir d'y dilapider une partie de ses économies en jeux d'argent. C'était là plus simple à expliquer qu'une alien de sang royal fille d'un dangereux terroriste.
Le but de sa sortie était double : Malady voulait découvrir ce que Midgard avait à proposer en tant que divertissements tout en se relaxant un peu après ces dernières semaines plutôt frustrantes. C'est pour cela qu'elle indiqua à son chauffeur fraichement arrivé l'emplacement d'un casino un peu spécial. Celui-ci avait attiré son œil de par sa sobriété mais surtout par l'ambiance sérieuse qui s'en dégageait - tout divertissement était bien plus intéressant quand ses adversaires étaient redoutables.
C'est ainsi que la reine de Svartalfheim se retrouva devant l'entrée du bâtiment, une pochette remplie à ras-bord de cash à la main et un grand sourire sur son visage. La voyant arriver, les deux videurs se redressèrent un cran, quelque peu surpris par la carrure de l'elfe.
- Bonjour madame, je peux vous aider ? - J'aimerais participer à vos meilleurs jeux d'argent.
- Je suis désolé mais l'endroit est réservé aux professionnels. Alors à moins que ça soit le cas...
Malady eut un petit sourire faussement innocent, notant au passage que les deux vigiles avaient un instant regardé les marques sur son front. D'un geste léger, elle entrouvrit sa pochette, montrant la quantité non-négligeable de billets présents en coupures de cent dollars. - Même pour une mutante avec trop d'argent et nul part où le dépenser ? Je vous promets que je n'embêterais aucune table qui ne voudra pas de moi.
Les deux vigiles échangèrent un regard. L'un sembla hausser les épaules, dans un geste qui voulait dire "on ne risque pas grand chose".
- On va vous faire une fleur madame, mais à la moindre plainte on vous met dehors, d'accord ?
Malady ricana intérieurement. Elle aurait bien voulu les voir essayer.
- D'accord. Merci beaucoup !
Elle entra alors sans plus attendre, se dirigeant presque immédiatement vers le bar. L'entrée avait été plus facile que ce qu'elle pensait, mais il semblerait que le fruit de ses recherches sur les casinos et les jeux d'argent associés à un tel lieu avait payé. Avec un autre sourire aimable, elle commanda un cocktail dont le nom était affiché, avant de tourner le dos au comptoir pour le siroter. De son point de vue actuel, elle pouvait voir quelques tables où des parties ce qui lui semblait être du poker et du blackjack était en train de se jouer. Quelle table allait-elle donc rejoindre en premier ?
En cette soirée du 11 septembre, il régnait au sein du Big Deal Casino une atmosphère particulière. Des banderoles avaient été accrochées dans tout le casino, suspendues au plafond et décorant le bar ainsi que les tables de jeu. Elles étaient constituées de dizaines de fanions représentant le drapeau américain. L'ambiance sonore était très solennelle, la playlist qui passait ce soir était composée de chants patriotiques, militaires, et bien sûr de l'hymne national qui revenait toutes les heures. Le propriétaire de l'établissement était du genre à saluer le drapeau à chaque commémoration officielle, et cela se ressentait dans l'ambiance très « God Bless America » de cette soirée.
De son côté, Remy ne s'en occupait qu'assez peu. Il ne s'était jamais vraiment senti patriote, en tout cas pas en tant qu'américain. Il était cadien dans l'âme, depuis toujours. Quant aux évènements du 11 septembre, il ne s'en souvenait que vaguement, étant enfant à l'époque et vivant dans le microcosme de la Nouvelle Orléans. Il n'avait rien contre une minute de silence pour respecter les âmes des morts, mais n'avait jamais fait l'effort de retenir les paroles de la Bannière Etoilée. La décoration et la bande-son le laissaient plutôt indifférent et ne l'empêchaient pas de passer une bonne soirée.
Il était installé depuis une petite heure à la table classique de poker du mercredi, où il retrouvait sensiblement les mêmes personnes chaque semaine. Il se faisait un plaisir, notamment, de plumer et tourner un peu en ridicule un jeune fils de riche, Jimmy Campbell, qui avait légèrement tendance à se prendre pour la huitième merveille du monde. Le jeune homme était particulièrement beau, cela dit, et le Prince des Voleurs ne désespérait pas d'un jour finir par l'attirer dans son lit. Ils ponctuaient donc leurs tours de jeu de joutes verbales tantôt acides tantôt piquantes, mais toujours avec un fond bienveillant, qui n'était néanmoins pas évident à discerner lorsque l'on observait la table d'un œil extérieur. Les autres joueurs de la table s'en amusaient et comptaient les points en silence.
