Summertime is boring When you're always locked inside
Je n'ai jamais vraiment aimé l'été. Cette saison a toujours été synonyme d'ennui profond pour moi. Petit gars de la campagne, coincé dans son patelin à s'emmerder pendant les grandes vacances. Quand j'étais gamin en Alabama, j'allais grimper dans les arbres. Quand la famille a déménager dans le New-Jersey à l'âge de l'adolescence, j'ai fais des conneries pour combler l'ennui. Un peu comme tous les gamins qui n'ont rien de mieux à faire de leurs journées et qu'on force à sortir dehors pour toucher de l'herbe au lieu de les laisser jouer à la console. L'été est pour moi synonyme d'ennui, même à l'âge adulte. Je ne prend jamais de vacances à cette période : c'est bien plus cher qu'en dehors de la saison estivale. Il y a trop de monde dans les endroits un peu touristiques. Et puis, il fait chaud. C'est le réchauffement climatique, n'en déplaise aux climato-septiques divers et variés qui nient pourtant ce phénomène bien réel. Non, je suis clairement mieux lotti dans mon appartement avec la climatisation. Oups, c'est pas très écologique ça mais... Ce n'est pas comme si j'avais réellement le choix ici en ville. Puis c'est aussi cette habitude très Américaine. J'ai lu sur reddit qu'ailleurs dans le monde, les gens ne mettent pas la clim à fond comme nous généralement.
Toujours est-il que moi je ne pars pas en vacances. J'ai du temps à tuer au bureau, à moitié déserté, avec une équipe au ralenti. J'ai la sale habitude de scroller mon portable dès que je m'ennuie ce qui en ce moment arrive relativement souvent. Et avec toutes les pages instagram que je suis, la plupart étant soit des pages de memes ou des chats rigolos, je suis bien évidemment tombé sur une publication bien particulière. Les refuges sont à priori débordés en ce moment, un peu partout dans le pays. Les sales types qui partent en vacances abandonnent leurs animaux sur le bord de la route, les bénévoles et autres employés se retrouve débordés et en surpopulation.
J'y songe depuis un moment, à adopter un chat. Parce que je les ai toujours beaucoup aimé. Mes parents n'en voulaient pas, la famille avait un chien et même si je les aime bien... Je n'ai pas spécialement d'atomes crochus avec les canidés. Non, je préférais largement traîner avec le chat de ma dernière copine en date. Je l'aimais bien, le gros Luigi. Il me manque plus que sa maîtresse finalement. Il serait peut-être temps que j'ai moi aussi, un Luigi à moi. Un Luigi que j'appellerai probablement autrement. Mais une présence à la maison pour me sentir moins seul.
Journée de repos aujourd'hui. J'ai décidé de me lever tôt ce matin, bien déterminé à rentrer accompagné chez moi plus tard dans la journée. Pas avec une fille au bras (ou un garçon, d'ailleurs) mais avec un chat dans une caisse. Un détour à l'animalerie, pour choisir soigneusement tout le nécessaire : un panier confortable où le chat n'iras probablement pas pour plutôt dormir sur un tas de linge propre. Une litière bien évidemment, des bols mignons pour la nourriture -de premier choix, encore un qui va être malheureux tiens-. Puis une fontaine à eau, puisqu'il parraît que les chats préfèrent ça. Un pack de jouets variés, pour qu'il y trouve éventuellement son bonheur (à moins qu'il préfère finalement une boule de papier...) et puis le fameux arbre à chat. Un plan à suivre, pas spécialement compliqué à monté grâce à dieu. Le futur perchoir du chat avec qui je rentrerai donne directement sur la grande fenêtre de mon salon, pour qu'il puisse observer les passants et les juger.
