Chapitre 1 — L’enfant tant désiré
Norton et Edna McCoy étaient des gens on ne peut plus normaux, et se réjouissaient de n’avoir jamais eu à rougir d’une quelconque bizarrerie. Leur pelouse était toujours soigneusement entretenue dans le petit quartier pavillonnaire qu’ils habitaient depuis leur mariage, leur Ford rouge n’empiétait jamais sur les places des voisins, ils ne recevaient jamais de visite après minuit et aucune voix furibonde ne s’élevait jamais au-delà des murs de leur maison. Ils étaient, aux yeux de tous, l’exemple même du couple parfait : lui travaillait dans une centrale nucléaire comme technicien, tandis qu’Edna travaillait à mi-temps comme infirmière dans l’hôpital du centre-ville. Leur couple aurait pu poser dans un catalogue féminin avec, pour slogan, « voici mesdames le couple parfait. » Seule ombre au tableau : le ventre d’Edna ne s’arrondissait pas, et des rumeurs sur sa stérilité eurent fini par se répandre dans la petite ville de Dundee. Pauvre homme, disait-on en regardant Norton passer, pauvre homme. Lui qui désirait tant un enfant ! Et même les époux McCoy eurent fini par se poser des questions à ce sujet, songeant que, peut-être, Dieu avait quelque chose à leur reprocher. Mais Dieu entendit finalement leurs prières et, après presque trois ans d’errance maternelle, Edna vit son ventre s’étendre pour laisser grandir leur premier enfant.
Soigneusement, les époux McCoy préparèrent la petite chambre au premier étage de leur demeure coquette, repeignant les murs et aménageant un espace adapté pour le futur bébé, qu’ils étaient déjà impatients d’accueillir. Et peut-être, que lui aussi était bien trop pressé d’arriver… Au cours de son septième mois de grossesse, sous la chaleur étouffante du mois de juillet, en pleine nuit, Edna avait perdu les eaux aux côtés de son mari endormi : ce alors la première fois que les voisins des McCoy entendirent des hurlements provenant de la sage maisonnette. Affolés par l’idée que leur bébé survenait bien trop tôt, ils partirent en trombe à l’hôpital en oubliant la moitié des affaires de maternité ; et quelques heures plus tard, au petit matin, tandis que l’aurore déchirait l’obscurité de la nuit, leur fils était né. Ils le nommèrent Henry. Henry Philip McCoy.
Bien qu’inquiets, les nouveaux parents étaient fous de joie d’accueillir enfin la venue de cet enfant tant attendu, si bien qu’ils ne virent pas tout de suite les étrangetés de son corps : ses mains et ses pieds étaient exceptionnellement grands. Le docteur Coleman, ayant pratiqué l’accouchement d’Edna, affirma même que, de mémoire de médecin, il n’avait jamais vu un nourrisson avec des extrémités aussi imposantes ! L’enfant fut alors soumis à une batterie d’examens, qui ne révélèrent aucune anomalie particulière dans son organisme ; à moitié rassurés de savoir que leur fils n’était pas réellement malade, Norton et Edna s’inquiétèrent surtout pour l’avenir de leur garçon déjà tant aimé : s’ils l’acceptaient pleinement et entièrement, s’ils le trouvaient parfait sans la moindre hésitation, est-ce que le monde extérieur, connu pour sa cruauté et sa violence, ferait preuve d’une telle bienveillance à son égard ? De nombreuses fois, des nuits durant, alors que le petit garçon dormait paisiblement dans sa chambre, les époux McCoy prenait place dans leur salon, se cajolant l’un contre l’autre face à la cheminée crépitante qui réchauffait agréablement leurs corps glacés par l’angoisse, tandis qu’ils se questionnaient… Et si ? Et s’il était préférable que leur fils suive des cours par correspondance ? Et s’ils déménageaient à l’étranger ? Et s’ils retournaient voir ce spécialiste un peu fou à Los Angeles, qui avait conseillé d’opérer l’enfant ? Et si ? Et si. Et si tout s’était déroulé normalement. Et si les choses n’avaient pas été aussi compliquées. Et si Norton n'avait pas été exposé si longtemps a des radiations dans sa centrale nucléaire, car c'était bien la seule raison capable d'expliquer une telle morphologie chez leur bambin d'après les nombreux docteurs s'étant succédés à son chevet. On va devoir être forts pour lui, avait dit Norton un jour, en serrant tendrement sa femme qui pleurait dans ses bras. Ils avaient fini par comprendre qu’ils ne pourraient pas éternellement protéger leur fils des affres du monde extérieur, mais qu'ils pourraient seulement l’accompagner sur le chemin de la vie, en l'aidant à se relever chaque fois qu'il en aurait besoin.
