Mauvaise surprise hier soir dans ma boîte mail du boulot. J'avais été étonné, tout d'abord, en voyant le nom de l'expéditeur. Je ne travaillais que rarement avec Célestine Orchent et elle n'était pas du genre à me contacter sans raison valable. Le titre du mail - Signalement de demande de sanction - n'augurait rien de bon. Enfin, le contenu du mail était pour le moins inattendu et n'était pas fait pour me mettre de bonne humeur.
Elle m'informait de sa demande de mise à pied envers Emy Carthew. Allons bon ! Pour insubordination ? Mais qu'est-ce qu'elle avait foutu ? La réponse se trouvait dans les enregistrements de l'interrogatoire d'un mutant tueur en série et elle ne me plut pas du tout. Qu'est-ce qui lui avait pris de remettre en question l'autorité de sa supérieure devant un prisonnier ? Ce n'était vraiment pas une bonne idée de se mettre à dos l'agent Orchent…
Avec mon niveau d'accréditation, j'avais accès aux emplois du temps et localisations des agents inférieurs. Il ne me fallut qu'une rapide recherche dans la base de données pour voir qu'Emy travaillait ce mardi dans les bureaux de Manhattan. La demande de mise à pied n'était donc pas encore remontée jusqu'à Fury, ou alors il n'en avait pas tenu compte. En tout cas moi, je comptais bien demander des explications à mon ancienne apprentie.
Je la trouvai dans une salle informatique, occupée à taper sur le clavier d'un ordinateur. Peut-être écrivait-elle un rapport, peut-être faisait-elle des recherches ou de la surveillance. Peu m'importait si je la dérangeais en plein travail. D'autres agents étaient présents dans la pièce, concentrés sur leurs écrans. L'un d'eux pourtant leva le nez, m'adressa un signe de tête respectueux et me salua.
« Bonjour agent Barton. - Agent Hobbs. »
Mon nom et la voix firent lever d'autres nez, mais je n'étais pas d'humeur à discuter avec qui que ce soit. Je me dirigeai droit vers le poste de travail d'Emy et posai sans délicatesse mon téléphone sur sa table. Sur ledit téléphone était affiché le fameux mail d'Orchent. Je le désignai du doigt et avant même qu'elle n'ait eu le temps de le consulter, je lui demandai avec une colère tout juste contenue mais qu'elle devait de toute façon ressentir :
24 septembre 2024, Bureaux du S.H.I.E.L.D, Manhattan, New-York
Emy n’arrivait pas à coire que Célestine Orchent soit la soeur de Lucy Orchent. Toutes les deux ne se ressemblaient pas du tout, mais une chose était sûre dans cette histoire : Emy n’aimait pas du tout Célestine. L’empathie d’Emy en avait prit un coup avec cette femme. Et encore, elle n’avait pas levé les barrières mentales que l’agent maintenait autour d’elle. Déjà parce qu’il y avait Luke Hunt dans la même pièce qu’elle et qu’il était un excellent émetteur. D’autant qu’elle le sache, Emy n’avait jamais sentit Hunt qui cachait ses émotions. Est-ce qu’il en avait de besoin ?
Cependant, Emy savait parfaitement qu’elle avait sans doute été un peu trop loin avec Célestine Orchent... Peut-être qu’elle aurait du rester à sa place, mais ce n’était pas le cas et sans doute allait-il y avoir des conséquences dès le lendemain. Aussi bizarrement que cela puisse paraitre, Emy était prête à faire face à ses actes, sans pour autant cacher qu’elle détestait Célestine. Peut-être que quelqu’un allait faire quelque chose faire à cette femme qui ne semblait être que froideur. Emy s’était endormie sur cette pensée. Réveillée de bonne heure, elle avait l’intention de passer sa journée dans les bureaux de Manhattan pour faire quelques recherches sur les soeurs Orchent. Du moins, aussi loin qu’elle pourrait le faire avec son niveau d’accréditation. Elle n’était pas certaine de trouver grand chose, mais qu’est-ce qu’elle avait à perdre ? Emy prit un café avant de partir pour les bureaux. Elle n’avait pas eu de convocation dans les bureaux des chefs ? Est-ce que son ressentit concernant Célestine était faux ? Peut-être qu’elle s’était trompée ? Emy fronça les sourcils : D’après ce qu’elle avait capté dans ses sentiments, ce n’était pas le genre de personne à s’arrêter. Orchent avait du être vexer dans son amour propre et les conséquences allaient être terrible. Arrivée dans les bureaux, Emy se trouvait un endroit un peu en retrait, mais toujours entourée de personnes. Tout le monde avait un petit quelque chose à faire aussi, ils ne virent pas tout de suite la jeune femme. On vient la saluer que bien plus tard, lui demandant si elle pouvait faire une recherche pour une prochaine mission. Puisqu’elle n’avait rien à faire, Emy accepta. Cela lui ferait penser à autre chose.
