En ce début d'après-midi, le professeur Rowles se faisait déposer par un taxi devant une petite maison de campagne, à quelques kilomètres de New York. Son rendez-vous de l'après-midi était une patiente qu'il suivait depuis quelques mois déjà, mais qu'il n'avait jamais pu directement rencontrer en raison de ses pouvoirs : une empathie extrême, qui l'affectaient particulièrement.
Il avait fallu du temps pour les laboratoires que finançait Rowles pour obtenir un produit lui permettant d'être temporairement immunisé aux effets de cette mutation, mais le résultat s'avérerait sans aucun doute payant. Ainsi, il lui était enfin possible de rencontrer sa patiente physiquement, ce qui était nettement plus confortable pour pratiquer son métier.
Après avoir payé le taxi, le professeur mit sa main en visière pour se protéger des quelques rayons du soleil qui passaient sous le ciel nuageux qui avait la clémence d'alléger la chaleur de cette journée. Rowles se demanda brièvement depuis combien de temps il n'avait pas plu, et l'herbe jaune qui bordaient les barrières de ce jardin de campagne étaient un indice révélateur.
Mais il n'était pas là pour admirer la vue ou profiter de l'air pur. Il était ici pour travailler. Le vrombissement du moteur du taxi s'éteignant à l'horizon, le professeur sortit une petite fiole de la poche intérieure de son veston. Même par ce temps, il gardait ce qu'il fallait d'allure. La fiole contenait un liquide bleu-vert peu engageant, mais ça ne l'empêcha pas de l'ouvrir et d'en boire le contenu.
Comme prévu, le goût était infect, mais le sexagénaire qu'il était savait que les meilleurs remèdes étaient ceux aux saveurs les plus mauvaises, donc il jugea que la qualité était excellente, même s'il regrettait de devoir conserver cette arrière-goût pendant toute la séance.
Rowles retira son veston, le plia en deux et le suspendit à son bras, tâchant d'oublier son organe gustatif tandis qu'il franchissait le portail de la petite enceinte de bois et remontait le petit chemin du jardin menant à la porte d'entrée. Là, il frappa trois coups brefs. Il était prêt à débuter la séance.
22 juillet 2024, 2:00PM, Staten Island, New-York, Terre.
Voilà plusieurs jours que Emy attendait la visite du Docteur Joseph Rowles. Elle voulait lui montrer beaucoup de choses, donc les changements qui s’étaient opérés chez elle. Parce que la dernière fois que la jeune femme avait parlé avec le docteur, c’était en visio et surtout, c’était au moment où Emy était au plus bas. Grâce à lui, elle avait eu sa maison et surtout, elle avait pu reprendre le dessus en étant isoler des autres. Lorsqu’elle l’avait rencontré, son pouvoir était vraiment instable, mais maintenant, Emy arrivait à sortir de chez elle et surtout, elle avait recréer son bouclier mental, chose qu’elle n’avait pas fait depuis longtemps. Elle était même prête à reprendre ses entrainements au S.H.I.E.L.D pour être prête au cas où. Oui, Emy avait changé depuis la dernière fois où le docteur l’avait vu.
La dernière fois qu’ils s’étaient vu, Emy se souvient que Joseph Rowles lui avait parlé d’un sérum qu’il pourrait s’injecter pour venir la voir en présentiez pour lui éviter d’être persécuté par les émotions du docteur. Lorsque la jeune femme avait recontacté le docteur, elle avait oublié de lui préciser que ce n’était plus la peine de prendre ce sérum s’il était créé ! Elle espérait que le docteur ne se mettait pas en danger surtout…
Quatorze heures allait bientôt sonné. La jeune femme était un peu nerveuse comme toutes les premières rencontres physiques. Parce qu’elle ne savait pas comment la personne allait réagir à son pouvoir et surtout, comme la personne allait plus ou moins gérer ses émotions. Le docteur Rowles étant un médecin, elle se doutait qu’il pouvait se contrôler, mais jusqu’à quelle limite ? Tout le monde avait ses limites, certains plus hautes que d’autres. Mais ce n’était pas grave sur l’instant. Emy pouvait échappé aux émotions des autres à présent. Pendant qu’elle finissait de regarder autour d’elle pour remettre en place quelque chose si besoin, la jeune femme entendit le moteur d’une voiture dans la cours et elle sut que c’était le docteur qui arrivait. Elle entendit aussi la voiture repartir signe qu’il était sans doute venu en taxi. Un dernier coup d’oeil autour d’elle pour s’assurer que tout était en place et elle entendit trois coups brefs à la porte. La jeune femme prit une inspiration avant de se diriger vers la porte.