Chapitre 2 — Le fils prodigue
Bien que ses camarades de classe lui trouvaient tout un tas de surnoms désobligeants et particulièrement mesquins, ses institutrices furent tour à tour étonnées mais fascinées par cet enfant si éveillé, qui était largement en avance pour son âge : il excellait particulièrement en mathématiques et en sciences, et n’affichait aucune lacune en littérature. Il était férocement curieux de tout, ne cessant de poser des questions parfois compliquées, auxquelles ses maîtresses n’avaient même pas de réponse. Surdoué, le mot était finalement tombé l’année de son sixième anniversaire. Votre enfant est surdoué, monsieur et madame McCoy. Norton et Edna s’étaient regardés sans véritablement comprendre ce que l’institutrice, assise derrière son bureau dans sa salle de classe, leur disait. Car bien qu’ils savaient tous deux que leur fils était un élève brillant, ils ne s’étaient jamais imaginés que leur Hank puisse être un surdoué ! Miss Parton lui avait fait passer toute une série de tests pour évaluer son niveau, et avait été alors effarée du résultat. Son QI est prodigieusement au-dessus de la moyenne, vous pouvez être fiers ! avait-elle affirmé avec un sourire jovial, tandis que les deux parents se dévisageaient sans savoir véritablement s’ils devaient se réjouir de cette nouvelle… Encore une fois, leur enfant était différent des autres. Ne l’était-il pas déjà assez ?
Mais être doté d’une intelligence hors du commun ne lui offrit pas que des avantages. Chétif en apparence —bien qu’étant plus agile et fort que la plupart de ses camarades, toujours le nez plongé dans un bouquin ou dans le laboratoire de son établissement pour y accomplir quelques expériences hasardeuses, Hank était rapidement devenu l’objet de moqueries et de harcèlement cruels, face auxquels ses parents étaient malheureusement impuissants. Malgré les brimades évidentes, les insultes inscrites sur son casier et les railleries douteuses qu’il essuyait à longueur de journée, l’administration scolaire restait sourde aux supplications des époux McCoy, qui firent de nombreuses fois le déplacement pour se plaindre, en vain. Ce n’est que lorsque Hank fut reçu à Harvard qu’il y trouva un semblant de paix ; là-bas, tout était différent. Il n’était plus le jeune garçon étrange, ni l’intello de service s’attirant les foudres de ses camarades. Là-bas, il était un génie. Un prodigue. Et personne ne riait jamais de lui.
Il fut diplômé d’Harvard à l’âge de 15 ans seulement, devenant ainsi l’un des plus jeunes doctorants de cette grande université américaine. Recruté dans la foulée par la CIA afin de travailler comme chercheur pour la « Division X », ses recherches ont principalement porté sur le vol supersonique et le prototype du Cerebro, sans que personne n’ait vent de sa mutation ; car en grandissant, son corps semblait rétablir un équilibre presque normal : ses mains avaient une taille tout à fait légitime par rapport à son corps, et il parvenait à cacher ses pieds grâce à ses chaussures… Jusqu’à ce que Charles Xavier révèle accidentellement sa véritable nature, devant l’un de ses supérieurs. Le professeur Xavier lui ayant rendu visite dans son laboratoire en compagnie d’Erik Lehnsherr, Raven Darkholme et Moira MacTaggert, Hank leur fit une démonstration de ses capacités avant de les suivre, car c’était bien la première fois qu’il rencontrait d’autres mutants, et il en éprouvait un sentiment bien réconfortant. Enfin, il n’était plus seul.
Chapitre 3 — Le poison du remède
Maintenant qu’il était en compagnie d’autres mutants et qu’il leur faisait pleinement confiance, Hank leur révéla qu’il travaillait, en secret et depuis un long moment, sur un sérum capable de « guérir » sa mutation physique tout en laissant ses capacités intactes ; il songea alors que la mutation de Mystique, capable de modifier son apparence à souhait, serait la clef pour le perfectionner : lui demandant un échantillon de son sang, ils manquèrent d'échanger leur premier baiser, qui aurait eu lieu si Erik n'avait pas interrompu leur rapprochement timide. Mais lorsque le sérum fut achevé, Raven refusa finalement de le prendre sous les conseils d’Erik, et Hank fut donc le seul à s’injecter ce qu’il considérait comme un remède : sa mutation connut alors une transformation radicale, produisant une fourrure bleutée sur tout son corps, une apparence davantage bestiale avec des dents en forme de crocs acérés, des oreilles pointues et des griffes puissantes. Le sérum avait été un échec. Pire encore, il avait eu l’effet inverse : il avait renforcé sa mutation au lieu de l’atténuer.
La déception et le désespoir se mêlèrent en une colère virulente qui le conduisit à saccager son laboratoire ; déjà qu’il avait eu du mal à s’accepter par le passé, comment allait-il vivre avec une apparence encore plus hideuse ? Il n’avait pas le choix, il allait falloir apprendre à faire avec. Car il n’était pas assez égoïste pour fuir : ses amis avaient besoin de lui.
