Les nuages sont noirs. Un grondement d'orage se fait entendre.
Il faut que je garde mon calme. D'ordinaire, je maîtrise plutôt bien mon lien météorologique, mais j'oublie bien vite que celui-ci réagit à mes émotions et là… Je bouillonne de colère. J'en suis même obligé à porter des lunettes de soleil afin de cacher mes yeux qui étaient d'un blanc livide. Je sais pertinemment que le contact de mon pouvoir avec l'environnement sera rompu lorsque je serais à l'intérieur de l'université. Cependant, c'est comme si toute l'atmosphère avait un fort ressentiment négatif envers une seule personne. Je suis au pas de la porte de Columbia, j'inspire et j'expire pour me donner du courage et également pour me détendre un tant soit peu. Je ne le connaissais même pas, mais les retours que j'en ai eu font en sorte que je ne l'aime déjà pas. Je monte les escaliers et j'entre finalement dans l'établissement ou Jean faisait ses études. Je fermais la porte en retirant mes lunettes, fermant les paupières quelques secondes avant que la couleur blanchâtre de mes pupilles ne disparaisse. Ce type… Je vais vraiment me le faire. Pour sûr, je ne vais pas le tuer. Je ne suis pas une psychopathe, mais je vais lui apprendre comment être enseignant.
Ce type… C'était un certain professeur. Celui dont Jean m'avait parlé.
La jeune Grey était venue me voir. Je sentais bien qu'elle avait un certain mal-être. Elle m'a expliqué qu'il y avait eu une manifestation anti-mutante qui avait dérapé. Un jeune-homme aux facultés électriques avait perdu son calme et s'était mis à vouloir s'attaquer à un maître de l'université. Par réflexe de bienfaisance et surtout par instinct de secouriste, la télékinesiste l'avait protégé et lui avait même sauvé la vie. Bien sûr, quelqu'un de normalement constitué aurait remercié la rouquine pour son acte salvateur et il aurait également loué le ciel d'avoir eu sa misérable existence sauvée par une élève éprise de bonnes intentions. QUE NENI ! Quelques semaines après, le professeur a appelé la douce Grey dans son bureau. Il l'a incendié, mise plus basse que terre et lui a interdit toute utilisation de ses capacités. Quand elle m'en a parlé, elle en tremblait et elle pleurait. Elle se demandait même si c’était de sa faute ! Elle n'a pas voulu rétorquer et ne voulait pas plus de problèmes. C'est une élève discrète et qui a toujours eu une belle mentalité lorsque je lui enseignais. Alors, elle n'a pas à se faire hurler dessus alors qu'elle venait objectivement de faire une bonne action. Je me trouve devant l'accueil de l'université. Je me racle la gorge pour interpeller une demoiselle qui était au téléphone.
« Oh… Un instant ne quittez pas. » Elle baisse le téléphone et m'observe avec un sourire. « Bonjour, je peux vous aider ? »
« Vous pouvez. » Moi, je ne souriais pas. Mon visage était fermé. « Je dois parler avec monsieur Richards. Auriez-vous l’amabilité de me dire où je pourrais le trouver ? »
« Vous êtes ? »
« Madame Munroe. J'ai rendez-vous avec lui. »
« Ah oui tout à fait ! Il est dans son bureau et il est disponible. »
« En vous remerciant… »
La dame m'indique ensuite là où je dois passer et je continue mon bout de chemin. Un enseignant de statistique hein… À combien il estime les probabilités que je lui mette mon poing dans la gueule ? Ce n'est pas bien de penser ainsi. Je dois garder les idées claires. Après tout, je représente l'institut Xavier à l'extérieur et je ne voudrais pas faire tache avec un mauvais comportement en dehors du manoir. Cela lui donnerait raison et je ne voudrais pas nuire à l'image du directeur ni à mes collègues d'ailleurs. Je devrais donc être ferme et non pas hystérique. Précis dans mes revendications et ne pas me laisser dicter par mes émotions. J'arrive donc vers le fameux bureau. J'hésitais à rentrer sans même frapper, mais je ne dois pas tomber dans le piège. Du coup, j'effectue deux coups de phalanges avec l'aide de mon index. Je patiente et une voix plutôt rocailleuse m'autorise à entrer. J'ouvre et c'est là que je pouvais l’observer. Il est assis et est en train de pianoter sur son clavier d’ordinateur.
Une barbe mal entretenue, une chevelure désordonnée et un regard de poisson mort.