« Docteur Rowles ! Je suis contente de vous voir enfin en physique. Je vous en prie, entrez. »
Emy s’effaça du cadre de la porte et laissa entrer le docteur avant de refermer la porte. Pico vient vers eux pour sentir Rowles et, ne ressentant pas de danger pour sa maitresse, retourna dans son panier près du canapé.
« Pardonnez moi, j’ai oublié de vous prévenir que j’avais adopté un chien. Je dois dire qu’il m’a beaucoup aidé pendant ma réhabilitation. »
Elle l’invita à la suivre jusqu’au salon avant de rajouter :
"Le plaisir est partagé, Miss Carthew", commença Rowles en franchissant le seuil. "Je vois que vous vous êtes accommodée de votre nouvel environnement."
Sa dernière phrase était faite en regardant le chien qui était venu le renifler. Rowles n'avait pas d'animaux chez lui, et n'y tenait pas vraiment. Même à l'époque de sa vie de couple, il n'avait jamais eu l'envie de devoir gérer les responsabilités liés à la possession d'un animal. Ceci étant, peut-être était-ce l'âge qui parlait, il serait peut-être bon de reconsidérer la question dans un avenir proche. Un compagnon n'était pas une si mauvaise idée pour tromper la solitude.
Cette pensée s'enfuit rapidement ainsi que l'émotion qu'elle engendrait. Heureusement, le sérum faisait effet, donc son interlocutrice ne pouvait pas la ressentir. Remettant ses lunettes correctement sur son nez, le professeur se recentra sur la situation et accepta un café de la part de Miss Carthew. Après quoi, il s'installa à l'endroit que lui indiquait son hôtesse.
"Je suis ravi de vous voir enthousiaste aujourd'hui, vous paraissez en bien meilleure santé que lors de notre première entrevue. Comment se passe votre quotidien ?"
Une question ouverte qui servait d'amorce pour exposer tout ce qu'elle souhaiterai exposer. En regardant autour de lui, Rowles pouvait déjà constater par l'entretien des lieux, la bonne santé du chien et les gestes fluides dépourvus de tics nerveux de Miss Carthew qu'elle ne mentait pas sur son état, et aussi qu'elle était convaincue de cette amélioration. Une bonne chose, car certains patients ne prenaient pas conscience de l'amélioration de leur état et freinaient ainsi leur guérison.
Mettez-vous à l'aise, vous êtes entre de bonnes mains désormais
22 juillet 2024, 2:00PM, Staten Island, New-York, Terre.
Emy était contente d’enfin voir le docteur en personne. Les choses n’avaient pas été facile avant qu’elle ne le rencontre en visio et maintenant, elle se rendait compte qu’elle lui devait beaucoup, tout comme le professeur Xavier. Charles. Elle avait demandé à le voir lui aussi, elle l’avait d’ailleurs vu quelques jours avant le docteur. Ces deux hommes avaient été d’une grande aide pour la jeune femme. Il y avait aussi eu Aaron, mais ces derniers temps, les deux amis ne se voyaient plus, trop occupés chacun de leurs cotés. Ce n’était pas plus mal, Emy pensait qu’elle s’était un peu trop attachée au jeune homme.
