Vendredi 09 août… J'étais de retour sur New-York, après avoir passé huit jours auprès de ma famille. Une bonne semaine de calme bien méritée, une semaine de bonheur, hors du temps, à profiter de ma femme et de mes gosses, que je n'avais pas vus depuis plusieurs mois… Bon sang ce qu'ils m'avaient manqué.
Je n'avais bien sûr pas vraiment pu déconnecter du boulot, des soucis, des responsabilités, surtout avec ce qui m'attendait à mon retour… Mais nous étions de nouveau réunis, et c'était ce qui comptait le plus à mes yeux. D'ici très peu de temps, ils seraient auprès de moi, à New-York, dans une maison sécurisée, avec des voisins fiables qui seraient là au moindre pépin. C'était un risque, j'en avais bien conscience. Mais les aller-retours dans le Missouri n'étaient plus possibles à présent que je passais mon accréditation de niveau 8, et je n'en pouvais plus d'être toujours loin de ma famille.
Les vingt années passées à faire ce job, à faire ce qui était nécessaire pour protéger et préserver les autres, avaient laissé leur marque sur moi. Sans Laura et les enfants, j'aurais sombré depuis longtemps. Je l'avais fait, d'ailleurs, durant les années sombres. Je ne regrettais pas mes actions passées, je ne regrettais pas d'avoir décimé des dizaines d'enflures qui n'auraient pas hésité à faire des massacres d'innocents. Mais je regrettais de ne pas avoir de remords. J'étais un tueur, c'était acté, je ne pouvais pas changer ça, et je ne le voulais pas, de toute façon. Il fallait bien que quelqu'un le fasse. Mais les choses allaient changer.
Je me posais quand même pas mal de questions. Est-ce que j'allais être à la hauteur ? Est-ce que je pouvais passer de tueur à leader ? Est-ce que j'en avais l'étoffe ? Fury semblait le penser, d'autres me l'avaient dit aussi. Mais j'avais toujours des doutes. Et lorsque j'étais en proie à ce genre de doutes sur moi-même, lorsque j'avais besoin de conseils, il y avait une personne que je pouvais aller voir. Une personne qui ne s'était jamais laissée aller à la noirceur, malgré les nombreuses tentations. Une personne qui avait toujours su rester droite, intègre, optimiste, inébranlable. Un vrai leader, qui avait tant fait pour ce monde. Cette personne, c'était le Captain Steve Rogers.
Si j'avais dû avoir un modèle dans la vie, ça aurait sans doute été lui. Je m'étais battu de nombreuses fois à ses côtés. J'étais même sorti de ma retraite et avais fait de la prison pour lui. Le Captain était un putain d'exemple à suivre, celui d'entre nous qui méritait sans doute le plus son titre de héros. Certes, maintenant, ce n'était plus qu'un vieillard paisible, heureux d'avoir vécu son existence de rêve qu'il avait amplement méritée. Mais mon respect pour lui ne s'était jamais émoussé. Et je lui rendais souvent visite, pour parler de tout et de rien, pour lui demander conseil, et pour recharger un peu mes batteries quand j'avais vraiment pas le moral.
Je restai avec lui plus d'une heure, à discuter. Il sut trouver les mots pour me rassurer, me motiver, me tirer vers le haut. Il était toujours aussi doué pour ça. Il me donna même quelques bons conseils. Je déjeunai avec lui puis le raccompagnai à sa chambre, où il s'endormit rapidement, pour une bonne sieste digestive. Je sortis donc du bâtiment, un léger sourire aux lèvres. Alors que j'avançais dans l'allée de la maison de retraite, je reconnus la silhouette qui franchissait le portail d'entrée. Tiens, Bucky... Rien d'étonnant à ce qu'il soit ici, en soit, c'était l'ami d'enfance de Rogers. Mais sa présence ici me prenait au dépourvu.
« Salut Bucky. Steve s'est endormi comme une souche. »
Je n'avais pas revu le Soldat de l'Hiver depuis le sauvetage de Wanda, et j'avais plutôt prévu de passer le voir directement pour prendre des nouvelles, pas de tomber sur lui par hasard. Mais bon, il était là, il n'allait pas pouvoir voir son vieil ami, alors autant rentabiliser sa présence. Qu'on discute ici ou ailleurs, après tout, ça n'avait pas d'importance.
