21 Novembre 2004,
Népal - Kamar-Taj
09:00.
Népal - Kamar-Taj
09:00.
Là où tout a commencé. Là où elle n’était encore qu’une petite fille insouciante de la cruauté de ce monde. Là où elle vivait heureuse. N’y avait-il jamais eu plus belle époque pour elle, cette époque où le monde n’avait pas encore conscience du potentiel qui sommeillait en elle. Pourquoi cette date précise ? Parce que c’était justement à ce jour exact que tout avait pris une tournure différente pour elle, que les gens, notamment ses parents avaient changé leur façon de penser et de se comporter vis-à-vis d’elle, la date dont elle se souviendra à tout jamais. Elle avait huit ans. À huit-ans, ses souvenirs de l’époque où elle était encore bambin étaient assez flous... Elle se rappelait uniquement avoir quitté un endroit froid, glacial et hostile avec ses parents pour venir dans cet endroit favorable, chaud et accueillant là où ils vivaient en communauté avec des gens qu’ils ne connaissaient pas. Fillette, son père lui avait conté qu’ils étaient à Kam... Kamar-Taj ? Enfin, connaître le nom exact de cet endroit était sans importance car ses parents lui avaient formellement interdit d’y répéter l’appellation à l’extérieur de l’enceinte sous peine d’être privé de nourriture. Néanmoins, la petite fille allait toujours se rappeler comment ils avaient commencé à fréquenter cet endroit. Un homme étrange était rentré en contact avec eux, remplies de mystères, celui-ci avait parlé du temple comme un endroit où tout le monde pouvait guérir de n’importe quelles blessures et avoir la paix. Elle avait compris plus grande qu’il s’agissait d’un apprenti. De ses yeux admiratifs et jonchés d’étoiles observait-elle l’entraînement quotidien du matin qui se profilait devant-elle. Mise de côté sur un banc, Isabel ne perdait pas une miette des combats, clairement fascinés par ceux-ci. Sa mère, Argella Ivanovitch de son nom de jeune fille, lui avait formellement interdit de prendre part aux duels car selon-elle, cela était bien trop dangereux pour une enfant. Cette restriction l’insupportait clairement car oui, avait-elle les compétences nécessaires pour se confronter aux magiciens. Depuis deux ans avait-elle été instruite et formée à la manipulation des photons et bien qu’elle était encore inexpérimentée, essayer n’engageait en rien. Balançant ses jambes d’avant en arrière dans le vide, elle avait constaté une nouvelle victoire de son père contre l’un des nombreux hommes de ce temple. Alexei, son père, semblait ne pas avoir d'intérêt particulier pour la magie... Isabel sentait qu'il était là uniquement pour apprendre à les protéger du monde extérieur... de ce qu'elle en déduisait. Ses parents n'étaient que de simples novices. Après qu'il eût fini, d’une démarche lente et fier qu’il essayait tant bien que mal de camoufler, Alexei s’était rapproché de sa fille pour venir aux nouvelles.
“Tu ne t’entraînes pas ?” demande-t-il, d’un reproche certain. Boudant clairement, Isabel avait tourné la tête pour lui répondre par la négative.
