Solstice d'hiver

C’est tellement chiant. Les adultes sont tellement chiants. Faut dire qu’en plus, étant donné de où on se trouve, ils sont particulièrement arrogants et assommants. Ils ne sont pas tous ainsi. Ouais, ouais, not all wizards, c’est bon, tu m’as déjà fait la leçon.

Une grimace accueille la réponse du dénommé Drumm, à ma question qui n’en était pas vraiment une. Enfin, c’en était une, mais… on s’en fout non ? Marque de respect mon cul, c’est rien qu’un titre, ça n’implique en rien de respecter la personne en face. Je sais qu’on dit que le respect se mérite, que ça marche dans les deux sens, mais ce sont des conneries. Le respect est un dû, on n’a pas à le gagner ou quoi, contrairement à la confiance. Ce qui est assez ironique venant de moi je sais, je n’ai pas l’air de respecter grand-monde – d’accord, ce n’est pas qu’une impression – mais en vrai…
En vrai, je ne sais plus où je voulais en venir.

Bref !

J’ai un vague sourire narquois quand il finit par baisser sa main, l’air quelque peu dépité. A défaut de marcher sur Strange, je peux au moins faire chier les autres, c’est toujours ça de pris ! D’autant que notre échange semble amuser le vieux con, ce qui me perturbe un peu. Parce que tu pourrais l’apprécier. « N’importe quoi. » Toujours est-il que j’ouvre un portail, ce qui satisfait donc le sorcier en chef, et Lockheed tournoie rapidement autour de nous avant de revenir se poser sur mon épaule.

Je soupire quand l’autre reprend, avec ce qui semble être une pique à mon égard. « Je me disais la même chose, sur l’entourage, et franchement, ça craint, ce n’est pas du tout à la hauteur de la Cape ! » Même si cette dernière continue de se la jouer hautaine. Etonnement, venant d’elle, ça ne me dérange pas le moins du monde, c’est marrant. J’ouvre la bouche pour répondre à Strange, mais je reçois un coup de tête du dragon, alors que franchement, c’est injuste, je suis carrément pas immature. J’aime bien emmerder les gens nuance. Il pousse un cri et je lève les yeux au ciel.

« Un exercice ? Quel genre d’exercice ? » Et pourquoi ? Ce n’est pas censé être Noël ou je ne sais pas quoi ? Quelle arnaque ! Je ricane quand il parle d’esprit de camaraderie et je penche la tête sur le côté à la question suivante. « Vous sembliez vouloir interagir avec Lockheed, je me trompe ? Les gens pensent que je parle à une simple peluche parce qu’ils sont trop stupides. Ils ne me prennent pas au sérieux quand il n’est pas animé. » Euphémisme quand tu nous tiens. Les gens hésitent toujours entre appeler la police et s’éloigner de moi quand ça arrive, avec un regard mêlé  de pitié, de mépris et d’inquiètude. Nouveau cri de mon ami. « Bonjour Sorcier Suprême… et les autres. » Je hausse les épaules et écarte les mains. « Pourtant je dois tout autant faire la traductrice. Et en plus, la plupart des gens flippent en le voyant. » Evidemment, je le dis avec un immense sourire ravi. Partant du principe qu’il vaut mieux toujours faire peur que pitié, ça me va totalement.

« On va avoir des milkshakes ? » Okay, c’est dit avec un peu trop d’enthousiasme. Je passe pour quoi là ? Oh, on s’en fout. « Et à manger ? J’ai faim. Et du coup, je suis kidnappée pour faire quoi ? Si c’est pour des combats, c’est une mauvaise idée vous savez. »Je gagne clairement, sans une once d’hésitation.

Solstice d'hiver

La blondinette un peu secouée vient d'ouvrir un portail et je m'étonnais que tu ne sois pas aussi alerté sur le coup. Cependant, j'ai rapidement compris ton cheminement de pensée. Tu as été forcément surpris, mais la présence du docteur Strange et le fait qu'il lui ait laissé la possibilité d'ouvrir ce portail vers les limbes t'a rassuré. Et bien alors ? Tu ne peux pas le voir en peinture, mais c'est quand même mieux qu'il soit là pour des questions de sécurité, hein ? Qui plus est, si je devais résumer ses réponses à tes provocations précédentes, j'utiliserais un dicton français qui affirme que la bave du crapaud n'atteint pas la blanche colombe. Même si je ne comprends pas pourquoi il l'appelle gamin alors que physiquement, elle ressemble à une fille, je suis plutôt satisfait qu'il te propose un entraînement. Cela te permettra de bouger ta carcasse et de compter sur tes capacités au lieu de la chance. J'ai un mauvais souvenir de ton intrusion dans l'entrepôt mafieux et de cette attaque d'un mystérieux groupe mutant.

« Heu… Et bien… » La question sur le Milshake vient de te prendre au dépourvu. « Je n’en bois pas spécialement. »

Bien entendu, tu préfères le rhum. Passons, c'est une question qui n'a pas particulièrement d'intérêts. Cela montre simplement que le sorcier suprême possède des goûts plutôt communs. Je pensais pourtant que de par son allure, il préférait le thé. Cependant, il y a une autre question qui nous trottine tous les deux dans l'esprit. Qu'elle est l'utilité d'avoir ouvert un portail ? Nous pensions qu'elle allait s'en aller, mais au lieu de ça un dragon d'une couleur violette vient se poser sur l'épaule de Magik. Là, tu ne peux pas t'empêcher de sursauter lorsqu'il passe le portail. Ah, elle affirme exaucer le souhait du docteur. Lui qui voulait savoir où était le fameux Lockheed. Et bien le voici. Il se permet même de parfois donner des coups de tête à sa maîtresse. C'est de la mutation ça ? C'est pourtant plus semblable à de la magie, même si je ne connais aucun art mystique avec de telles propriétés. Il dit bonjour à Strange et aux autres. Toi petit-frère, tu fais partie des autres. Frustrant, hein ?