« Comment tu vas ? »
Ce n'était pas une formulation banale de politesse, le genre de phrase qu'on sort par réflexe et qui ne veut rien dire. Prononcée d'un ton sérieux, presque grave, c'était une vraie question sincère, qui sous-entendait un paquet de choses. La balle était dans son camp maintenant, j'avais fait un pas vers lui, à lui de décider ce qu'il allait me répondre, s'il souhaitait se confier un peu à moi ou pas.
« Autant que possible, la confiance, c'est aussi cela : apprendre à accepter le monde et les autres comme imparfaits. Et la confiance lucide consiste à ne pas se mettre en position de dépendre et de souffrir de leurs imperfections. » (C. ANDRÉ)
Toujours les mêmes décors. Toujours les mêmes bruits. Toujours les mêmes visages. La nuit. Le vent. Le cri. Le sang. Toujours le même souffle qui se coupe. Toujours les mêmes battements qui se ratent, qui s’entrechoquent puis qui reprennent à une vitesse folle : toujours la même culpabilité, le même sentiment d’imposture et d’impunité volée, toujours les mêmes injures, toujours les mêmes blessures. Toujours le même cauchemar. Mais il en avait l’habitude, maintenant. Trop, peut-être.
« Toi tu dors sans problème hein… » Ronflant comme une locomotive à vapeur, Captain était allongé de tout son long sur le canapé de son maître, sa langue rose coincée entre ses petites dents carrées ; attendri de cette vision paisible, Bucky avait tendu sa main robotique pour flatter le crâne de son vieux chien de quelques caresses, qui ne firent point réagir celui-ci. Ils venaient tout juste de rentrer d’une longue promenade, voilà qui expliquait la sieste (amplement méritée) du labrador devenu un enfant-roi en sa demeure. Ne sachant trop quoi faire, tournant en rond chez lui depuis quelques jours, Bucky s’était finalement levé du canapé en glissant sa main dans ses cheveux pour les repousser en arrière, attrapant rapidement sa veste et ses clefs avant de sortir de son appartement, sans même déranger le repos de son chien.
Une vingtaine de minutes plus tard, il avait immobilisé sa voiture noire sur le parking de la maison de retraite, retirant son casque et s’avançant d’un pas volontaire vers l’entrée. S’il n’avait pas pu voir Wanda lors de sa première visite au Raft, il n’avait pas dit son dernier mot et comptait bien réitérer mais, avant de retourner voir sa belle Sorcière, il tenait à passer un moment avec son ami de toujours, celui à qui il devait tant ; dans une certaine mesure, Steve ne faisait plus partie de ce monde. Le Captain America qu’il avait été, oui, les vestiges de son héroïsme perdurerait dans le temps mais l’homme derrière le bouclier, qui s’en souciait encore ?
« Clint ? » Peut-être n’aurait-il pas dû être aussi étonné, après tout, lui et Steve étaient de bons amis ; mais c’était bien surprenant qu’ils se rencontrent seulement en cet instant, après la bataille contre Wanda, dans le hall de cette maison de retraite. Bucky y était venu si souvent depuis Thanos ; au moins une fois par semaine lorsqu’il le pouvait, ne manquant pas de tenir Steve informé de la vie extérieure, lui épargnant néanmoins les informations trop pénibles pour son grand âge. « Ah… » Fit-il en pressant ses lèvres l’une contre l’autre, d’abord dans un pincement déçu, avant de finalement afficher un franc sourire. Au moins, il allait bien pensa-t-il pour se réconforter du fait de ne pas le voir aujourd’hui. Et il avait passé un moment avec l’un de ses plus proches amis, cela avait dû le rendre heureux et c’était bien le principal. « Il allait bien ? » Il avait un peu l’air du père qui quémande des nouvelles de son enfant malade, avec un froncement de sourcil équivoque et un regard soucieux. Mais, lorsque la question lui fut retournée, il avait détendu les traits de son visage en haussant