“J’en ai marre de tout le temps danser sur place.” faisait-elle référence aux gestes répétitifs que faisaient les apprentis de Kamar-Taj pour perfectionner leurs mouvements. Levant la tête, laissant ses yeux presque attristés se perdre dans ceux de son père, elle avoue. “Je veux me battre comme toi, faire de vrais exercices.” de cela, espérait-elle désespérément une approbation de son géniteur, après tout, qui ne tentait rien n’avait rien. Hésitant longuement, son père avait fini par soupirer d’un air peu convaincu, l’observant de manière peu rassurée. “D’accord mais à deux conditions, la première est que si cela devient dangereux, nous arrêterons immédiatement. La deuxième est que ton adversaire sera moi.” ses conditions n’avaient même pas été écoutées par Isabel car tout ce qu’elle avait retenu de ses yeux rendus émerveillés était l’accord de son père. “Ouuuuuuuiiiiiiiiiii!” s’exclame-t-elle, toute contente de pouvoir pratiquer. Sans perdre une seconde de plus s’était-elle placée sur la petite piste de combat, attendant impatiemment son adversaire. Lorsqu’il vint se présenter enfin à elle, Isabel se mit en posture prête à démarrer au signal. “Je ne retiendrai pas mes coups... allons-y.” dit Alexei, d’un air sûr de lui. La petite fille ne l’écoutait même pas, trop bien occupée à faire attention à son propre placement et ses faits et gestes. Son père se mit à l’attaquer, créant un bâton grâce à l’effet de photophorèse pour tenter de l’asséner contre son buste. À la hâte mais tout en restant théâtrale, elle avait rapidement conçu un bouclier pour parer le coup de son père qui, malgré son attaque manquée, ne cessait de s’acharner sur elle. Sans jamais pouvoir répondre, la jeune fille avait déjà perdu le fil du combat et sa défaite ne semblait qu’être finalement qu’une question de temps.
“Alors, tu te penses toujours capable de t’entraîner avec les adultes ?!” intimidait son père, comme pour également la punir pour son comportement. Faiblissant de plus en plus, son bouclier semblait se briser petit à petit puis, espérant la clémence de son adversaire, elle avait fini par avouer.
“J’ai perdu... arrête...” mais rien n’y fait, les coups de bâtons sur sa magie continuait de pleuvoir sans qu’elle ne puisse rien y faire.
“J’AI PERDU, ARRÊTE...” suppliait-elle, alors que son cœur bouillonnait de rage. Pourquoi n’arrêtait-il pas... ? Elle était nulle... Elle avait compris la leçon... Elle ne lui désobéirait plus... “ARRÊTE, J’AI...” puis passant de la défensive à l’offensive d’un éclair de manière instinctive, elle avait balancé ses bras vers sa cible, expédiant une puissante brume lumineuse afin de réaliser une projection photonique. “COMPRIS!” conclut-elle, expédié en arrière dans un vol plané par sa propre puissance. Heurtant le sol et restant quelques peu dans les vapes, le temps s’était comme arrêté quelques secondes... et quand elle avait redressé le buste pour voir ce qui s’était passé, elle y avait pu voir son père, lui au sol, partagé entre douleur et surprise. Elle avait... gagné ? Lorsqu’elle l’avait enfin compris, un rire enfantin n’avait pas pu s’empêché d’éclater, relâchant d’un coup toute sa pression. Ce que la petite fille ne savait pas à ce moment-là, c’est qu’en révélant son bon potentiel, elle venait inconsciemment de faire basculer sa vie...
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11 Octobre 2012,
Népal - Katmandou
23:17.
Népal - Katmandou
23:17.