Si la conversation allait bon train, Remy prit quelques instants avant de répondre à une énième pique lorsqu'il vit une femme étrange pénétrer dans le casino. Son regard se porta immédiatement sur sa carrure hors du commun, qui associée à une jolie petite robe noire lui donnait une apparence assez insolite. Puis il regarda son visage et haussa un sourcil intrigué. Tout en gardant la tête tournée vers la table de jeu, ses yeux vifs et curieux suivirent la nouvelle venue jusqu'au bar. Son changement d'attitude fut bien évidemment remarqué par les autres joueurs de sa table qui ne manquèrent pas de le railler.
« Oh, Gambit, t'arrêtes de jouer les jolis cœurs ? T'es là pour jouer ou pour draguer ? »
Remy détacha son regard de l'étonnante demoiselle pour regarder son adversaire, esquisser un léger sourire et relancer la mise.
« Je suis là pour gagner. Remarque, je ne prends pas beaucoup de risques en jouant contre toi... »
Cette provocation poussa Jimmy à augmenter la mise. Comme les autres joueurs se couchèrent et que ni l'un ni l'autre ne céda, ils finirent par montrer leurs cartes : Gambit remporta le tour avec un brelan de sept, le sept de pique et le sept de trèfle de sa main associés au sept de carreau de la table. En récupérant les jetons, il ne manqua pas de répliquer, son sourire s'agrandissant et mettant en relief la charmante fossette sur sa joue gauche :
« Tu vois, je peux laisser mon "cœur" s'occuper ailleurs, je n'en ai pas besoin pour rafler tes jetons. »
D'un royaume à l'autreRemy Lebeau11 septembre 2024.
Son regard en croisa un autre.
Un homme l'observait depuis une table de poker - châtain, les yeux bleus et un air curieux peint sur ses traits. Malady se contenta de lui adresser un large sourire, alors même qu'il se faisait charrier par ses partenaires de jeu.
Le bel inconnu avait retenu toute son attention. Ainsi il était dragueur ? Et joueur également, puisqu'elle le vit relancer la mise. Sirotant son cocktail, l'alien qu'elle était profita du spectacle, une scène qu'elle n'avait vu que sur sa terre natale, entre soldats éclopés. L'ambiance - malgré le ton curieusement patriotique du lieu - était cependant loin d'être aussi morose et, rapidement, celle-ci devint plus intense. L'homme venait de se retrouver seul contre son adversaire qui l'avait invectivé un peu plus tôt, après que la mise ait été augmentée.
Sa victoire attisa encore un peu plus l'intérêt de Malady. Du genre à se faire désirer, elle préféra observer encore une manche avant de se diriger vers leur table. Elle n'allait cependant pas se contenter d'ignorer le dernier commentaire du bellâtre, la reine souhaitant tester la théorie de ce dernier. Arriverait-elle à le distraire ? Se retournant vers le barman, elle pointa du doigt la table et, plus précisément, l'objet de sa curiosité. - Pourriez-vous lui servir un verre de ce qu'il boit habituellement et lui souhaiter bonne chance pour son prochain round de ma part ?
Un billet important accompagna sa requête et l'homme l'accepta sans broncher, servant lui-même le verre. Quelque chose dans son expression lui évoqua un mélange de jalousie et de résignation, comme si elle n'était pas la première à lui tourner autour. Lorsque le barman fit un signe dans sa direction pour indiquer que la boisson venait d'elle, Malady fit un signe au bel homme avant de retourner à son cocktail.
Une fois celui-ci fini - ce qui ne prit pas très longtemps, l'alien ayant une descente des plus rapides - elle partit un court instant échanger un cinquième de son argent contre des jetons, revenant ainsi au bar avec son porte-jetons rempli à la main. Elle put ainsi observer le milieu de la partie, où un des joueurs s'était déjà couché. Son attention fut brièvement attirée par le téléphone qu'il sortit de sa poche, dérivant sur les autres joueurs un temps avant de revenir à lui, se rendant compte que l'homme n'avait pas bougé depuis maintenant quelques très longues secondes. Son visage devenu livide, il commença à taper un message frénétiquement sur son appareil, s'adressant par la suite d'une voix mal assurée au reste de la tablée.
- Je.. Désolé tout le monde je dois y aller, ma femme vient de perdre les eaux. On se revoit... euh... dans un petit moment.