légèrement ses sourcils sombres, ne sachant pas tellement quoi lui répondre. Il allait bien ; objectivement, il n’avait aucun problème de santé. Mais la mécanique de son esprit grinçait, la machine s’emballait, l’empêchant de trouver le sommeil comme toujours, mais les rouages s’étaient dégradés depuis l’emprisonnement de Wanda. Néanmoins, sobrement, en glissant sa main robotique gantée dans la poche de sa veste, il répondit avec un bref sourire : « Je vais bien. Et toi, pas trop déçu de rentrer de vacances ? » Détourner le sujet. Même si ce n’était pas foncièrement utile avec Clint car Bucky se doutait du fait que l’archer n’insisterait pas, il s’agissait seulement d’un vieux réflexe de diversion. Se décalant pour permettre à deux visiteurs d’entrer, l’un d’eux portant un immense bouquet de fleurs rouges dans les bras, Bucky avait lancé un léger coup de menton en direction de l’extérieur, lui proposant alors : « T’as le temps pour une bière ? »
THE FALCON & THE WINTER SOLDIER ✯ « they made you into a weapon and told you to find peace, but you can't because this is who you are, a product of war. chains are broken but are you truly free ? »
Dernière édition par Bucky Barnes le Lun 20 Juin - 1:09, édité 1 fois
Clint Barton Avenger Agent du S.H.I.E.L.D. Niveau 8
Bucky semblait bien étonné de me voir ici. Peut-être ne se rendait-il pas compte de ce que Steve et moi avions traversé ensemble. L'invasion de New York… Les nombreuses batailles contre Hydra… La Sokovie… Le conflit interne aux Avengers… Thanos… Oui, nous avions combattu ensemble de nombreuses fois, peut-être même avions-nous vécu plus de batailles que Bucky n'en avait connues auprès de son ami d'enfance durant la seconde guerre. Ce n'était pas un concours bien sûr, toujours est-il que Steve était un ami proche et que j'étais prêt encore aujourd'hui à me lancer à l'assaut d'une armée extraterrestre s'il me le demandait. Je m'empressai de rassurer Bucky sur son état :
« En pleine forme ! Bon j'suis pas sûr qu'il pourrait encore arrêter un hélico à mains nues ou sauter sur un train lancé à pleine vitesse, mais il a encore toute sa tête et de l'énergie à revendre pour un homme de cent-vingt ans. J'aimerais bien être comme lui à son âge ! »
Sauf que bien sûr, je l'atteindrai jamais, son âge. Le sérum de super-soldat n'avait pas seulement amélioré son corps, il lui avait aussi accordé une longévité exceptionnelle. Steve serait capable de tous nous enterrer. Bucky aurait-il une vie aussi longue ? J'étais pas certain que cette idée le séduise. Il m'affirma aller bien mais changea de sujet bien trop vite pour que je puisse le croire. Tant pis, je n'allais pas insister, du moins pas pour le moment. Je haussai les épaules et jouai le jeu en répondant à sa question :
« Ca m'a fait un bien fou de revoir enfin ma famille. Mais bon, je pouvais pas rester en vacances éternellement, y'a encore plein de méchants à arrêter ! »
Loki et Zemo, pour ne citer qu'eux… Mais ce n'était ni le moment ni le lieu approprié pour discuter de ça plus en détails. Si on restait là trop longtemps, on allait finir par attirer l'attention et des gens finiraient par nous reconnaître. Pour la tranquillité de Steve, mieux valait ne pas trop s'attarder ici. Bucky en avait conscience lui aussi. Quand il me proposa de sortir de là, qui plus est pour aller boire une bière, je lui adressai un grand sourire et le suivis bien volontiers.
« J'ai toujours le temps pour une bière. »
Soit il s'était un peu renseigné sur moi, soit c'était une heureuse coïncidence, en tout cas il me prenait par les sentiments. Et puis, avec un peu de chance, le houblon lui délierait un peu la langue… J'étais persuadé qu'on pouvait avoir beaucoup de choses à se dire tous les deux, si on faisait l'effort de se parler.