Aujourd’hui était un jour spécial. Aujourd’hui était le jour où sa vie avait basculé d’un extrême à un autre. Aujourd’hui était le jour où sa vie a commencé à être un véritable enfer. Il était dans la nature humaine de beaucoup se plaindre, souvent de tout et de rien... mais surtout de rien. Chacun avait ses raisons, certes mais parmi ceux-là, lesquelles étaient réellement valables ? Difficile à dire et pour être honnête avec elle-même, elle n’était personne pour juger les problèmes d’autrui néanmoins... elle pouvait affirmer avec certitude que la majeure partie de la population humaine n’avait pas conscience de ce qu’était réellement : vivre un cauchemar éveillé. Elle se rappelait. Comment oublier de toute façon ? Chaque détail était encore gravé au fin fond de sa tête. Elle se rappelait que c’était un jour pluvieux. Un jour de changement. Il faisait sombre et était-elle confortablement assise à l’arrière du véhicule de ses parents, nostalgique et perdue dans ses pensées en observant l’horizon. Elle quittait le Népal et par la même occasion Kamar-Taj. Cela faisait plus d’une semaine qu’elle avait annoncé à l’Ancienne son départ, les MAM étaient comme une famille pour elle mais sa volonté était de rester auprès de ses parents qui eux, déménageaient pour les Etats-Unis. Aurait-elle pu rester et devenir membre des Maîtres des Arts Mystiques mais l’idée de sacrifier cette vie pour veiller sur ceux qui lui avaient donné la vie lui convenait mieux. Ceux-ci, stricts et ambitieux concernant l’avenir et le talent de leur fille, l’avaient forcé à s’entraîner intensivement pendant huit ans. Argella et Alexei, n'étaient plus magiciens à cause de son père depuis 5 ans. Ils avaient été renvoyés de Kamar-Taj pour mauvaise conduite répétitive. Enfin ils... encore et toujours, sa mère semblait avoir payé les pots cassés de son père car c'était en vérité lui qui avait été la cause de leur renvoi. Argella l'avait uniquement suivi. Ils n'étaient pas assez qualifiés pour avoir recours aux entraînements de leur fille eux-mêmes... Heureusement à l’époque, Isabel avait eu la chance d'être épargnée par la sanction - car avait-elle toujours eu un comportement exemplaire, ainsi elle avait eu la permission de continuer à s'y rendre jusqu'à son départ. De force, certes, mais elle l’avait fait sans ronchonner pour répondre aux attentes de ses parents. Avant qu’elle ne quitte le monastère, matin, jour et nuit n’étaient réservés qu’à approfondir ses compétences vis-à-vis de la magie et lorsqu’elle venait gagner un peu de temps libre, elle prenait un plaisir profond à réaliser des activités qu’une adolescente de son âge aurait dû normalement faire. Elle qui auparavant avait les yeux qui scintillaient à la simple évocation de magie, n'avait plus la même passion qu'antan pour le domaine. Elle aimait Kamar-Taj et toutes les personnes qu'elle avait rencontrées, néanmoins, ce rythme de vie n’allait pas lui manquer. Sortie de ses pensées par l’arrêt brusque que venait de faire son père, elle avait simplement tourné les yeux vers lui. “Ne bouge pas Isabel, ta mère et moi revenons dans quelques minutes.” et sans attendre sa réponse, part-il du véhicule accompagné de sa femme. L’Adolescente n’avait pas fait attention à ça, il était habituel pour son père de faire des arrêts précipités pour aller à la banque et retirer de l’argent... cela ne prenait pas longtemps.
Seulement, après quelques minutes à patienter, la Russe commençait à trouver cela relativement long et naturellement, se mit-elle à se poser des questions. Qu’est-ce qu’ils pouvaient bien fabriquer... ? L’endroit où ils l’avaient laissé ne la rassurait pas tant que ça, la ruelle était sombre et peu fréquentée et surtout, avait-elle un mauvais pressentiment... pressentiment qui ne tarda pas à se réaliser. Rapidement eut-elle une vision d’horreur se dessiner droit devant ses yeux, sortant de la pénombre, de nombreux individus cagoulés se rapprochaient d’elle armés jusqu’aux dents et surtout... avec ses parents en otage. “LACHEZ-LES!” quittant le véhicule en trombe, n’hésite-t-elle pas à mettre en garde les ravisseurs, prête à intervenir. Son cœur battait la chamade. Elle paniquait. Qu’est-ce qu’ils leurs voulaient ?! De l’argent ?! Quelque chose d’autre ?! Sans qu’elle ne le sente, ses yeux s’étaient mis à verser des larmes... elle avait peur pour ses parents car elle ne savait que trop bien qu’ils étaient en danger. Son père n’était plus magicien, ils ne pouvaient compter que sur elle... “LACHEZ-L...” elle n’eut pas le temps de terminer qu’elle s’était faite couper de manière sèche.