L'air absent, il récupéra les jetons qu'il n'avait pas misé pour les faire changer en grande hâte, avant de partir d'une marche si rapide que Malady ne put qu'admirer sa retenue pour ne pas sprinter dans une telle situation.
Elle vit là l'opportunité qu'elle attendait mais choisit de ne pas la saisir immédiatement. Non, elle voulait d'abord voir l'issue de ce round.
Avec un regard analytique, elle observa les mouvements de l'intéressé pour tenter de percevoir plusieurs choses : si il trichait, si il semblait douter de lui-même et si il possédait des tics nerveux. Ce n'est donc que lorsque le gagnant fut déclaré que la reine décida à se diriger vers la table, sa curiosité repue, en se présentant du côté de la chaise vide. - Puis-je me joindre à vous ? Je ne suis pas une experte mais je suis sûre que nous saurons nous amuser quand même.
Elle ponctua sa demande d'un grand sourire, tenant son porte-jetons comme une pochette. L'alien se tenait prête à utiliser son nom de couverture, Alysson Cain, si celui-ci lui était demandé.
La partie continuait, mais Remy n'oubliait pas la présence de l'étrange inconnue qui lui avait adressé un grand sourire lorsqu'il avait posé son regard sur elle. Il ne l'observait plus directement, se faisant un devoir de se concentrer sur sa partie de poker, mais il la percevait vaguement du coin de l’œil. Elle s'était installée au bar et semblait discuter avec le serveur. De son côté, le joueur n'avait pas encore une main prometteuse, mais il avait pour principe de ne jamais se coucher sur les débuts de tour, aussi posa-t-il le même nombre de jetons sur la table que son voisin de droite.
« Je suis. »
Un cocktail à base de rhum et de fruits exotiques lui fut apporté par un barman qui lui désigna, d'un air poli mais un brin dépité, la fameuse demoiselle au physique insolite mais pas désagréable. Elle lui fit un signe charmeur de la main, auquel il répondit par un léger sourire et un signe de tête pour la remercier, avant de lever son verre et d'en boire la première gorgée en la fixant, comme s'ils trinquaient à distance. Il leva les yeux au ciel d'un air amusé devant les réflexions et sifflements indiscrets de ses collègues de table, se trouvant bien satisfait de leur jalousie. Peut-être qu'il ne dormirait pas seul ce soir...
Le tour continua, un premier joueur se coucha. Une quatrième carte fut révélée, qui n'avait toujours rien à voir avec celles que Remy avait en main. Il n'en montrait rien, cependant, et resta dans la partie, augmentant même la mise du joueur précédent. Le poker, au-delà d'un jeu de chances et de statistiques, était surtout un jeu de bluff, et il excellait dans ce domaine. Impossible pour ses adversaires de deviner la teneur de sa main : qu'il possède deux cartes dépareillées ou de quoi faire une quinte flush, son attitude était difficile à déchiffrer.
Attentif aux expressions faciales et comportements de ses voisins, il fronça les sourcils lorsque l'un des joueurs sortit son téléphone portable et commença à pianoter dessus. C'était un manque flagrant de professionnalisme, et Remy posa sa main sur le poignet du donneur pour interrompre son mouvement avant qu'il ne retourna la dernière carte. L'homme au portable était devenu tout blanc, bredouilla que sa femme allait accoucher et quitta la table en toute hâte. Remy resta songeur et silencieux tandis que ses compagnons de tablée souhaitaient bonne chance, bon courage ou félicitations au futur père. Puis il fit signe au donneur de retourner la cinquième carte.
Il n'avait toujours aucun jeu, mais la rivière comportait cinq cartes dépareillées, ce qui diminuait fortement les possibilités de combinaisons intéressantes avec les différentes mains des joueurs. Les mises sur la table n'étaient pas non plus très élevées. Les joueurs se couchèrent les uns après les autres. Pas Remy. Il remporta les jetons placés en jeu sur la table, sans avoir eu besoin de montrer ses cartes. Il songea alors à s'arrêter là, pour aller discuter avec l'insolite inconnue, mais celle-ci fit son bonheur en venant à la table, se proposant pour rejoindre la partie.