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Rasséréné quant à l’état de santé de Steve, Bucky avait hoché son visage de haut en bas sans se départir de son sourire cordial — et qui n’était point forcé pour une fois, bien qu’il était toutefois fort difficile d’ignorer sa déconvenue. Pas celle de croiser Clint, mais plutôt celle de ne pas avoir la possibilité de s’entretenir avec son ancien acolyte avant de repartir au Raft pour quelques jours. Il n’avait plus vu Steve depuis… Il n’aurait su le dire avec exactitude, et cette incertitude prouvait donc que cela faisait bien trop longtemps. « Je repasserai plus tard, dans ce cas. » Avait-il finalement dit en glissant ses deux mains dans ses poches, ses sourcils se haussant machinalement lorsque Clint lui fit réaliser que Steve avait bel et bien cent-vingt ans… Cent-vingt ans. Il avait l’impression que leur rencontre dans Brooklyn avait eu lieu la veille. Ses sourcils restèrent arqués quelques secondes avant qu’il ne prenne une fine inspiration, une expression amusée venant agréablement engourdir ses traits. « C’est tout ce que je te souhaite. Sauf de manger la gelée immonde qu’ils te donnent ici... » Il avait prononcé la seconde phrase d’une voix discrète, pour ne pas froisser le personnel dévoué qui travaillait ici ; croisant ensuite ses bras contre son torse, ayant machinalement jeté un regard vers ses mains pour s’assurer que celles-ci étaient gantées, il avait écouté les paroles de Clint en se réjouissant sincèrement pour lui : l’archer avait bien mérité ces quelques jours de vacances auprès de sa famille. Mais la mention des fameux méchants eut pour effet de le tendre imperceptiblement, car ses pensées dérivèrent malgré lui vers le Baron Zemo, qui vagabondait quelque part, libre et vivant. Pour l’instant. « Tu l’as dit. Ce connard est quelque part et… » Nul besoin de dire son nom, Clint savait fort bien de qui Bucky voulait parler. Néanmoins, au dernier moment, il avait observé un silence retenu : après un discret soupir, il avait adressé un sourire complice à son leader en remuant légèrement son menton barbu, songeant que ce n’était ni le lieu ni le moment de parler de cette enflure. Un moment plus approprié viendrait plus tard.
Commençant à sentir des regards insistants sur eux de la part de la dame flanquée derrière l’accueil, Bucky avait rapidement proposé à Clint de quitter les lieux pour aller boire une bière, ce que le principal intéressé avait accepté. Un léger rire résonnant dans sa gorge, Bucky avait passé les portes automatiques de la maison de retraite en entamant : « Et puis, maintenant que j'y pense...» Descendant les marches en parcourant la rue d’un regard circulaire, ses iris s’étaient arrêtés sur la façade de ce qui semblait être un bar. Sans trop réfléchir, Bucky entreprit de marcher en direction de celui-ci, enfouissant davantage ses mains dans ses poches tout en disant, d’une voix toujours aussi joviale : « Nous avons quelque chose à fêter. » Est-ce que l'archer savait qu'il savait ? La promotion de Clint, en somme, était une excellente raison de se réjouir et de se retrouver autour de quelques chopes. Ce moment allait faire le plus grand bien au Soldat.
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Dernière édition par Bucky Barnes le Lun 20 Juin - 1:10, édité 1 fois
Clint Barton Avenger Agent du S.H.I.E.L.D. Niveau 8
Était-ce un trait d'humour que je venais d'entendre dans la bouche du Soldat de l'Hiver ? Voilà qui était bien inhabituel. C'était bon signe, il commençait à se détendre avec moi. En revanche, pour ce qui était de me souhaiter de vieillir aussi bien que le Captain… Meh. Je ne m'imaginais pas vieillir. Je n'étais déjà plus de première jeunesse, et j'avais côtoyé la mort de si près et tant de fois qu'elle ne m'effrayait plus depuis longtemps. J'avais été chanceux jusque là, mais je doutais honnêtement de finir mes jours dans une maison de retraite comme celle-ci.
Pas besoin de lire ses pensées pour savoir à qui Bucky faisait allusion en parlant de "ce connard". Si nous avions été seuls, j'aurais complété sa phrase en lui disant qu'on serait là pour le cueillir dès qu'il sortirait de son trou. Je lui rendis simplement son sourire entendu et acquiesçai en silence. Il était temps pour nous de quitter cet établissement, si nous voulions parler plus librement. Je remis donc en place ma casquette et mes lunettes de soleil, petite garantie de mon anonymat dans l'espace public, et le suivis au dehors.
Je haussai les sourcils, intrigué, lorsqu'il m'affirma que nous avions quelque chose à fêter. Je ne pensai pas à moi en premier lieu, mais à Wanda. Nous ne nous étions pas revus depuis ce singulier affrontement au QG des Avengers. Bucky avait-il eu l'occasion de lui rendre visite ? Je la savais sous haute garde au Raft, et j'étais bien placé pour savoir combien il était ardu d'y entrer ou d'en sortir. D'autres l'avaient déjà fait, néanmoins. Mais j'étais peut-être à côté de la plaque, Bucky avait peut-être autre chose en tête.