“Ferme ta gueule. Détends tes cordes vocales. Si tu nous suis sagement, rien n’arrivera à tes parents, par contre si tu fais un mouvement brusque...” il vint mimer un tir dans la tête pour illustrer ses propos. “Pan.” conclut-il, d’un air moqueur. Cela avait eu le don de faire rire tous les hommes présents dans la ruelle... ça ne la faisait pas rire, vraiment pas. Elle avait hésité quelques secondes... mais elle n’avait pas le choix.
“Je me rends.” à ces mots, lève-t-elle les mains pour signifier sa reddition. Un homme s’était empressé de venir jusque derrière son dos puis d’un coup avait-elle senti une décharge électrique parcourir tout son corps avant que celui-ci ne s’effondre. Dans les vapes, elle tombait de plus en plus inconsciente... et les derniers mots qu’elle avait pu entendre avant que sa vision ne devienne subitement sombre ont été : “On a la fille, mission accomplie.”
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11 Octobre 2022,
Manhattan, United States, QG de la MCD.
21:30.
Manhattan, United States, QG de la MCD.
21:30.
Dix ans. Dix années qu’elle avait été enlevée. Dix années qu’elle subissait ou faisait subir les pires tortures aux gens nuisibles à la Mystic Compagnie Development. Cette organisation secrète et tapis dans l’ombre visait à rétablir un nouvel ordre mondial au sein de la planète terre en recrutant, de force ou non, les apprentis sorciers de cette planète. La cheffe de ce groupe encore petit mais qui visait à devenir de plus en plus gros était une puissante sorcière nommée Kayle. Maintenu captive contre son gré, pendant une décennie la Russe avait dû se plier aux ordres de ses ravisseurs pour la seule et bonne raison que si elle n’obéissait pas, ses parents pourraient mourir d’un instant, sans qu’elle ne puisse rien y faire. Malgré leur manquement dans leur éducation, Isabel les considérait quand même comme des êtres chers et si elle devait se sacrifier pour sauver leurs peaux, alors elle le ferait. Ses missions étaient claires, éliminer tous les hommes et femmes représentant une menace pour leur organisation. Ainsi, dès qu’elle avait mis les pieds au MCD, à New York Isabel avait été formée à être une tueuse à gage, froide et sans émotions. L'organisation était encore faible pour s'affirmer complètement face à la Sanctum Narthex et aux MAM... alors pour leur échapper, tous les sorciers de la MCD avaient pour obligation d'utiliser leurs pouvoirs hors du QG situé à Manhattan et uniquement en cas d'ultime recours, lorsqu'ils sont en difficulté. Ce qui, pour des cibles sans aucun pouvoir arrive rarement. De plus, en aucun cas avaient-ils le droit de s'en prendre à un membre des MAM afin de rester le plus discret possible. Elle était devenue une tueuse oui... mais il était clair qu’ils n’avaient pas su éliminer la part d’humanité qui sommeillait en elle. Elle se souvenait de chaque assassinat et chaque fois qu’elle abattait une cible, elle était remplie de ressentiment, de frustration, de haine et de culpabilité envers elle. Elle savait conserver son professionnalisme et feindre que cela ne l’affectait pas, qu’elle savait tuer de sang-froid mais lorsqu’elle devait s’endormir le soir, les cauchemars venaient la hanter. En plus de développer ses qualités de tueuse, le MCD avait aussi fait en sorte de préserver son apprentissage de la magie... pour ainsi dire, elle était l’élève de sa ravisseuse. Il y a trois ans, le snap avait bouleversé le monde... malheureusement, elle n’était pas de ceux qui avaient disparu, ni elle, ni sa détentrice. Aurait-elle pu rêver d’être libre si le snap avait touché les bonnes personnes mais la chance n’avait pas été de son côté. Pour ainsi dire, les actes de Thanos n’avaient pas réellement changé quelque chose à sa vie. Revenant de mission, après avoir dû espionner un membre important du gouvernement anglais, la jeune femme avait pénétré le bureau de sa cheffe. Chargé d’une tonne d’information maintenu captif dans sa Clé USB, Isabel avait voulu déposer cette dernière sur la table et s’en aller sans un regard pour sa maîtresse, qu’elle méprisait. Néanmoins, Kayle n’avait pas l’air d’en avoir terminé avec car aussitôt vient-elle l’interpeller.