« Bien sûr, installez-vous ! »
Sa décision ne sembla néanmoins pas faire l'unanimité. Deux joueurs échangèrent un regard gêné, un autre toussota, quant à Campbell, il se pencha pour murmurer quelques mots à l'oreille de Remy, qui haussa les épaules et s'exclama en levant de nouveau les yeux au ciel :
« Foutaises ! Elle a plus de muscles que toi. »
Jimmy rougit, honteux que Gambit ait répondu à haute voix en laissant comprendre la remarque misogyne qu'il avait pu lui faire à voix basse, grommela une phrase incompréhensible et baissa le nez sur ses jetons pour jouer nerveusement avec. Remy, quant à lui, affichait un grand sourire, un brin narquois, puis reporta son attention sur celle qui s'asseyait à leur table, observa la quantité de jetons qu'elle avait apportée et expliqua :
« Nous sommes sur une partie classique en Texas hold'em, mise de base à cinquante dollars. C'est bon pour vous ? »
D'un royaume à l'autreRemy LebeauPas de triche, pas de doute et pas de tics. Seulement une assurance nonchalante et une attitude professionnelle contrastant avec celle de l'homme qui venait de quitter la table.
Oh, il lui plaisait de plus en plus.
Les autres joueurs ne furent pas ravis de son arrivée à la table - l'un d'entre eux en particulier alla murmurer quelque chose à l'oreille du bel inconnu qui le rebiffa instantanément. A en juger par ladite réponse, le problème venait probablement de son genre. Ha. Elle allait l'écraser.
Leurs protestations étaient de toute façon vaines, puisque Malady s'était assise dès lors qu'on lui avait suggéré. Un sourire flottant sur ses lèvres, elle avait posé son porte-jetons sur la table, jouant habilement avec l'un d'entre eux entre ses doigts. Son sourire s'élargissant à l'explication de celui qui l'intéressait, elle répondit d'une voix suave :
- C'est parfait pour moi.
Son jeton regagna l'endroit qui lui était réservé, tandis qu'un jeton de cinquante pris sa place entre ses doigts, signalant qu'elle était prête à commencer.
Une fois sa mise posée et les cartes distribuées, Malady se contenta de suivre une nouvelle fois - hausser la mise dès le départ aurait été un peu trop ambitieux pour quelqu'un qui venait juste d'arriver à la table. Lorsque fut venu le moment de regarder ses cartes, l'elfe noir eut une plaisante surprise : un valet de coeur et un as de pique.
Elle n'en laissa néanmoins rien paraitre. Son large sourire resta fixé sur son visage, sans qu'elle ait pour autant à se forcer : elle s'amusait déjà beaucoup. Regardant autour de la table avant la deuxième partie des hostilités, elle tenta de jauger ses adversaires, pour tenter de deviner si les cartes reçues étaient bonnes ou non mais surtout pour voir l'attitude de ces derniers.
L'homme qui avait fait une remarque à son arrivée n'en était visiblement pas à son coup d'essai, puisque la lecture de son visage s'avéra impossible en si peu de temps. Cependant, elle nota que celui-ci jetait des coups d’œil régulier dans sa direction quand il pensait qu'elle ne le voyait pas. Les deux autres hommes semblaient légèrement plus transparents mais certainement pas au point de dévoiler immédiatement leur jeu en quelques tics. L'expérience était probablement plus aisée pour le bel homme qui devait avoir joué plusieurs parties avec eux - voire jouait régulièrement avec ce groupe. C'est d'ailleurs en observant celui qui suscitait son intérêt que Malady comprit rapidement que toute tentative de déchiffrer ses expressions était vouée à l'échec. Mais, plutôt que de la frustration, la reine ressentait une sorte de jubilation à l'idée d'affronter un adversaire si peu prévisible - et possiblement de passer la nuit avec lui, mais ce genre de pensées pouvait attendre.
Les trois cartes au centre de la table furent révélées : un cinq de carreau, une dame de pique et un cinq de trèfle. Cela ne l'arrangeait clairement pas. C'était une paire gratuite pour toute la tablée et elle devait maintenant se reposer sur les deux dernières cartes qui devaient encore être révélées et sur son bluff. Campbell haussa immédiatement la mise, un air confiant sur son visage qui ne signifiait pas grand chose pour Malady - elle jouait avec des professionnels, capable d'être de vrais acteurs dans cette situation - mais qui suivit néanmoins la mise, joueuse. Un des deux hommes se coucha avec un soupir.
Elle eut toutes les peines du monde à ne pas montrer sa joie lors de l'apparition de la quatrième carte : un as de trèfle. Malady possédait maintenant une double paire, ce qui n'était certes pas la meilleure combinaison (loin de là), mais cela lui permettait déjà d'être plus tranquille pour la suite des évènements. Campbell, toujours avec son petit air confiant, haussa de nouveau la mise en la regardant cette fois droit dans les yeux. Elle allait suivre. Évidemment.