« Si tu le dis… »
Au moins, en restant vague dans ma réponse, je ne risquais pas de me gourrer. Le bistrot en face de la maison de retraite était ouvert et peu fréquenté à cette heure de la journée, c'était l'endroit parfait pour discuter sans oreilles indiscrètes. Après un rapide examen des lieux, je désignai une table à l'intérieur, éloignée du comptoir et commandai deux bières au barman avant de prendre place.
« Bien, on va pouvoir causer plus tranquillement. »
Une fois de plus, la balle était dans son camp. J'étais à son écoute s'il avait besoin de parler. Et s'il fallait le pousser un peu, je saurais aussi faire un effort de mon côté. Bucky et moi étions frères d'armes à présent, il fallait qu'on apprenne à se connaître un peu mieux et à se faire mutuellement confiance.
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Une fois qu’ils eurent passé les portes de la maison de retraite de Steve, Bucky s’était efforcé de chasser le Baron Zemo de son esprit belliqueux ; ce dernier rodait très souvent dans ses pensées depuis que leurs chemins s’étaient recroisés et qu’il avait failli le tuer au détour d’une ruelle sordide (il ne parvenait toujours pas à en éprouver de la culpabilité et avait donc cessé d’essayer) mais, pour l’heure, il voulait faire honneur à Clint et à la promotion dont celui-ci venait fraîchement d’être gratifié. Un instant étonné de la réponse reçue, le Soldat avait d’abord froncé ses sourcils sans perdre son sourire chaleureux, donnant l’impression de le questionner brièvement du regard avant de détourner les yeux une fois devant le bar. Clint ne semblait pas avoir compris de quoi il voulait parler… Ou alors il voulait éviter le sujet de sa promotion ? Barton n’était pas du genre à se vanter alors cela n’avait rien de surprenant en fin de compte, et c’est pourquoi Bucky avait décidé de ne pas insister davantage et de ne pas le féliciter outre mesure, ne voulant pas mettre l’archer mal-à-l’aise.
Le malentendu du sujet à fêter s’imposant alors comme une volonté ardue de ne pas froisser l’autre d’une quelconque façon, Bucky lui avait adressé un simple sourire quelque peu hésitant avant de le suivre à l’intérieur du bar qui, heureusement, était peu fréquenté à cette heure de la journée. Prenant place à la table isolée dans le fond du bar, il avait déposé sa casquette bleue sur la table ronde et glissé sa main gantée dans ses cheveux sombres pour les repousser en arrière, se tassant par la suite dans la banquette confortable en ressentant un malaise étrange, auquel il était néanmoins coutumier. Bien qu’il avait sincèrement envie d’établir une relation de confiance avec Clint, Bucky ne savait pas comment s’y prendre et avait toujours l’impression d’être jugé pour ses crimes — bien que, au fond de lui, il savait que ce n’était guère l’intention de l’archer. Après les paroles de ce dernier, le serveur était venu le sauver en déposant les deux bières sur la table, lui octroyant quelques secondes pour trouver quoi répondre. Puisque Clint ne semblait pas vouloir parler de sa promotion et de son nouveau statut au sein des Avengers, il était évident qu’il voulait aborder le sujet de leur amie enfermée au Raft. Elle aussi, occupait souvent ses pensées. « Tu as des nouvelles de Wanda ? J’ai essayé d’aller la voir début août mais, tu t’en doutes, ils ne m’ont pas laissé rentrer. » Amer de cet échec, il avait souri avec nervosité avant d’attraper sa bière pour en boire quelques gorgées pour apaiser sa gorge sèche, faisant ensuite tourner son verre entre ses mains gantées. Il espérait qu’elle aille bien mais, il ne se faisait pas de faux espoirs à ce sujet… Au Raft, personne ne pouvait aller bien. « Est-ce que tu sais si on pourra bientôt la voir ? Ou ce qu’ils vont faire d’elle ? » Se montrant véritablement inquiet devant Clint, Bucky avait posé ses yeux azurés sur celui-ci en retenant presque sa respiration, craignant d’entendre que ses méfaits étaient trop grand pour espérer une issue favorable.
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Dernière édition par Bucky Barnes le Lun 20 Juin - 1:11, édité 1 fois
Clint Barton Avenger Agent du S.H.I.E.L.D. Niveau 8
Bucky s'installa à la table et retira sa casquette. Je gardai la mienne, ayant un visage plus connu que le sien. Pas aussi célèbre que le Captain ou Tony, certes, mais tout de même reconnaissable. J'étais pas d'humeur à tailler la bavette avec des admirateurs ou pire, des détracteurs. L'arrestation de Wanda n'avait pas encore été rendue publique, et les Avengers n'étaient pas vraiment en odeur de sainteté. Heureusement, le barman ne sembla pas nous reconnaître et nous apporta nos bières rapidement avant de retourner derrière son comptoir.