Ayant combattu avec les X-Men pour empêcher Sebastian Shaw et son groupe de mutants de déclencher une Troisième Guerre Mondiale entre les États-Unis et l’Union Soviétique, pendant la crise des missiles de Cuba ; ce fut au cours de cet affrontement que Charles fut blessé, lui ôtant de manière injuste et cruelle la capacité de marcher. Après cet épisode tragique, et avec Charles, Hank construisit une seconde version du Cerebro pour permettre au professeur Xavier de repérer les jeunes mutants à travers les États-Unis, afin de les accueillir, s’ils le souhaitaient, dans le manoir familial de ce dernier.
Chapitre 4 — Le soleil brillera de nouveau
Après la guerre des missiles de Cuba en 1962, Hank, qui était devenu professeur de sciences au Manoir Xavier, vit son école se vider de ses occupants : la plupart des professeurs et des étudiants avaient été appelés pour se battre au Viêtnam, le laissant seul avec le monstre de tristesse qui errait dans les couloirs de l’Institut : Charles, son plus proche ami, celui qui était presque comme un frère pour lui, était en équilibre entre la folie et le chagrin. Ayant mis au point un sérum capable de contrôler sa forme de « bête », Hank offrit un peu de ce sérum à Charles pour bloquer ses pouvoirs et surtout les voix qui envahissaient son esprit : ils vécurent ainsi, tous deux, éloignés du monde extérieur, comme deux ombres ne se ternissant point dans la poussière et l’indifférence, jusqu’à ce jour fatidique de 1973.
Ce jour-là, les deux mutants vivant reclus dans leur manoir reçurent une visite étonnante, celle d’un homme arrivant du futur sur les ordres de Charles et Erik, et se nommant Logan ; il affirma même à Hank que tous deux deviendraient de proches amis, quand bien même leurs premiers échanges furent particulièrement houleux dans cette temporalité. Si, au début, aucun des deux amis ne prit au sérieux cet homme étrange, il eut fini par les convaincre de la véracité de ses propos : une guerre allait éclater, une guerre qui mènerait à l’extinction des mutants. Mais pour éviter un tel dénouement tragique pour les mutants, ils avaient besoin de Magnéto, retenu sous le Pentagone dans une prison en béton et plastique pour avoir été impliqué dans le meurtre de Kennedy ; à contre-coeur, ils le libérèrent grâce à Vif-Argent, qui était bien curieux de retrouver son père, quand bien même celui-ci ignorait son existence. Mais le plus dur restait à faire : empêcher Raven de tuer le docteur Trask, qui mettait au point un programme anti-mutant, le créateur des Sentinelles. Mais, encore une fois, Charles et Erik n’étaient pas tout à fait d’accord sur la marche à suivre : Magnéto décida tout simplement que cet avenir sombre pourrait être évité si Mystique était éliminé, car son sang ne pourrait servir à la création d’armes puissantes contre les mutants. Il poursuivit Raven devant les caméras du monde entier, qui filmèrent la scène sans en perdre une seule seconde : alors qu’il était prêt à la tuer d’une balle dans la tête, Hank l’empêchât d’abattre son plan machiavélique sur celle qui était, malgré tout, son amie. Lui permettant de fuir, il fut à son tour la cible de Magnéto, avant que la police n’oblige les mutants à se disperser. Mais le pire avait été évité, et ce sauvetage permit au monde de dévoiler un pan plus positifs des mutants : peut-être que les mentalités allaient commencer à évoluer… Enfin, les mutants n’étaient plus totalement une menace dont il fallait à tout prix se débarrasser pour survivre. L'horizon s'était éclairci, et les mutants pouvaient alors espérer des temps de paix.
Chapitre 5 — La guerre contre Apocalypse
Mais le calme et la paix ne furent pas éternelles. En 1983, dix ans après les événements ayant vu l’affrontement des X-Men contre Magnéto, l’humanité vit la venue d’une nouvelle menace, plus redoutable encore que tout ce qu’ils avaient connu jusqu’ici : Apocalypse, mutant ancestrale qui souhaitait provoquer la fin du monde, avait trouvé comme alliés Erik, Psylock, Storm et Angel. Ensemble, ils étaient prêts à ravager le monde pour le sculpter selon les volontés de leur leader, qui considérait les mutants comme supérieurs. Si Jean fut la première à l’apercevoir dans ses cauchemars, Charles et Hank ne perdirent pas de temps avant d’utiliser le Cerebro pour le localiser. Et malgré la redoutable menace qui pesait à présent sur leurs épaules, les X-Men partirent pour l’affronter sans la moindre hésitation, mais les choses ne se déroulèrent pas réellement comme prévu : si Magnéto manqua une nouvelle fois de tuer Raven, Charles fut capturé par leur ennemi car celui-ci convoitait ses pouvoirs télépathiques, ô combien puissants. D’un naturel optimiste, ce fut néanmoins la première fois que Hank songea qu’il avait vu son ami pour la dernière fois, et cette morne idée lui avait provoqué une colère brûlante, qu’il n’avait jamais éprouvée jusqu’ici. Loin d’être belliqueux, il n’avait cependant pu se résoudre à essuyer la perte de Charles sans se battre avec acharnement, et c’est ce qu’il fit. Le professeur Xavier fut finalement sauvé par ses amis, et Apocalypse fut vaincu par Jean et Charles. Le monde venait d’échapper de justesse à une désolation sans nom, et l’humanité devait son salut aux mutants. Et désormais, les x-men seraient toujours prêts à se battre pour protéger le monde de toutes les éventuelles menaces.