La cinquième carte fut révélée et ce fut une surprise... neutre. Un sept de coeur.
Le temps était maintenant venu de révéler ses cartes. Elle ne pouvait qu'espérer que Campbell bluffait en la poussant à se coucher, mais il n'y avait qu'une façon de le savoir. Il y avait également l'autre homme qui semblait être en train de bluffer mais se rendait rapidement compte que sa stratégie ne serait probablement pas payante. Puis, il y avait le bel inconnu. Et là... tout pouvait se produire.
Pour récapituler, les cartes présentes sur la table sont un cinq de carreau, une dame de pique, un cinq de trèfle, un as de trèfle et un sept de coeur. Malady a un as de pique et un valet de coeur (double paire).
Puisque Gambit est un vétéran des jeux d'argents en général, il peut détecter que malgré une poker face béton, les trois cartes de départ n'arrange pas Malady et la quatrième lui a bien fait plaisir.
N'hésite pas à choisir le résultat de la partie, perdante comme gagnante, Malady est contente. Si tu veux d'ailleurs l'inviter à aller ailleurs, elle te suit.
Remy observa le jeton danser entre les doigts de l'intrigante inconnue avec un intérêt croissant. C'était le genre de geste qui, s'il ne payait pas de mine à première vue, pouvait tout à fait émoustiller l'imagination du Joueur. Un geste qui signifiait selon lui "Je suis habile, je ne m'en vante pas, mais vous devriez vous méfier." Il extrapolait peut-être. Mais il se plaisait à le penser.
La nouvelle manche débuta. Si Remy n'avait pas une main exceptionnelle, il suivit les mises des autres pour le plaisir de jouer, tout en observant ce qui se passait à la table. Campbell augmenta la mise, avec cet air confiant sur le visage que Remy connaissait par cœur. Cet imbécile était incapable de cacher sa satisfaction, il se persuadait qu'il faisait du double bluff en faisant croire ostensiblement qu'il avait une bonne main pour que l'on pense qu'il bluffait. De l'avis de Gambit, Campbell avait quelque chose, mais sans doute rien d'extraordinaire.
En revanche, il remarqua un très léger tressaillement des lèvres de la demoiselle, signe qu'elle était heureuse de l'arrivée de l'as de trèfle, même si elle s'était efforcée de le cacher. Remy se coucha après la révélation de cette quatrième carte, convaincu qu'ainsi il pouvait la laisser gagner la manche. Il fut ravi, une fois que les cartes furent retournées, de voir l'ascenseur émotionnel chez Campbell, lorsque sa belle paire de dames se fit magnifiquement décrédibiliser par la paire d'as de leur nouvelle adversaire.
Plusieurs manches s'enchaînèrent. Remy n'en gagna pas beaucoup, ce qui semblait assez inhabituel au vu des réflexions, de nouveau assez lourdes, que lui firent les autres, auxquelles il ne réagit que par de légers sourires. Son but avait changé, il ne cherchait pas à gagner. Il avait en fait deux objectifs : le premier, plutôt mesquin mais très satisfaisant, consistait à faire perdre Campbell. Il ne s'engageait donc profondément dans la manche que s'il était certain que son prétendu rival allait se ramasser en beauté.
Le second objectif, plus subtil, était d'en apprendre plus sur la mystérieuse joueuse. Gambit était convaincu qu'on pouvait en apprendre beaucoup sur la personnalité des gens en jouant avec eux. Il l'observait donc attentivement, l'air de rien, analysant ce qu'elle disait et ne disait pas, la façon dont elle réagissait, les risques qu'elle prenait ou non.
Au bout d'une vingtaine de minutes, leur partie fut interrompue dès le premier tour par le tintement d'une clochette secouée par le gérant du casino, qui demanda une nouvelle minute de silence, tandis que l'hymne américain résonnait dans les haut-parleurs. Remy jeta ses cartes sur la table avec un soupir d'agacement, ce qui ne manqua pas de faire réagir Campbell à l'instant où la minute de silence s'acheva.