La matinée était déjà bien avancé lorsqu’elle sentit une vague de colère entrée dans le bureau. Quelqu’un était vraiment fâché et elle n’osa pas lever les yeux de son écran de peur que ce ne soit pour elle. Les pas se firent entendre et quelqu’un salua l’agent Barton. Emy se raidit sur sa chaise et elle sentit tout de suite le changement d’ambiance. Calmement, elle continua ce qu’elle était en train de faire, mais le téléphone de Clint vient volé sur son bureau avant qu’elle n’ai le temps de s’y attendre. Elle sursauta légèrement, eut tout juste le temps de lire l’expéditeur et les mots, la colère de Clint lui parvenèrent d’un coup. Heureusement qu’elle avait sa barrière mentale parce que sinon elle se serait prise la colère en pleine tête ! Doucement, calmement, elle se tourna doucement vers Clint, essayant de ne pas faire monter la pression encore plus.
“Je peux t’expliquer...”
Elle n’aimait pas être le centre de l’attention, mais actuellement, c’était ce qui se passait. L’agent ne pouvait pas demander à son supérieur d’aller dans une autre salle s’il n’en avait pas envie. Elle joua nerveusement avec ses mains et lui demanda :
“C’est un mail de l’agent Orchent, c’est ça ?”
Emy baissa les yeux sur ses mains. Clint, c’était celui qui l’avait entrainé et surtout, c’était celui qui lui avait fait confiance pour sa première mission après qu’elle ai perdu pied. Elle avait l’impression qu’elle venait de le décevoir et c’était sans doute le cas. Il fallait qu’il comprenne pourquoi elle avait réagit comme ça. Mais il y avait plusieurs choses qui faisaient qu’il pouvait être en colère. Est-ce qu’il savait pour Morbius ? Et tant d’autres choses ? Elle lui dit presque timidement :
“J’ai dis ce que je pensais et ça n’a pas plut à l’agent Orchent. Peut-être que j’ai été trop loin.”
Mon regard était dur, mes lèvres pincées, mes sourcils froncés. Mes muscles étaient raides, tendus. Il n'y avait clairement pas besoin d'être empathe pour deviner que j'étais en colère, et pour ceux qui auraient eu des doutes, il leur suffit d'entendre ma question pour ne plus en avoir. Emy se tourna vers moi doucement, comme si le moindre geste brusque pouvait empirer mon énervement, et m'annonça timidement qu'elle pouvait m'expliquer. Ben elle avait intérêt, oui !
Je lui laissai le temps de lire le mail tout en soupirant, et ne répondis rien à sa question puisque la réponse était évidente. Evidemment que c'était un mail de l'agent Orchent, c'était marqué dessus bon sang ! Emy baissa les yeux sur ses mains qu'elle triturait fébrilement. J'en avais rien à foutre qu'elle soit nerveuse, elle avait fait une belle connerie et il allait falloir qu'elle ait une bonne explication si elle voulait pas se prendre une soufflante en public.
Eh ben son explication était loin d'être bonne ! A l'entendre on aurait cru qu'Orchent avait exagéré en prenant mal sa réaction. Merde, j'aurais été à sa place j'aurais sérieusement engueulé Emy, peut-être pas devant le prisonnier, mais elle se serait fait franchement remonter les bretelles juste après l'interrogatoire. C'était peut-être arrivé d'ailleurs, je n'avais eu accès qu'à l'enregistrement de l'interrogatoire, pas au potentiel échange entre les deux agents après. En entendant la réponse d'Emy, je haussai les sourcils et me penchai légèrement vers elle tout en répétant d'un ton incrédule :
« Peut-être que tu as été trop loin ? »
Je répétai la phrase une seconde fois en augmentant un peu le volume sonore, avant de taper du poing sur son bureau et de m'énerver un peu plus.
