PretenderOh-oh, yes, I'm the great pretender Pretending that I'm doing well My need is such, I pretend too much I'm lonely, but no one can tell Oh-oh, yes, I'm the great pretender Adrift in a world of my own I played the game but to my real shame You've left me to grieve all alone
L'enfer, c'est les autres. Cette phrase concernant le monde prend d'autant plus de sens dans un lieu comme le Devil's, en sachant qu'ici, on est carrément dans l'arène des enfers. Là où certains se prêtent à comparer ce genre de lieux aux jungles humaines dans le but d'ajouter une touche de vert capable de renouveler l'oxygène ambiant, ici c'est un étouffoir de sueur due à la danse, de respirations erratiques, de rires inspirants encore plus le peu d'air restant. Surtout durant des jours comme un dimanche soir, où l'électricité de la liberté du vendredi précédent est toujours présente. Les gens fêtent la disparition de leurs chaînes, de leur trepalium en allant à la chasse du coup d'un soir, l'oubli d'une mauvaise semaine auprès d'une oreille attentive, ou en buvant de tout leur saoul parce que selon les conventions imposées, il ne faut pas l'être pour apparaître décent. Tout cela, avant que le lundi n'apparaisse de son auguste aurore et ne change à nouveau la donne et ne les rappelle à ces ennuyeuses et fâcheuses conventions. Et pour certains comme Felicia Hardy, la décence doit se retrouver en n'importe quelle circonstances quand, selon son planning, elle prend le rôle d'escorte au Devil's. Pour eux, elle doit être cette irréprochable et délicieuse créature qui leur fera oublier leurs tracas, qui pourra leur répondre en dehors de ses heures de boulot par SMS, ou bien en acceptant de les suivre dans quelque soirée où ils ont besoin d'une compagne de choix. Quand elle est serveuse aussi au demeurant, bien que la proximité et l'énergie transmise par ceux venus dans le seul but de danser et boire l'aide à manifester un côté plus chafouin.
Enfin ça, c'était avant.Avant que l'une des escortes la considérant comme une rivale, voir une potentielle raison de perdre un peu plus de sa notoriété déjà branlante, ne fasse l'irréparable aux yeux d'une Felicia déjà bien tendue. Et pourquoi est-elle tendue ? Parce que deux jours avant, quelque chose l'avait profondément perturbée, secouée. Quelque chose en rapport avec un homme qui prend beaucoup de place dans son coeur, et qu'elle veut soutenir avant qu'il ne dérape complètement. Tout cela met en exergue ses inquiétudes, un manque de sommeil se faisant de plus en plus avéré, avec un lot de catastrophes ayant secoué son immeuble à cause de ce truc en elle. Avant que cela ne se produise, Felicia était radieuse, comblée. À tel point que cela lui donnait un charme fou, une aura sans pareille qui avait enchanté autant les clients qu'elle servait, que ceux qui ont pu obtenir sa compagnie durant son service d'escorte. Mais ce soir, c'est tout l'inverse. L'éclat est certes toujours présent, sauf que la jeune femme paraît plus soucieuse et susceptible. Rien que le fait que cette pouffiasse se soit permise de fouiller dans ses affaires et récupérer son lisseur comme un dû l'agace. Mais ce qui l'agace encore plus, c'est qu'elle se soit permise de lui imposer de refuser un client pour récupérer ce lisseur. Et autant dire que là, même en suçant ce bonbon à la fraise et en restant tout sourire, Felicia a la haine contre cette meuf. Le bonbon qui jusque là lui insufflait douceur et sérénité dans le sucre et les arômes, devient sous ses dents la tête de cette nana. Ce qui finit par le casser en deux. Du coup bloquée au comptoir, elle attend, pendant que l'autre fait son paon ... ou plutôt sa dinde avec ses trente six couleurs de l'arc en ciel plantées sur son croupion. Non sans commander un verre et fulminer, Feli remarque tout de même un truc la concernant. Durant sa parade, la femme s'est arrêtée près d'un brun qu'elle a salué un peu trop chaleureusement. Client habitué ?