Et bien… Cela promet. Il ne suffisait pas qu'il ait la réputation d'avoir mauvais caractère, il fallait en plus qu'il soit négligé. Oh, il aura beau avoir un tempérament de chien enragé avec la pauvre Jean qui ne peut pas véritablement se défendre étant donné sa position d'élève, cela sera une autre paire de manche avec moi. Ce genre de cabot moi, je vais le dresser. À la fin de l'entretien il va même lever la patte.
Quel temps de merde… J'étais assis sur mon fauteuil et j'avais le regard vague vers la fenêtre qui me montrait le ciel de New York est, je dois dire que d'avoir trois ans après le bac pour préparer un diplôme d'ingénieur, cinq pour préparer un master science de l'océan et huit ans en science de l'atmosphère et du climat ne suffisent pas à certains pour correctement faire leur travail. La météo d'aujourd'hui annonçait du froid, mais un temps ensoleillé. Je me demande parfois si l'état américain ne devrait pas enlever un pourcentage de salaire à tout météorologue qui se tromperait sur le temps. Bon, au pire, ce n'est pas mon problème. Mes yeux dévient sur mon écran d'ordinateur et je continuais à pianoter mon prochain cours que je présenterais sur diaporama. C'est alors que je sursaute légèrement lorsque mon téléphone fixe sonna. Moi qui espérais être tranquille un moment, il faut croire que c'est raté. Je décroche alors en calant le téléphone entre mon cou et mon oreille et en continuant de taper sur mon clavier.
« Oui ? »
« Reed, il y a ton rendez-vous qui arrive. »
« Un rendez-vous ? » Je m'arrête de tapoter sur mon clavier et je me concentre sur la conversation. « Mais je n'ai aucun rendez… »
« C'est madame Munroe qui arrive, tu sais le mail que je t'ai transféré ? »
Oh nooooooon, c’est vraiment un temps de merde aujourd’hui. J’avais complétement zappé qu’elle venait à cette heure-ci. Pour remettre les choses dans le contexte, il s’agit d’une enseignante en géographie qui n’avait pas apprécié que je reprenne son ancienne élève, à savoir la tête de pioche de Jean Grey et qui avait envoyé un écrit à l’adresse de l’université Columbia afin de prendre rendez-vous soit avec moi ou soit avec la présidence ou la direction pour en discuter. Alors déjà : elle est professeur de géographie et pas d’histoire-géographie ? Cela prouve à quel point elle fait son travail qu’à moitié et ensuite pourquoi elle vient monter sur ses grands chevaux pour une élève dont elle n’a même plus la responsabilité ? L’institut Xavier, une école pour jeunes surdoués… Je n’avais jamais vraiment entendu parler de cet endroit jusqu’à maintenant et je n’avais pas consulté le dossier de mademoiselle Grey, je ne trouvais pas que cela était utile. J’ai simplement accepté ce rendez-vous pour pas que cette Munroe vienne se plaindre à ma hiérarchie. Fais chier, quelqu’un vient de toquer à ma porte.
« Entrez. »
La porte s'ouvre et c'est là que je l'aperçois. Elle est jeune, très jeune pour une enseignante et surtout, il y a un truc qui cloche. La couleur des cheveux des êtres humains est due aux unités pigmentaires épidermiques issues du follicule pileux. Il existe également une biosynthèse de la mélanine et un transfert ultérieur du mélanocyte aux kératinocytes du bulbe pileux. Certaines études démontrent que le mélanocyte folliculaire est plus sensible aux effets du vieillissement que le mélanocyte épidermique. Par contre, il y a un hic. Comme je l'ai dit, elle n'a pas l'air d'être vieille. Est-ce qu'elle doit donc souffrir d'une canitie précoce ? Le stress et l'anxiété peuvent jouer sur ce phénomène. Pas étonnant que sa tignasse blanchisse au moindre petit problème mineur. Elle est venue à moi pour perdre son temps, soit, je lui serais simplement reconnaissant de ne pas me faire perdre le mien. Elle vient alors s'asseoir sur le siège qui était en face de moi. Son regard est aussi aiguisé qu'une lame de rasoir. Super… Elle n'est pas venue enfiler des perles à ce que je constate.
« Je vous propose un café ? »
Moi, il me faudrait une bière, mais je n'ai pas le droit de boire à mon travail n'est-ce pas ? Je n'ai même pas fait chauffer la cafetière à la salle des enseignants. Si elle dit « oui », ce sera l'occasion de m'éclipser un instant pour réfléchir à ce que je pourrais lui dire. Un dernier regard à la fenêtre et le temps s'était éclairci, le soleil avait même pointé le bout de son nez. Cela n'empêche pas que ce soit toujours un temps de merde
Accueil