“Hep, hep, hep...” dit-elle, le sourire arrogant en coin. Affichant une moue glaciale, Isabel s’était simplement retournée en l’observant dans les yeux. Elle voulait lui faire ravaler ce sourire et l’étrangler jusque plus aucun souffle de vie n’émane d’elle mais Isabel ne pouvait pas... d’une part car le sortilège que lui avait lancé sa maîtresse était bien trop puissant pour elle et d’une autre car ses parents étaient retenus en otage. “Voici tes nouvelles cibles, on m’a dit que tu les connaissais bien...” elle vint balancer les photos à l’extrémité de sa table. “Tu as deux mois pour les abattre.” conclut Kayle, son visage reprenant un air bien sérieux. Lorsque ses pupilles vertes s’étaient attardés sur les portraits de ces deux personnes, Isabel avait eu comme un frisson d’angoisse parcourant tout son corps. Aussitôt, tourne-t-elle frénétiquement la tête de gauche à droite pour manifester son refus évident.
“Non... Non... Je ne ferai pas ça, impossible, jamais.” refuse-t-elle, alors que sa voix se met à trembler. Il s’agissait de ses parents... sa chair... son sang, elle ne les toucherait jamais, ils pouvaient la torturer s’ils le souhaitaient mais elle ne leur retirerait jamais la vie. “Ce n’était pas une proposition mais un ordre.” mécontente, Kayle se lève-t-elle, s’approchant d’un air menaçant d’Isabel. “Tes parents ont voulu jouer, ils en assumeront les conséquences.” conclut-elle, plongeant ses yeux dans les siens. Que voulait-elle dire par là... ? Elle n’en avait aucune idée et clairement, elle ne voulait rien savoir, elle ne le ferait pas, point final. “N-..” elle n’avait même pas eu le temps de refuser qu’elle s’était faite projetée contre le mur par une force invisible. L’étau se resserrant autour de sa gorge, Isabel se faisait étrangler par cette même force.
“Assez. Maintenant tu vas m’écouter bien sagement car tes parents ne t’ont apparemment jamais dit toute la vérité.” l’observant et se débattant pour récupérer de l’air, elle n’avait pas le choix que de l’écouter.
“Tu ne t’es jamais posé de questions ? Pourquoi vous aviez quitté la Russie ? Pourquoi tes parents t’ont sévèrement entraîné en apprenant ton potentiel ? Parce qu’ils nous fuyaient et nous devaient des dettes. Quelle meilleure dette à éponger en offrant une apprentie sorcière talentueuse à une organisation de sorcier ? En d’autres termes, ils t’ont vendu pour sauver leurs peaux. Toi. Leur fille. Maintenant nous jugeons qu'ils en savent un peu trop.” révèle-t-elle, froidement. Non... impossible... ils ne lui feraient pas ça... jamais... jamais. Tout ceci n’était qu’un mensonge inventé de toute pièce pour mieux la dompter... c’était certain. Contradictoirement à son refus en bloc d’accepter cette histoire qui venait de lui être raconté, des larmes perlaient le long de ses joues. “Tu mens...” à ces mots, Kayle avait relâché la pression d’un air convaincu.
“Ah oui ? Alors dans ce cas pourquoi ces larmes ? N’y crois-tu pas finalement au fond de toi-même ?” la cheffe du MCD avait fait mouche, il était inutile selon elle d’en rajouter davantage. Ne lui répondant pas, Isabel serrait ses poings de dégoût. Elle détestait l’admettre mais toute cette histoire ne pouvait pas être inventé... tout coïncidait, tout. D’un déchirement au cœur était-elle victime, elle se sentait davantage meurtrie, blessée et naïve... on lui avait menti toute sa vie et toute son existence avait-elle voulu protéger deux géniteurs qui l’avaient vendu. Aveuglé par la rage, Isabel avait balancé ses bras vers Kayle utilisant l’effet de photophorèse afin de lui expédier un rayon lumineux puissant. Uniquement des étincelles étaient apparues de ses mains.