« Bah alors Gambit ? Tu te couches au premier tour ? Ca ne te ressemble pas ! - Cet excès de patriotisme commence à m'ennuyer. - Oh, tout de même, tu pourrais témoigner d'un peu de respect pour nos… - Oh mais j'ai du respect pour les morts du 11 septembre. Mais j'en ai tout autant pour les milliers de morts en Irak à cause du caprice d'un président blessé dans son orgueil. Et pourtant, eux n'ont pas droit à une commémoration. »
Sa déclaration avait jeté un froid à la table. Campbell lui lança un regard outré et commença une phrase de protestation que Remy n'avait pas envie d'entendre. Il le coupa aussitôt pour s'adresser à la demoiselle qui l'intéressait autrement plus afin de lui demander :
« Et vous, qu'est-ce que vous en pensez ? »
Ses yeux brillaient d'une lueur singulière. Un brin de malice, peut-être ?
D'un royaume à l'autreRemy LebeauUn sourire quasi-permanent aux lèvres, Malady s'amusait beaucoup. Le jeu en lui-même lui convenait bien : assez rapide, très compétitif et encourageant la prise de risques. Bien qu'elle ne pensait pas revenir dans un casino après aujourd'hui - miser de l'argent restait la partie qu'elle aimait le moins - elle ne rechignerait pas à jouer au poker avec d'autres habitants de Midgard.
Le seul bémol de cette soirée était le comportement de Campbell et de ses acolytes. Si Malady éprouvait une totale indifférence aux remarques qui pouvaient lui être faites, ce n'était pas le cas des railleries à destination de Gambit. Personne à la table hormis elle ne semblait s'être rendu compte du petit jeu qu'elle menait.
Il lui avait fallut quelques manches pour se rendre compte que Gambit semblait prendre le contrôle de la partie dès que la Reine devenait malchanceuse et que les acolytes disposaient de cartes médiocres. Le but était clair - faire perdre Campbell. Et devant ses railleries constantes aux tonalités devenant de plus en plus aiguës, l'objectif semblait atteint. Malady prenait néanmoins sur elle pour ne pas intervenir.
Une musique qu'elle ne reconnut pas emplit la salle, alors qu'une personne armée d'une clochette réclamait une minute de silence. Voyant que ses camarades de jeu s'exécutaient, la Reine décida de suivre leur exemple, sans toutefois imiter le geste d'agacement de Gambit. Alors que son esprit tournait toujours à plein régime pour essayer de trouver la raison de cette minute de silence, un échange vif vint interrompre ses pensées. Campbell et Gambit semblaient être en désaccord sur l'aspect commémoratif de la journée. Puis ce dernier lui demanda son avis.
Ah.
Il était manifeste maintenant que Malady avait loupé un épisode. Et pas des moindres. Son esprit se remit à fonctionner à toute vitesse pour essayer d'assembler les éléments que Gambit venait de lui apporter. Un évènement mortel s'était passé pendant cette journée, quelques années auparavant. Il lui manquait l'année, ce qui était problématique, mais elle pourrait faire sans. Des milliers de morts dans un autre pays après un caprice du président. Le fait qu'une journée soit célébrée lui laissait penser que l'évènement était ponctuel - personne ne célébrait le début d'une guerre, simplement sa fin. Bien qu'extrêmement rare sur sa planète, le terrorisme était aussi présent. Donc un acte terroriste auquel le président avait répondu par orgueil, tuant ainsi des milliers de personnes dans un autre pays. Il lui manquait des bouts importants, mais elle pouvait au moins exclure l'idée d'une guerre. Tout cela lui restait tristement familier néanmoins.
Une ombre passa sur son visage et sa voix se fit légèrement plus basse qu'à l'ordinaire. C'est avec une expression sérieuse qu'elle répondit à Gambit :
- Mon cœur se fait lourd pour les victimes de l'attentat. Cependant nous ne pouvons pas ignorer la réponse démesurée de notre président et les morts que celle-ci a causé. Tous sont victimes d'hommes irrationnels abusant des pouvoirs qui leur sont confiés.
Il ne lui restait plus qu'à espérer que l'instigateur de l'attentat était un homme et elle ne s'en sortirait potentiellement pas trop mal.
Néanmoins, la Reine avait envie d'explorer d'autres horizons, de préférence sans Campbell et sa clique. Se couchant elle aussi, elle doubla sa mise et celle de Gambit avant de ranger ses jetons, son sourire retrouvé et sa langue toujours aussi acérée : - Je vous remercie pour ces parties messieurs. Voici une mise un peu plus élevée qui, je l'espère, compensera au moins un peu vos pertes.
Sans se soucier de leurs réactions, elle se tourna vers le bel homme, en lui tendant son bras.
- Cher Gambit, accepteriez-vous de m'accompagner au bar ? J'aimerais goûter à quelques cocktails et me délecter de votre expertise sur les autres jeux de cet établissement.