« Quelle surprise… » Tu rétorques à ce qu'elle est en train d'expliquer. Le fait que les gens sont effrayés en voyant le dragon apparaître. « Je me demande vraiment pourquoi… »

La jeune Magik souhaite avoir une boisson et elle a faim. Elle juge avoir été kidnappée et met en garde de ne pas participer à des combats. Tu es d'accord avec elle sur ce coup. Tu n'as vraiment pas envie de participer à quoi que ce soit. Tu es là simplement parce que tu es là. Tu ne comptes pas non plus t'attarder. Contrairement à la dresseuse de lézard et au propriétaire de la cape de lévitation, tu as une association normale à gérer, avec des responsabilités normales et tu souhaites mener une vie normale le plus possible. Tu as halluciné sur le fait que le docteur t'ait proposé d'inclure Magik dans le Lazarus. Si c'est pour invoquer Lockheed tous les quatre matins, ce n'est vraiment pas la peine. Tu penses leur dire d'aller se boire un verre entes eux pendant que tu vas vagabonder à tes occupations. Non Jericho. Tu dois continuer à faire l'effort de plus t'impliquer avec le sorcier suprême et cela implique également de faire quelques pas avec lui et la mutante. Cela ne mange pas de pain après tout.

« Parfait ! Vous n'aurez qu'à me re contacter pour l'entraînement. D'ici là, je vous laisse aller casser la croûte tous les trois. En vous souhaitant un bon solstice d'hiver. »

Je devais le prévoir… Tu ne m'écoutes jamais. Tu viens tourner tes talons en agitant la main en signe de salut. Tu vas où exactement ? Déambuler dans Kamar-Taj ? Et le fait de lui parler de l'organisation mutante que tu estimes être dangereuse, ce serait l'occasion ! COMMENT ÇA, TU AS DÉJÀ FAIT SUFFISAMMENT D'EFFORTS ?! Tu continues ta marche en t'éloignant du groupe et sans même prendre en compte mes conseils. Je ne sais pas qui est le plus immature dans l'Ordre, mais en tout cas, tu viens de gagner des points…

Magik s’adapte, Drumm deux morfle, je suis à mon aise. Il est important que je m’entoure de gens avec du caractère afin qu’ils ne soient pas écrasés par mon propre caractère. Magik est de ce genre-là aussi même si ça pourrait n’être qu’une défense. Drumm deux me laisse plus perplexe : il a du caractère avec moi, ou plutôt contre moi, mais ne sait-il pas se défendre contre une adolescente ? Cela serait dommage. Même si je suis aussi surpris lorsqu’elle s’exclame un "n’importe quoi" venu de nulle part, quelques instants avant que Lockheed ne vienne des Limbes par le portail ; tel que je l’anticipais.

L’ami fait sursauter Drumm deux puis le tour de la scène sous les regards de beaucoup de spectateurs avant de s’installer sur l’épaule du gamin. Mon regard s’en va à la peluche afin de savoir ce qu’elle devient. Simplement rangée ou proprement disparue ?

La pique vis-à-vis du fait que personne, incluant Magik et m’excluant moi puisque j’ai été choisi, ne soit à la hauteur de la Cape m’amène à regarder à nouveau le visage de la lanceuse. Lanceuse qui se prend un "tais-toi" félin de la part de son compagnon draconien. Voilà, en partie, pourquoi il est l’ami. Un ami qui échange avec un gamin en silence d’abord puis bruyamment ensuite, me laissant l’occasion de jeter un regard à Drumm deux pour savoir s’il n’est pas trop perturbé de la situation. Ce qui est le cas. N’est-ce pas lui qui honore des esprits d’un autre monde pour qu’ils lui prêtent des pouvoirs ? Un dragonnet est si surprenant ?

Nous partageons la hâte de l’exercice alors que Magik se surprend de mon invitation. Ses questions m’amènent à la regarder avec un sourire en coin et je n’ai pas le temps d’y répondre qu’elle change de sujet. Interagir avec Lockheed, j’acquiesce simplement ; même si elle ajoute ensuite qu’elle se trompe, à l’interrogatif. Donc non, elle ne se trompe pas, car oui, je voulais que le dragon soit là.

« Les gens pensent que je parle à une simple peluche parce qu’ils sont trop stupides. Ils ne me prennent pas au sérieux quand il n’est pas animé. »

Pas le temps de poser la question importante à ce propos que ledit Lockheed réintervient pour driver sa Magik et l’amener à une présentation respectueuse envers moi ; juste envers moi. Sachant que je m’indiffère du fait d’être appelé Sorcier Suprême et préfère le titre de Docteur… mais ça fait parti du jeu du gamin. De la traduction, même ? Si c’est Lockheed qu’elle a traduit, je suis surpris qu’il se contente d’un "et les autres". Mais il y a le facteur traductrice à prendre en compte, aussi. Traductrice qui se définie comme tel d’ailleurs. Après, nous sommes des Maîtres des Arts Mystiques : un dragonnet provenant d’une dimension où l’eau semble électrifiée et où le ciel rouge est dissimulé derrière des nuages, ce n’est pas le plus "flippant" que nous ayons vu. En tout cas chez moi, c’est très loin d’être le plus effrayant auquel j’ai fait face. Surtout qu’il est parfaitement bien éduqué, comme dragon. Bien plus que son gamin ou que le gamin qui commente.

Gamins que je prends par les sentiments, obtenant l’excitation de la jeunesse pour l’un et la perplexité de l’âge adulte pour l’autre.

« On va avoir des milkshakes, s’exclame un gamin que j’ai pris par les sentiments en m’adressant à un autre gamin qui ne sait pas quoi faire des siens, de sentiments, pour me répondre.

- Heu… Et bien, hésite un autre gamin comme si je venais de poser une question difficile…

- Framboise et chocolat, je me souviens, dis-je un instant à Magik avant d’en revenir au Drumm deux que j’ai bien plus perturbé à vouloir être gentil qu’à être provocateur, ce qui ne m’encourage pas à laisser voir cette autre partie de moi.

- Je n’en bois pas spécialement.

- Soit, acquiesce-je simplement avant de passer à autre chose ; un autre chose qui passe lui aussi à autre chose.