Joseph Rowles lui dit alors que le plaisir était partagé de la voir et qu’il voyait qu’elle s’était accommodée de son nouvel environnement. Emy eut un petit sourire et hocha doucement la tête. Il est vrai qu’elle s’était vite habituée. Elle n’avait plus cette ambiance oppressante du QG du S.H.I.E.L.D où il se passait toujours beaucoup de choses. La jeune femme avait beaucoup apprécié la solitude et elle avait même accepté de prendre un chien pour lui tenir compagnie. Pico était le meilleur chien qu’elle puisse avoir. Il l’avait aidé dans ses moments de tristesse et de désespoir et il était encore là aujourd’hui. D’ailleurs, l’animal vient voir le docteur avant de repartir vers son panier, satisfait de voir que sa maitresse n’était pas en danger.
Emy essaya de ressentir les émotions de Joseph, mais elle n’y arrivait pas. Elle ne pouvait pas savoir qu’il avait prit le sérum. Elle n’allait pas s’en plaindre, mais c’était un peu bizarre de ne pas ressentir les émotions d’une personne. Peut-être qu’il les cachait bien ? Mais personne n’avait vraiment résisté au pouvoir de Emy alors, elle commençait à se poser des questions… mais elle aurait sans doute les réponses plus tard. Le docteur accepta un café qu’elle allait faire et revient quelques secondes plus tard avec deux tasses et invita son invité à s’asseoir. Elle prit finalement place sur le fauteuil en face du docteur pendant que ce dernier lui disait qu’il était ravi de la voir enthousiasme, qu’elle paraissait en bien meilleure santé, lui demandant comment se passait son quotidien. La jeune femme prit une gorgée de son café et réfléchi à la question. Il y avait tellement de choses à dire depuis la dernière fois… Emy posa sa tasse sur la table basse avant de se lancer :
« Il s’est passé plusieurs choses depuis la dernière fois que l’on s’est vu. Peu de temps après mon arrivée ici, j’ai essayé de sortir de chez moi et d’aller rejoindre l’agent Smith pour une balade dans Central Park. Tout se passait bien jusqu’au moment où j’ai du intervenir auprès d’une jeune femme qui se faisait agresser par des hommes… mais je n’ai pas pu contenir les émotions et sentiments de toutes les personnes autour de moi… Je suis entrée en crise et j’ai juste eu le temps de voir l’agent Smith qu’on disparaissait devant tout le monde… »
Elle leva les yeux vers le docteur et lui apporta une précision :
« J’ai rencontré l’agent Smith quand nous étions encore en convalescence tous les deux. Il avait été blessé aux jambes, a perdu sa femme, sa fille a disparu… On s’est un peu trouvé par hasard. Son pouvoir de se déplacer où il veut nous a aider à Central Park. »
Elle joua nerveusement avec son pantalon avant de continuer.
« Nous avons atterri en Amazonie. Il y allait souvent pour se ressourcer et j’ai rencontré le peuple le plus simple du monde. Toujours heureux, toujours dans la bonne humeur. Je me suis rendue compte que c’était moi qui me mettait des barrières au niveau de mes sentiments et émotions. Ce n’était pas les sentiments et émotions des autres qui me faisaient peur. C’était les miennes. Alors, j’ai essayé de recréer mon bouclier mental et ça a marché. Certains jours, ce n’est pas facile, d’autres jours, c’est plus facile. Alors, je me permets de sortir plus souvent en public et je dois vous avouez que depuis que j’ai accepté que mes sentiments jouaient beaucoup sur mon pouvoir, il est plus facile pour moi de le contrôler… Et j’ai découvert une autre facette de mon pouvoir. »
Emy se permit momentanément dans ses pensées. Elle repensait à ce jour dans Central Park où elle avait vu ce petit garçon tombé et se cassé le bras. La douleur était forte et Emy était venue prêter main forte à la mère. C’est à ce moment qu’elle s’était rendue compte qu’elle pouvait prendre un peu de la douleur du garçon, pas beaucoup, mais juste assez pour que la douleur lui paraisse moins forte.