Le choix de ses paroles était loin d'être innocent, ainsi que celui de son audience. Quitte à enfoncer le couteau dans la plaie, autant le faire tourner un peu au passage, non ?
L'étrange inconnue, que Remy trouvait belle dans sa singularité - il avait toujours aimé l'exotisme - semblait bien s'amuser dans cette partie de poker. En fait, elle ne montrait guère d'autre émotion que ce sourire sur ses lèvres qui ne la quittait que peu. Certaines réflexions de Campbell l'estompaient par moment, mais elle ne disait rien. Elle parlait assez peu, de fait, ce qui ne manquait pas d'exciter la curiosité de Remy à son sujet. Il brûlait d'envie de lui poser mille questions… mais pas dans ce contexte, pas en pleine partie de cartes, pas devant ses collègues de jeu.
La minute de silence fut en fin de compte une occasion de mettre la partie en pause. Le cadien, qui n'était pas vraiment un bon patriote, n'hésita pas à exprimer son agacement. S'en suivit un faux débat stérile qu'il interrompit rapidement, car seule l'opinion de leur invitée l'intéressait. Il avait en effet un léger doute sur ses origines : il doutait qu'elle soit de ce pays… voire de ce monde. Mais sa réponse, juste, humaniste et pertinente, dissipa ses doutes. Elle venait de marquer encore quelques points pour Remy.
Le joueur eut un instant de déception lorsqu'il la vit ranger ses jetons, même s'il apprécia la pique qu'elle lança et qui était clairement destinée à Campbell. Remy haussa un sourcil intrigué lorsqu'elle lui tendit son bras, et un charmant sourire illumina son visage en entendant sa proposition. Il rangea aussitôt ses propres jetons avant de se lever et de passer son bras sous celui de la demoiselle en répondant :
« Oh cet établissement offre bien des divertissements et je me ferai un plaisir de vous les faire découvrir… »
Il se retint d'adresser un clin d'œil à Jimmy Campbell. Les sous-entendus étaient assez explicites pour lui faire tirer une mine de six pieds de long. Après une brève et élégante salutation à ses collègues de poker, Remy se dirigea vers le bar, bras-dessus bras-dessous avec la plaisante inconnue qu'il avait hâte de connaître mieux. Le regard pétillant de malice, un sourire charmeur aux lèvres, il lui demanda alors :
« Alors, quels sont vos goûts en matière de cocktails ? Êtes-vous plutôt du genre doux et sucré, fort et intense, pétillant et exotique ? »
Les mots avaient été choisis avec soin, le sous-entendu était bien évidemment voulu et assumé. Après tout, c'était elle qui avait fait le premier pas vers lui et elle semblait être le genre de femme à savoir ce qu'elle voulait… espérons simplement qu'il ne s'était pas trompé et que ce qu'elle voulait ce soir, c'était lui.
D'un royaume à l'autreRemy LebeauCe fût avec un plaisir non dissimulé - et un peu de soulagement tout de même - qu'elle vit Gambit saisir son bras et lui donner la réplique. L'homme mystérieux semblait avoir de la suite dans les idées et ce n'était pas pour lui déplaire.
Quittant sans regret un Campbell se décomposant lentement sur sa chaise, Malady et son bel inconnu se dirigèrent en direction du bar. La reine des elfes noirs désirait discuter un peu avec lui avant d'enchainer directement sur une autre table de jeu.
Ses questions pleines de sous-entendus ne lui échappèrent pas, lui arrachant un sourire franc. D'une voix mêlant sensualité et amusement, elle répondit :
- Mmm, je dirais fort et intense, même si je sais m'adapter aux goûts de mes interlocuteurs. J'ai rarement l'occasion de goûter à quelque chose de suffisamment intense pour moi, hélas...
Le ton de sa voix offrait clairement un challenge.
Ses dernières relations remontaient à... très longtemps. Si l'on exceptait l'ellipse due à l'hibernation qu'elle avait subi, Malady n'avait eu que quelques fricotages avec des soldats (et soldates) qui n'étaient pas sous son commandement. Si la soirée se passait aussi bien qu'elle avait commencé, ce serait l'occasion pour elle de découvrir l'expérience unique qu'était les relations avec des membres d'un autre royaume.
S'adressant au barman, elle glissa quelques billets dans sa direction :
- Je vais vous prendre un Death In The Afternoon. Gambit, qu'est ce qui vous ferait plaisir ?