Un tour rapide sur google m'a indiqué qu'un refuge se trouve dans mon quartier, à Staten Island. Parfait. Ni une ni deux, maintenant que tout est installé pour mon futur colocataire : lunettes de soleil et sac attrapé à la volée me voilà parti avec une cage de transport à la main. Quand j'ai quelque chose en tête, j'aime mettre mes plans à exécution immédiatement : pour ne pas changer d'avis.
A l'accueil, un jeune homme me propose de me conduire à la chatterie immédiatement lorsque j'annonce mon intention d'adopter. Comme partout, ils sont débordés ici. Alors c'est probablement une aubaine de me voir débarqué si déterminé et prêt à partir avec l'un de leurs nombreux pensionnaires félins !
Staten Island - Refuge animalier
Spoiler:
crawl into your
soul
♥:
Dernière édition par Jun Goodfellow le Dim 3 Sep 2023 - 22:16, édité 1 fois
Maxime travaillait au refuge de Staten Island depuis cinq ans et il adorait son boulot. Il faisait partie de cette catégorie de personnes que l'on appelle les éternels optimistes. Chaque arrivée d'animal abandonné le confortait dans l'importance de son travail, car grâce à eux cette boule de poils aurait une seconde chance. Chaque adoption le ravissait, car un fidèle compagnon à quatre pattes allait avoir une meilleure vie. Le refuge était surchargé durant l'été ? Au moins il n'avait pas le temps de s'ennuyer !
Lorsque Jun arriva devant son comptoir, Maxime l'accueillit avec beaucoup d'enthousiasme. Un amoureux des chats, comme cela tombait bien, ils en avaient beaucoup à proposer à l'adoption en ce moment ! Il l'invita immédiatement à venir voir la chatterie extérieure où les félins étaient régulièrement sortis en groupe pour les sociabiliser et les stimuler avec des parcours d'agility. Alors qu'il l'accompagnait à travers le refuge, il ne put s'empêcher de dire :
« J'aime beaucoup vos tatouages, ça vous donne un look tout à fait atypique ! Oh et votre voix, vous avez une très belle voix, on vous l'a déjà dit ? Vous faites de la radio, non ? Ou des doublages de pubs ou de dessins animés ? Vous devez au moins être chanteur dans un groupe de rock ou de blues avec une voix pareillle ! »
Une fois lancé à discuter, Maxime était difficile à arrêter, mais sa joie de vivre était communicative. Il enchaîna ainsi sans faire de pause, sans laisser à Jun l'occasion d'en placer une, jusqu'à ce qu'ils arrivent devant le grillage de la chatterie. Il scruta alors les différents chats avec une attention étrange, tout en pensant à voix haute :
« Alors, où est-elle... Bon, euh, LILY ! Y'a un adoptant pour toi ! »
* * * * * * * * * * * * *
Petit tour à la chatterie extérieure aujourd'hui. Un nouvel arrivant a besoin d'être sociabilisé. Il refuse tout contact avec l'humain et n'est pas non plus à l'aise avec ses congénères. Je prends donc pour modèle un chat roux qui est en isolement pour le moment et rejoins les autres dehors. Je le repère, prostré dans un coin, sous un petit pont suspendu. Je me rapproche de lui petit à petit, pas à pas, lentement. Je lui laisse le temps de s'habituer à ma présence. Après une bonne vingtaine de minutes, je parviens enfin à l'approcher sans le faire trembler... et c'est évidemment à ce moment-là que Maxime m'appelle.
Pendant un instant, je suis tentée de ne pas lui répondre. Après tout, il est bien incapable de me reconnaître au milieu de la trentaine de chats présents. Mais non, il ne vient pas me déranger pour rien, il est avec un adoptant. Je laisse donc le pauvre félin et me dirige au petit trot vers les deux hommes. Arrivée devant le grillage qui nous sépare, je reprends forme humaine et me force à sourire brièvement.