Qui dit client habitué, dit possibilité de se venger. Oui, elle est rancunière et alors ? La mettre en pétard et la faire passer pour une putain de matérialiste en dèche ce n'est pas le meilleur moyen de faire copine copine non plus. Donc en regardant ce brun du coin de l'oeil en sirotant son Bloody Mary, Felicia étudie la question, ainsi que ses plans d'attaque. Chaque gorgée, chaque tempo de musique passant à présent lui donne les impulsions, l'élan pour se lancer dans ce méfait social. Et finalement, au bout d'une nouvelle gorgée ingérée via cette paille métallique, Felicia se décide à passer à l'attaque.
— D'habitude les hommes qui viennent au comptoir n'ont pas trouvé chaussure à leur pied, ou alors cherchent juste un peu de discussion. Et je dis bien d'habitude.
Pinçant entre ses doigts la paille, avant de tourner toute son attention, ainsi que son visage vers le mystérieux sujet des attentes silencieuses de la pétasse dont elle veut se venger, Felicia se montre assez confiante, mais tout de même mesurée dans son estimation pour ne pas paraître trop arrogante.
— Parce que vu votre profil, vous n'avez pas l'air d'avoir besoin de demander quoi que ce soit. Ce sont plutôt les femmes qui viennent à vous.
Elle prend ce petit air innocent, interrogatif, dans lequel ses grands yeux bleus s'inspirent de la connaissance de l'individu dans ses mystères et ses manières. Non sans assumer par ces faits qu'il ne doit pas avoir de mal à trouver chaussure à son pied. En même temps, quand on voit la qualité physique et même mentale de certains clients friands d'escorte, autant dire qu'ils ne donnent pas matière à rêver, et qu'elle comprend pourquoi l'autre tâche fait les yeux doux au brun. Autant lier l'utile à l'agréable comme on dit, pas vrai ?
I hope you know there's a part of you that lives in every note and every step I take along these broken roads that I've been walking and the time between us talking is so much longer now, but I still call you home. I hope you know. -byendlesslove
Depuis que le White Rabbit Hole était devenu le Devil's Playground, Remy le fréquentait beaucoup moins. Dans le terrier du lapin blanc, il était un habitué. Il connaissait tous les membres du personnel, ayant d'ailleurs couché avec une partie d'entre eux. Il échangeait volontiers avec nombre de mutants venus se baigner dans l'atmosphère excentrique du lieu. A présent, le fait de songer que beaucoup d'entre eux étaient morts, massacrés par un groupe de terroristes anti-mutants, lui laissait une sensation désagréable dans le ventre. Était-ce réellement pertinent d'avoir reconstruit le night-club ? C'était comme s'ils dansaient sur les cadavres de tous ces malheureux.
Mais Remy venait quand même de temps en temps. Même si au Devil's Playground, il se sentait un peu comme étranger. Ce qui était paradoxal, vu que bon nombre de membres de la Pègre, qu'il connaissait très bien, y venaient régulièrement. Et puis, le propriétaire du club était tout de même son meilleur ami… Mais l'était-il encore ? Ezekiel s'éloignait de plus en plus. Il avait changé. Remy avait beau faire des efforts pour rester tolérant et disponible, il ne pouvait ignorer le sang qu'Orion avait sur les mains. Il s'était engagé sur une autre voie… et il faudrait qu'ils en parlent, sérieusement. Mais pas ce soir.