« Peut-être que tu as été trop loin ? PUTAIN Emy, tu as délibérément sapé l'autorité de ta supérieure devant un prisonnier ! Qu'est-ce qui t'a pris bon sang ?! »
Il n'y avait déjà pas beaucoup de bruit dans la salle avant que j'arrive, mais à présent il y régnait un silence total. Plus aucun agent ne pianotait sur son clavier, ils regardaient tous, plus ou moins discrètement, dans notre direction. J'en avais conscience, mais je ne leur accordai pas un regard. Toute mon attention était focalisée sur Emy et sur sa réponse à venir. Elle avait intérêt d'être meilleure que la précédente.
24 septembre 2024, Bureaux du S.H.I.E.L.D, Manhattan, New-York
Emy savait très bien que si Clint était dans cette salle, c’était parce qu’elle avait fait une bêtise et la bêtise s’appelait Orchent, Célestine. Pourquoi est-ce qu’on lui avait demandé de rester avec elle ? Dès le début, elle ne l’avait pas aimé. Mais il est vrai qu’elle n’aurait jamais du aller aussi loin. Alors que Emy voit le mail sur le téléphone de Clint, elle sait déjà qu’elle va passer un mauvais quart d’heures. Les autres autour d’elle ne font qu’écouter ce qui se passent. Elle détestait être au centre de l’attention, mais elle n’allait pas demander à son supérieur de sortir de la pièce pour se faire disputer... Non, elle allait affronter les choses comme il se doit. Lorsqu’il tapa du poing sur la table, Emy sursauta légèrement, mais se reprit assez rapidement. Ne pas montrer ses faiblesses. C’était toujours ce qu’on devait faire devant une personne en colère... Elle laissa Clint lui dire qu’elle avait délibérément sapé l’autorité d’une supérieure devant un prisonnier. Qu’est-ce qu’il lui avait prit ? Emy releva les yeux sur Clint pour lui répondre. Ne pas chercher à se cacher.
“Je ne sais pas ce qu’il m’a prit d’accord ? Peut-être que son visage ne me revenait pas ? Tu l’as déjà entendu parler ? Sérieusement Clint, il fallait que je reste sans rien dire ? Le prisonnier est là grâce à moi et moi, je me retrouve devant la personne la plus froide du monde et qui me prend pour un larbin.”
Emy commençait à s’emporter aussi parce qu’elle ne supportait pas qu’on puisse la prendre de haut. D’accord, elle n’était qu’un agent de niveau 5, mais ce n’était pas une raison pour parler avec condécendance si ? Clint ne l’avait jamais fait avec elle ni même Aaron. Pourquoi est-ce que Célestine Orchent le faisait ? Est-ce qu’elle était comme ça avec tout le monde ? Emy n’allait pas poser la question à Clint, ça l’énerverait encore plus. La jeune femme soupira avant de lui dire d’un ton plus calme :
“Ecoute, j’ai merdé, j’en suis désolée. S’il le faut, j’enverrais une lettre à l’agent Orchent pour lui demander un rendez vous pour m’excuser... Mais je n’en pense pas moins Clint.”
Emy sursauta légèrement quand je tapai du poing sur son bureau mais elle soutint mon regard pour me répondre. A l'évidence, le courant n'était pas passé entre les deux femmes. Ca n'avait rien d'étonnant : Emy était une empathe dont les pouvoirs la rendaient souvent à fleur de peau et Orchent était son opposée, une personne froide et factuelle qui ne montrait quasiment aucune émotion, à tel point qu'on pouvait se demander si elle était capable d'en éprouver. Mais si ses manières étaient désagréables, ses méthodes étaient efficaces.
Je serrai les mâchoires pour me retenir de répondre immédiatement. Je ne voulais pas que mes mots dépassent mes pensées et que cette mise au point se transforme en humiliation publique. C'était pas le but. Emy avait été formée par moi à son arrivée au S.H.I.E.L.D., c'était aussi moi qui l'avait réintégrée sur le terrain après sa période à vide. Je l'aimais bien et je ne voulais pas qu'elle foute sa carrière en l'air pour une connerie. Elle avait juste besoin d'un petit recadrage.