« J’ai le pouvoir de prendre un peu de la douleur des gens. Je l’ai découvert quand j’ai été aidé cette mère de famille et son enfant qui était tombé d’un arbre et s’était cassé le bras. J’ai été à ses cotés et à un moment, il me disait qu’il avait trop mal, j’ai posé ma main contre son bras et quelques lignes noires se sont dirigées vers mon bras. Je ressentais sa douleur, mais lui avait moins mal. Je n’ai pas maintenu le contact, j’ai peur que ce pouvoir soit un autre soucis. Par exemple, je ne suis pas certaine de pouvoir aider un polytraumatisé… Je pense que mon corps ne pourrait pas le supporter en plus des émotions. Mais je n’ai pas eu l’occasion de le tester. Et je ne suis pas certaine de le vouloir. »
Emy fit un petit sourire au docteur. Il y avait eu beaucoup de changement en si peu de temps, elle espérait que Rowles n’était pas trop perdu dans les explications de la jeune femme…
Rowles écouta attentivement sa patiente conter toutes ses aventures et le positivisme qu'elle avait pu en tirer. Il semblait effectivement qu'elle avait trouvé en elle l'énergie nécessaire pour retrouver le sourire et la joie de vivre, en témoignait sa verve pour le moins importante. La façon dont elle qualifiait l'agent Smith était particulièrement intéressante. Rowles se souvenait que, précédemment, les deux agents s'étaient rapprochés émotionnellement. Pourtant, le fait qu'elle n'utilise pas son prénom impliquait qu'elle mettait une distance entre eux, ou du moins qu'elle tâchait de cacher ce lien. Avait-il disparu ou était-elle encore incertaine à son propos. Sa gestuelle faisait toutefois pencher pour la seconde solution. Affaire à suivre, donc.
Les détails de son séjour "forcé" en Amazonie étaient très intéressants. Il semblait que cette expérience en particulier avait apporter son lot d'éléments sur lesquels elle s'était reposée pour avancer. De plus, elle semblait avoir découvert une autre utilisation de mutation. Alléger la peine d'autrui était un pouvoir admirable, mais les implications pouvaient aussi être sinistres, tant pour sa propre santé que pour son entourage en cas de débordement. Même si elle semblait se porter comme un charme, Rowles n'oubliait pas que l'agent Carthew n'avait, jusqu'à récemment, que très peu de contrôle sur son pouvoir.
Bien sûr, il n'était pas question de lui faire part immédiatement de ces inquiétude. C'eût été contre-productif, voire néfaste. Elle avait fait d'énorme progrès, et il fallait l'encourager dans ce sens. La négativité liée à ses découvertes ne viendraient que plus tard, sûrement dans une autre séance, à moins qu'elle ne les découvre elle-même, ce qu'il ne lui souhaitait pas. Pouvoir prendre la douleur d'autrui, ça signifie aussi pouvoir leur prendre leur joie. S'approprier cette douleur, c'est aussi se détruire soi-même. Non, c'était bien trop tôt pour lui en parler.
Ne quittant pas son sourire bienveillant, le psychologue la laissa aller au bout de tout ce qu'elle avait à lui conter en savourant le café qu'elle venait de lui offrir. Lorsqu'elle sembla avoir terminé, il reposa délicatement la tasse et remonta ses lunettes.
"Que d'aventures, assurément, et je vois l'influence positive qu'elles ont eu sur vous. Un retour aux sources tel que votre voyage en Amazonie s'est montré particulièrement bénéfique, à ce que je vois. Je suis heureux de vous voir ainsi respirer la santé, Miss Carthew.
Si vous le voulez bien, je souhaiterai revenir sur votre expérience quant à la nouvelle application de votre pouvoir. Pouvez-vous me dire comment vous avez réalisé que vous pouviez soulager cet enfant de sa douleur ? Quelles pensées vous ont traversées à ce moment pour rendre cela possible ? Et qu'avez-vous ressenti en le faisait, et après ?"