Le club était bien rempli pour un dimanche soir. Les clients habituels n'étaient pas vraiment des fonctionnaires, contraints de retourner au turbin le lundi matin. Rien ne les empêchait de faire la fête le dimanche, là où les braves gens se préparaient tristement à reprendre une routine déprimante. En arrivant dans la salle principale, Remy fut rapidement accosté par Candice. Ah, Candice… une charmante et pétillante brunette, rescapée du White Rabbit Hole, où elle faisait régulièrement des strip-teases en version sexy du lièvre de mars. Elle travaillait toujours ici, pour Ezekiel à présent, en tant qu'escorte. Remy n'avait jamais couché avec elle - en l'occurrence, dans le privé, elle préférait la compagnie charnelle des femmes, ce que ses clients ignoraient bien évidemment - mais il s'entendait bien avec elle.
Après avoir échangé un câlin et quelques mots joyeux avec elle, il se dirigea vers le comptoir pour commander un verre et observer le terrain de chasse. Il fut rapidement approché par une jolie poupée, blonde aux yeux bleus, particulièrement sexy. Il avait toujours eu un faible pour les blondes… surtout celles à qui le monde semblait appartenir. Il écouta l'approche originale de la blonde avec un sourire amusé aux lèvres. Sensible au compliment déguisé, il choisit néanmoins le biais de l'humour - et d'un peu d'arrogance - en rebondissant sur la dernière phrase de la demoiselle :
« La preuve en est, vous êtes venue à moi. »
Il la regarda plus en détail, de la tête aux pieds. Travaillait-elle ici ? Difficile à dire. Il ne l'avait encore jamais vue, mais il ne faisait plus vraiment partie des clients réguliers, et le personnel avait pas mal changé. Comme elle n'avait pas commencé la conversation par les banalités habituelles, il choisit de la suivre sur ce terrain et tenta une approche plus directe, quitte à se prendre un râteau magistral :
« Jolie robe… »
Il laissa la phrase en suspens quelques instants, le temps pour elle de le remercier ou d'acquiescer, puis ajouta :
« Elle irait bien au pied de mon lit. »
Oui c'était osé, cash, pas tellement élégant, mais vu la tenue et l'attitude de la demoiselle, et l'endroit où ils se trouvaient, il pensait pouvoir se le permettre. Comme on disait : "ça passe ou ça casse", et depuis le temps il n'avait pas peur de prendre des risques en matière de séduction. C'était même plutôt amusant de tenter de nouvelles accroches.
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C'est clair, elle est venue à lui. Mais pas pour les raisons qu'il croit. Chose qui, au demeurant, reste à la discrétion de l'intéressée. Elle en rit légèrement, accompagnée de ce grand sourire affirmant sans mal que ce culot et ce charme lui plait. On ne peut pas nier qu'il est en totale confiance, voir dans son élément quand il s'agit de draguer. Ça sent comme un diffuseur à brume d'huiles essentielles, dont l'eau et l'arôme ont été fraîchement changés. Felicia en secoue ensuite la tête avant de demander un verre au barman. Bien sûr, cette première consommation est, elle l'espère, la première mais néanmoins la dernière qui va engager son petit processus de vengeance. Elle a besoin de passer ses nerfs, à cause de l'autre pouffe, mais aussi dans ses vicieuses intentions cacher ce qui la hante plus profondément qu'une histoire de babiole. Et cet inconnu que l'autre voudrait bien avoir à sa botte est la parfaite relique pouvant ne serait-ce qu'un peu diminuer ce stress latent.
— Je suis venue, j'ai vu. Mais je n'ai pas encore vaincu. Mais ça viendra.
Elle aussi déborde de confiance et de culot. Bon, elle se la pète un peu avec cette citation détournée de grand homme qui de toutes manières a réussi à se faire planter par ceux qui étaient censés l'aider dans son grand plan d'empire. Mais elle sous entend par la présente qu'elle n'a pas encore un pied dans la tombe, si l'on peut imager leurs prochaines interactions ainsi vu que déjà elle sent le regard assassin de l'autre se poser sur elle.