L'homme chargé de lui faire son cocktail haussa un sourcil mais ne fit pas de commentaire. Malady avait regardé en avance sur internet les cocktails qui l'intéressaient et - parmi les plus forts, évidemment - le nom d'une boisson mélangeant absinthe et champagne avait attiré son attention. Elle espérait que Gambit tenait l'alcool si ce dernier se décidait à la suivre.
Avec un sourire malicieux, Malady posa une question qui l'intriguait au plus haut point :
- Mon cher Gambit, que faites-vous dans la vie quand vous ne faites pas semblant d'être juste bon au Poker pour faire perdre Campbell ? Êtes-vous un joueur professionnel ?
Le jeu de mot* était voulu. Devant son flirt facile et le charme qu'il exsudait par tous les pores, elle se doutait bien qu'il ne manquait pas d'expérience dans le sujet. Dans une situation plus sérieuse, elle se serait sentie nerveuse, de par son manque de connaissances dans les relations romantiques. Mais avec quelqu'un d'aussi assuré que lui et des circonstances aussi décontractées, Malady se sentait à l'aise.
Elle sentit brièvement des yeux se poser sur elle, avant de passer à autre chose. C'était un des vigiles qui l'avait regardé quitter sa table, probablement pour vérifier qu'elle se comportait correctement, avant de remarquer la personne qui l'accompagnait. Avec un roulement des yeux exaspéré, ce dernier était retourné à son poste. Elle ne doutait pas un seul instant que le fait qu'elle ait pu l'aborder d'elle-même ne lui ait pas traversé l'esprit. Cette pensée la laissait indifférente. Ce n'était qu'un casino parmi tant d'autres et elle était là pour passer un bon moment.
Son regard se posa à nouveau sur son délicieux compagnon.
* Jeu de mot sur le terme "Player" qui en anglais désigne aussi bien quelqu'un qui joue à/de quelque chose et un séducteur chevronné. :copyright: 2981 12289 0
La métaphore amusa l'atypique demoiselle qui ne manqua pas de la filer. Fort et intense, donc… avec un défi à la clé. Remy allait devoir se surpasser pour la satisfaire. Il ne s'en sentit pas inquiet, bien au contraire, l'excitation montant même d'un cran devant ce challenge. Il le pressentait, cette nuit pouvait devenir mémorable. Il eut une moue pensive quelques instants, avant de finalement acquiescer avec un léger sourire. Challenge accepté.
Pour son cocktail, elle savait aussi ce qu'elle voulait. Elle n'eut même pas besoin de regarder la carte - pourtant Remy était certain qu'elle venait ici pour la première fois. "Death in the Afternoon"... le nom ne faisait pas rêver. De l'absinthe ? Difficile de faire plus fort, en effet. Le Cadien ne la suivrait pas sur ce coup-là, préférant un mélange plus doux mais ne manquant pas de piquant.
« Ce sera un Gambit Special pour moi, merci Dwayne. »
En une phrase, il avait implicitement démontré qu'il était en terrain conquis : il appelait le barman par son prénom, avait un cocktail qui portait son nom - et qui ne figurait pas sur la liste des boissons. Dwayne se mit à l'ouvrage, après avoir servi son cocktail à la demoiselle, en mélangeant du rhum, du jus d'orange, du sirop de baies rouges et du piment. A la fois doux et sucré, fort et intense, et exotique. Remy aimait la diversité.
Son visage s'illumina à nouveau d'un charmant sourire lorsque sa partenaire de jeu évoqua les feintes qu'il avait utilisées pour faire perdre Campbell. Observatrice. Maline. Et malicieuse. Difficile de ne pas percevoir un double-sens dans sa question.
« Tout à fait ! Le jeu c'est toute ma vie. J'ai d'ailleurs pu remporter quelques beaux trophées au cours de ma carrière... »
Il était grand temps d'arrêter la métaphore avant qu'il ne bascule dans le sexisme. Même s'il collectionnait les conquêtes, il respectait les femmes, à sa manière. En tout cas il ne les considérait pas comme des objets et appréciait sincèrement chaque moment intime passé avec celles qu'il courtisait. Comme Dwayne posait son cocktail devant lui, Remy le prit en main pour le tendre vers sa compagne du soir afin de trinquer avec elle.
« A notre rencontre, mademoiselle… Mademoiselle ? »
Il ne se rendit compte qu'à cet instant qu'elle ne s'était toujours pas présentée à lui. Elle ne lui avait même pas dit son prénom.
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