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22 juillet 2024, 2:00PM, Staten Island, New-York, Terre.
Emy s’était laissée aller à parler, sans doute trop longtemps. Mais c’était la première fois depuis longtemps qu’elle n’avait pas pu discuter avec le docteur alors elle en profitait pour lui dire tout ce qui lui passait par la tête. Sans doute y avait-il quelques petits points négatifs et Emy était tout à fait prête à les entendre, mais pour le moment, le docteur Rowles lui souriait seulement, signe qu’il l’écoutait avec attention. Sans doute avait-il beaucoup de choses à lui dire, mais il la laissa finir avant de lui dire qu’elle avait vécu beaucoup d’aventures et qu’elles avaient eu un effet positif sur elle ce qui était une bonne chose. Le retour aux sources en Amazonie avait été plus que bénéfique. L’homme était heureux de voir sa patiente en bonne santé. La jeune femme sourit doucement. Il faut dire que lorsqu’ils s’étaient rencontré la première fois en visio, ce n’était la grande forme pour Emy qui devait lutter tous les jours contre les sentiments et émotions des gens qui venaient la voir dans sa chambre. Personne n’avait trouvé de solution et finalement, la jeune femme l’avait trouvé toute seule, ce qui n’était pas plus mal. Bien sûr, il y avait encore quelques ratés parfois, mais elle avait reprit l’entrainement chez elle, elle comptait le reprendre aussi au S.H.I.E.L.D pour prouver à tout le monde qu’elle était de nouveau sur les rails.
Le docteur Rowles lui dit alors qu’il souhaitait revenir sur son expérience concernant son pouvoir, du moins l’évolution. Emy hocha doucement la tête en écoutant ce que que le docteur avait à lui dire. Il lui demandait s’il pouvait lui dire comment elle avait réalisé qu’elle pouvait soulager cet enfant de sa douleur, quelles pensées lui avaient traversées l’esprit à ce moment là pour que cela soit possible. Et qu’avait-elle ressentit en le faisait et après… Emy prit quelques instants pour réfléchir avant de répondre. Comment avait-elle réalisé qu’elle pouvait soulager l’enfant ? Sur le moment, elle ne s’était pas posé de questions. Son main était posée sur le bras blessé de l’enfant à un endroit où elle pouvait ne pas lui faire du mal. Et c’est alors qu’elle avait ressentit le besoin de mettre sa main au dessus de la blessure et ça c’était mit en place…
« Je dois dire que je n’avais pas réfléchi à ça… En fait, le petit garçon avait tellement mal et il pleurait et vous savez à quel point les émotions des autres peuvent me touchent. Alors, j’ai essayé de le rassurer, je maintenais son bras blessé pour ne pas qu’il bouge pour aggravé la situation. Et c’est ensuite que j’ai senti que je pouvais le faire. J’ai passé ma main sans vraiment comprendre ce que je faisais et j’ai sentit la douleur venir à moi. Cela c’est matérialisé avec des lignes de couleurs noires. Le petit garçon m’a regardé avec de grands yeux en me disant qu’il n’avait presque plus mal. Je n’ai pas pris toute la douleur, ce n’était possible. Si je prenais toute la douleur, il n’aurait pas sentit que son bras était cassé et peut-être qu’il aurait fait d’autres mouvements qui lui aurait causer d’autres soucis. »
La jeune femme continua de réfléchir.