Le barman revient avec son Mai Tai pendant que le brun se permet un compliment on ne peut plus flatteur sur sa robe. Juste sa robe ? Felicia laisse filer ainsi son regard vers sa cible, en arquant singulièrement les sourcils pour lui signifier qu'elle est sûre qu'il n'y a pas que la robe qu'il complimente. C'est à son tour d'étudier le brun. Petite barbe bien rasée, une fente mentonnière qui vous ramène rapidement plus haut, c'est à dire jusqu'à sa bouche ravageuse et pulpeuse. Viennent ensuite ces yeux d'un brun qui laisse autant l'équivoque que l'appétit transparaître. Quand à la tenue, elle laisse aisément dire qu'il est là pour autant apparaître dans tout son fiel, que faire céder certaines barrières.
— Je pourrai retourner le compliment, si vous portiez vous aussi une robe.
Dit-elle d'un ton feutré et légèrement malicieux, avant d'enchaîner sur un véritable merci, attendu dans ce genre d'interactions polies, mais néanmoins significatives d'un intérêt presque commun.
— Merci. Vous aussi, vous portez très bien ces atours criant clairement que vous n'êtes pas là pour jouer au Scrabble.
Toute fière de ses petites tournures, elle ne s'attend pas à la suite de sa phrase. Enfin si, elle l'a dit elle-même : il n'est pas là pour jouer au Scrabble. Et il lui confirme par la présente qu'effectivement, il ne va pas chercher à faire le maximum de points avec un X. Enfin ... bref. Erm. Felicia écarquille les yeux et avale sa pauvre gorgée de boisson comme elle peut avant de rire.
— Et en plus vous avez du culot ! Charmant.
Boy ! De suite au lit pour faire son affaire ? On reste dans un bar, la soirée est encore jeune, et elle bosse. Il y a aussi un quatrième point mais elle en fait abstraction, car elle fait simplement son job.
— Donc ça, c'est la première étape. Dois-je ensuite me rapprocher et dire qu'il n'y aura pas que la robe qui va se retrouver au pied du lit ? à défaut de mur. Non, ce serait trop rapide, trop facile. Et pas vraiment professionnel.
Quoi ? elle reste réceptive à sa tentative ! Ce n'est pas comme si elle était étrangère à ce genre de rentre dedans, ni une petite ingénue venue avec une jolie tenue provocante dans le but qu'on fasse tomber son statut de vierge bouton de rose à celui de fleur aux pétales déployées.
Après, oui. Même si elle y va au contact Felicia rappelle qu'elle reste en service. Qui dit service, dit sa paie, dit son excuse toute trouvée pour garder une limite à ne pas franchir. Bon ok, dans le cadre d'un boulot d'escorte, elle peut se retrouver à, mais pas au bar ! Et ça reste donnant donnant oh ! Ce n'est pas non plus une prostituée, ni une midinette venue avec de grands rêves dans ce bar pour trouver éventuellement le swipe de Tinder qu'elle va pouvoir fixer dans son "je ne veux que des aventures d'un soir". Dévisageant donc le mystérieux et tentateur brun, Felicia penche légèrement la tête autant dans un signe d'interrogation, que pour ployer la matière de sa robe au niveau de ses tentatrices formes.
— Je suis Anya. Et je fais partie du personnel du Devil's. Comme cette chère Candice, qui n'a de cesse depuis tout à l'heure de nous fixer alors qu'elle se trouve déjà en charmante compagnie.
Autant lancer les hostilités en se montrant raisonnable, et surtout intéressée par le fait indéniable que la fameuse Candice n'a de cesse de poser ses yeux sur eux, pendant ses petites escapades et enjambées lyriques devant son client du soir. Felicia en profite pour la regarder à ce moment là, sans aucune discrétion. C'est à dire en se tournant vers la pouffe responsable de sa hargne, en calant son bas de dos contre le rebord du comptoir pour lui faire face à face. Et là, Candice en tord ses lippes avant de se détourner et se concentrer à nouveau sur ce qui va lui permettre de mettre plus que du pain dans sa soupe du mois. Toujours de profil, Felicia continue sa conversation avec l'inconnu comme tout était parfaitement naturel.