“As-tu oublié le sortilège t’empêchant de retourner ta magie contre moi ? Épargne-moi tes réactions puériles et va donc noyer ta peine autrement.” dit-elle, s’en allant sans un regard pour la Russe. Sale garce... un jour ou l’autre, elle se vengerait, elle le jurait sur tout ce qu’elle avait de plus cher à ses yeux...
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25 Décembre 2022,
Novgorod, Russie
08:00.
Novgorod, Russie
08:00.
Novgorod, là où tout avait commencé, son premier souffle de vie, ses premiers pas et ses premiers mots y furent. Novgorod, là où le début de la fin de son calvaire démarrait. Isabel n’était pas fière de ce qu’elle s’apprêtait à faire... mais force était-il de constater que des têtes devaient tomber si elle voulait un jour retrouver sa liberté. Quel meilleur commencement... ? Quel meilleur commencement était-il d’abattre ceux qui étaient en premier lieu, les principaux responsables de sa vie foutue en lambeau ? Alors certes était-ce grâce à eux qu’elle voyait le jour, néanmoins, cela leur permettait-il pour autant d’user de sa vie comme bon leur semblait ? Isabel y avait réfléchi. Longuement réfléchi. Et plusieurs questions ne cessaient de lui revenir à l’esprit. Quel genre de parent vendrait son enfant ? Quel genre de parent mentirait ? Quel genre de parent accepterait de faire vivre un enfer à son sang ? Et la seule réponse qu’elle trouvait était unanime. Des parents indignes. Des géniteurs. Des gens qui ne méritaient pas la vie. Ces parents en question avaient commis une erreur, laissant cette enfant devenir une tueuse en série, assassinant et enlevant des vies presque sans la moindre émotion. Presque. Il n’avait jamais été facile pour Isabel de tuer sans rien ressentir mais elle avait fini par s’habituer malgré la culpabilité certaine qui la rongeait. Aujourd’hui était Noël, cela faisait dix ans qu’elle n’avait plus revu ses parents et maintenant s’apprêtait-elle à être le cadeau sous leur sapin en ce matin. L’air absente, confortablement installé sur le canapé du salon de ses géniteurs et surtout fusil d’assaut en main, Isabel attendait sagement qu’ils débarquent. Elle n’avait pas eu de mal à s’infiltrer sans bruit dans cette maison qu’elle connaissait étrangement si bien, hélas. Lorsque ce qui semblait être son père avait descendu les escaliers, celui-ci avait immédiatement été visé par l’arme de sa fille d’un geste nonchalant. “Appelle ta femme.” ordonne-t-elle, sans même un regard pour lui. Isabel voulait vite en finir sinon, elle allait commencer à hésiter, elle se connaissait. Son père n’avait pas bougé pendant près de trente secondes, visiblement surpris de revoir cette être qu’il avait abandonné lâchement. “Isab-…" il n’eût pas le temps de terminer sa phrase qu’une balle était venu frôler sa joue. Évidemment, elle était en silencieuse. “Ne suis-je pas assez clair ?” et enfin, porte-t-elle ses yeux émeraudes sur cet homme qui la répugnait tant en cet instant-même. Les yeux soudainement jonchés d’effroi, son géniteur avait obéi. Lorsque sa mère avait débarqué, elle aussi fût surprise, sursautant.
“Joyeux Noël.” blague-t-elle, sarcastiquement. Tel une réelle psychopathe, Isabel vint afficher un rictus clairement prononcé pour signifier sa fausse joie. Devant la non-réaction de ses géniteurs, mime-t-elle de la déception.
“Quoi ? Vous n’êtes pas content de me voir ? Je comprends pas.” et à ces mots elle vint s’affaler sur le canapé davantage. S'avançant doucement les mains en l’air comme pour signifier qu’il n’était pas un danger, son père prenait la température.