« Bonjour. Vous venez pour adopter un chat ? »
Maxime me regarde avec ce sourire béat qui ne quitte presque jamais son visage. Il a l'habitude de me voir changer de forme ou parler aux animaux du refuge. Tous mes collègues sont parfaitement au courant de ma nature mutante et l'ont acceptée. Quant à l'adoptant, si ça lui plaît pas, il pourra toujours aller voir ailleurs.
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Bien entendu, que le bénévole a compris que quelque chose clochait chez moi. Mais comme la plupart des gens, il ne pense pas immédiatement à la mutation. Une voix pour la radio, la pub ou chanteur d'un groupe de rock. J'aurais sans doute pu faire tout ça sans trop de mal, choisir une carrière dans ce domaine, bien que ma voix soit atténuée lorsqu'elle est enregistrée et retransmise -comme au téléphone ou lorsque je laisse un message vocal. Heureusement, le jeune homme qui doit être un brin plus âgé que moi -ou est-ce seulement que je juge très mal en faisant plus jeune que je ne le suis ?- est du genre bavard et ne me laisse pas le temps de répondre une fois devant la chatterie.
Il appelle après une certaine Lily. Puisqu'elle n'est pas là en vue, je suppose qu'elle est occupée ? Peut-être à l'intérieur puisque les chats semblent également avoir la possibilité de rester dedans s'ils ne souhaitent pas sortir par la porte grande ouverte de ce qui semble être une sorte de salon. Si je n'ai jamais eu de chat à moi personnellement, je sais néanmoins une chose : ce sont eux qui choisissent et on ne peut pas vraiment les obliger à faire quoi que ce soit. S'il y en a qui arrivent à les dresser pour leur apprendre des tours, afin de tourner dans des films ou des pubs, je suppose que c'est bien plus dur qu'avec un chien ou un cheval par exemple. Même un oiseau tiens, puisqu'ils sont super intelligents. Surtout les perroquets gris, je ne me lasse pas de regarder des vidéos d'eux sur Tiktok et instagram.
Lily... N'était pas plus loin, occupée par quelque chose. Je peine à rester inexpressif face à une métamorphose. C'était... Un chat roux il y a quelques secondes. Si le jeune homme n'a pas immédiatement pensé à une mutation me concernant, je suis à peu près certain que c'est ce qui la concerne elle aussi. A moins qu'il y ait une race extraterrestre capable de faire ça ? Ou peut-être les maîtres des arts mystiques ? Un peu troublé, je me ressaisis tout de même. C'est mal poli, de fixer les gens. Remettant mes lunettes de soleil en place avant de me racler la gorge, je hoche simplement la tête.
Mais je devrais sans doute parler. ça s'est bien passé avec son collègue. Puis... Elle n'est pas totalement humaine elle non plus. Mutante ou encore autre chose, je ne suis pas qualifié pour savoir tout ce qu'abrite l'univers si vaste. Si j'aurais pu choisir de devenir chanteur avec ma voix, astrophysicien c'était hors de mes capacités. Pas d'assez bonnes notes en sciences à l'école, même si je me débrouillais relativement bien en mathématiques. Pas au point d'en faire une carrière en tout cas.
« Heum, oui. Un chat. Je n'ai pas spécialement de préférence d'ailleurs. »
C'est sans doute bien de le préciser, non ? Beaucoup de gens veulent sans doute un petit chaton. Ce n'est pas forcément mon cas. Un chat encore jeune, je dirais. En bonne santé ou tout du moins, sans pathologie gravissime. Pour la couleur ? J'en sais foutrement rien. J'imagine qu'on se décidera en fonction d'avec le quel des chats le courant passe le mieux.
« Mâle ou femelle, chaton ou déjà adulte, la couleur je n'ai pas de préférences non plus. Juste un chat avec qui je m'entende bien. Et qui puisse vivre en appartement. »
L'adoptant a l'air surpris et me fixe quelques instants avant de se reprendre. Je peux pas lui en vouloir, il s'attendait forcément pas à voir un chat se transformer en humain, on n'est pas dans Harry Potter. Mais il a la délicatesse de ne faire aucun commentaire, et comme souvent quand les gens ne savent pas comment réagir, il fait comme si rien d'étrange ne venait de se passer. Il se retrouve une contenance en mettant des lunettes de soleil et en se raclant la gorge, avant d'enfin me répondre.