— Peut-être qu'elle s'attendait certainement à ce que ce soit sa robe qui tombe au pied de votre lit. Peut-être pas. Si ce n'est pas le cas, je me demande quand même pourquoi elle nous lance ces regards. Elle s'attend à ce que je tombe dans un traquenard ?
Elle se tourne à nouveau vers lui, non sans exprimer avec spontanéité combien elle n'est en rien intimidée par ce genre de jeux, vu qu'elle aussi est en train d'en jouer un, pour que la brune sente ce que ça fait de se prendre un coup de talon dans les gonades. Par la présente, elle indique aussi par un léger, très léger rapprochement, que oui, elle reste intéressée.
— Oh c'est ça. Vous avez tous les deux monté un plan machiavélique pour que la nouvelle, fraîche, et innocente blonde comprenne qu'elle n'a pas sa place ici. Ouh ! Ça, c'est un très bon pitch d'épisode de série romantique à suspens.
Elle blague, tourne autour des contours de leur relation sans s'avancer sur la vérité. Car Felicia sait que chacun a ses secrets, ses prétentions. Et la vie n'est pas que pavée de bonnes intentions. Preuve en est, si elle se rapproche pour établir un jeu de séduction, c'est aussi pour commencer à poser les jalons de son objectif principal ... à savoir voler quoique ce soit à sa cible, qui fasse tomber Candice.
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La jolie blonde répondit avec autant d'assurance que lui. Elle se permit même de reprendre une citation du plus célèbre et plus grand empereur romain, en la détournant quelque peu pour l'effet comique et audacieux de la réponse. Remy y répondit par un sourire en coin et le haussement d'un sourcil qui semblait dire silencieusement qu'il avait hâte de voir cela. C'était donc une joute verbale qui s'engageait entre les deux jeunes gens, une bataille de séduction, à qui serait le plus hardi, le plus entreprenant, à qui saurait le mieux mener le jeu. Qu'il était agréable de trouver un adversaire à sa taille, ou du moins qui avait du répondant !
Le Cadien observa le cocktail que la demoiselle avait commandé avec un certain intérêt. Il ne le connaissait pas, mais il détectait sans problème l'odeur subtile et agréable du rhum. Avant que le barman ne reparte, il demanda donc à avoir « la même chose que la demoiselle ». Puis il rit à la réplique insolite sur la robe. Lui qui avait porté de nombreux costumes dans sa vie, dont quelques tenues pour le moins excentriques, ne s'était pourtant jamais travesti. C'était une expérience qu'il lui faudrait tenter un jour, pourquoi pas ? Mais déjà elle enchaînait, le remerciant, et signifiant à son tour qu'il était visiblement là dans un but précis... et elle avait parfaitement raison.
Il fut néanmoins satisfait de constater que sa répartie sur la robe au pied de son lit avait fait mouche. La belle en fut surprise, désarçonnée l'espace d'un instant, avant d'en rire. Donc, « ça passe ». Elle lui fit clairement du rentre-dedans, faisant miroiter son acceptation, avant d'annoncer que ce serait trop rapide, trop facile. Qu'importe la manière et la vitesse d'exécution, si cela leur permettait de prendre du plaisir ? Mais ce qui intrigua Remy fut la notion de professionnalisme. Interrogation à laquelle elle répondit en se présentant. Ah, elle travaillait donc bien ici... En tant qu'escorte, très probablement. Dommage.
La remarque sur Candice amusa beaucoup Remy, même s'il ne le montra guère. Y-avait-il une forme de rivalité entre les deux demoiselles ? Dans son attitude provocatrice et assurée, Anya ressemblait à une lionne défendant farouchement son territoire. Ou était-ce une sorte de jalousie mal placée ? Si elle savait... Mais c'était plus amusant qu'elle ne sache pas. Remy en joua d'ailleurs, tournant à son tour le regard vers Candice et lui adressant un signe de tête et un sourire charmeur, avant de revenir vers la jolie blonde.