Bucky me parla de Wanda. Comme je l'avais supposé, il avait tenté de lui rendre visite, mais les portes du Raft étaient restées closes pour lui. Ca servait à rien d'insister pour le moment. Le personnel de la prison en aurait sûrement rien à carrer du lien particulier entre Bucky et Wanda. Il faudrait probablement batailler pour pouvoir la voir. Avec ma nouvelle position au sein du S.H.I.E.L.D., ça me paraissait néanmoins envisageable. Mais pas tout de suite.
« Je suis rentré hier dans la nuit, mais j'ai contacté Fury ce matin. Wanda est toujours endormie. Xavier nous avait prévenus que ça risquait de prendre du temps. J'espère juste que ce sera pas trop long. »
Je l'espérais pour Bucky, surtout, à qui Wanda devait manquer terriblement, surtout depuis qu'il s'était enfin avoué ses sentiments pour elle. Pour ma part, je ne savais pas trop quoi en penser. Je tenais beaucoup à elle, c'était certain, mais sa connasse de double m'avait fait du mal, et j'étais pas sûr d'être impatient de la revoir. Elle avait peut-être réussi à régler ses comptes avec elle-même, mais elle allait devoir rendre des comptes à un paquet de monde.
Je n'avais pas encore touché à ma bière. Je sentais le regard inquiet de Bucky sur moi, je voyais bien qu'il redoutait la suite des évènements. Je voulais bien tenter de le rassurer, mais j'étais pas très optimiste moi-même. Je pris quelques secondes pour réfléchir à la façon de dire les choses et finis par répondre comme ça me venait, en tâchant de ne pas être trop abrupt :
« J'vais pas t'mentir, ça va pas être une partie d'plaisir. Toi et moi on a fait des trucs condamnables par le passé, mais ça a jamais été rendu public, ils ont pu nous couvrir. Pour Wanda c'est différent. Le Jour des Héros a été un carnage, et ça s'est passé sous les caméras du monde entier. J'sais pas c'que ça va pouvoir donner. »
Je doutais franchement qu'elle puisse réintégrer les Avengers comme si de rien n'était. Et quand bien même on lui proposerait, je doutais qu'elle l'accepte. C'était injuste en un sens, Bucky et moi on avait fait bien plus de saloperies qu'elle, et pourtant on s'en sortait comme des fleurs, alors qu'elle se retrouvait au Raft, pour la seconde fois depuis son arrivée en Amérique. On avait beau avoir sauvé le monde plusieurs fois, il suffisait d'un seul faux pas pour qu'on passe de héros à criminel. Monde de merde.
« C'qui est sûr, c'est qu'elle aura besoin d'soutien. Parce que la connaissant, elle va culpabiliser à mort pour tout c'qui s'est passé. »
Bon, ma réponse était pas vraiment rassurante, mais au moins j'avais été franc avec lui. Peut-être qu'il aurait préféré que je le dorlote, que je lui mente, mais c'était pas mon genre. Et je pensais pas que ce soit le sien non plus.
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Si Clint et Bucky avaient des points communs évidents, Wanda était pour l’instant comme un point d’ancrage les reliant l’un à l’autre ; c’est donc tout naturellement que la jeune femme s’était imposée comme le premier sujet de conversation, tous deux étant préoccupés par son état — et son silence, depuis leur affrontement dans le parc. Écoutant attentivement les paroles du leader, Bucky avait joint ses mains gantées tout en soupirant, à la fois nerveux et inquiet de ce que l’avenir leur réservait ; certes, ils avaient été prévenus que l’état léthargique de Wanda pouvait durer mais… Aussi longtemps ? Sans la moindre évolution ? Il essayait de se convaincre qu’il fallait voir Wanda comme une grande blessée plongée dans un coma réparateur mais, dans les faits, être tenu loin d’elle alimentait ses inquiétudes. S’il avait pu la voir, ne serait-ce qu’une minute, peut-être aurait-il été rassuré ? « J’espère surtout qu’elle ne souffre plus. » Il n’y connaissait pas grand-chose en télépathie et autres bizarreries de l’esprit, et avait encore un peu de mal à comprendre ce qui se passait réellement dans celui de Wanda maintenant qu’elles étaient deux à l’habiter, et ne pouvait s’empêcher de se demander comment la cohabitation avec la Sorcière Sombre était. Mais Charles avait dit qu’elles étaient en paix, alors il s’accrochait à cette affirmation malgré son inquiétude tenue muette, dont il n’osait partager l’ampleur avec Clint.