« Pendant que je faisais ça, je ne pensais à rien d’autre qu’au bien être du petit garçon. Pour ma part, je ressentais la douleur comme si je m’étais moi-même cassée le bras, mais sans la blessure. C’est passé au bout de quelques minutes. Par la suite, je me suis sentie un peu faible quand les pompiers sont arrivés pour prendre en charge le garçon. Et je ne comprenais pas mon nouveau pouvoir. Depuis, je n’ai pas eu l’occasion de l’utiliser. »
La jeune femme s’enfonça dans son fauteuil avant de rajouter :
« Je pense que je vais vite atteindre mes limites avec ce pouvoir. Parce qu’on ne peut pas retirer la douleur d’une personne totalement. Premièrement parce que moi-même, je ne vais pas pouvoir supporter la douleur d’une personne polytraumatisé par exemple. Ce serait contre productif. Et deuxièmement, la personne qui est blessée et donc je retire la douleur pourrait se faire mal de nouveau… Et ce n’est pas le but. »
L'évolution du pouvoir de Miss Carthew et la façon dont elle s'était manifestée était intéressant. Le déclencheur était sans conteste le sentiment altruiste envers l'enfant qui s'était fait une place dominante dans l'esprit de l'empathe, au point de supplanter sa propre douleur, issue de son pouvoir non maîtrisé. Mais ce qui était d'autant plus étrange, c'était que ces deux facettes d'un même pouvoir, s'ils semblaient être en rapport, n'étaient en fait pas aussi liés qu'on aurait pu le croire.
Rowles, intérieurement, s'amusait de voir à quel point les mutations semblaient prendre un malin plaisir à défier les lois naturelles. Si le pouvoir de Miss Carthew ou même la télépathie pouvaient s'apparenter à une évolution de l'empathie naturelle du règne animal, l'altération de la nociception, la capacité à ressentir la douleur, aurait du être d'une toute autre nature. Pourtant, ici, il semblait que les deux facettes puisaient toutes deux dans la même origine.
Rowles songea à la façon dont le cerveau peut "reprioriser" une douleur lorsqu'une autre plus importante survient. Cette méthode peu orthodoxe était parfois utilisée pour faire oublier une douleur à quelqu'un. La théorie qui naquit dans son esprit fut que le pouvoir empathique de Miss Carthew évoluait vers quelque chose de semblable, en "partageant" une information du cerveau... entre deux cerveaux. En somme, c'était assez proche de la télépathie, mais en bien plus ciblé. Ce n'était pas la nociception qui était affectée, mais la façon dont le cerveau l'interprétait, chose avec laquelle le pouvoir de sa patiente interférait. Quelque part, on pouvait y trouver un effet similaire à celui des douleurs fantômes, comme lorsque quelqu'un amputé d'un bras continue de ressentir de la douleur dans le bras manquant.
Évidemment, il était trop tôt pour théoriser correctement, mais Rowles estimait tenir là une bonne piste expliquant la nature de ce pouvoir. Bien sûr, il n'écartait pas la possibilité qu'une seconde mutation se soit manifestée, mais son lien étroit avec le flot continu d'empathie que Miss Carthew subissait laissait peu de place à d'autres théories. Ce qui restait inexpliqué, en revanche, c'était les lignes noires. En général, le noir sur un organisme vivant n'était pas bon signe, synonyme de nécrose des tissus. Mais encore une fois, les mutations du gène X défiaient les lois de la nature. Qu'est-ce que ces lignes impliquaient ? Un mystère à résoudre plus tard. Comme Miss Carthew fréquentait aussi le Pr Xavier, peut-être pourrait-il en discuter avec son illustre confrère.
Toutes ces pensées ne le firent pas dévier de la réalité et de la discussion qu'il avait avec sa patiente. Elle en disait beaucoup et tâchait de détailler, c'était appréciable. De plus, elle avait poussé la réflexion assez loin pour entrevoir les risques liés à l'utilisation de son pouvoir.
"Vous avez raison", commença-t-il en retirant ses lunettes pour les essuyer, "L'utilisation de cette nouvelle facette de votre pouvoir présente des risques pour vous et pour la personne sur laquelle vous l'utilisez. Je n'ai pas grand chose à ajouter sur vos conclusions, elles sont assez justes.
Toutefois, je me dois de vous rappeler que, malgré votre profession, votre santé est ce qu'il y a de plus important. Je sais que vous avez un tempérament altruiste, c'est comme qui dirait un prérequis même, mais gardez en tête que plus vous restez longtemps en bonne santé, plus vous serez en mesure d'aider les gens.