Mais avant qu’ils n’aient le temps de retourner à l’Institut, une faille spatio-temporelle s’ouvrit en les aspirant pour les transporter trente-cinq ans dans le futur, dans une réalité parallèle de surcroit : ici, dans ce monde moderne où la technologie est le maître-mot, les super-héros étaient connus et acclamés. Hank découvrit même que l’un des super-héros, faisant partie des Avengers et nommé Bruce Banner, était un colosse géant de couleur verte : ce dernier était aimé et accepté par le monde entier, et découvrir ceci lui produisit une bouffée d’espoir. Dans cette réalité, dans ce nouveau monde, peut-être, allait-il enfin trouver sa place ? Mais ses espoirs furent brefs, car la guerre contre Thanos ne lui laissa guère le temps d’avoir la réponse à cette question.
Chapitre 6 — Une nouvelle vie, un nouveau monde
Bien trop occupé à s’adapter à cette nouvelle vie, à cette technologie sur-puissante qui lui volait des heures de sommeil tant il voulait tout apprendre et tout maîtriser, Hank suivit l’avis de Charles concernant la menace que représentait Thanos : les Avengers allaient s’en occuper, c’était évident. Ils étaient nombreux, forts, soutenus, aidés par des divinités et des entités incroyablement puissantes, alors comment aurait-il pu en être autrement ? Malheureusement, ils avaient été tous deux bien trop confiants. Mais contrairement aux autres, Hank ne vit personne disparaître ce jour-là : dans son laboratoire de l’Institut, penché au-dessus de quelques analyses qu’il venait d’effectuer concernant le gène X, il se sentit tout d’abord nauséeux… Avait-il encore oublié de déjeuner, accaparé par ces ordinateurs incroyables qu’il ne quittait jamais tant les fonctions le fascinaient ? Se redressant sur sa chaise inconfortable, il avait été assailli d’un vertige foudroyant, qui lui avait donné l’impression de s’endormir à même le sol. Sans souffrance, sans peur, sans pensée, il avait disparu. Durant cinq longues années.
Cinq ans plus tard, Hank avait ouvert des yeux embrumés sur le plafond de son laboratoire plongé dans la pénombre, car il ne restait que trois ampoules fonctionnelles, qui éclairaient son bureau d’une vague lumière blanchâtre : ayant cette même sensation de vertige, il s’était redressé sur ses coudes en parcourant la vaste salle du regard, un peu perdu. Avait-il dormi aussi longtemps ? Pour ainsi dire, il avait dormi pendant cinq ans. Le claquement de doigts de Thanos l’avait emporté, mais celui de Hulk l’avait ramené. Les Avengers avaient réussi, perdant, au passage, quelques-uns des leurs. Malgré cette cruelle vérité, ce sacrifice ô combien salvateur, Hank ne put que se réjouir de voir des visages familiers : celui de ses amis, de ceux qui étaient comme sa famille désormais. Et rien n’est plus important que sa famille, à ses yeux.
Dire que son époque lui manque serait mensonger : Hank a enfin l’impression d’être dans le monde qui lui correspond. Un monde où la technologie est omniprésente et surpuissante, où les recherches scientifiques sont au coeur de toutes les évolutions et considérations, et où les mutations, sont bien mieux acceptées. Est-ce qu’il s’accepte lui-même davantage ? Si seulement. Mais il essaye. Il apprend. Mais une chose est sûre : il sera toujours là pour ceux ont besoin de lui. Et les récents événements concernant la Sorcière Rouge et Raven l’ont prouvés : sans rancœur, sans condamner, sans se proclamer juge, il n’a eu de cesse de vouloir les aider. Ainsi est fait le Fauve qui se terre derrière sa voix sereine, ainsi est le génie qui se cache derrière ses lunettes épaisses : un homme de valeur, de confiance et de parole, qui braverait tous les dangers pour ceux qui lui sont chers.