L’archer n’était pas non plus vraiment optimiste pour l’avenir de Wanda ; c’était au moins un sentiment que les deux hommes partageaient, mais Clint avait eu plus de courage en le formulant à haute voix. Ne paraissant guère surpris suite aux paroles de celui-ci, Bucky s’était contenté de soupirer une nouvelle fois avant d’avaler une autre gorgée de sa bière, la mine un peu défaite et la voix morne : « Honnêtement, je m’en doutais… Il va sûrement y avoir un procès, et il sera très médiatisé. Elle va être lynchée de tous les côtés, et nous avec. » Mais le dernier point n’était pas vraiment ce qui comptait le plus ; comment allaient-ils pouvoir la protéger de la haine et des reproches ? Dans le pire des cas, elle resterait probablement au raft pour endurer sa peine mais, le supporterait-elle ? Bucky en doutait mais, refusant pour l’instant d’envisager le pire des scénarios, il avait raclé sa gorge en relevant ses yeux azurés vers Clint. « Je serai là pour elle, je ne la lâcherai pas. » Ne disant rien de plus, il attendait d’entendre Clint à ce propos ; quand bien même Bucky savait que l'archer s'était battu pour aider Wanda, une question subsistait et elle n'était pas difficile à deviner : est-ce qu’il lui avait pardonné, lui ?
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Dernière édition par Bucky Barnes le Lun 20 Juin - 1:13, édité 1 fois
Clint Barton Avenger Agent du S.H.I.E.L.D. Niveau 8
J'espérais pour Bucky que Wanda se réveillerait bientôt. Bucky, quant à lui, espérait qu'elle ne souffre plus. J'acquiesçai en silence, gardant mes sombres pensées pour moi. Était-il possible qu'elle cesse de souffrir ? Elle avait perdu ses parents, son frère jumeau, son premier amour. Elle avait pété les plombs, avait dû lutter férocement contre elle-même. Elle avait pas mal de sang sur les mains et traînerait sans doute une belle culpabilité pendant un sacré bout de temps.
Et que se passerait-il, lorsqu'elle serait réveillée ? Un procès public ? Peut-être. On avait toujours réussi à éviter ce genre de choses jusque là. Mais son basculement et ses conséquences avaient en partie été rendues publiques, ça me paraissait difficile de la couvrir. Peut-être resterait-elle au Raft, ou peut-être qu'on réussirait à la faire sortir en liberté surveillée, comme on l'avait fait pour moi à une époque. Ce serait sans doute le mieux.
« Franchement j'm'en fous pas mal de c'que peuvent penser les gens. S'il faut bousculer quelques convictions et foutre un grand coup d'pied dans la fourmilière, on l'fera. »
Wanda méritait pas un lynchage public, ni de finir sa vie derrière des barreaux. On avait plus donné pour cette ville, pour cette planète, pour ce foutu univers, que ce qu'on avait pris. Le premier qui viendrait me casser les couilles avec nos actions controversées, je lui rappellerais que sans nous, la Terre serait dirigée par une race d'aliens pas très sympathique et que la moitié de ses habitants serait toujours en poussière, si tant est que la planète n'ait pas été détruite par Ultron.
Bucky m'affirma qu'il serait là pour aider Wanda, en me fixant d'un air déterminé. Je n'en attendais pas moins de lui. Il serait sûrement celui qui pourrait le mieux la soutenir. Je hochai la tête, lui offrant un mince sourire.
« Je sais. »
Je percevais néanmoins comme une interrogation implicite de sa part. Est-ce que moi, je serai là pour elle ? Je pris enfin ma bière en main et en bus une longue gorgée, avant de faire tourner le verre entre mes doigts, la mine pensive. Cette question m'avait bien sûr traversé l'esprit, mais je n'y avais jamais répondu à haute voix jusque là.