- Et à manger ? J’ai faim. »

Il me semble néanmoins que Blackwood faisait gouter à sa gamine des spécialités népalaises, voire d’autres origines, partagées par des Maîtres des Arts Mystiques tout à l’heure.

« Et du coup, je suis kidnappée pour faire quoi ? Si c’est pour des combats, c’est une mauvaise idée vous savez.

- Parfait ! Vous n'aurez qu'à me recontacter pour l'entraînement. D'ici là, je vous laisse aller casser la croûte tous les trois. En vous souhaitant un bon solstice d'hiver. »

Je marque un temps à regarder Drumm deux, savoir s’il est sérieux. Puis j’acquiesce alors qu’il s’en retourne avec sa bonne humeur habituelle en ma présence. Au moins, les présentations sont faites et les relations sont initiées. On sait à quoi s’en tenir.

« Certains Maitres ont dû apporter de la nourriture, confirme-je à Magik avant de tendre une main pour l’inviter à me suivre. Va-t-on voir ? »

Après avoir eu une réponse, j’entreprends de me tenir au côté du gamin et de l’ami qu’on soit en mouvement ou à l’arrêt. J’ai une question à poser.

« Dites-mois, qui était là en premier de Lockheed ou de la peluche le représentant ? »

Les autres ont également des noms. Remarque plus amusée que réellement mécontente, à laquelle je ne réponds que par un vague haussement d’épaules. Ça va les vexer tu crois ? Peut-être davantage que l’appeler Sorcier Suprême quand il se présente en tant que Docteur. Cette fois-ci un sourire étire sensiblement le coin de mes lèvres. C’est de bonne guerre, et ce n’est pas bien méchant. Ce n’est pas comme si j’avais fait montre d’impertinence ou d’irrespect depuis le début. Et non, jamais je ne changerais d’avis concernant leur tenue. Même si tu intègres leur rang ? Oui, même si je… Je ne vais pas intégrer leur rang ! Faire partie de tout ce cirque là, c’est non !

Même si le vieux con me prend par les sentiments et que ça marche plutôt bien. Et que l’autre pourrait se montrer divertissant, malgré sa réponse honteuse concernant les milkshakes. Je lui lance un regard déconcerté, un tantinet méprisant, mais je reviens vite sur Strange. « C’est ça ! » J’échange un regard avec Lockheed. « Deux framboises aujourd’hui, ce serait top ! » Je pourrais finir par m’habituer à ce genre d’attention, j’en conviens. Mais ça ne suffira quand même pas. A te faire rester ? Ou à te faire l’apprécier ? Ne commence pas à être désagréable, il y a déjà trop de concurrents en lice.

Je me tourne vers le blasé, Drumm ?, et je hausse un sourcil en le fixant. Il a eu peur de toi pas vrai ? Je ne devrais pas m’en réjouir autant je sais. « Il est tout petit, il n’a presque rien d’effrayant. » Tu serais presque vexante. Ma main monte lui grattouiller le cou sans que je ne quitte le sorcier du regard. « Franchement, avec tout ce qu’il s’est passé ces dernières années et tout ce qu’ils ont pu voir, ils ne font pas d’effort. Ça reste n’importe quoi. » Je lui offre un sourire bien trop grand et trop heureux. « Mais c’est vrai qu’il peut quand même vous dévorer d’une bouchée, il vaut mieux se méfier. » Lockheed pousse un cri et je dois bien être la seule à entendre son amusement. N’oublie pas d’être gentille malgré tout. Je le suis, je le suis.

Et puis franchement, il y a pire que moi ! Je taquine et je suis un peu… irrévérencieuse, voire insolente, mais… il est VIEUX lui et il fait pire que moi. « Il a peur de perdre. C’est normal, il n’a pas l’air très doué. » Je m’adresse à Strange, étant donné que Drumm est déjà en train de se barrer, mais je suis sûre qu’il m’entend, c’est fait pour. Ouais, un peu garce je suis parfois quand même. Mais une gentille garce.

Je souris et hoche la tête à la question plus que rhétorique du vieux concernant la nourriture. Je lui emboîte le pas, Lockheed voletant autour de nous, et je lève le nez vers lui à sa question. Ah. Ai-je envie de parlé de ça ? De moi ? Non, idiot, j’adore parler de toi, mais pas du reste… Tu n’es pas obligée. Je soupire. « En premier ? » Lockheed revient vers nous et se pose sur mon épaule, me donnant un coup de tête affectueux. « J’ai eu la peluche quand j’étais petite, c’était… un cadeau. Je lui parlais tout le temps, je me confiais à lui et je… voulais qu’il soit réel… j’avais besoin de lui. C’était mon ami. Ma famille. » J’esquisse un sourire. « Et un jour, il m’a répondu, il m’a aidé et soutenu. Je n’étais plus seule. » J’ai une moue en jetant un coup d’œil au docteur. « La peluche est Lockheed. Lockheed est la peluche. Mais elle était là avant il me semble. » N’est-ce pas ? En tout cas il a fallu qu’elle soit là pour que je puisse l’être. « Pourquoi ? »

Solstice d'hiver

Tu en as par-dessus la tête de ce qui est pour toi de la fausse gentillesse provenant de maître Strange. Les commentaires acerbes de Magik n'ont pas aidé à calmer ta mauvaise humeur du moment. Plaisantant sur le fait que son animal de compagnie pourrait te dévorer à tout moment et en remettre une couche par la suite sur le fait que tu n'es, semble-t-il, pas très doué. Combien de fois te l'ai-je répété ? C'est l'image que tu montres de toi. Celui de quelqu'un qui baisse les bras à la première épreuve. Nous savons tous les deux qu'elle se trompe lourdement sur ton compte et j'aimerais que tu le lui prouves. Malheureusement, tu restes sourd à mes demandes et je me contente alors de te laisser faire. Je n'ai pas vraiment le choix, après tout. Tu viens faire quelques pas de plus en t'éloignant du groupe afin d’aller demander à maître Hamir de te donner le chemin du retour. C'était ce que tu comptais faire au début. C'était sans compter sur un homme qui t'observait avec un air dédaigneux et finit par t'interpeller.