« Peut-être n'apprécie-t-elle pas que je discute avec vous alors qu'elle m'avait accosté la première ? Peut-être est-elle jalouse de votre beauté et de votre prestance ? Ou peut-être est-ce simplement parce que je la connais bien, l'ayant déjà fréquentée dans le cadre de son... travail... »
Il jouait sur les mots, laissant clairement entendre qu'il avait fait plus que discuter avec la pétillante Candice. Anya était nouvelle ici, elle l'avait dit elle-même, et à l'évidence elle ne connaissait pas les réels penchants affectifs de Candice. Même si cela n'avait guère d'importance, car en tant qu'escorte, elle offrait essentiellement ses services à des hommes, bien qu'elle ne soit pas spécialement attirée par la gente masculine. Il était en tout cas amusant de jouer sur cette confusion pour pousser Anya à se montrer entreprenante avec lui, dans le but illusoire de faire enrager Candice.
« Je doute pourtant qu'il y ait une clause d'exclusivité dans vos contrats d'escorte. Supposons que ce soir, je préfère me tourner vers vous que vers elle... Serait-ce un problème ? Serait-ce... mal ? »
Un sourire malicieux accompagna ces derniers mots, comme s'il espérait qu'elle lui réponde par l'affirmative. Si elle voulait marquer son territoire en faisant de lui sa proie du soir, il voulait bien se prêter au jeu... pour le moment. Il plaçait tranquillement ses pions, en prévision de sa prochaine attaque, laissant pour l'heure entendre à sa partenaire de jeu que si ce genre de « mal » pouvait lui faire du bien, il n'y avait pas de raison de s'en priver.
Comme le barman lui apportait son cocktail, Remy sortit son portefeuille de la poche intérieure de sa veste et l'ouvrit. Le petit rectangle de cuir ne semblait contenir aucune carte ou papier d'identité, uniquement des billets, en bonne quantité. Il prit d'ailleurs un billet de cinquante dollars, car il n'avait pas de petites coupures dans la liasse du portefeuille et rangea la monnaie avant de replacer son pécule à sa place, sans vraiment y prêter attention. Il ne pensait absolument pas prendre de risque à afficher une certaine opulence financière en ce lieu : sérieusement, qui oserait le voler, lui ?
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Felicia étire ses lippes, dans un sourire aussi bien provocateur que flatté par les mots prononcés par cette voix suave et ô combien profonde. Si d'aventure elle n'avait pas été en proie à ses retenues imposées par son travail et toutes ces pensées qui pressent son cœur et la rendent d'autant plus sauvage, elle y serait allée à fond en se disant qu'on n'a qu'une vie, olé ! Mais elle a un objectif, un besoin on ne peut plus formulé de se venger de cette pouffe qui tente encore et encore de faire régner sa loi et son billet, alors qu'elle se tartine au fond de teint les bras comme on en tartinerait du beurre. Ajoutons à cela ses embardées plus secrètes de voleuse, sa vendetta solo organisée autant contre le Caïd et Mallow, ça ne fait que rajouter du piment sur un plat déjà bien épicé. Et encore, même épicé ainsi, ça n'a pas le don de l'anesthésier, tant elle a cette capacité à être insatiable et vive, comme l'est un chat.
— Oh ...