Pour être honnête, et bien que cette nouvelle application de votre pouvoir soit formidable, son fonctionnement m'inquiète quelques peu, en particulier en ce qui concerne ces lignes noires que vous voyez apparaître. Voyez-vous, dans le domaine du vivant, le noir est généralement mauvais signe. Généralement. Je pense qu'il serait bon qu'on en définisse la nature, qu'en dites-vous ?"
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22 juillet 2024, 2:00PM, Staten Island, New-York, Terre.
Il était agréable pour Emy de revoir le Docteur Rowles parce qu’elle savait qu’il avait toujours les bonnes questions et surtout des réponses à ses questions. Depuis qu’elle l’avait rencontré, elle savait que c’était un homme bon et qu’il pourrait l’aider dans à peu près tous les domaines. Ce n’était sans doute pas pour rien qu’elle avait réussi à remonter la pente assez rapidement. Pendant qu’elle expliquait ce qui s’était passé à Central Park, son ressenti et les conséquences, Emy tenait sa tasse de café entre ses mains et jouait un peu avec. L’homme lui dit alors qu’elle avait raison sur la nouvelle façon d’utiliser son pouvoir, qu’il présentait des risques pour elle, mais aussi pour la personne qui se trouvait en difficulté. Il rajouta qu’il se devait de lui rappeler que sa santé était plus important que tout. Il fallait qu’elle garde en tête que même si elle voulait sauvé tout le monde, elle devait être en bonne santé. Elle était loin de se douter que dans quelques jours, elle n’allait pas du tout écouter les conseils du Docteur Rowles… Mais ce n’était pas le sujet. Il rajouta que même si le nouveau fonctionnement de son pouvoir était exceptionnel, il y avait quelque chose qui l’inquiétait. Elle se doutait déjà de ce qu’il allait lui dire. Les lignes noires. Le docteur lui dit que le noir en général n’était pas bon signe. Il fallait qu’ils en trouvent la nature et Emy hocha de nouveau la tête.
« Je savais que vous alliez m’en parler. Et je crois avoir une explication. »
Emy bu une gorgée de son café avant de reprendre :
« Dans cette configuration, je ne pense pas que ces lignes noires soient dangereuses. En fait, la douleur est quelque chose de négatif non ? Je pense que c’est juste une façon de la définir, de voir qu’elle passe d’une personne à l’autre. Parce que j’ai ressenti la douleur du petit garçon pendant quelques minutes, mais sans plus. Je ne sais pas si la douleur dépend de la blessure de la personne. C’est quelque chose que je n’ai pas eu le temps de définir encore… »
Elle se doutait bien qu’elle allait sans doute l’apprendre à ses dépends assez rapidement. Mais pour le moment, ce n’était pas le sujet du jour. Puis, elle sourit un peu avant de dire au Docteur Rowles :
« Vous savez que j’ai repris les entrainements au S.H.I.E.L.D. Cela faisait si longtemps que je n’avais pas fais ces entrainements et je dois avouer que cela m’avait manquer. Et j’ai bon espoir de prendre les missions, les petites missions, bientôt. »
La jeune femme était peut-être un peu trop optimiste, peut-être que le Docteur Rowles ne la voyait pas reprendre les missions tout de suite ? Après tout ce qu’elle avait vécu, ce serait logique, mais elle avait besoin de bouger et de se prouver qu’elle n’avait pas fait tout ça pour rien…
Miss Carthew avait visiblement réfléchi plus avant concernant cette nouvelle capacité. C'était une bonne chose, mais la théorie qu'elle avançait était bien trop simpliste du point de vue du psychologue. Si sa théorie concernant le transfert empathique de la sensation de douleur se confirmait, il était possible que la vérité soit proche de la version de sa patiente. Néanmoins, tout ceci n'était que théorique, et même si son positivisme faisait plaisir à voir, il ne fallait pas écarter l'hypothèse de quelque chose de plus néfaste.