« Tiens… Drumm. Cela faisait longtemps. » Oh non. Pas lui… « Tu t'es décidé à pointer le bout de ton nez ? Cependant, as-tu vraiment ta place parmi-nous en ce jour ? Seuls ceux qui maîtrisent l'Eldritch ont pu ressentir les canalisations lumineuses offertes par le solstice. Ce n'est pas ton cas. Je me trompe, mauviette ? »

« Garde tes provocations pour toi Santosh, je ne suis vraiment pas d'humeur. »

« Ah ? » Il s'avance vers toi en délaissant la poutre sur laquelle il était appuyé. « Pourtant, on ne s'était pas revu depuis que nous avions tous les deux accédé au rang de maître. Tu ne veux pas discuter avec moi ? Nous qui avons eu le même mentor ? »

« Non merci. » Il est en train de te barrer la route. « Laisse-moi passer. »

« Ne me donne pas d'ordre espèce de minable ! Je te rappelle que je suis ton ainé et donc, tu me dois le respect ! »

Le maître qui vient de te parler ainsi se nomme Santosh. Il était également un élève de maître Minoru et je dois l'avouer, il est plutôt doué avec l'Eldritch. Cependant, il est hautain et possède un ego surdimensionné. Durant ta formation, il n'a cessé de te prendre de haut et lors des nombreux entraînements que vous avez eus, tu n'as jamais réussi à le battre. Il était malin à l'époque. Se débrouillant que maître Minoru soit absente pour te harceler et te mépriser. Il faut croire qu'il est resté sur ces bases encore aujourd'hui et le fait d'être passé au grade supérieur ne l'a pas calmé dans son côté imbuvable. Dans le passé, tu aurais simplement lâché l'affaire et continué ton apprentissage avec tes lacunes, mais aujourd'hui, la critique que Magik vient de te faire raisonne encore dans tes oreilles. Pas très doué… Tu ne serais pas très doué… Tu sers le poing et tu viens t'approcher de lui et la tension devient lourde entre vous deux. Tu le défis du regard.

« Soit… Alors, prends ma proposition de duel comme un gage de respect. »

« Tu parles sérieusement ?! Tu sais qu'il risque d'y avoir des spectateurs pour voir ton humiliation en direct, au moins ? »

« Tu as la langue bien pendue… Tu aurais peur d'une petite danse ? Dans ce cas, cesse de me faire perdre mon temps. »

Dans quoi tu es en train de t'embarquer encore ? Tu es une véritable girouette quand tu t'y mets… D'abord, tu décides de t'en aller et au final, tu restes pour défier ce crétin. J'ai beau être dans ta tête, ta manière de fonctionner continue toujours de m'échapper. Santosh est tout aussi surpris que toi et se recule un moment. Il semble déboussolé, mais un sourire carnassier vient rapidement remplacer cette fausse stupéfaction. De son anneau mystique, il vient créer un portail jusqu'aux toits, là où les combats de spectacle se font. « Alors, dans ce cas, allons danser ! » Tu emboîtes le pas pour te retrouver aussitôt dans le cercle d'affrontement. Les autres disciples et apprentis semblent intrigués par la nouvelle affiche qui vient d'avoir lieu. Une petite foule commence alors à s'amasser. Ton rival discute avec l'organisateur des confrontations et une fois que tout est en accord, il se retourne vers toi en voulant faire le spectacle.

« Ah... Cela me rappelle le bon vieux temps ! » Vous vous défaites tous les deux et en même temps de votre robe commémorative pour être à vos aises dans une tenue plus adéquate pour le combat. « Combien de fois je t'ai fait mordre la poussière déjà ? Je ne me rappelle plus… Tu ne m'as jamais battu, Drumm alors n'espère pas que cela change aujourd'hui ! »

« Je vois que tu as progressé dans ta capacité à brasser de l'air. Ne t'en fais pas pour moi, ce sera l'occasion de rattraper le temps perdu. »

« Oho… Je ne me rappelle pas que tu avais de la repartie avant ! Ce n'est rien, je vais te ramener à la réalité. »

La plupart des spectateurs connaissent de près ou de loin la rivalité qui vous animait tous les deux. Certains semblent dubitatifs concernant le fait de votre capacité à rester dans les clous, mais d'autres attendent le spectacle avec impatience. Une chose est sûre, c'est que je ne pense pas que beaucoup miserait sur ta victoire. Même si je n'étais pas fan de la tournure des événements au début, je souhaite au moins que tu montres à toute cette assemblée ce que tu as dans le ventre.

« Maîtres… » Annonce l'arbitre de la rencontre en s'approchant et en regardant les deux adversaires que vous êtes. « Je vous rappelle que ce n'est qu'un combat démonstratif. Tâchez de vous en souvenir… »

Deux framboises pour aujourd’hui, j’acquiesce. Si je n’avais pas le titre de Protecteur de la Terre et le passif de sauveur de l’univers, je pense que mon ardoise au café d’en face du Sanctuaire pourrait grossir aussi rapidement que je côtoie Magik. Magik qui me fait sourire face à ses considérations de son dragon : "il est tout petit, il n’a presque rien d’effrayant". En effet. Grandira-t-il et, si oui, à quel rythme ? Tout comme les Limbes vont m’amener à étudier la géologie, Lockheed va peut-être m’amener à inaugurer une nouvelle dragonologie. Dracologie ? Le premier terme me convient mieux.

« Mais c’est vrai qu’il peut quand même vous dévorer d’une bouchée, il vaut mieux se méfier. »

Je craindrais plus l’incinération que la morsure mais je ne dis rien, réalisant que ce que je nomme des rivières électrifiées est peut-être plutôt question d’une forme magmatique extraterrestre ; qui laisserait donc penser à une planète en formation. Je n’ai pas encore beaucoup de connaissances dans le domaine mais cela changera rapidement. Ce soir, plus exactement. Et dans les prochains jours voire semaines. Je me doute que le SHIELD trouverait des experts plus facilement que moi mais je n’ai pas l’intention d’emmener une expédition scientifique dans les Limbes ; ou même de véritablement partager la connaissance de leur existence, pour l’instant. Nous verrons à l’avenir si cela s’avère pertinent.