Donc oui, il veut adopter un chat. Mais il ne sait pas quel type de chat. Bon… On va voir ça ensemble. Je m'apprête à lui poser quelques questions de base pour l'aiguiller, mais il apporte de lui-même quelques précisions bien utiles. Le son de sa voix est très agréable et c'est presque malgré moi que je lui souris avant de répondre :
« Eh ben c'est très bien, comme ça vous aurez l'embarras du choix ! Même si généralement on ne choisit pas un chat, c'est le chat qui vous accepte ou non. Max, tu le fais entrer s'te plaît ? »
Maxime acquiesce avec un grand sourire puis montre le chemin à notre adoptant. Il leur faut revenir à l'intérieur du refuge et passer par deux portes pour pouvoir accéder à la chatterie extérieure : question de sécurité, pour éviter que les chats se barrent dehors quand on ouvre la porte. Puis il nous annonce qu'il repart à l'accueil - ce qui m'arrange bien, sa bonne humeur excessive est parfois un peu lourde - et nous laisse tous les deux.
A présent que l'adoptant est à côté de moi, je réalise qu'il est plus grand que moi - ce qui est assez rare vu que je mesure 1m80 et porte des bottines à talons qui me réhaussent encore un peu. Je remarque aussi qu'il a beaucoup de tatouages… c'est vraiment pas un truc qui m'attire, mais après chacun son délire. De toute façon on n'est pas là pour causer esthétique.
« Eh ben voilà, y'a une trentaine de chats ici, de tous âges et de tous profils. On va voir si y'en a un qui s'intéresse à vous ! »
Placer l'humain directement dans la chatterie me permet aussi d'observer comment il se comporte avec les félins, voir s'il a le respect et l'intelligence nécessaires pour prendre soin correctement de l'un d'eux. Je m'écarte un peu de l'adoptant pour me placer contre le grillage et le laisser au milieu de l'espace extérieur, et je regarde ce qui se passe…
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Puisque je ne suis certainement un expert en matière de chats, je fais donc confiance à la dénommée Lily que je rejoint en compagnie de Max au sein de la chatterie extérieure. J'ai les bases en ce qui concerne les félins : ce qu'il faut leur donner à manger, ce dont ils ont besoin comme équipement. Je m'occupais un petit peu du chat de mon exe, j'ai donc une bonne idée. Pour la suite, je suppose que je pourrais toujours regarder sur internet si j'ai une question super spécifique, ou encore aller chez le vétérinaire demander des conseils si quelque chose ne va pas avec la boule de poil.
« Un chat c'est quand même plus indépendant qu'un chien. J'ai un travail avec des horaires de bureau, donc je rentre relativement tôt, mais je n'ai clairement pas le temps de sortir un chien promener trois ou quatre fois par jour. »
Et puis je trouve les chats globalement plus propres que les chiens qui ont tendance à se rouler dans la crotte et à bouffer le premier truc qui traîne par terre en promenade avant de vous le ramener couvert de bave. Les chiens c'est bien... Chez les autres. Quand on me voit d'ailleurs, je suppose qu'on ne m'imagine pas forcément comptable dans la vie, avec un travail aux horaires fixes. Je fais quelque chose d'un brin plus créatif, mais j'ai quand même la chance d'avoir des horaires qui ne sont pas trop chiantes dans la vie. J'ai même la possibilité de parfois travailler depuis chez moi si je ne fais qu'éditer des sons que j'ai enregistré plus tôt au studio. Alors avoir une compagnie dans mon appartement les jours où je travaille à domicile... Ce sera aussi agréable je suppose.