« Tu sais que Wanda est comme une p'tite sœur pour moi. J'me suis battu pour qu'elle revienne. J'lui en veux pas pour tout c'qui s'est passé, je sais qu'elle a fait d'son mieux. Mais sa… son alter-ego est toujours là. Wanda a p't-être fait la paix avec elle, mais… »
Mais pas moi. Je poussai un profond soupir, bus une nouvelle gorgée de bière, et relevai les yeux vers Bucky pour le regarder en face alors que je lui avouais, la mine plus sombre, le regard plus dur :
« La Sorcière Sombre a voulu s'en prendre à ma famille. Elle aurait sûrement tué ma femme et mes gosses si je les avais pas mis à l'abri. Et ça, tu vois, j'suis pas sûr de pouvoir lui pardonner. »
« Autant que possible, la confiance, c'est aussi cela : apprendre à accepter le monde et les autres comme imparfaits. Et la confiance lucide consiste à ne pas se mettre en position de dépendre et de souffrir de leurs imperfections. » (C. ANDRÉ)
Le franc-parler légendaire de Clint lui arracha un sourire conciliant mais néanmoins amusé, car il ne put qu’approuver les dires de son leader. Les heures s’annonçaient particulièrement sombres pour Wanda, qui avait vécu les derniers évènements derrière son double, et qui devait ignoré certains de ses méfaits ; une fois sortie du Raft, elle allait devoir affronter la colère et la justice. Celle de l’état, certes, mais aussi celle plus cruelle, vicieuse et intrusive : la justice populaire. Les gens allaient la lapider sur la place publique, déterrantt son passé chez HYDRA et scrutant la moindre de ses erreurs, et Bucky savait par avance qu’ils ne pourraient la protéger de tout, malheureusement.
Vint alors une discussion plus profonde et personnelle concernant leurs ressentis à présent que leur combat contre Wanda était terminé ; si Bucky ne semblait plus nourrir de rancoeur envers son aimée, Clint était encore sur la réserve, encore trop marqué par les souffrances engendrées par la Sorcière Sombre. Cette fois, avant de reprendre à la question implicitement posée, sous-entendu par un regard appuyé de la part du Soldat, Clint avait même pris le temps d’imposer un silence de courte durée, buvant un peu de sa bière et se perdant brièvement dans ses pensées avant de reprendre la conversation. Sans jugement, Bucky avait écouté Clint avec attention, hochant son menton de haut en bas avec lenteur, pensif à son tour. Il était vrai que Clint avait énormément souffert de cette situation, au-delà de la perte d’une amie… Il s’agissait peut-être pas d’un point de rupture, mais la menace ayant plané sur sa famille ne lui permettait pas de construire le pardon, pour l’instant. Un jour, peut-être.
Songeur, il avait bu un peu de sa bière tout en baissant les yeux sur le bois élimé de la table ronde, entendant alors des verres se briser sur le sol derrière le comptoir, sursautant presque à l'entende du vacarme ; après un juron du serveur, Bucky avait relevé les yeux vers Clint pour lui répondre, d’une voix toujours aussi calme : « Je comprends. Elle savait où appuyer pour faire mal. » Clint, Rocket et lui en étaient de bons exemples, et le premier avait besoin de plus de temps pour passer l’éponge sur les cruautés de Dark Wanda. Buvant de nouveau de sa bière pour apaiser sa gorge sèche, Bucky avait rapidement regardé autour d’eux avant de poursuivre, se permettant de parler librement de ses soupçons avec Clint, même s’il savait que le sujet du Dieu de la Malice était sensible. « J’suis sur que Loki n’est pas étranger à tout ce qu’elle a fait. Je n’essaie pas de la dédouaner… Ou peut-être que si, j’en sais rien. Peut-être que c’est plus facile pour moi de penser qu’il est aussi responsable de tout ce qu’elle a fait, mais quand elle était venue me voir début juillet, elle m’a dit qu’elle soupçonnait Loki de l’avoir manipulée, elle m’avait dit qu’il voulait ses pouvoirs. Ça ne peut pas être une coïncidence. » Ou peut-être que si. Peut-être que Wanda se trompait. Mais c'était bien plus confortable de penser que Loki était bien plus responsable que Wanda dans cette histoire. Beaucoup plus confortable.
THE FALCON & THE WINTER SOLDIER ✯ « they made you into a weapon and told you to find peace, but you can't because this is who you are, a product of war. chains are broken but are you truly free ? »
Dernière édition par Bucky Barnes le Mar 21 Juin - 0:52, édité 2 fois
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