Au niveau de la pertinence, je ne considère pas réellement le fait que Drumm deux "a peur de perdre" comme en relevant. Il n’est pas très doué dans l’art de la lumière mais je m’abstiens de le dire, d’autant que j’ai défini l’art vaudou comme celui d’être lèche-bottes. N’armons pas Magik contre Drumm deux alors qu’il ne tient déjà pas le rythme lorsqu’elle est désarmée. Surtout qu’il y a plus important à étudier : qui de la peluche ou du dragon est arrivé en premier.

« En premier, interroge Magik alors que le concerné revient vers nous en volant et que je tourne le visage vers elle en marchant.

- Oui, confirme-je simplement alors que le dragon joue encore les chats en un encouragement muet.

- J’ai eu la peluche quand j’étais petite, c’était… »

Son hésitation me laisse le temps de détourner un visage pensif. Si la peluche précède le dragon, il est effectivement possible qu’elle soit créatrice de celui-ci. Est-ce l’énergie primordiale des Limbes qui permet d’y créer la vie puisque celle-ci n’existe pas encore ? Ou est-ce que la croyance de son état démiurgique de Magik est réelle ? A ma connaissance, seuls les Célestes ont le pouvoir de créer des planètes et celles-ci se stabilisent avec l’émergence de quatre entités piliers à l’instar de celles du cosmos. Je ne comprends pas pourquoi un Céleste prendrait forme humaine considérant que l’attention qu’ils portent aux humains, et autres créatures vivantes d’autres espèces, est comparable à celle que nous accordons aux bactéries. Ce n’est pas sans précédent cependant : le père de Peter Quill était un Céleste. D’une évolution différente de celles de tous les autres Célestes, peut-être suite à un bannissement de ceux-ci du fait de sa volonté d’agir comme un cancer cosmique et non un créateur, mais tout de même. Serait-ce possible que Magik soit née dans les Limbes et qu’elle n’ait pris forme humaine qu’en arrivant sur Terre ?

L’histoire qu’elle me raconte me semble être celle d’une enfant. Une enfant esseulée mais pas complètement isolée puisqu’il a fallu quelqu’un pour lui offrir la peluche. Peut-être que l’esseulement et l’isolation sont arrivées après une tragédie. Peut-être que le vœu que Lockheed soit plus qu’une peluche est arrivée après une tragédie. Rien n’implique qu’elle ait été humaine pour cela, cependant. Reste à savoir si une autre espèce aurait pu faire la peluche.

« La peluche est Lockheed. Lockheed est la peluche. Mais elle était là avant il me semble. »

Nous nous approchons des Maîtres des Arts Mystiques avec qui Blackwood discutait précédemment et je les salue de la tête.

« Pourquoi ?

- Essayer de comprendre, lui réponds-je simplement avant de faire face aux Disciples. Auriez-vous encore à manger pour une autre jeune fille ? »

Après avoir fait les présentations d’une main et de trois mots, je laisse l’interaction se faire sans moi tandis que prend l’Anneau de Téléportation puis la posture nécessaire à ouvrir un portail de la taille d’un plateau jusqu’à un comptoir bien connu mais actuellement vide et dans la pénombre laissée par mes étincelles.

« Certes, constate-je en me rappelant et avant de prendre une inspiration nasale pour alimenter un soupir tout aussi nasal. Décalage horaire. 03pm ici, 05:15am à New York…

- Ey, intervient un jeune adulte en tenue blanche de Novice, visiblement excité, en hélant tout le monde. Y’a un idiot qu’a lancé un défi à Santosh !

- Ne me dites pas que c’est notre idiot… »

Santosh était le Yang au Ying de Drumm deux : excellent élève de l’art Eldritch auprès de Minoru. Je ne pensais pas qu’il y avait rivalité entre les deux puisque le talent dans l’art de la lumière était unilatéral mais c’est la première supposition qui me vient. Surtout en connaissance de l’orgueil de Santosh. Et de l’énervement de Jericho.

Mes lèvres s’entrouvrent pour me permettre une grande inspiration puis, après un regard à Magik, la Cape se déploie légèrement autour de moi et me fait léviter jusqu’au niveau des toits. J’ai ainsi l’occasion de regarder l’attroupement se faire autour de la future zone de combat comme l’affrontement lui-même. Après une demande mentale, la Cape s’en va nous positionner au côté de la tour la plus proche afin que Magik puisse revenir à sa case départ si jamais elle se téléporte près de moi.

Je sais pertinement que ce n’est pas ainsi que la plupart des gens, d’où qu’ils viennent, fêtent Noël ou s’imaginent passer leur réveillon. Mais étant donné que je n’ai jamais trop connu la joie et le bonheur de décorer un sapin et de danser tous ensemble autour en se tenant la main et en chantant des chansons idiotes, mes attentes sont sans doute au-dessous du niveau zéro. Quoi que j’imagine que les piques et les grimaces peuvent être monnaie courante dans certaines familles. Ce qu’ils sont peut-être entre eux, pour certains. Mais, personnellement, étant donné que je fais ça avec tout le monde, ça ne veut rien dire. Toutefois… je peux au moins admettre que ce n’est pas si mal d’être ici, plutôt que dans les rues de New York. Et je préfère amplement ça, même s’ils sont fucking trop solennels, à une ambiance faite d’amour, de bons sentiments et autres chamallows fondus. Même si c’est bon, les chamallows.

A défaut d’en avoir, j’obtiens néanmoins un milkshake – ce qui commence à se tranformer en un précédent fâcheux pour le Doc – en attendant de dénicher de quoi manger. Et comme le vieux con est malin, il en profite pour s’engouffrer dans la brêche et tenter une nouvelle approche. C’est la première fois que l’on me demande, et si je n’ai jamais été véritablement curieuse à ce sujet, Lockheed étant Lockheed, je peux comprendre qu’il le soit. « Comprendre Lockheed ? Ou moi ? C’est important ? »

Mon attention est détournée momentanément par les personnes, disciples ?, qu’il aborde, et à qui j’offre un sourire, malgré leur imperceptible hésitation en m’aperçevant. Réprimande infime et silencieuse ? C’est fort possible. « Tu veux goûter ça ? » Le dragon pousse un cri et je récupère un peu de tout. « Merci ! » Nouveau grand sourire, alors que le dragon a détourné leur attention de mon absence de tenue, et j’emboite à nouveau le pas de Strange. Un « Oh. » quelque peu déçu franchit mes lèvres en voyant l’obscurité de l’autre côté de la fenêtre de téléportation qu’il a ouverte. Ça c’est naze.