Après avoir un peu durci le ton, elle soupira pour maîtriser son propre agacement et reprendre d'une voix plus calme. S'excuser auprès de l'agent Orchent... Pourquoi pas, mais si Emy n'y croyait pas elle-même, ça ne servirait à rien. Ca pourrait même empirer la situation. Elle n'avait pas l'air de comprendre en quoi son comportement était un problème, même si elle reconnaissait avoir « merdé ».
« Je m'en fous de ce que tu penses d'elle. On te demande pas de l'apprécier ou de faire des pyjamas party avec elle. Mais c'est ta supérieure et quand elle dirige une opération tu dois suivre ses ordres et fermer ta gueule, que ça te plaise ou non. T'es une agent de terrain, il faut que tes chefs d'équipe puissent te faire confiance et être sûrs qu'ils peuvent compter sur toi si jamais ça merde. »
C'était mon cas : je connaissais ses capacités et ses limites, au cœur de l'action et de l'horreur à Merna elle n'avait pas flanché, même si elle s'était effondrée après. Ce ne serait pas le cas de l'agent Orchent, et je ne pourrais pas lui en vouloir : si une agente sapait son autorité sur un interrogatoire basique, elle ne prendrait certainement pas le risque de la recruter dans son équipe pour une mission dangereuse sur le terrain.
« Les excuses ça sert à rien si c'est pas sincère. Par contre, un mail pour lui dire que tu reconnais ne pas avoir eu un comportement adapté envers elle, ça serait pas de trop. »
Les nouvelles allaient vite dans l'agence, des réputations pouvaient vite se forger ou se briser, et être dans le colimateur d'un agent de niveau 7 n'était pas un bon plan quand on voulait faire avancer sa carrière.
24 septembre 2024, Bureaux du S.H.I.E.L.D, Manhattan, New-York
Emy n’avait jamais vu Clint être autant en colère, du moins contre elle. Elle pouvait comprendre qu’il soit dans cet état, parce qu’elle était l’une de ses anciennes élèves. Il avait été là pour l’aider à reprendre pied dans ce monde qu’elle ne connaissait plus depuis qu’elle avait fait cette erreur, tuer son frère... Entre Célestine et Emy, le courant n’était pas passée et c’était une évidance. Manque de chance, Emy avait ressentit tout ce que ressentait sa supérieure. Bien sûr, elle n’aurait pas du réagir comme ça, mais Emy s’était aussi promis de ne plus se laisser monter sur les pieds. Mais elle n’aurait pas du réagir comme ça. Clint avait raison. Le voir comme ça, ça mettait un coup dans le coeur quand même. Elle avait l’impression de le décevoir... C’était peut-être le cas. Emy s’agaça puis se calma. Ce n’était pas la peine d’ennivrer les choses en s’énervant. Clint lui dit alors qu’il s’en foutait de ce qu’elle pensait de Célestine, on ne lui demandait pas non plus de l’apprécier ou de faire des pyjamas party. Mais c’était sa supérieure et elle devait se taire et suivre les ordres... Emy regardait toujours Clint. Elle savait qu’il avait raison, mais quelque chose chez Célestine l’insitait à être un peu rebelle. Mais ça, elle se gardait bien de le dire. Elle se contenta de hocher doucement la tête. Il avait raison. Emy devait faire attention à ses limites et ses capacités. Il fallait qu’elle arrête de chercher à être là pour tout le monde. Penser aussi à elle...
Emy savait que ses collègues écoutaient la conversation depuis le début et qu’elle allait sans doute avoir droit à quelques blagues par la suite. Ce n’était pas grave et ce ne sera pas voler. Elle avait sappé l’autorité d’une personne qui lui était supérieure, il pourrait y avoir des conséquences. Emy n’y avait pas pensé sur le coup, mais maintenant, elle se doutait bien qu’elle était dans le colimateur des grands chefs... Si elle ne l’était pas encore, cela n’allait pas tarder parce que les discussions et les différentes disputes entre les agents se savaient assez rapidement... Emy baissa légèrement les yeux lorsque Clint lui dit que les excuses ne servaient à rien si cela n’était pas sincère. Par contre, un mail pour lui dire qu’elle avait eu tord de s’être comporter de la sorte, cela ne serait pas de trop. L’agent de niveau 5 releva les yeux et dit à Clint :
“D’accord, je veux bien le faire.”