Souffle-t-elle, en se montrant on ne peut plus intéressée par ces trois chemins. Ainsi Candice a réellement un lien avec le brun ? Et pas qu'en petits babillages. C'est vrai qu'avant d'être le Devil's, cet établissement a eu du vécu. Un sacré vécu. Candice se targue d'ailleurs d'être de ces anciennes, comme si l'on devait la respecter à la façon de ces vieux qui soi disant ont la sagesse par rapport à la jeunesse. C'était aussi une manière d'affirmer son territoire face à des nanas comme elle en soi. Cependant, cette constatation en amène une autre : si il a connu Candice, c'est que c'est un ancien. Pas si récurrent que ça, au demeurant. Mais c'est sans doute un bon moyen d'allonger la discussion et en apprendre un peu plus sur lui, qui se veut si charmeur et mystérieux. Felicia s'accoude au comptoir et se penche, laissant donc une vue entière sur sa tenue et l'élancé de ses longs cheveux. Intense, prenante, mais aussi prise par ces petits bijoux d'indices tendus par son interlocuteur.
— Et je suppose qu'au regard de l'intensité de vos regard échangés, le moment a été inoubliable.
Elle est assez proche, mais pas assez pour effectuer ce qu'elle souhaite, sachant que le séduisant inconnu est toujours assis. Ce serait avouer sa faute en n'effectuant qu'un mouvement de touche ou de tire sur les poches de son costume. Il faut qu'elle engage le contact, sans pour autant se montrer intrusive et guider sur une mauvaise ligne l'homme à ses côtés. La commissure de ses lèvres s'anime alors qu'elle s'approche dangereusement du visage du brun comme pour formuler de l'angle de Candice un début de contact sur lequel elle va pouvoir dire que ce n'est pas pro, que c'est au delà des limites des règles imposées, blablabla, Felicia fait juste en sorte de pouvoir parler avec plus d'intimité avec sa cible.
— Ce n'est pas le cas, et je pense que je ne vous apprends rien. Et même si ça l'était, je ferai en sorte de jeter un pavé dans cette mare pailletée pour que ça éclabousse et leur demande de revoir certaines ... conditions d'utilisation, dirons-nous.
C'est vrai qu'il est beau. Il y a comme une aura délicate, espiègle et tentatrice qui se mêle au velours de sa voix. Sauf qu'un autre visage intercède et vient voiler cette vision. Une partie manquante de sa vie, actuellement, qui lui fait cruellement défaut. Et ce vide ne fait que crisper son besoin de s'acharner sur l'injustice que Candice lui a imposé.
— Je pourrai même utiliser le prétexte de ma pause pour que l'on aille sur la piste ensemble. De toutes façons, c'est mon temps libre, et je peux bien en faire ce que je veux.
Insolente, impertinente, mais logique, l'escorte montre combien elle a du chien, et comment elle sait user elle aussi des contours et des opportunités par cette simple idée.
Elle ne se départit pas de cette proximité, tandis que Candice de son côté se demande bien ce que cette petite pétasse de blonde est en train de fomenter. Non pas qu'elle soit jalouse (si un peu quand même), mais le fait que Anya ou Felicia qu'importe se permette de subtiliser en soi une de ses zones de confort amicales et rassurantes, la rend envieuse. Pourtant, Felicia ne fait rien d'autre que d'échanger avec le brun. De se montrer intéressée, de tendre les perches nécessaires à ses propres objectifs. Elle n'engage rien de physique, rien qui ne puisse servir à la cause d'autrui, si ce n'est une tension palpable qui n'a de cesse d'enfler et chauffer.
— Dites-moi, quelqu'un comme vous doit avoir une vie passionnante pour autant mettre en haleine une jeune escorte qui, sous ses airs a sans doute plus de bouteille qu'elle ne le laisse paraître. Ce qui vous amène ce soir c'est simplement le besoin de décompresser ? Je jurerai pourtant qu'il y a plus.
Elle le laisse répondre, même si cela peut encore amener à des mystères ou des troubles. Gourmande ? elle l'est. Que ce soit dans les potins ou en faisant un casse, Felicia aime manger chaque chose, les subtiliser et les faire disparaître à la face de tous ces imposteurs et imposeurs. D'ailleurs celui face à lui joue sûrement aussi à un jeu, mais elle n'arrive pas à voir lequel, si ce n'est celui de la séduction. Mais elle espère qu'en lui ayant ne serait-ce que tendu la perche pour la pause, il s'accroche.