« L’idiot qui n’aime pas les milkshakes ? » Je tends un morceau de nourriture au dragon et lève les yeux vers Strange. « C’est qui Santosh ? » Mais le voilà déjà qui décole et se dirige vers les toits. Je tente de voir par-dessus les gens, sans grand succès, avant de pousser un soupir. Je me téléporte près du Doc et de la Cape, m’asseyant en posant l’assiette entre Lockheed et moi. « Votre idiot va se faire rétamer ou il est moins nul qu’il en a l’air ?... Ça se fait de parier sur ces combats? »

Oui, je suis un peu curieuse en vérité. Pas tant de savoir si, oui ou non, Drumm peut gagner ou si je pourrais continuer de le troller. L'un n'excluant pas l'autre de toute manière. Mais de les voir utiliser leur magie. Un cri en réponse à mes pensées. Oui, évidemment, ça pourrait peser dans mon envie de rester. Peut-être. On verra.

Solstice d'hiver

L'arbitre a fixé les règles et lève le bras en hauteur pour finalement le rabattre vers le bas en disant : « Commencez ! ». Les cris des apprentis se font entendre et les disciples sont quant à eux plus mesurés. Santosh vient alors se mettre en garde et tu adoptes la posture de défense typique de la capoeira et également son jeu de jambe aussi appelé « le ginga ». Un moment d'observations et les cris d'encouragements cessent alors pour laisser la place à un silence de plomb. Vous semblez vous jauger… Rien ne semble véritablement se passer. Tout à coup Santosh fonce sur toi en envoyant un coup de pied retourné tu l'évite aisément en te baissant dans un geste d'esquive qu'on nomme « la négativa ». Tu viens ensuite te relever avec vitesse pour envoyer à ton tour un coup de pied « martelo » en sa direction. Il le bloque et te repousse et c'est ainsi qu'un échange au corps-à-corps se fait voir entre vous. Vous vous connaissez très bien tous les deux et lorsqu'un adversaire tente un assaut l'autre le contre et ainsi de suite. Ton style oblige, tu utilises tes jambes pour envoyer un coup de pied en crochet aussi appelé « gancho », mais il l'évite et t'envoie balader avec une balayette qui te fait basculer au sol. Cependant, tu te rattrapes in extremis avec tes mains et retournes ta position avec un coup de pied circulaire : el chapéu de couro. Surpris par ce retournement, Santosh se prend de plein fouet le coup et se voit propulser au sol. C'était la première fois que tu l'avais touché, le public s'exclame de joie en voyant ce fantastique duel d'art martial.

« Espèce de… »

« Que se passe-t-il Santosh, tu as perdu quelque chose par terre ? »

« Haha… Oui, je dois avouer que tu te débrouilles très bien dans le corps-à-corps » Il se relève, essuie le coup reçu avec le dos de sa main et se remet dans un autre type de positionnement. « Mais… Tu sembles oublier que c'est un combat d'art mystique ! »

Ohoh, là ça va vraiment être une autre paire de manche. Deux tao mandalas viennent se dévoiler dans les mains de ton rival et il te les envois comme s'il te jetait des disques en continu. Tu prends un coup d'adrénaline et tu esquives les attaques à distance comme tu le peux te déplaçant et tentant d'aller à sa rencontre pour continuer à l'acculer par des attaques physiques. Malheureusement, il avait bien prévu son coup : Il a fait mine d'envoyer les tao mandalas sur toi, mais en réalité, il les a placés de manière à en faire des plateformes qui venaient te contourner. Il esquive ton coup-de-poing et s'appuie sur ses créations pour te prendre à revers. Il créait encore un tao mandala et le transforme par la suite un poignard. Il va vraiment te planter ? C'était un combat à but commémoratif ! Non ! Il souffle sur sa lame de lumière orangée qui se disperse alors en poussière lumineuse et qui vient t'aveugler. Tu ressens un coup au foie. Un coup de pied circulaire qui t'a projeté au sol. À ton tour de te retrouver face contre terre.

« Et bien alors Jericho ?! Tu n'utilises pas ta magie ? » Tu te frottes les yeux en retrouvant la vue. « Pourtant, tout le monde a hâte de voir ce qu'est capable un sorcier vaudou ! »

Tu halètes et le combat commence sérieusement à être en ta défaveur. Tu te relèves avec difficulté en te tenant le ventre. Je t'interdis d'utiliser les faveurs d'Ogun pour ce combat. Cela pourrait vraiment le blesser et ce n'est clairement pas le but. Oui, tu dois te débrouiller de le battre sans utiliser tes capacités. Et ne pense même pas à demander le pouvoir d'Erzulie, ce serait encore pire et de toute façon la malédiction est très dure à mettre en place. Attention, il va encore attaquer ! Plaquant son poing contre sa paume, il vient créer un fouet occulte qui fait apparaître d'intimidantes étincelles lorsqu'il vient de frapper contre le sol. Tu cours alors sur lui en zig-zag, mais il te garde à distance en t'envoyant ce lasso orangé. Il vient ensuite t'immobiliser ta jambe gauche et créer un autre lien occulte qui s'accroche à ton bras droit. D'un mouvement sec, il vient alors tirer sur ses deux lianes magiques pour te retourner comme une crêpe et te projeter une nouvelle fois sur le sol. L'impact est dur et ton corps semble totalement inerte. Du point de vue des spectateurs tu sembles totalement K.O. Les fouets occultes disparaissent alors et il s'approche de toi en posant son pied sur ta carcasse de manière triomphale. Il lève les bras en l'air et vient ensuite s'adresser à la foule.