“Écoute-moi ma fille, nous pouvons tout t’expli-…" encore une fois n’eût-il pas le temps de terminer qu’il s’était fait couper. “Pose-moi tes fesses sur ce fauteuil et épargne moi tes salades.” rapidement pointe-t-elle ensuite son arme sur sa génitrice.
“Pareil pour toi.” conclut-elle, d’un regard noir. Il n’y avait rien a expliqué, rien. Laissant son père et sa mère s’installer en les observant d’un air clairement dégoûté, elle eut un rire nerveux. “Nous pouvons tout t’expliquer. C’est tout ? Tu n’as pas trouvé mieux ?” ses mains et ses doigts tremblaient, pas de peur mais de tristesse.
“J’ai donné ma vie en pensant vous protéger, j’ai sacrifié mon humanité pour votre peau, dix ans de ma vie... tout ça pour ça... ?” naturellement, des larmes commençaient à perler sur ses joues... elle n’avait pas pu se retenir de faire semblant davantage.
“Maintenant, il est temps de payer pour vos erreurs.” à ces mots, commence-t-elle à viser son père qui semblait avoir finalement accepté son sort.
“Quoi que tu fasses ma fille, sache que nous ne regrettons en rien nos choix.” avoue-t-il, sincèrement. Elle ne s’attendait à rien mais avait été quand même déçue. Son cœur était en miette. Son index maintenu sur la gâchette tremblait, comme lorsqu’elle avait dû tuer pour la première fois. “Au moins, m'auras-tu dit la vérité une fois dans ta vie.” et sans plus tarder, presse-t-elle la détente, expédiant une balle dans le crâne de son géniteur. Changeant de cible, elle n’avait pas laissé le temps à sa mère de se justifier qu’elle avait répété le même mouvement, l’abattant froidement. Balance-t-elle ensuite son arme au sol à cause de ses mains rendues faibles par la faute de ses tremblements qui s’intensifiaient. Un énorme cri de rage et de détresse s’était ensuite échappé de ses lèvres, provenant du plus profond de son âme. Était-elle devenue un monstre elle-aussi ? Avait-elle eu raison de faire ce qu’elle avait fait ? Elle ne savait pas et ne saurait certainement jamais.
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17 Septembre 2024,
Manhattan - United States.
22:00.
Manhattan - United States.
22:00.
Deux années. Deux années s’étaient écoulées depuis que la Russe avait commis ce qui semblait être l’irréparable. Deux années que ses actes ne cessaient de lui trotter dans la tête et revenaient la hanter tardivement le soir comme pour tourner encore plus le couteau dans la plaie. L’ironie était qu’aujourd’hui était le jour de son anniversaire, elle venait d’avoir ses vingt huit ans et pour “fêter” ceux-ci, n’avait-elle rien trouvé de mieux que de boire sans jamais s’arrêter pour noyer ses douleurs dans son appartement à New York. Quelle vie de merde. Finalement, n’avait-elle été heureuse que lorsqu’elle était bambin. Vingt ans. Vingt ans qu’elle possède le statut d’esclave, soit pour le compte de ses parents, soit pour le compte de la MCD. Cela allait-il s’arrêter un jour ? Elle ne le savait pas. Le seul moyen rapide pour elle de mettre fin à ses souffrances était probablement de se tirer une balle dans le coeur pour qu’il cesse de battre à tout jamais. Néanmoins, elle trouvait cela trop facile… beaucoup trop facile car, jamais ses détracteurs n’auraient assez payé pour ce qu’ils lui ont fait et, souhaitait-elle par ce qu’elle avait de plus chère au monde être à l’origine de la fin de cette organisation de malheur. Elle continuait de tuer pour leur compte mais avait-elle le pressentiment que son cauchemar allait enfin être terminé. Il restait uniquement à savoir qui allait rester debout à la fin de cette histoire, elle ou la Mystic Compagnie Development ?