Bien sûr, son rôle aujourd'hui n'était pas de faire état de ces possibilités obscures, d'une part parce que c'était son travail d'y réfléchir et non celui de sa patiente, d'autre part parce qu'il ne s'agissait pas que ses inquiétudes viennent faire ombrage à ses progrès évidents. Il était de son devoir de la faire persévérer dans cette voie. Quant à ses inquiétudes, la mise en garde énoncée plus tôt était, à son sens, amplement suffisante.
"C'est une possibilité", conclu-t-il finalement à la théorie de Miss Carthew, "Peut-être est-ce l'influence de votre vision de la douleur. Nous entrons là dans une partie encore très floue concernant les pouvoirs mutants. Je ne pense pas qu'il y ait matière à s'inquiéter outre mesure, mais si jamais quelque chose devait vous paraître étrange, voir inquiétant, n'hésitez pas à m'en faire part."
Venait ensuite les reprises de mission. La fonction de l'agent Carthew au sein du S.H.I.E.L.D., et par conséquent celui dans la société, ne permettait pas de prendre aisément du repos. Mais au vu de ses progrès, Rowles ne voyait aucun inconvénient à ce qu'elle ait repris l'entraînement. En fait, cette reprise d'activité était à la fois la preuve de son moral ascendant, mais aussi un bon moyen de le faire continuer dans cette voie. Bien sûr, la reprise de missions impliquait le risque de subir un nouveau traumatisme semblable au précédent, pour une psyché qui était encore fragilisée, mais le psychologue choisit de ne pas en tenir compte, estimant le risque assez bas.
"Je pense que c'est une bonne idée. De mon point de vue, vous semblez apte à reprendre pleinement votre service. Je pense que ce serait même bénéfique. D'ailleurs, puisque nous abordons le sujet, peut-être est-il temps que nous parlions de la façon dont se déroulent vos mission ?"
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22 juillet 2024, 2:00PM, Staten Island, New-York, Terre.
Emy parlait de l’évolution de son pouvoir avec calme et savait à quoi s’attendre. Enfin, pour l’instant, elle savait à quoi s’attendre. Peut-être qu’elle allait faire face à quelque chose de plus gros, mais pour le moment, elle n’y pensa pas. Elle discuta de sa théorie sur son pouvoir, de ses lignes noires qui représentaient la douleur. Le docteur Rowles semblait approuvé sa théorie. Il lui dit alors qu’ils entraient dans une partie floue des pouvoirs mutants. Ce n’était pas le moment de s’en inquiéter pour le moment, mais si quelque chose de bizarre devait se passer et cela devrait être étrange, il fallait qu’elle lui en fasse part. La jeune femme hocha doucement la tête.
« D’accord, je vous en parlerais. »
Puis, viens le moment de parler de la reprise de la mission. Pour le moment, Emy avait reprit les entrainements et elle espérait vraiment avoir des missions sous peu. Elle allait être en mission dans quelques semaines, mais elle ne le savait pas encore. Et elle ne savait pas encore que Clint allait l’aider. Pour l’instant, elle se contentait de se remettre sur les rails. Le docteur Rowles lui dit alors qu’il pensait que c’était une bonne idée, que de son point de vue, elle était apte a reprendre pleinement son service. Emy eut un sourire sincère. Il était la première personne à lui dire ça et cela lui faisait plaisir. Il rajouta que cela pourrait même lui être bénéfique. C’était sans doute la meilleure idée qu’elle ait eu au cours des cinq dernières années. Et cela la confortait dans sa décision. Elle aurait aimé en parler aussi avec Aaron ou Clint… Aaron… Il lui manquait, mais elle devait se concentrer sur ce que Rowles lui demanda. Il lui proposa de parler de la façon donc se dérouleront ses missions. Emy croisa les bras contre sa poitrine.
« Je ne comprends pas la question Docteur ? Mes missions se dérouleront comme avant, je ne pense pas que le temps se soit arrêter pour les missions… »
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