Ce n’était pas de gâter et de coeur, mais elle ne pouvait pas rester comme ça, en sachant que son avenir au sein du S.H.I.E.L.D pouvait se jouer sur ce genre de choses.
“Je vais le faire dès maintenant... Et je tenais à m’excuser de mon comportement auprès de toi. Parce que je sais que tu es déçu et blessé. Je ne vais plus le faire. Je vais rester à ma place.”
Quand Emy capitula et annonça qu'elle acceptait d'envoyer un mail à l'agent Orchent pour tenter de rattraper sa connerie, j'acquiesçai et désignai l'écran de l'ordinateur devant lequel elle se tenait. Puis, pendant qu'elle commençait à pianoter sur le clavier, je me tournai vers le reste de la salle et apostrophai les agents qui nous écoutaient et regardaient tous attentivement.
« La pause est finie, agents ! Remettez-vous au boulot ! »
Certains sursautèrent, d'autres eurent l'air un peu déçus, d'autres gênés, mais en tout cas ils ne se firent pas prier. J'avais suffisamment de galons et d'autorité pour qu'ils m'écoutent, et surtout pour qu'ils ne prennent pas le risque de m'énerver davantage en continuant à jouer les curieux. Pour ma part, je me radoucis quand Emy s'excusa pour m'avoir déçu et blessé.
Je savais que je pouvais me montrer dur avec mes recrues, exigeant le meilleur d'eux-mêmes, mais je le faisais pour leur bien, pour leur sécurité et leur épanouissement tant personnel que professionnel, même si c'était pas toujours évident au premier abord. J'attrapai par son dossier une chaise de bureau au poste de travail d'à côté et la fis rouler près d'Emy avant de m'asseoir dessus et de reprendre la parole, d'une voix plus basse et plus douce :
« Ecoute Emy… Ca m'fait pas plaisir de t'remonter les bretelles comme ça… Et j'le fais pas pour te faire chier… Mais tu viens tout juste de t'remettre sur les rails, c'est pas l'moment de t'embrouiller avec un des contrôleurs du train… Tu comprends c'que j'veux dire ? Et pourquoi j'te dis ça ? »
Wow, voilà que je me mettais à causer en métaphores ! Ce que j'essayais de lui faire passer comme message, un peu maladroitement, c'était que je tenais à elle, et que même si elle n'était plus sous mon commandement direct, je continuais à veiller sur elle. Si c'était peut-être pas clair dans mes mots, ça le serait sûrement plus dans mes sentiments : Emy était empathe, elle devait bien ressentir l'inquiétude et l'attachement que j'avais pour elle.
24 septembre 2024, Bureaux du S.H.I.E.L.D, Manhattan, New-York
Comme tout le monde, Emy n’aimait pas se faire remonter les bretelles, mais parfois c’était nécessaire. Elle savait bien qu’elle avait fait des conneries au cours des dernières semaines... Il fallait qu’elle se calme et se rattrape. Alors écrire un mail à l’agent Orchent, ce n’était pas grand chose. Elle aurait pu le faire en personne, mais cela lui évitait de la revoir, du moins pour le moment. Elle se gardait bien de le dire à Clint. Ce n’était pas le moment de se prendre la tête. Emy se tourna vers son ordinateur et commença à tapoter sur le clavier. Elle vit ses coéquipiers sursautés quand Clint demanda à tout le monde de se remettre au boulot. Elle n’avait jamais aimé être le centre du monde. Elle savait bien que les ragots allaient être au coeur de toutes les discussions au cours de la journée, mais tant pis. Tous les agents retournèrent à leur bureau parce que Clint, il avait assez d’autorité pour qu’ils le fassent. Emy eut un petit sourire tout en continuant de taper son mail.