— Je prends donc ma pause de quinze minutes et je vous accompagne sur la piste de danse pour faire plus ample connaissance, sans le cadre du travail pour nous mettre des bâtons dans les roues ?
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Une première vérité avait été lâchée : il connaissait bien Candice, et à priori avait déjà couché avec elle. C'était donc une semi vérité, car la belle n'avait jamais partagé sa couche, mais il était amusant de le faire croire à la jolie blonde. Celle-ci se cambra, mettant en valeur des formes que Remy avait déjà pu remarquer et qu'il ne se gêna pas d'observer à nouveau, puisqu'elle l'y invitait. Puis il se pencha vers elle pour lui susurrer à l'oreille :
« Je tâche de rendre chaque rencontre inoubliable... »
Au-delà d'une vantardise qu'il ne voulait pas trop grossière, il lui livrait là une part de sa philosophie. La vie était courte, semée d'embûches qui pouvait la faire cesser brutalement à tout moment. Aussi était-il important de profiter de chaque instant et de transformer chaque apparente banalité en souvenir mémorable. Il se redressa sur son tabouret, remettant une distance socialement convenable entre elle et lui, et ajouta d'une voix plus franche et plus forte :
« Et ne pas, quand viendra la vieillesse, découvrir que je n'avais pas vécu. »
A la façon dont il déclama cette phrase, c'était à l'évidence une citation. Il la ponctua d'ailleurs d'une levée de verre, dont il but une bonne gorgée avant de commenter avec un sourire et un hochement de tête appréciateur :
« Excellent. Vous avez bon goût. »
La belle aimait le rhum, en cela elle marquait de base des points dans l'estime du Cadien. A son tour elle approcha son visage tout près du sien, jouant avec une tentation à laquelle il ne céderait pas tout de suite. Non, ce serait rompre le charme en se précipitant, alors qu'il était bien plus agréable de savourer chaque petite étape de ce jeu de séduction.
La belle était rebelle, ainsi elle marquait d'autres points. Son image de "pavé dans la mare pailletée" était délicieusement subversive. Il laissa volontiers leurs visages se frôler sans pour autant se toucher. Oh oui, elle pouvait bien faire ce qu'elle voulait. C'était une évidence. Elle semblait jeune, mais pas inexpérimentée, loin s'en fallait. D'ailleurs sa remarque sur la jeune escorte et ce qu'elle laissait paraître fit esquisser à Remy un sourire malicieux et il répondit :
« Parle-t-on toujours de Candice ? »
Cependant son sourire s'estompa quelque peu lorsqu'elle affirma, à juste titre, que ce lieu n'était pas pour lui un simple prétexte à l'amusement. Oui, il y avait plus... Mais il ne voulait pas y penser pour le moment. Il retardait le moment, nécessairement douloureux, où il lui faudrait avoir une sérieuse discussion avec le propriétaire du club. Anya était une excellente diversion.
« Oui, il y a plus... Mais ne rompons pas le charme tout de suite avec des révélations qui ne feraient que nous ramener brutalement à la dure et sinistre réalité. »
Le jeu de l'escorte était habile. En lui proposant de continuer leur échange durant sa pause, elle clarifiait bien qu'il ne s'agissait pas là d'une rencontre professionnelle. Cela lui convenait tout à fait : il n'avait jamais payé pour jouir de la compagnie d'une femme, et il ne comptait pas commencer ce soir. Son sourire revint, plus charmeur, et il ne put s'empêcher de commenter :
« Quinze minutes, cela risque d'être un peu court... »
Après avoir demandé au serveur de veiller sur son verre, il se leva de son tabouret et tendit sa main à Anya pour l'escorter - ah ah - sur la piste de danse, tel un prince charmant invitant la princesse au bal.
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