Accroupi pour laisser un petit chat noir renifler ma main, puisqu'il semble être intrigué, je le regarde et le laisse faire tout seul. Une petite caresse sur la tête, mais il semble se désintéresser assez vite de moi. Il y a par contre un chat roux qui descend de son perchoir pour venir m'inspecter lui aussi. Il est un peu plus vieux, peut-être un jeune adulte ? Il semble avoir perdu les traits caractéristiques d'un chaton, mais est à priori assez vif pour ne pas être trop vieux. Un miaulement pour attirer mon attention et me voilà à être encore une fois reniflé. Il ou elle me réclame des caresses d'un coup de tête contre ma main, et je m'exécute bien sagement pour lui offrir des gratouilles derrière les oreilles.
« Il est sympa celui-là ! En tout cas, il sait se faire comprendre. »
L'adoptant a l'air d'avoir réfléchi avant de venir ici, il ne vient pas sur un coup de tête. Je pourrais lui répondre qu'il est tout à fait possible d'avoir un chien en appartement à condition de bien le choisir et de lui consacrer du temps et de l'affection, mais ça ne servirait pas à grand chose puisqu'il veut un chat et non un chien. Chacun son truc.
Un premier chat vient le voir mais s'en désintéresse rapidement. Celui-là est du genre très indépendant, ses précédents humains l'ont abandonné parce qu'il était trop solitaire à leur goût et refusait souvent leurs caresses, allant jusqu'à griffer leur gamine quand elle voulait trop forcer le pauvre chat à faire des câlins. Un animal n'est pas une peluche, bordel.
Un deuxième s'approche de l'adoptant, et là le courant passe beaucoup mieux. Lui, à l'inverse du précédent, est un père câlin. Je souris à nouveau à l'homme à la voix envoûtante et lui explique, tandis que le chat se vautre sur le sol pour avoir des gratouilles sur le ventre :
« C'est un chat assez sociable avec l'humain, en tout cas qui aime beaucoup être le centre de l'attention. Il a toujours vécu en milieu fermé, il était chez une vieille dame qui est morte le mois dernier. Les personnes âgées ne devraient pas prendre d'animaux... »
J'ai conscience que c'est une opinion qui peut déranger, mais c'est pourtant la vérité : les gens sont souvent égoïstes et ne pensent pas assez à l'équilibre et au bien-être de leurs "animaux de compagnie". On récupère beaucoup de chiens et de chats qui ont perdu leurs humains et se retrouvent sans rien du jour au lendemain.
« Il est encore jeune puisqu'il a à peine deux ans, mais c'est un chat plutôt tranquille, et qui a besoin de calme. Il est aussi très gourmand. »
Je fourre une main dans ma poche et en sors une friandise que je tends à l'adoptant pour qu'il la propose au chat. C'est typiquement le genre de matou qui peut rapidement être adopté, avec un profil assez simple, pour peu qu'on respecte ses besoins.
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La légende raconte que c'est le chat qui vous choisis et non pas l'inverse. Elle semble se vérifier en cet instant dans l'enclos, quand un matou roux s'approche. Lily m'en dresse un portrait rapide ainsi que son historique passée. C'est un chat de retraité, qui est habitué à l'humain et s'est malheureusement retrouvé ici suite au décès de son ancienne maîtresse le mois dernier. Il n'a donc pas spécialement passé beaucoup de temps dans ce refuge, c'est sans doute une bonne chose. Peut-être que les bénévoles préfèrent voir partir les animaux rapidement dans des nouveaux foyers, pour qu'ils restent le moins longtemps possible ici. C'est toujours mieux d'avoir une vraie maison, même quand on est un chat ou un chien !