Pendant qu’elle tapait sur son clavier, elle sentit que Clint avait attrapé une chaise et la tirait vers le bureau d’Emy. Cette dernière s’arrêta de taper sur son clavier et se tourna doucement vers son instructeur qui se mit à lui parler d’une voix basse et plus douce. Il lui dit que cela ne lui faisait pas plaisir de lui remonter les bretelles et qu’il ne le faisait pas pour l’embêter. Mais elle venait tout juste de se remettre sur les rails et que c’était pas le moment qu’elle s’embrouille avec l’un des controleurs du train. Il lui demanda alors si elle comprenait ce qu’il voulait dire et pourquoi il lui disait ça ? Emy hocha doucement la tête. Clint n’était peut-être pas habile avec les mots, mais les sentiments, personne ne pouvait les cacher, surtout pas à quelqu’un comme Emy. Elle savait que Clint tenait à elle et qu’il était inquiet pour elle. Emy posa doucement une main sur le bras de son ancien instructeur et lui dit :
“J’ai merdé, je sais. Je pense que j’ai surtout besoin de prouver au monde que je ne suis plus celle qui a perdu la tête il y a cinq ans et sans doute que je ne m’y prends pas de la bonne manière... J’ai peut-être besoin d’un temps d’adaptation. Et peut-être que j’ai besoin de quelques conseils de mes anciens instructeurs aussi... J’aurai aimé que Aaron soit là aussi... Mais je sais qu’il est occupé ailleurs. J’ai besoin de retrouver mes marques... Et je pense que j’ai aussi un peu peur de ne pas être à la hauteur...”
C’était la vérité, elle avait toujours cette peur d’être incapable de retrouver ses marques et de faire confiance aux gens qui étaient avec elle. L’inverse était aussi vrai. Si Clint et Aaron avaient toute confiance en Emy, ce n’était pas le cas de tout le monde et malheureusement, elle le ressentait beaucoup... Ce n’était pas toujours chouette d’être empathe.
“Je veux juste bien faire mon travail...”
Elle enleva sa main du bras de Clint et finit d’écrire son mail avant de l’envoyer.
“Le mail est envoyé. J’espère que ce sera suffisant...”
Bon, elle avait l'air de comprendre. En tout cas, elle hocha la tête quand je lui demandais si elle comprenait. Et son geste, lorsqu'elle posa sa main sur mon bras en signe d'affection, valait plus qu'un long discours. Si des agents osaient encore jeter un coup d'œil à notre échange, ils ne devaient rien y comprendre. Peu importe, j'étais pas là pour eux, mais pour Emy.
Elle me répéta qu'elle avait merdé et qu'elle le savait, et cette fois je la crus. Ses raisons étaient tristes, mais on ne pouvait pas y faire grand chose. La mort de son frère, par sa faute, l'avait traumatisée et la hanterait à jamais. Il fallait qu'elle apprenne à vivre avec pour pouvoir continuer à avancer. Quant aux conseils de ses anciens instructeurs… Elle déplorait le manque de disponibilité d'Aaron, et ça n'allait pas s'arranger vu qu'il allait monter en grade dans les jours à venir. Mais moi je pouvais toujours m'y essayer, à ma façon.
« Faire des erreurs, ça arrive à tout l'monde. L'important c'est d'les reconnaître, d'essayer de les réparer, et si c'est pas possible, de passer à autre chose. Quand on tombe de ch'val, faut vite remonter en selle sinon on... s'retrouve piéton... Faut vraiment qu'j'arrête les métaphores hein ? »
Conscient du ridicule de la fin de mon petit discours, même si j'étais plutôt bien parti, je terminai par une touche d'auto-dérision tout en souriant à Emy et en lui adressant un clin d'œil complice.
« Plus sérieusement, faut qu'tu t'fasses confiance. Et qu'tu fasses confiance à tes supérieurs. On sait c'qu'on fait, généralement. C'est juste qu'à un certain niveau, y'a pas mal d'infos confidentielles qu'on peut pas donner aux agents intermédiaires. L'agent Orchent est sur des projets pas simples et même si elle peut donner l'air d'être un dragon sans cœur, elle est très efficace dans son boulot. »
Le mail était envoyé. Je doutais fortement qu'Orchent y réponde, mais au moins Emy avait fait la démarche. Elle avait reconnu ses torts, et on avait une trace écrite de ça. Ca pourrait peut-être jouer dans la balance quand les dirigeants du S.H.I.E.L.D. décideraient si la mise à pied devait ou non avoir lieu.