« Mesdames et messieurs ! Je vous présente Jericho Drumm, l'héritier des Drumm ! Très impressionnant n'est-ce pas ? Vous devriez revoir les règles d'accession au titre de disciple. » Il lance un regard accusateur à maître Minoru qui était venu assister au combat de ses deux anciens élèves et retourne ton corps avec le pied. Il pouvait te voir au sol, grimaçant de douleur. Il s'approche de toi et vient de murmurer au visage. « Ta petite famille vaudou et toi n'aviez pas votre place dans l'Ordre. Ton frère aurait dû le comprendre et toi aussi… »

« Et le vainqueur de ce combat est… » L'arbitre s'apprête à mettre fin à la débâcle et ton adversaire commence à se tourner pour s'en aller. « Maître Santo… »

L'arbitre s'arrête. Il s'arrête parce qu'il voit que tu es en train de te relever et que tu es en train de te remettre en garde malgré la difficulté. Il s'approche de toi en te disant que le combat était terminé, mais toi, tu réfutes cette possibilité. Tu affirmes que tu peux encore te battre et que tu as simplement été surpris. L'arbitre hésite, il ne sait pas vraiment quoi faire et ce recul pour laisser place à la confrontation. Il vient de te mettre hors de toi. Sa dernière phrase était clairement de trop et tu avais une idée pour lui faire mordre la poussière.

« Tiens donc ? Tu ne sais vraiment pas t'arrêter ma parole… Tu en redemandes encore ? »

« Comprendre Lockheed ? Ou moi ? C’est important ?

- Oui. »

Je n’ai rien à ajouter, un seul mot suffisant à répondre aux trois questions. D’autant que la nourriture devient le sujet d’attention de Magik et qu’elle n’est jamais aussi concentrée que lorsqu’il est question de cela justement. Le dragon est tout aussi friand qu’elle, laissant questionner son régime alimentaire originel dans les Limbes voire l’existence d’une telle chose ; s’il n’est pas totalement vivant mais tient finalement d’une marionnette animée. D’un ami imaginaire devenu réel.

J’ai beaucoup à penser vis-à-vis de Magik et de ses capacités, lesquelles se trouvent au point commun entre les arts mystiques et la mutation ; comme n’importe quel télépathe ou photokinésiste puisque la mutation simplifie, voire amplifie, le potentiel inné à chaque être humain que les arts mystiques cultivent. Suis-je à côté d’une adolescente qui ridiculiserait en pouvoir la Sorcière Rouge et le Phénix ? Télépathie exceptée, puisque je ne suis pas certain que l’esprit de Magik soit imperméable aux contrôles mentaux qui me font tant déprécier Xavier. J’ai plus de compassion pour la vraie Jean Grey, non la création faite par le Professeur X suite à son meurtre des parents afin de récupérer l’enfant sous son aile et de lui laver le cerveau pour qu’elle l’aime comme s’il était son père. Je l’ai néanmoins sacrifiée à son tyran puisque je ne peux rien faire contre lui. Puisque personne ne peut rien faire contre lui. Peut-être que Magik pourra changer cela même si ce n’est pas dans mon intention de l’utiliser ainsi. Elle a ses choix à faire. Je ne deviendrais pas comme Xavier à essayer de l’arrêter. Sinon, j’aurais déjà tenté de l’assassiner. Qu’importe mon affection pour Raven, sacrifiée aussi sur l’autel de mon impuissance d’une certaine façon. J’ai pu tenir tête à Thanos alors qu’il possédait quatre Pierres d’Infinité mais je suis une blague du fait de mes limitations humaines et morales…

M’envoler pour regarder le combat entre Drumm deux et Santosh est un changement de considération appréciable. Je n’ai même pas calculé Magik et ses questions sur l’identité de l’idiot. Ou de son adversaire. Elle déduit la première par elle-même lorsqu’elle arrive à mon côté.

« Votre idiot va se faire rétamer ou il est moins nul qu’il en a l’air, me demande-t-elle sans que je ne lui adresse un regard, incertain d’à quel point il peut faire une démonstration pertinente considérant les difficultés de contrôle du feu dans un affrontement qui n’a pas vocation à engendrer des blessures autre part que dans des égos. Ça se fait de parier sur ces combats ?

- Oui, réponds-je à nouveau avant de me dire que je ne vais pas me contenter d’un mot cette fois. Et pour qui voulez-vous donc parier ? »

Une fois la démonstration lancée, je constate que les deux Disciples se passent de canalisations : deux postures de garde différentes mais pas de construction de lumière ni de flammes. Inhabituel mais ayant le mérite de ramener tout le monde à l’attention et au respect du partage de connaissances dans une démonstration rituelle. Tout le monde peut apprendre de tout le monde, ici.

Mes sourcils se froncent et mes yeux se plissent à l’utilisation d’un coup de pied, inhabituel là encore puisque les pratiquants de l’art Eldritch utilisent surtout leurs mains ; et la lumière. L’amplitude du mouvement permet de plus la réaction de son adversaire, qui ne manque pas de l’esquiver. Je suppose qu’ils se testent et cherchent justement à ne pas employer les arts mystiques dont ils sont familiers afin de pouvoir prendre de court avec eux. Seuls les arts martiaux sont impliqués, même si l’Eldritch permet un renforcement similaire au Chi et qu’un coup de Santosh sera surement bien plus dévastateur qu’un coup de Drumm deux. Ce ne serait pas fair-play mais ce ne serait pas surprenant non plus.

Le coup de pied circulaire qui répond au retourné est d’ailleurs bloqué, élément qui me laisse comprendre le renforcement : les jambes sont plus puissantes que les bras. Drumm deux joue contre plus fort que lui, physiquement. Le problème étant que la capoeira n’est pas un style rapide, malgré le crescendo que permet les enchainements et l’accumulation de vitesse.

L’enchainement d’un coup de pied crocheté, peut-être pensé comme une feinte, se retourne contre Drumm deux puisque son autre appui est fauché. Il faut néanmoins reconnaitre au style une aisance dans les passages au sol et ce n’est que l’occasion d’un nouvel enchainement. Santosh, dont je pense que l’art martial principal est le taekwondo considérant son utilisation des jambes, se retrouve lui aussi par terre et avec bien moins d’aisance.