Attrapant la friandise que la jeune femme me tend je la remercie d'un sourire et hoche la tête au fur et à mesure de ses explications. Le chat gourmand ne tarde pas à venir renifler la petite croquette carrée et à la manger avec appétit. On ignore s'il a été gâté ou non dans sa vie d'avant, mais probablement qu'il devait être heureux pour ne pas avoir peur des humains. S'il avait été maltraité il ne se serait sans doute pas approché aussi facilement à cause de la peur des hommes. Si les animaux un peu trouillard à cause de leurs passifs méritent tout autant un foyer aimant que les autres plus sociables, je ne me sens pas forcément assez renseigné pour être capable de gérer un animal ayant des besoins très spécifiques. Un chat craintif serait surement un peu malheureux chez moi et serait plus apte à cohabiter avec quelqu'un qui s'y connaît bien en matière de comportement félin.
« Il doit déjà être stérilisé à son âge en plus, non ? »
Parce que sinon, bonjour les pipis partout dans l'appartement ! Je préfèrerai nettement éviter ça et s'il a encore son service trois pièces... Il devra s'en séparer très vite pour ne pas marquer mon canapé ou mes tapis de salle de bain. Je crois que normalement, les animaux sont obligatoirement stérilisés lors de leur arrivée en refuge, s'ils ne l'étaient pas encore.
« Est-ce qu'il a déjà un nom ? Je changerai sans doute plus tard, si on s'entend bien tous les deux. Mais on doit apprendre à se connaître pour ça. »
Si ma remarque sur les vieux irresponsables qui prennent des animaux l'a choqué ou dérangé, il n'en montre rien. Il est peut-être d'accord avec moi, peut-être pas, difficile à savoir, et dans le fond ça m'importe peu. L'important c'est que le courant semble bien passer entre ce chat et cet humain, et que ce dernier semble avoir un profil qui pourrait convenir à l'animal.
« Je pense que ça devrait coller entre vous, tant que vous lui accordez l'attention dont il a besoin et que vous n'organisez pas des grosses fêtes chez vous tous les week-ends. Je le répète, ce chat a besoin de calme. »
Cet humain a l'air plutôt calme, mais je préfère prévenir quand même. Beaucoup d'humains ne réalisent pas que leur mode de vie peut être inadapté aux animaux qu'ils adoptent.
« On l'a opéré il y a deux semaines, aucun souci à se faire de ce côté-là. La stérilisation est obligatoire dans les refuges. Y'a déjà bien assez de chats et de chiens abandonnés, pas la peine d'en rajouter avec des portées non désirées. »
Quant au nom du chat… Oui, il en a un. Et si l'adoptant veut le changer, je le comprendrai tout à fait. De toute façon, le nom n'est important que pour l'humain, pour l'animal ce n'est qu'un son qui lui permet de comprendre qu'on s'adresse à lui.
« Son humaine l'avait appelé Pompon, mais vous pourrez changer sans problème. Essayez de le prendre dans vos bras, qu'on voit comment il réagit ? »
Ca me permettra aussi de voir s'il sait un minimum comment s'y prendre. Après tout je ne sais pas s'il a déjà eu des chats par le passé. Si ce contact-là se passe bien, on pourra sortir de la chatterie et aller remplir les formulaires d'adoption.
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« Des fêtes tous les week end... non, ça ne risque pas avec moi. »
Je ne suis pas un jeune homme tès actif, je n'aime pas non plus sociabiliser plus que le stricte minimum. Alors faire des soirées ?... C'est un peu ce que je qualifierai d'enfer personnel. Le chat sera bel et bien au calme avec moi et ne risqueras pas d'être perturbé. Le seul bruit qu'il y a chez moi, ce sont les bruits du quotidien. La cuisine, la salle de bain, la télévision et les jeux vidéos. En soit, rien qui ne soit particulièrement inhabituel dans un foyer. Et puisqu'il n'y a pas d'enfant en vue non plus... Clairement, pompon -puisque c'est son nom de base- sera bien en ma compagnie.