« Et si jamais t'as des doutes, ou un besoin d'causer, tu sais où m'trouver hein. T'as mon numéro, tu sais où j'habite. Alors t'hésites pas, d'accord ? »
24 septembre 2024, Bureaux du S.H.I.E.L.D, Manhattan, New-York
Emy n’était pas du genre à refuser les conseils ou les remontrances. Bon, parfois, elle pouvait s’emporter un peu parce que personne n’aimait être reprit sur sa façon de faire ou autre. Mais Emy était toujours prête à prendre un temps pour réfléchir à ce qu’elle avait fait. Et c’était le cas aujourd’hui. Même si Clint l’avait affiché devant tous les agents présents dans la salle, elle ne lui en voulait pas. De toute façon, les ragots circulaient assez rapidement dans l’agence, tous les autres auraient fini par savoir ce qui s’était passé entre Célestine et Emy.
Clint voulait qu’elle comprenne qu’elle avait merdé et surtout, elle savait que Clint était là pour elle. C’était une chose assez importante pour elle. Il fallait juste la remettre sur les rails. Les agents autour d’eux ne devaient pas savoir trop où se mettre au moment où Emy posa sa main sur le bras de son ancien instructeur. Ils avaient toujours été très proche, comme un grand frère avec sa soeur. Emy avait toujours pu compter sur Clint et sur Aaron aussi. Ce dernier avait de nouvelles obligatoires sans doute parce qu’elle ne le voyait plus aussi souvent qu’avant, mais elle savait qu’il allait bien. Clint lui dit alors que faire des erreurs, cela arrivait à tout le monde, le plus important, c’était de les reconnaitre. Emy hocha doucement la tête. C’était toujours la partie la plus difficile, mais elle y arrivait de mieux en mieux. Clint rajouta que lorsque l’on tombait de cheval, fallait vite remonter en selle sinon... la fin de la métaphore fit sourire.
“Mais non, c’est bien les métaphores !”
Elle se déridait un peu. Clint lui fit un clin d’oeil et lui dit qu’elle devait se faire confiance de nouveau et qu’elle devait faire confiance à ses supérieurs, surtout qu’ils savaient ce qu’ils faisaient en général. Emy eut un petit sourire malgré tout. Oui, ils savaient ce qu’ils faisaient en général, mais c’était aussi possible qu’ils fassent une erreur non ? Clint rajouta que jusqu’à un certain niveau, il y avait pas mal d’informations confidentielles qui ne pouvaient pas être donner aux agents intermédiaires. Emy hocha doucement la tête. Effectivement, elle n’était qu’un agent de niveau 5... Mais c’était sa place, elle ne se voyait pas monter dans les grades, du moins pas tout de suite. Barton rajouta que l’agent Orchent était sur des projets pas simples et qu’elle pouvait donner l’air d’un dragon sans coeur, mais elle était très efficace dans son boulot.
“Oh mais je n’ai jamais dis le contraire... Mais je pense que parfois, il faut savoir se remettre en question... Mais ce n’est que mon point de vue... Le mail est envoyé, je doute que j’ai une réponse de sa part. Pour ma part, je vais essayer de ne plus la croiser.”
C’était sans doute enfantin, mais si cela pouvait éviter de se prendre des remarques à chaque fois qu’elle la croisait... Clint rajouta que si jamais elle avait des doutes, un besoin de causer, elle savait où le trouver. Un coup de téléphone, passer à la maison. Elle lui sourit doucement. Il est vrai que les deux agents habitaient tous les deux à quelques mètres l’un de l’autre et Emy n’avait jamais eu la présence d’esprit d’aller rendre visite à Clint. Mais elle savait aussi qu’il y avait la vie professionnelle et la vie personnelle et elle n’était pas du genre à s’imposer.
“Tu sais très bien que je ne suis pas le genre à déranger... Mais merci. Je sais que je peux compter sur toi et peut-être que je devrais me référer un peu plus souvent à toi. La prochaine fois, je t’appellerais pour avoir des conseils !”
Emy se sentait un peu plus légère. Elle se sentait prête à attaquer une nouvelle mission ou un nouvel aspect de son entrainement physique. Clint avait raison. Elle devait se faire confiance pour tout un tas de choses. Elle devait retrouver ses bases pour redevenir l’agent qu’elle était avant que les choses ne dérapent pendant le snap... Emy se cala dans son siège avant de demander :
“Bon assez parler de moi, et toi, comment vas-tu ?”
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