Lévitant et observant, je les écoute s’énerver et se provoquer en une mi-temps qui m’amène à croiser les bras, mains dissimulées entre lesdits bras et le torse. L’échauffement est énoncé comme terminé et le pratiquant d’Eldritch s’en va faire la démonstration. Il prend la garde de l’art de la lumière et se pare des boucliers manuels qui peuvent être utilisés à l’offensive comme à la défensive. Je le sais bien, étant incapable de donner un coup de poing sans souffrir plus que mon adversaire et me reposant beaucoup sur eux.

Les projections de Santosh sont esquivées par Drumm deux mais ne se dissipent pas, restant dans les airs pour un usage ultérieur. Contrôle du terrain, donc. En essayant de se rapprocher, Drumm deux ne peut voir cela et j’en penche la tête en arrière : vision tunnel, manque de recul. Précipitation, forcée par l’adversaire. Le coup de poing du pratiquant de capoeira est peine perdue, aisément blocable par l’un desdits Tao Mandalas, et il offre à Santosh l’occasion de montrer la supériorité de son art. Le contrôle du terrain est exploité et c’est un petit Sabre Sacré des Vishanti qui apparait en main du pratiquant de l’Eldritch. Une feinte. Les Vents de Watoomb sont soufflés depuis la concentration de lumière et l’utilisation qui en est faite n’est nullement un impact mais plus une gêne. Un aveuglement. Une démonstration.

Le taekwondo revient.

Un coup de pied circulaire aussi.

Et le sol.

Pas de capoeira pour rattraper Drumm deux cette fois.

Je sais que j’ai raison sur la supériorité de l’Eldritch par rapport au Vaudou, ainsi qu’au Chi d’ailleurs, mais j’aimerais que cela soit confirmer en un combat équilibré et non entre l’affrontement d’un artiste martial et d’un artiste mystique. Sentiment partagé, et exprimé, par Santosh. Avec tout autant de provocation que précédemment.

Ma respiration est calme. Tout l’inverse de celle de Drumm deux. Je le quitte des yeux pour chercher Minoru, qui doit pouvoir contempler son œuvre au sein des spectateurs. Deux élèves entrainés à la dure et pour le plus efficace, même si pas forcément le plus humain. Deux étudiants entrainés l’un contre l’autre et non ensemble. Dominique n’aime pas Kayser car elle est partie. Même si ce n’est pas son mécanisme de repousser les autres pour être seul qui a fonctionné, l’Apprentie de Satrinava est partie. Fait partie des personnes qui n’en valent pas la peine. Il ne voit pas la grande image. Ou peut-être que si. Peut-être qu’il voit que je suis juste un épouvantail et que cela a mieux marché sur sa camarade que sur lui. Suis-je capable de garder des relations plus saines entre mes Apprentis que celles que Minoru a été capables de faire avec les deux en contre-bas ?

La canalisation d’un Fouet de Watoomb contre un adversaire désarmée et dans le cadre d’une démonstration est peut-être exagérée. C’est néanmoins ce que fait Santosh avant de remettre la pression sur Drumm deux ; comme précédemment. Et, comme précédemment, cela pousse l’artiste martial à essayer de reprendre l’initiative. Sauf que la portée accrue et la force accrue permettent à l’artiste mystique de neutraliser l’art martial : capture de la jambe. Capture d’un bras. Visée de la soumission, sans doute. Entre la force augmentée et l’effet de levier, la mise au sol est d’une violence qui laissera des séquelles durant longtemps ; qu’il s’agisse d’hématomes mettant une semaine ou deux à se résorber à des fractures qui nécessiteront tout autant de mois.

La démonstration devrait être terminée.

Elle ne l’est pas.

A l’abris des regards, mes poings se serrent.
A la vue de Magik, mon visage se crispe.

L’humiliation m’amène à descendre jusqu’au cercle de spectateurs. Je me pose devant son premier rang et place mes bras aux mains closes le long de mon corps droit.

« Vous devriez revoir les règles d'accession au titre de disciple, conseille un Santosh qui oublie que c’est moi, et Wong puisque nous partageons l’influence, qui décide cela ; le Maître d’un Apprenti propose celui-ci à mon jugement, ou celui de Wong lorsque j’étais absent. Ta petite famille vaudou et toi n'aviez pas votre place dans l'Ordre. »

J’inspire profondément par le nez alors qu’il insulte tout à la fois une famille, une culture et une religion.

« Ton frère aurait dû le comprendre et toi aussi… »

Je lève mes index et majeurs couturés de cicatrices jusqu’aux fermoirs en or de la Cape de Lévitation. L’arbitre intervient enfin et parle de combat, non de démonstration. Au moins évite-t-il le terme "humiliation". A mettre au pluriel dans quelques instants.

Je m’interromps lorsque je constate, comme les autres, que Drumm deux se relève. Mes mains n’en restent pas moins au contact de ma Relique, que je sais prête à obtempérer. Je regarde l’arbitre s’approcher du vaincu pour lui expliquer cela et rabaisse mes mains quant à la réponse.

Face à l’hésitation de l’arbitre, j’entreprends d’avancer.

« Tiens donc ? Tu ne sais vraiment pas t'arrêter ma parole… Tu en redemandes encore ? »

Je m’arrête là où aurait dû se tenir l’arbitre. Désormais, je m’en charge.

Un regard de mépris pour Santosh.

Un regard d’avertissement pour Drumm deux.

Au nom de vos pairs et de vos pères, de votre culture et de la nôtre, de votre frère qui a fait l’ultime sacrifice pour tout cela et pour nous, vous avez intérêt de vous bouger le cul. Sinon j’invite Magik à s’installer au Lazarus et j’y propose Dominique comme bénévole. Ne me sous-estimez pas !

« Maîtres… vous savez pour quoi vous vous battez. »

J’interviendrais juste pour éviter un mort ou un blessé grave. Ni plus ni moins.