« Je suppose que je verrais pour le nom par la suite... Voir un peu sa personnalité peut-être ? »
Parce que c'est vrai que c'est pas le prénom le plus incroyable qui soit. Là, je comprend bien que la dame devait être âgée et en manque d'inspiration. En le prenant dans mes bras sur les conseils de la bénévole du refuge, je constate qu'il n'a pas une tête de pompon. Pompon c'est plutôt un nom de chien dans ma tête, pour un caniche ou un bichon, un animal de ce type, plutôt que pour un chat. Surtout que lui a la fourrure assez courte et que... du coup, il ne ressemble pas trop à un pompon.
« Ah, c'est bien qu'il soit stérilisé en tout cas. ça m'éviteras un aller retour si c'est déjà fait pour lui. »
Quoi qu'il en soit, il serait passé par la case vétérinaire de toute manière. Je n'ai pas spécialement envie de me retrouver avec des pipis partout dans mon appartement. Le chat semble en tout cas assez détendu dans mes bras. Si ce n'est qu'il commence à remuer la queue au bout d'un moment, me voilà donc à le reposer délicatement par terre en comprenant qu'il n'a plus envie.
« On est un bon match d'après vous, pompon et moi ?... ça a l'air non ? »
L'adoptant me rassure en me confirmant ce dont je me doutais déjà : ce n'est pas un gros fêtard. Le chat sera au calme chez lui, d'après ce qu'il m'en dit. Très bien. Espérons simplement qu'il ne me monte pas un bobard. Mais j'ai envie de le croire. Il y a quelque chose dans sa voix qui inspire la confiance. C'est presque hypnotique d'ailleurs. Mais c'est peut-être simplement parce que j'ai passé trop de temps sous forme féline avant de lui parler. Ca a parfois tendance à brouiller ma perception des choses.
En tout cas il prend le chat délicatement et "Pompon" semble à l'aise dans ses bras. Et lorsqu'il ne veut plus de câlin, l'humain le comprend et le repose doucement au sol. Nickel. Lorsqu'il me demande s'il pense qu'ils sont un bon match tous les deux, j'affiche un léger sourire et réponds :
« Ouais. Pour moi c'est tout bon. »
Pas la peine d'y passer des heures, quand le courant passe bien entre un humain et un animal du refuge, et qu'on pense que l'humain sera en mesure de bien s'en occuper, on lance rapidement la procédure. Surtout en été, où on a beaucoup d'abandons à cause de tous les connards qui partent se dorer la pilule au soleil en laissant tomber leurs animaux de compagnie. Je me relève donc et dis à l'adoptant :
« Nous allons aller au bureau pour remplir les papiers d'adoption et vous pourrez partir avec Pompon. Vous avez une caisse de transport ? Sinon le refuge peut en prêter, avec une caution de cinquante dollars. »
Ca peut sembler cher pour une cage en plastique, mais on a eu trop de gens par le passé qui nous ont "emprunté" des caisses sans nous les rapporter après, alors au moins la caution dissuade pas mal de voleurs. Pour le reste, l'adoptant aura un peu de paperasse à remplir et un paiement de cent-cinquante dollars à nous faire pour l'adoption. Je le laisse écrire, vérifie qu'il n'a rien oublié, lui donne quelques conseils de base, puis nous retournons à la chatterie chercher Pompon. Une fois le chat dans sa caisse de transport, je fais un signe de tête à l'humain en guise d'au revoir - n'étant pas tactile, je ne serre pas facilement la main des gens - puis lui dis :
« Et voilà, une nouvelle vie commence pour vous deux ! Prenez bien soin l'un de l'autre et tout se passera bien. Si jamais y'a un pépin, vous savez où nous trouver. »
On ne sait jamais ce qu'il peut se passer. On a moins de retours de chats que de chiens, mais ça arrive quand même. Surtout à cette période de l'année. J'espère ne pas m'être trompée sur cet homme, qui me semble être quelqu'un de bien. En tout cas, sa voix me restera longtemps en mémoire.
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